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CHAPITRE 5 : PRÉSENTATION ET ANALYSE DES RÉSUTATS

5.2 Parcours des proches-soignantes

5.2.1 Contexte d’entrée dans le rôle

Selon les répondantes, un soutien est offert à l’aîné bien avant l’annonce du diagnostic. Les témoignages recueillis illustrent que les proches-soignantes s’investissent naturellement et graduellement pour pallier aux manques et aux difficultés vécues par les aînés. L’engagement des proches-soignantes peut d’ailleurs parfois s’étendre sur plusieurs années.

« Naturellement, heu, plus il (conjoint) avait de manques plus je devais suppléer. [...] C’est un petit peu comme ça que j’ai commencé à m’occuper à faire attention un peu plus et là, j’ai commencé à me rendre compte qu’il avait d’autre manques. » (Proche 1)

« Mais j’ai été 3 ans que je voyais ce qui s’en venait puis là je n’avais pas d’aide. » (Proche 3)

Cependant, toutes les répondantes notent une évolution de leur rôle et de leur engagement dans le soutien offert à l’aîné. Graduellement, leurs tâches de soutien viennent à occuper une grande partie de leur temps et leurs loisirs ou leurs activités rémunérées s’en retrouvent du coup, limités. Il en ressort un oubli de soi lié à l’engagement auprès de l’aîné.

« C’est combien de mon temps par jour de m’occuper de mon mari? Bien, c’est sûr que ça occupe bien du temps. » (Proche 3)

« J’ai vécu ça d’abord comme une sorte de prison dans le fond, que je ne pouvais pas avoir de vie propre parce qu’il fallait que je sois constamment à l’écoute, au regard aussi. » (Proche 1)

« Heu, bien ça implique que ça demande beaucoup de temps. Donc je ne pourrais pas travailler en ce moment. J’espérais recommencer au printemps, mais je ne peux pas. Tant que ça ne sera pas stabilisé là, il n’y a rien à faire. » (Proche 4)

Les proches-soignantes apparaissent donc impliquées et engagées auprès des aînés et ce, bien avant le recours aux services formels. L’analyse des entrevues révèle toutefois que toutes les répondantes ont reçu une quelconque forme d’aide de la part de leur entourage. Comme cette aide est issue des solidarités familiales, il convient de la qualifier d’aide informelle (Lipman et Longino, 1982).

5.2.1.1 Aide informelle

Selon les répondantes, cette aide informelle est fournie par le réseau social immédiat et provient en grande partie des membres de la famille, des enfants, du conjoint ou des amis.

« Oui (souriante), j’ai de l’aide de ma fille. » (Proche 1)

« Mon conjoint me disait toujours, focus sur tes parents. Il y a juste ça qui est important, le reste on oublie ça, ce n’est pas ça. Tu t’occupes de tes parents. » (Proche 4)

« [...] vous savez moi je dis toujours c’est pour ça que j’ai mon groupe de soutien. Mon groupe de soutien c’est mes amis, c’est mes enfants, ma famille. » (Proche 3)

De plus, l’aide informelle est offerte spontanément. Pour les proches-soignantes rencontrées, elle est venue naturellement et sans qu’aucune demande ne soit formulée.

Comme le démontrent les extraits suivants, l’aide offerte par l’entourage est dite régulière et rapide.

« Heu, (Soupir) Je ne l’ai pas vraiment demandé, c’est venu pas mal... c’est venu d’elle (sa fille) et je l’ai accepté. Je ne suis pas quelqu’un qui demande beaucoup il faut dire, mais ça c’est parce qu’elle venait ici d’une façon régulière et puis assez vite. »

(Proche 1)

« Comment j’ai fait pour recevoir de l’aide? Bien, je dirais que c’est un peu naturel. Mon conjoint c’est quelqu’un dont la famille c’est important pour lui. Heu, il peut y avoir des conflits de temps à autre, mais dès qu’il y a un problème tout le monde se rallie derrière et puis ça tient vraiment de sa famille à lui de faire ça. Donc, c’est normal d’avoir cette aide là. » (Proche 4)

L’aide informelle offre par ailleurs un soutien instrumental au quotidien et elle prend différentes formes. De l’accompagnement, de l’aide quotidienne dans l’entretien du domicile et la préparation des repas, ainsi que du soutien émotif et financier sont offerts aux proches-soignantes et ce, avant le recours aux services formels.

À priori, l’aide informelle offerte aux proches-soignantes résulte de l’initiative des membres de l’entourage et de la famille. Pourtant, au gré de l’évolution de la situation, il arrive que les proches-soignantes formulent des demandes à leur réseau. Toutefois, peu ou pas de demandes sont formulées et lorsque tel est le cas, elles sont ponctuelles et concernent l’accompagnement ou le gardiennage de l’aîné. L’analyse des entretiens effectués dévoile que les proches-soignantes formulent peu de

demandes à leur entourage parce qu’elles sont conscientes des désagréments que l’implication auprès de l’aîné risque d’engendrer.

« Donc j’avais téléphoné [à son fils] et il avait accepté, des fois oui des fois non. [...] J’avais demandé pour des rendez-vous médicaux, mais des fois un de ses enfants m’a dit : « bien écoute je suis à l’extérieur, donc je ne pourrai pas, je travaille ». L’autre me dit : « bien j’ai un rendez-vous de travail ou je suis sur une liste de rappel » et l’autre est dans une autre ville. Donc ça c’était... On ne peut pas compter beaucoup avec ça ». » (Proche 2)

« [...] elle (fille) vient un soir par semaine et si par hasard il y avait un autre soir, je lui demande toujours si c’est possible parce qu’elle a ses choses elle aussi. » (Proche 1)

« Je ne l’ai pas demandé parce que je sais le suivi. Voyez-vous, Caroline l’a vu, il faut beaucoup de dévouement, il faut beaucoup de générosité. Je sais ce que ça implique, je ne demanderais pas à ma sœur parce que je lui compliquerais la vie bien gros. » (Proche 3)

Ainsi, les données recueillies démontrent que les proches-soignantes recevaient de l’aide de la part de leur entourage avant de recourir aux services formels. Cette aide instrumentale, provenant du réseau informel, les a soutenues dans leur rôle et dans leur engagement auprès de l’aîné. Or, l’implication de l’entourage va bien au-delà du soutien instrumental. Comme on le verra plus loin, les témoignages recueillis démontrent que l’entourage est également impliqué dans le processus de recours aux services formels.