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PARTIE I : COMPORTEMENTS SOCIAUX

IV- Relation avec l’homme

2. Conséquences de cette relation

2.1- Modifications physiologiques

La peur de l’homme peut avoir des conséquences au niveau physiologique. Ainsi la fréquence cardiaque de vaches laitières est augmentée en présence d’un animalier au comportement désagréable ou peu familier (Knierim et Waran 1993; Rushen et al. 1999). De même, des veaux dont l’éleveur s’est comporté de façon positive, ont une fréquence cardiaque inférieure pendant le chargement et le déchargement d’un camion, à ceux dont l’éleveur a montré plus de comportements négatifs (Lensink et al. 2001).

Cela influe aussi sur les concentrations en corticoïdes. Des porcs ayant subi un traitement désagréable par l’homme ont des plus hautes concentrations plasmatiques en cortisol, même en dehors de la présence de l’homme, que des porcs ayant reçu un traitement agréable. Cela traduit un état de stress chronique (Hemsworth et al. 1987). Semblablement, des poules peu habituées à l’homme ont des concentrations en corticostérone supérieures, après manipulation, à celles qui ont reçu plus de contacts (Barnett et al. 1994). Il y a même une augmentation de la taille du cortex des surrénales chez des porcs ayant reçu un traitement aversif (choc électrique si l’homme n’est pas évité) pendant 10 semaines (Gonyou et al. 1986).

Le système immunitaire peut aussi être impacté lors de stress chronique. Ainsi, des poules ayant eu peu de contacts avec l’homme, présentent une moins bonne immunité cellulaire après un test d’approche, que des poules ayant eu plus de contacts humains (Barnett et al. 1994).

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2.2- Paramètres de production

Ces modifications physiologiques peuvent avoir des conséquences sur la production des animaux d’élevage.

Plusieurs études ont notamment cherché un lien entre la peur de l’homme et la production laitière. Par exemple, Rushen et al (1999) ont montré que la présence d’un animalier désagréable peut baisser la production de lait des vaches. Une étude sur 30 fermes laitières familiales a également mis en évidence une production laitière inférieure dans les exploitations où les animaliers ont une attitude négative envers les vaches et emploient des interactions neutres plutôt que positives au moment de la lactation (Waiblinger et al. 2002). Une autre étude sur 31 exploitations laitières commerciales a montré que certaines variables de comportements, liées à la peur de l’homme, étaient modérément à hautement corrélées à la production et la composition du lait. De plus la peur de l’homme expliquait 19% de la variation de production de lait entre exploitations (Breuer et al. 2000). Cette baisse de production laitière peut être reliée à des paramètres physiologiques. Ainsi, Knierim et Waran (1993) ont trouvé qu’un animalier associé à la plus haute fréquence cardiaque chez des vaches est également celui associé à la plus faible production laitière.

On peut aussi observer des conséquences de la relation homme-animal sur les productions de viande. Premièrement, cela peut avoir un effet sur la productivité des animaux : des poulets de chair venant de fermes où les animaux évitent l’homme, ont des efficacités alimentaires plus faibles que ceux venant de fermes ou les poulets sont plus familiers à l’homme (Hemsworth et al. 1994). On retrouve le même phénomène chez le porc : des animaux ayant expérimenté un traitement agréable par l’homme (caresses), ont des meilleurs taux de croissance et efficacité alimentaire que ceux ayant subi un traitement désagréable (Hemsworth et Barnett 1991). De plus, cela peut avoir une influence sur la qualité de la viande. En effet, des veaux venant d’une unité ou l’éleveur montre une majorité de comportements positifs envers les animaux, ont une viande plus pâle, avec un pH et une humidité inférieurs à ceux de veaux d’une unité où l’éleveur montre une majorité de comportements négatifs (Lensink et al. 2001). Des animaux réactifs à l’homme ont, en outre, une viande présentant plus de contusions et moins tendre (Fordyce et al. 1988; Voisinet et al. 1997).

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La peur de l’homme peut aussi impacter la reproduction. En effet, une étude sur 66 fermes laitières commerciales a révélé une corrélation significative et positive entre le pourcentage de vaches approchant l’homme à moins de 3m dans un test standard et le taux de réussite à la première insémination (Hemsworth et al. 2000). Une autre étude sur les porcs a montré qu’une manipulation désagréable entraine une moins bonne fécondité au 2ème

œstrus des truies, accouplées avec des verrats inexpérimentés, que celle des truies qui ont eu une manipulation agréable, dans les mêmes conditions. Les verrats, quant à eux, ont des testicules plus petits s’ils sont manipulés de façon désagréable (Hemsworth et al. 1986).

2.3- Facilité du travail de l’éleveur

Du point de vue de l’éleveur, des animaux peureux vis-à-vis de l’homme sont souvent plus difficiles à manipuler et à diriger (Waiblinger et al. 2006). Il parait donc intéressant d’habituer les animaux à des contacts positifs puisque nous avons vu que cela permet, entre autres, de supprimer les comportements agressifs (Boivin et al. 1992) et les tentatives de fuite (Becker et Lobato 1997) lorsqu’un homme est présent.

Par exemple, des bovins en allaitement artificiel, nourris deux fois par jour par un animalier, sont plus rapidement triés et restreints dans un coin que des animaux au pâturage ou en stalles libres, ayant donc moins de contact avec l’homme (Boivin et al. 1992).

Ainsi, le comportement positif de l’animalier pendant la période d’élevage permet de diminuer la réponse émotionnelle des veaux à la manipulation et au transport et donc de réduire les incidents lors de ces activités, ainsi que le temps qu’elles nécessitent. Ces animaux demandent également moins d’efforts pour être chargés et déchargés, facilitant par conséquent le travail des éleveurs (Lensink et al. 2001). Cela est aussi efficace pour les actes vétérinaires (palpation rectale, insémination) : les réactions de stress (coups de pieds, agitation) peuvent être réduites par une manipulation positive antérieure et/ou par un contact doux pendant la procédure. Cela diminue le risque d’incidents et le temps nécessaire à cet acte (Waiblinger et al. 2004).

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