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Chapitre 1 – Contexte de la recherche

2.1. Présentation du glissement de Super-Sauze

2.1.2. Connaissances sur la cinématique et la structure interne

2.1.2.1. Déplacements

Les déplacements en surface ont été entre autres relevés lors de campagnes de GPS sur repères (Malet & Maquaire 2002), en continu par GPS et à l’aide d’extensomètres en d’autres points (Malet 2003) puis par acquisitions terrestres par scanner laser (Travelletti et al. 2008). Ils sont complétés depuis 2007 en continu par des mesures de corrélation photogrammétrique (Fig. 2.4, Travelletti et al. 2011).

Figure 2.4. Installation du système d’acquisition photographique dans une cabane située en face du glissement

de terrain de Super-Sauze (d’après Travelletti et al. 2011).

On constate que le champ de déplacements est extrêmement variable dans le temps et dans l’espace. Les taux de déplacements peuvent atteindre jusqu’à 40 cm par jour au printemps dans la région la plus active de la partie supérieure du glissement et descendre en-dessous de 0,2 cm par jour en aval au niveau du pied du glissement (Fig. 2.5). Dans la région supérieure, la présence de deux crêtes stables (crête « in situ » et crête « de limite », respectivement nommées E3 et E1 sur la Fig. 2.5, selon la nomenclature établie par Travelletti & Malet 2011) complique l’évolution du déplacement. Cette topographie complexe induit des mouvements relatifs latéraux entre des compartiments de cinématiques lente et plus rapide (de vitesse de déplacements nulle à plus de 3 cm par jour).

Amitrano et al. (2007) et Walter & Joswig (2008) ont déjà suggéré que les variations de déformations pouvaient être liées à l’activité sismique interne au glissement de Super-Sauze. Il existerait plusieurs hypothèses pour définir l’origine de cette sismicité. Elle pourrait être attribuée au cisaillement de la masse en mouvement sur le socle rocheux stable (Amitrano et al. 2007) ou encore à la présence d’escarpement et de crêtes stables. En effet, en 2008, Walter et al. (2009) et Walter & Joswig (2009) installèrent des antennes sismiques de part et d’autre du glissement pendant deux semaines. Ils cherchaient à vérifier s’il était possible de détecter des signaux sismiques voire de les localiser malgré la forte atténuation et l’hétérogénéité du terrain et de les associer à des phénomènes liés à des déformations du glissement, tels que des ouvertures / fermetures de fissures, des phénomènes de

cisaillement et transport de matériaux en surface observées sur le terrain (Fig. 2.2d et Fig. 2.6). Cette application permit de prouver que l’on pouvait effectivement détecter des signaux sismiques de magnitude ML ~ -2 dans des matériaux argileux atténuants et saturés en eau. Walter et al. (2009) et Walter & Joswig (2009) fournirent une vue globale de la distribution spatiale des sources sismiques et conclurent que l’essentiel de ces sources était localisé en amont du glissement, vers la région la plus rapide (Fig. 2.5).

Les photographies qui illustrent la Fig. 2.6 ont été prises à l’aide d’un appareil téléguidé type drone (Fig. 2.7) de 60 cm de diamètre, volant à de faibles altitudes (200 m environ) afin que les photographies prises aient une résolution suffisamment précise pour mettre en évidence les fissures du glissement. Cet appareil et ses applications ont été conçus et développés par Niethammer et al. (2012).

Figure 2.5. Déplacements moyens mesurés sur le glissement de Super-Sauze jusqu’en 2008. Sur cette image,

l’amont est situé en haut. Le glissement s’étend d’amont en aval sur 300 m environ. Les points rouges représentent les localisations des sources des principaux signaux sismiques identifiés par Walter & Joswig (2009) (adapté de Malet 2003 et Walter & Joswig 2009).

Figure 2.6. Vue générale des phénomènes associés à la dynamique du glissement visibles en surface : (a)

cisaillements au niveau de la crête E3, (b) fissures entrecroisées, (c) fissures transversales au niveau d’une rupture de pente et (d) fissures longitudinales (d’après Walter et al. 2009).

C’est à la jonction entre les crêtes a priori stables et le secteur le plus actif, zone où ont été précédemment relevés par Walter & Joswig (2009) la plus grande quantité de signaux sismiques et où sont observables en surface les phénomènes de fractures et de cisaillements, que nous avons installé notre antenne sismique, à cheval sur le versant stable et le versant beaucoup plus actif du glissement (Fig. 2.5 et Fig. 2.8). Le but est de compléter les premières analyses avancées par Amitrano et al. (2007) et Walter & Joswig (2008) et Walter et al. (2009) pour surveiller la dynamique du glissement et compléter l’identification des sources sismiques significatives de déformation.

2.1.2.2. Structure interne

Nous avons mis à jour le modèle de la structure interne du glissement au niveau de notre antenne d’acquisition sismique pour pouvoir l’adapter à nos applications d’écoute sismique. Nous avons pour cela réalisé en juillet 2010 une campagne d’acquisition de sismique réfraction suivie de tirs de calibration. La Fig. 2.8 indique l’emplacement des profils tomographiques et des tirs par rapport à l’antenne d’écoute sismique qui sera introduite ultérieurement (partie 2.3 de ce chapitre).

Fig. 2.8. Localisation des profils sismiques et des tirs de calibration par rapport à l’emplacement de l’antenne

d’écoute sismique et à la morphologie du glissement (à droite, agrandissement de 120 m sur 180 m).

Les détails de cette campagne sont présentés partie 2.4 de ce chapitre. Ils sont en concordance avec des études réalisées précédemment à partir d’outils complémentaires (illustrations en 2.4) :

- Grandjean et al. (2007) ont réalisé des profils de tomographie sismique mais bien plus en aval du glissement ;

- Méric et al. (2007) ont mis en évidence des discontinuités du milieu à partir de la méthode d’écoute passive du bruit H/V (rapport de la composante horizontale sur la composante verticale du bruit) ;

- Walter et al. (2009a, 2009b) ont effectué une série de tirs pour déterminer le modèle de vitesse qui permettrait d’identifier au mieux les arrivées des ondes sismiques ;

- Travelletti & Malet (2011) ont proposé un modèle à partir de la combinaison de données géologiques, hydrogéologiques, géotechniques et géophysiques (Weber 1994, Malet et al. 2003, Flageollet et al. 1996).

On retiendra pour nos applications un modèle à trois couches caractérisées par des cinématiques et des compactions différentes (Fig. 2.9). Ce modèle présente en surface une première couche de matériaux d’une dizaine de mètres d’épaisseur, définie par la vitesse de propagation des ondes P vP comprise entre 350 et 700 m.s-1, glissante sur le socle rocheux stable, où vP varie entre 2200 et 2300 m.s-1. La troisième couche est intercalée sur une petite région entre les deux précédentes. Il s’agit de la continuité de la crête E1 (Fig. 2.5), relativement stable par rapport à la première couche glissante, mais a priori moins compacte que le socle du dessous. On évalue dans cette couche vP compris entre 1300 et 1700 m.s-1 environ.

Fig. 2.9. Modèle retenu de la structure interne de la partie la plus active du glissement de Super-Sauze, au niveau