3.3 Variation latérale de l’atténuation en France Métropolitaine
3.3.1 Contexte géologique et données sismologiques
Dans le prochain paragraphe nous allons brièvement discuter de la géologie de la France
au premier ordre. Dans un deuxième paragraphe, on détaillera les données utilisées pour
cette étude et nous choisirons la fenêtre de coda à adopter pour le jeu de données français
afin d’éviter les biais de mesures dus à la dépendance temporelle deQc (section 3.2.5.2)
[Calvet & Margerin, 2013].
3.3.1.1 Un bref contexte géologique
La France possède une grande variabilité rocheuse comme l’atteste sa carte géologique
(Fig. 3.18a). Cette variabilité s’est créée au fil du temps par la succession de plusieurs
phénomènes géologiques comme (1) l’ouverture et la fermeture des océans ; (2) des
col-lisions continentales comme en témoigne les hauts reliefs des Alpes et des Pyrénées ; et
(3) des périodes de volcanisme, indiquées par les roches volcaniques du Massif Central.
L’ensemble de ces phénomènes ont été accompagnés de métamorphisme, d’érosion et de
sédimentation.
Aujourd’hui, la géologie nous informe qu’il existe quatre grands bassins sédimentaires
dont le remplissage s’est effectué aux ères Cénozoïque (-65Ma à aujourd’hui) à Mésozoïque
(-252Ma à -65Ma) : le bassin Parisien, le bassin Aquitain, le bassin du Sud-Est alimenté en
partie par les dépôts de la vallée du Rhône et le Graben du Rhin. Chacun d’eux est reporté
par un contour noir sur la figure 3.18. Au nord-est du Bassin Parisien correspondant à la
zone nord de la Belgique, on retrouve le Massif du Brabant. La particularité de ce massif
calédonien est d’être recouvert d’une couche sédimentaire Méso-cénozoïque qui s’épaissit
vers le Nord pour atteindre 800m à Anvers.
En dehors de ces zones de remplissage, des roches plus anciennes datant
principale-ment du Paléozoïque (-541Ma à -252Ma) composent les massifs cristallins des Pyrénées,
au Sud et des Alpes, à l’Est. Au nord de la zone d’étude, on peut identifier le Massif de
l’Ardenne formant la zone ancienne et métamorphisée du sud de la Belgique. À l’Ouest de
l’Hexagone (zone Bretonne), on retrouve le Massif Armoricain, vestige de l’orogenèse
Her-cynienne aujourd’hui érodé et réduit à l’état de pénéplaine. Bien que sa topographie soit
relativement plate, les roches constituant le Massif Armoricain sont essentiellement
grani-tiques. Au centre de la France, on identifie le Massif Central, également massif ancien de
l’époque hercynienne et majoritairement composé de roche granitique et métamorphique.
On peut retrouver des roches volcaniques, dû à la période de volcanisme intense qu’a
connue la région entre -65Ma et -7000ans.
−5˚ −5˚ 0˚ 0˚ 5˚ 5˚ 10˚ 10˚ 45˚ 45˚ 50˚ 50˚ 100 km
(a) (b)
Bassin Parisien
Bassin
du Sud-Est
Bassin
Aquitain
Fossé
Rhénan
MASSIF
ARMORICAIN
MASSIF
CENTRAL
PYRENEES
ALPES
Massif du Brabant
MASSIF DE
L’ARDENNE
Figure 3.18 – (a) Carte géologique de la France d’après Pawlewicz et al. [2002]. Les lignes
rouges indiquent les provinces géologiques. Les zones jaunes, vertes et roses font référence aux
unités géologiques du Cénozoïque, Mésozoïque et Paléozoïque, respectivement (voir légende).
Les bassins Cénozoïque à Mésozoïque sont indiqués par les contours noirs. (b) Carte des stations
sismologiques (triangle blanc) et de la sismicité (point rouge) utilisés pour cette étude.
3.3.1.2 Sélection et traitement des données
Grâce à la collaboration de quatre laboratoires de recherche (Observatoire Royal de
Belgique (ORB) - Bruxelles, Laboratoire de Planétologie et Géodynamique de Nantes
MÉTROPOLITAINE
(LPGN), Centre d’Etude Atomique (CEA) - Bruyères le Châtel et l’Ecole et Observatoire
des Sciences de la Terre - Strasbourg (EOST)) et à la récupération de données
distri-buées sur les sites Internet des réseaux sismologiques ou via le protocole ArcLink ainsi
que le réseau mobile Pyrope, 88456 formes d’ondes constituent la base de données pour
la France dans cette étude. Les enregistrements proviennent de plus de 1700 séismes de
magnitude locale supérieure à 2.8, s’étant produits entre 1995 et 2013 (d’après le
Cata-logue du RéNaSS) (Fig. 3.18b). 390 stations sont répertoriées dans la base de données qui
correspondent à différents réseaux sismologiques : le Réseau Accélérométrique Permanent
(96 stations), le réseau courte période incluant les réseaux SismAlp et RéNaSS (118
sta-tions), le Réseau Large Bande Permanent (50 stasta-tions), le réseau du CEA (40 stations) et
le réseau belge de l’ORB (86 stations). Comme nous nous intéressons dans cette thèse à
l’atténuation crustale, la base de données est composée uniquement de sismogrammes de
distance épicentrale ∆<220km. Le tableau 3.1 résume les données que j’ai pu collecter
pour chaque réseau sismologique, et celles qui ont été exploitées dans cette étude lors de
l’étape de sélection automatique de coda (section 2.2.5.1).
Total RLBP RAP RéNaSS SisMob CEA Nantes ORB
Coll. 88456 11% 10% 28% 4% 36% 1% 10%
Exp. 22350 20% 5% 23% 10% 35% 1% 6%
Table3.1 – Tableau détaillant le pourcentage de formes d’onde collectées pour la France (ligne
du haut) et exploitées dans cette étude (ligne du bas), par réseaux sismologiques (colonnes). Les
données exploitées ont été triées par la procédure de sélection automatique détaillée en section
3.2.5.1.
Pour s’assurer de l’absence de biais de mesure dû à la dépendance de Qc avec la
distance épicentrale (section 3.2.5.2), j’ai réalisé sur le jeu de données français la mesure
deQc pour différents temps de démarrage de la fenêtre de codatw, en fixant sa duréeLw
à 50s. On peut noter là encore que les estimations deQcsont réalisées avec la méthode de
Aki & Chouet[1975] (section 3.1.1.1). La figure 3.19 montre l’analyse à 6Hz pourtw=30s
(Fig. 3.19a) et tw=70s (Fig. 3.19b) avec une gamme de distance épicentrale comprise
entre 0 et 200km. Seules les valeurs de Qc dont le coefficient de corrélation R2 de la
régression linéaire delog(E(t, ω)t3/2 (section 3.1.1.1) est de 0.9, ont été prises en compte.
Comme sur les Alpes, on s’aperçoit qu’une fenêtre à temps court dans la coda nous permet
de sélectionner seulement une gamme de courte distance épicentrale (∆ = 0−50km)
(Fig. 3.19a). Cependant, la base de données française contient essentiellement des grandes
distances épicentrales (∼ 120km) et nous voulons cartographier des variations de Qc à
l’échelle régionale. Nous avons donc fait le choix d’adopter un temps de démarrage à
tw= 70s pour ∆= 0−200km (Fig. 3.19b). On s’aperçoit sur la figure 3.19b que ce choix
impose un léger biais de mesure deQc pour∆>150km. Cependant, en ne sélectionnant
que des valeurs de Qc pour lesquelles R2 est supérieur à 0.7, j’ai pu remarquer que les
structures d’atténuation étaient identiques pour la gamme∆= 0−150kmet∆= 0−200km
mais qu’en revanche, le deuxième choix nous permettait d’avoir une plus forte densité de
mesure et une couverture spatiale plus large.
t
w=30s, L
w=50s t
w=70s, L
w=50s
Q
iQ
i
Distance épicentrale (km) Distance épicentrale (km)
t=t
S(a) (b)
Figure 3.19 – Qi à 6Hz en fonction de la distance épicentrale pour une fenêtre de coda d’une
longueur deLw=50s démarrant à (a)tw=30s et (b)tw=70s. Seule la moyenne des valeurs deQi
par distance épicentrale est représentée en trait plein. L’écart type des mesures est montré en
trait pointillé.
Dans le document
Regional variations of seismic attenuation in metropolitan France from observations and modeling of the seismic coda
(Page 142-145)