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2 - Contexte intersyllabique 2.1 - Cooccurrences *V1/*C2

Dans le document Lexiques proto-bantous : (Page 63-75)

Dans les racines verbales10 et dans les thèmes nominaux11, les cooccurrences entre *V1 et*C2 diffèrent selon le schème auquel elles appartiennent car elles dépendent essentiellement du nombre total d’occurrences atteint par chacun des phonèmes appartenant à la séquence. On relèvera dans les *-CVCVC- que la séquence *i + mi-nasale est du côté de l'évitement.

2.2 - Cooccurrences *V2/*C3

L'analyse de la séquence *V2C3 des thèmes verbaux *-C1V1C2V2C3- cherche à comprendre si son origine tient exclusivement à la morphologie grammaticale ou s’il y a lieu d’envisager d’autres scénarios, sachant que les suffixes sont reconstruits essentiellement sous la forme * -VC-.

dominance de deux segments l'un consonantique : *d, l'autre vocalique : *

U

. De ce fait, c’est la séquence *

U

d qui est la plus fréquente du corpus en totalisant 20% des occurrences totales de B.L.R.1 (28% dans les Cs).

- un deuxième groupe comprend les autres segments dont la reconstruction, à cette position dans le schème, s’avère plus occasionnelle.

2.2.2 - Tableaux B.L.R.1 et Cs BLR 1 : pourcentages *V2 /*C3 en *-CVCVC-*d *k *m *t *n *b *Ng *g *c *j *W *U 19,2 8,72 4,07 2,91 0,58 1,16 1,16 0,58 0,58 39 *a 9,3 3,49 4,65 2,91 2,33 0,58 1,16 24,4 *I 5,81 9,3 0,58 1,74 0 17,4 *o 3,49 2,33 0,58 0,58 1,16 0,58 8,72 *e 0,58 1,74 0,58 1,16 0,58 4,65 *i 2,33 0,58 1,16 4,07 *u 1,16 0,58 1,74 38,4 22,1 12,2 9,88 5,23 4,65 2,91 1,74 1,74 0,58 0,58 / 172 Tableau 36 Cs : pourcentages V2 /C3 en *-CVCVC-*d *k *m *t *n *p *Ng *b *g *c *U 28,6 12,2 1,17 2,92 0,58 0,58 0,29 46,4 *I 9,33 16,3 0,29 1,17 0,29 0,87 0,29 0,58 29,2 *a 6,41 6,71 2,62 3,5 0,29 0,29 0,87 20,7 *i 0,87 0,58 1,46 0,29 3,21 *u 0,29 0,29

*V2C3 présente des ressemblances avec le premier groupe de phonèmes du tableau précédent, puisque on trouve dans ce contexte, presque exclusivement, les phonèmes qui étaient déjà les plus fréquents en *-CVCVC-. Ainsi, la voyelle *

U

et la consonne *d totalisent chacun la moitié des occurrences et la séquence *

Ud

est de loin la plus fréquente.

BLR 1 : pourcentages V2 /C3 en *-CVC-VC-*d *k *m *t *b *n *U 37,2 13,7 50,9 *a 9,8 15,7 1,9 1,9 1,9 31,4 *I 7,8 9,8 17,6 54,9 23,5 15,7 1,9 1,9 1,9 / 51 Tableau 38

Dans les Cs : les radicaux de forme *-CVCVC- ne sont jamais présentés par

Guthrie avec une frontière morphologique, par contre une partie de ces séries comparatives ont en plus de leur numéro de série la lettre a ou b ou c signifiant qu’elles sont rattachées à un radical simple. D’après la définition que donne Guthrie de ce type de numérotation au § 38.33 (cf. Comparative Bantu, vol.1) on pourrait déduire que toutes ces Cs sont rattachées à un radical simple et font pendant aux *-CVC-VC- de Meeussen. En fait, sur la totalité des *-CVCVC- du tableau ci-dessus, deux cent un (soit 57,6%) sont numérotés avec une lettre a, b, c et contrairement à ce qu'il explique, Guthrie a employé les lettres a, b, c, non seulement pour rapprocher un radical de ses dérivés, mais aussi pour mettre sous le même numéro de série des formes à astérisque *-CVCVC- présentant une différence dans leur séquence *V2 C3, sans qu'elles soient pour autant liées à un radical *-CVC-. Ces Cs ont parfois une différence de sens (cf. Cs 319b/c ; Cs

en ce qu'ils apparaissent souvent avec des radicaux qui ne se présentent pas sans suffixes" (p.15, Reconstruc. gramm.).

• Les extensions : *-

Ik

-, *-

am

-, *-

ad

-, *-

at

-, *-

Ud

-, *-

Uk

-. Ces morphèmes que Meeussen nomme extension ont, à l’exception de *-

ad

-, une forme comparable à celle des suffixes mais leur valeur sémantique n’est pas précisée. On peut supposer que Meeussen classe dans cette catégorie des morphèmes qu’il n’a pas pu isoler du radical, ou pour lesquels il n’a pas retrouvé le sens.

• Les élargissements : *-u-, *-im-, *-

I

m-, *-un-, *-i

Ng

-, *-a

Ng

-, *-

UNg

-, *-ab-, *-ag-, *-

U

t-. Ce groupe de morphèmes se présente sous une forme bien différente de celle des suffixes et des extensions, tant dans la variété des voyelles que dans celle des consonnes.

2.2.4 - Bilan

Les étymons *-CVC-VC- ont une distribution des *V2C3 qui reprend exactement les formes suffixales reconstruites par Meeussen. Les étymons de forme *- CVCVC- se partagent entre une distribution des *V2 C3 conforme à celle des extensions et une distribution qui s’en éloigne. Ces distributions ne sont pas à part égale dans le corpus puisque les *V2 C3 ont dans 77% des cas une forme identique à celle d’un suffixe reconstruit, quant aux 23% restants, si je les reprends en détail je constate qu’elles s’adressent :

• d’une part à des *V2 C3dont la voyelle appartient au troisième degré d’aperture, or le troisième degré d’aperture vocalique n’appartient pas aux formes suffixales reconstruites, ce qui sous-entend probablement un changement vocalique à travers un processus d’harmonisation des timbres. En effet, à ce propos je rappellerai l’observation faite pour les cooccurrences V1 / V2 des *-CVCVC- (cf. § 2.5.2) où le troisième degré d’aperture est reconstruit en position post-radicale uniquement quand la voyelle radicale appartient déjà au troisième degré. Ainsi les

*-kUkUm-

swell, rise

*-p`UpUm-

boil up, boil over

*-tUtUm-

bubble up

*-tUtUm-

quake, tremble

Ainsi *V2 a le même timbre que *V1 et *C1 = *C2 ! En plus de ces ressemblances formelles, il y a synonymie pour quelques radicaux et pour l'ensemble, il existe une proximité sémantique à travers l'idée de vibration et de mouvement. Cette idée s'est peut-être exprimée à travers un processus de type onomatopéique où le phonème *m traduit l'idée de mouvement.

Dans le même ordre d’idée, lorsque *C3 = m et quelque soit *V2, dans 12 cas sur 19 la reconstruction est une réduplication où *C1 V1 = *C2 V2. Par contre, dans le contexte *-CVC-VC- lorsque * C3 = m, il n’est jamais question de réduplication et la nasale est toujours précédée de la voyelle *a, ce qui renvoie à l’extension reconstruite *am.

A l’exception des reconstructions contenant *-

U

m-, les autres séquences, dont la forme n'est pas comparable à celle d'un suffixe reconstruit, ne sont présentes qu’une fois chacune dans les reconstructions, ce qui leur confère un caractère très occasionnel. Il reste alors seulement 10,4% de séquences *V2 C3 ne permettant pas une explication en termes de lexicalisation d'un morphème grammatical suffixé au radical.

• La séquence *ak est absente des distributions *V2C3. Si on s'en tient aux fréquences

respectives de *a et de *k elle est suspecte, par contre dans un contexte morphologique elle est cohérente et vient confirmer que toute séquence *V2C3 a son origine dans la morphologie grammaticale.

voyelles ouvertes *

e

ou *

o

qui les composent. Dans le cas des séquences Vdegré3k et Vdegré3d il est possible de supposer que le changement d’aperture est le résultat d’une assimilation vocalique. C'est la conclusion à laquelle nous aboutirons dans l'étude des cooccurrences vocaliques.

- Soit par la présence d'une séquence composée des voyelles fermées *i, *u et d'une des occlusives non voisées du système (*p, *t, *k dans les Cs, *p dans B.L.R.1). B.L.R.1 : pourcentages *V12 /*C2 en *-CVVC-d k t p m g n b UU 4,76 7,14 2,38 2,38 2,38 23,8 ee 4,76 4,76 4,76 4,76 4,76 2,38 21,4 aa 4,76 4,76 4,76 2,38 2,38 19 II 2,38 4,76 2,38 2,38 2,38 2,38 16,7 oo 7,14 4,76 2,38 14,3 ii 2,38 2,38 uu 2,38 2,38 23,8 19 16,7 11,9 11,9 7,14 7,14 2,38 / 42 Tableau 39 Cs : pourcentages *V12 /*C2 en *-CVVC-d k p t b n m c g j W ee 1,22 3,66 6,1 3,66 1,22 2,44 2,44 1,22 1,22 23,2 UU 8,54 2,44 1,22 2,44 2,44 1,22 1,22 1,22 1,22 22 oo 7,32 2,44 2,44 1,22 3,66 17,1 aa 3,66 2,44 3,66 1,22 1,22 1,22 2,44 15,9 II 1,22 6,1 1,22 1,22 1,22 11

les possibilités de cooccurrences diminuent nettement par rapport au contexte précédent et cela n'est pas dû au nombre total d'occurrences. De plus, 80% des séquences *V12C2 sont identiques à une forme suffixale.

La voyelle *a totalise plus de la moitié des occurrences totales et les consonnes qui apparaissent dans son environnement immédiat, conduisent à isoler des séquences proches de celles reconstruites en morphologie grammaticale. Les voyelles fermées se réduisent à la seule présence de *i devant la consonne palatale *j. Dans BLR3, ce contexte se retrouve au niveau proto-bantou à travers deux étymons : *-bàij- « travailler le bois », *-goij- « avoir sommeil ».

Deux mi-nasales ont été reconstruites : *

Ng

et *

nj

dans B.L.R.1, *

Ng

et *

nt

dans les Cs. La consonne *

Ng

est précédée uniquement par la voyelle *a, ce qui renvoie à la séquence *-a

Ng

qui partie des élargissements reconstruits par Meeusssen. La mi-nasale *nj compte une seule occurrence avec la voyelle *

o

mais dans B.L.R.3 elle est refusée au profit d’un étymon composé d’une nasale simple.

B.L.R.1 : pourcentages *V12 /*C2 en *-CVVC-d k m t n Ng b g p j W nj a 8,89 2,22 2,22 6,67 8,89 4,44 2,22 2,22 2,22 40 I 8,89 6,67 6,67 22,2 U 6,67 8,89 15,6 e 6,67 2,22 2,22 2,22 13,3 i 2,22 2,22 4,44 o 2,22 2,22 4,44 u

Cs : pourcentages *V12 /*C2 en *-CVVC-d Ng t k m n g p b j nt a 15,1 7,55 11,3 9,43 3,77 3,77 1,89 1,89 54,7 U 5,66 3,77 3,77 1,89 15,1 e 9,43 1,89 1,89 1,89 15,1 I 3,77 3,77 1,89 9,43 o 1,89 1,89 3,77 i 1,89 1,89 u 0 34 15,1 13,2 9,43 9,43 7,55 3,77 1,89 1,89 1,89 1,89 / 53 Tableau 42

Si maintenant on extrait de ces tableaux les reconstructions à frontière morphologique sûre, on aboutit au tableau suivant :

B.L.R.1 : cooccurrences *V12 /*C2 en *-CV-VC-d k m n b U 4 3 7 a 1 2 2 1 6 I 2 3 5 7 6 2 2 1 = 18 Tableau 43

La frontière morphologique identifiée par Meeussen pour les reconstructions ci-dessus met en scène des suffixes clairement reconnaissables : *-

U

d, *-

U

k, *-

I

d, *-

I

k, *-am, *-an, *-at, tandis que les morphèmes *-ab- et *-ad- correspondent à des élargissements (Meeussen 1965). Parmi ces dix-huit reconstructions, quatre sont à voyelles isotimbres et se présentent sous la forme *-C

U

-

U

d- ou * -C

U

-

U

k-, les

2.3 - Cooccurrences *Pn/*C1

Nous allons rapidement relever quelques observations dans les cooccurrences entre le Pn et la consonne initiale du thème, c’est-à-dire à la frontière entre le mot et le thème. Ce qui m’intéresse avant tout est de préciser la distribution générale afin de mettre en évidence la distribution particulière de la palatale voisée que nous étudierons en partie 3 [chapitre 4].

2.3.1- L'accord dans les langues bantoues

Les langues bantoues, comme l'ensemble des langues de la famille Niger-Congo, possèdent un système de classes d'accord qui oppose le singulier au pluriel. Les classes sont appariées par deux pour former un genre, chaque genre comprenant une classe singulier et une classe pluriel, et c'est le substantif qui détermine dans quel genre se feront les accords. Ces classes d'accord incluent donc le morphème préfixé au substantif appelé préfixe nominal (pn) et les morphèmes préfixés au radical verbal : préfixe pronominal (pp), préfixe verbal (pv) et préfixe objet (po). L'observation qui va suivre porte uniquement sur les cooccurrences entre le préfixe nominal et l’initiale du thème.

2.3.2 – Interaction entre le Pn et la consonne initiale

L’influence du Pn sur l’évolution de la consonne initiale est un processus suffisamment répandu sur l’ensemble du domaine bantou pour qu’il soit cohérent d’y prêter attention.

Dans les langues actuelles, on constate des alternances dans la réalisation de la consonne initiale en lien avec la forme du Pn. Un autre cas de figure est celui des alternances dans la réalisation du Pn en fonction de la consonne initiale de thème, par exemple en

Bàsà&a

A.43a, les allomorphes du genre 9/10

/N, µ/

sont

tri des informations chez Guthrie car lorsque plusieurs classes sont attribuées à une Cs12 celles-ci sont présentées par ordre numérique croissant et non sur une probabilité linguistique comme l’a fait Meeussen. Les appariements attribués aux étymons sont donc très fortement hypothétiques, malgré cela nous allons voir que d'un corpus à l'autre on retrouve des constantes qui pourront révéler un fonctionnement propre à la proto langue.

2.3.4 – Distributions observées13

Malgré le côté fragile de cette reconstruction, il existe une constante entre les différents lexiques et cette constante tient à la fréquence attribuée à la classe 9 (31% dans B.L.R.1) puis aux classes 3 et 5 (19,8%).

Deux types de substantifs font exception à cette distribution : les étymons à initiale *t et les étymons à initiale *d. Cette distribution des étymons à initiale alvéolaire incite à imaginer un lien entre le préfixe nominal et le lieu d'articulation de cette consonne puisque elle se reproduit de manière identique dans chacun des corpus, éliminant ainsi le hasard. De quel ordre peut être cette interaction ?

Pour les étymons à initiale *y, c’est en prenant en compte la séquence *C1V1 que nous aurons des indications sur son fonctionnement.

Conclusion

En conclusion, on retiendra de ce chapitre deux observations principales. Tout d'abord, en contexte intrasyllabique on a relevé pour la syllabe initiale une tendance à favoriser les séquences de même lieu d'articulation, alors que la deuxième syllabe ne présentait pas de contrainte particulière. Toujours à propos de la première syllabe, on peut déduire de la fréquence des cooccurrences entre la ou les consonne(s) vélaire(s) et les voyelles postérieures qu'il s'agit d'un contexte stabilisateur. Parallèlement, les contraintes phonotactiques apparaissaient dans l'évitement entre la consonne vélaire *k et la voyelle palatale *i, entre la coronale non voisée *c et la voyelle vélaire *u.

Dans le cas des séquences consonne palatale + voyelle antérieure, les inférences sont d'un tout autre ordre et seront traitées en partie 3 dans le chapitre consacré aux palatales voisées.

Ensuite, en contexte intersyllabique le point essentiel a été l'identification formelle de la plupart des séquences *V2C3 et *V12C2 à un suffixe reconstruit. Pour les suites *-CVVC-, cette identification vient renforcer les hypothèses émises à partir de la distribution de *C2.

Dans le document Lexiques proto-bantous : (Page 63-75)