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Chapitre II : Généralités sur les flashs d’impacts lunaires

III. Paramètres de détection des flashs lunaires

III.2 Considérations du signal sur bruit

Dans la partie sombre de l'hémisphère lunaire faisant face à la Terre; le signal de fond est dû principalement à la lumière cendrée (éclairage par la Terre) provoquée par la réflexion du rayonnement solaire par le coté jour de la Terre qui éclaire le coté nuit de la Lune. Ce signal de fond n’est pas considérablement gênant, mais est un inconvénient pour observer les plus petits flashs. Cependant la lumière cendrée est très utile pour localiser les impacts sur la surface lunaire. C’est la lumière diffusée par le côté jour de la Lune qui diminue le rapport signal/bruit et perturbe la qualité des images au fur à mesure que la phase lunaire augmente. Le cas le plus favorable à l’observation se produit donc au cours de la nouvelle Lune, mais la séparation angulaire entre le Soleil et la Lune est trop petite pour permettre des observations depuis la Terre, la Lune se lève et se couche presque en parallèle avec le Soleil, et la diffusion de la lumière solaire dans l’atmosphère terrestre rend l’observation du disque lunaire et les

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flashs impossibles depuis la Terre (c’est possible pendant une éclipse totale, mais ceci est beaucoup moins fréquent).

Les conditions optimales d’observation ont lieu quelques jours avant ou après la nouvelle Lune. Pratiquement, les observations se déroulent quand la portion non éclairée domine au maximum (>50%) le disque lunaire, et c’est entre le dernier quartier lunaire et le premier quartier, en excluant bien sûr 2 nuits avant et après la nouvelle lune (figure II.11).

Figure II.11 : Les phases favorables aux observations offrent 8 à 10 nuits par mois, est c’est entre le dernier et le premier quartier. Deux nuits avant et après la nouvelle lune sont exclues, car le coucher et le lever de la lune sont synchronisés avec ceux du Soleil (en raison de la faible séparation angulaire). Au cours de l’autre moitié du mois, la partie éclairée domine le disque lunaire,empêche la visibilité des flashs due à la lumière diffusée par cette portion et augmente le bruit de fond.

Figure II.12 : À gauche : Un champ avec une bonne qualité d’acquisition correspond à une observation au deuxième croissant (23/02/2015). À droite : Même champ pris deux nuit après (25/02/2015), notez la diminution la qualité des images.

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Comme illustré sur la figure II.12, l’observation vers les phases juste avant où après la nouvelle lune se caractérise par une bonne qualité d’images, ce qui favorise la détection des impacts avec un bon rapport signal/bruit de fond. La surface de la portion nocturne est clairement apparente, car près de la nouvelle lune, la nuit lunaire se trouve très éclairée par le jour terrestre qui domine l’hémisphère terrestre faisant face à la lune (presque le maximum de lumière cendrée). L’inconvénient de ces phases (croissants) c’est que la lune se couche tôt après le soleil (début de mois lunaire) ou se lève tard vers le lever du soleil (fin de mois lunaire). La durée d’observation dont on peut profiter est alors minimale (45 min à 1h30).

Le bruit provoqué par la diffusion de la lumière à partir du côté jour de la Lune augmente avec la phase lunaire (voir figure II.12), et dépend aussi des conditions atmosphériques sur le site d'observation ainsi que l’optique du télescope. Pour des conditions normales d'observation, la luminosité de la face nocturne de la lune varie approximativement entre 10 et 16 mag/arcsec2 (Pilar et al. 2007; Bouley et al. 2012), elle est maximale vers le premier ou le dernier quartier. Pour les phases proches des quartiers, les caractéristiques de la surface dans la partie nocturne deviennent presque invisibles, ce qui ne permet pas de bien localiser les impacts à partir de la morphologie de surface. L’avantage d’observer pendant ces phases est que la séparation angulaire entre le disque lunaire et le soleil est plus grande donnant lieu à des durées d’observation de 3 à 5 heures.

Dans le but de quantifier la visibilité du signal d'impact dans la nuit lunaire, Bouley et al. (2012) ont modélisé et examiné l’influence de deux sources de radiations à la surface de la lune,: l'émission thermique lunaire contrôlée par la température de surface et par l'émissivité du régolite, et la lumière cendrée correspondant à la réflexion (par la surface lunaire) de la lumière provenant de la surface terrestre éclairée par le soleil (coté jour) faisant face à la Lune. Le rayonnement thermique lunaire intrinsèque par unité de surface (W/m²/m) est donné par : LMoon = 2πhc 2 λ5 1 exp( hc λkBTMoon)-1 ϵ(λ)

Où ‘T’est la température de surface (allant de 120 K à 150 K pendant la nuit lunaire), ′λ′ est la longueur d’onde, ′ϵ(λ)′ est l'émissivité du régolite lunaire en fonction de la longueur d'onde, ‘c’‘h’ et ‘kB‘ sont respectivement la vitesse de la lumière dans le vide, la constante de Planck et la constante de Boltzman. Le spectre de la contribution de la lumière cendrée par unité de surface (W/m2/m) est donné par:

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LEarthshine= AEarth(λ)AMoon(λ)ESun(λ)ΩFcos(i) π

Où ′Esun′ est l'incidence rayonnante (la constante solaire 1 UA),AEarth et AMoon sont respectivement les albédos terrestre et lunaire (en fonction de la longueur d'onde, de la saison, et la région de la Terre vue de la lune). ‘Ω‘ est l'angle solide du disque de la Terre vue de la lune (environ 8,6 sr), ‘i’ est l'angle d'incidence de la Terre à un endroit donné sur la surface lunaire,‘F’ est la fraction de la Terre éclairée par le soleil, vu de la Lune.

Le rayonnement de type corps noir associé à l’expansion d’un nuage composé de plusieurs phases (vapeurs, liquide, solide) dépend de la distribution de la température et la profondeur optique. Afin d'obtenir un premier aperçu de la contribution relative des différentes sources de rayonnement, un flash d'impact peut être approché par l'émission d'un corps noir associé à une température effective. Dans cet esprit, Bouley et al. (2012) définit une température effective Tecomme la température cinétique d'un corps noir qui émettrait une quantité de rayonnement par unité de surface égale à celle émise par le nuage associée à un impact par unité de surface.

Le spectre de flash (W/m2/m) a été approché par la loi de Planck du rayonnement d’un corps noir: Limpact(λ,t)=2πhc 2 λ5 1 exp( hc λkBTe(t))-1

Le spectre des flashs d’impacts et les autres sources de radiations sont représentés dans la Figure II.13 (Bouley et al. 2012). L’examen de ce spectre suggère que la lumière cendrée peut limiter la détection des flashes d'impacts dans le visible (entre 0,4 et 0,9 micromètre), tandis que les observations dans le proche-infrarouge et l’infrarouge peuvent être limitées par le bruit de fond de l’émission thermique lunaire.

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Figure II.13 : Spectre des différentes sources de rayonnement de la surface lunaire (lumière cendrée, émission thermique) par rapport à un rayonnement de corps noir à plusieurs températures. La transmission atmosphérique (axe vertical de gauche)est donnée sur l'axe vertical de droite.Le maximum de la lumière cendrée, quand le disque entier de la Terre est vu de la Lune, est calculé en premier (marqué avec 1,0). Lorsque seule une fraction du disque de la Terre éclairé est vu de la Lune l'intensité de la lumière cendrée est plus faible et les courbes sont données pour des valeurs moitié du maximum de la lumière cendrée(0,5) et le quart du maximum cendrée (0,25) (Bouley et al, (2012).

Le rapport du signal flash/signal lunaire pourrait être plus élevé dans le proche infrarouge que dans le visible, lorsque la température effective du « nuage » s’est abaissée, et que le nuage est optiquement transparent au rayonnement. Un autre avantage de l'infrarouge est que le rayonnement diffusé du côté jour de la Lune est plus faible que dans le visible. Le principal inconvénient des observations infrarouges est la variation rapide de la luminosité du ciel, qui montre souvent des différences significatives sur les échelles de temps de l'ordre de quelques minutes.

On peut augmenter le rapport signal sur bruit (SNR) de détection des flashs lunaires si nous utilisons des cameras CCD à temps d'intégration très court. Réduire le temps d’exposition engendre une diminution de bruit de fond, et puisque les flashs sont intenses, mais seulement pendant des intervalles à temps extrêmement courts, nous obtenons plus de détails sur l’évolution du flash au cours du temps, avec un meilleur rapport signal sur bruit, et

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un signal qui n'est pas modifié, ce qui favorise aussi l’identification des petits flashs de faible luminance. Il est donc pratique de réduire le temps d'intégration autant que possible pour que le fond ne cache pas le signal provenant de l'impact, à cet égard, les caméras à capteurs CCD très rapides sont nécessaires pour augmenter la probabilité de détection (Bouley et al. 2012). Le deuxième avantage de ces caméras, c’est que le rendement quantique est généralement élevé dans les capteurs CCD, le grand nombre de pixels et la petite taille angulaire d’un seul pixel permet aussi aux matrices des CCD d’être plus sensibles.

Le type de capteur CCD, le télescope et d’autres facteurs techniques supplémentaires (champ de vision, résolution spatiale…) qui influencent la visibilité des flashs d'impacts lunaire vont être examinés en discutant le choix de nos équipements dans le chapitre III.