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Mieux se connaître : une promesse mutuelle en prélude au nouveau partenariat

Dans le document Europe-Afrique : partenaires particuliers (Page 52-56)

ÉVOLUTION DEPUIS 20 ANS

1.3. Réinventer le partenariat Europe-Afrique

1.3.2. Mieux se connaître : une promesse mutuelle en prélude au nouveau partenariat

En Europe comme en Afrique, les clichés sont nombreux sur celui qui se trouve de l’autre côté de la Méditerranée. Ces idées reçues peuvent être ravageuses : stimulation de l’élan migratoire et de la déception une fois arrivés sur le vieux continent, persistance de préjugés dans l’opinion publique européenne.

Un nouveau partenariat ne pourra se construire qu’en s’affranchissant de l’entre soi et de la méconnaissance des opinions publiques respectives sur l’autre. Le premier travail consistera donc à travailler cette connaissance mutuelle. La saison Africa 2020, lancée à l’initiative de la France, qui a vocation à faire découvrir la richesse culturelle, sociologique, historique de pays africains en pleine mutation, va dans le bon sens. Ces initiatives doivent se multiplier, à l’échelle européenne. Côté africain, on pourrait imaginer des initiatives similaires pour faire découvrir l’UE, un « Europa 2020 » dans une forme de réciprocité salutaire pour les deux continents.

Travailler ces sujets auprès de la jeunesse est sans doute le meilleur gage d’un changement profond des mentalités et de la relation euro-africaine. Erasmus est souvent présenté comme l’une des rares initiatives ayant donné corps à la construction européenne. Ce programme créé il y a un peu plus de 30 ans en Europe est un

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véritable succès. Près de 10 millions d’Européens, en majorité des étudiants, se sont rendus dans un autre pays européen que le leur pour poursuivre leur cursus académique. Un brassage utile et fécond, puisqu’aujourd’hui, plus de 80 % de ces jeunes gens se déclarent plus européens que jamais. Un Erasmus euro-africain ne pourrait-il pas jouer le même rôle ?

C’est de ce brassage culturel, linguistique, humain dont l’UE et l’Afrique ont besoin. L’échange de bonnes pratiques, des échanges culturels permettent une meilleure connaissance de l’autre et ainsi faire tomber les barrières des a priori. Cela pourrait s’accompagner de la création et de la structuration de réseaux d’influence communs menant à une véritable prise de conscience d’une communauté de destin. Outre la diaspora née et/ou établie en Europe, les personnes issues de double culture ayant de fortes attaches en Afrique et sur le continent européen qui font des allers retours physiques et culturels incessants entre les deux continents pourraient être le ciment de ces réseaux d’influence, pour construire un soft power euro-africain basé sur des valeurs communes. Véritables

« caméléons », ils se sentent parfaitement à l’aise dans les deux cultures et les deux espaces géographiques. La jeunesse européenne et la jeunesse africaine, bien plus ouvertes sur ces questions qu’on ne le soupçonne, sont à prendre en considération de manière très sérieuse pour changer les perceptions entre nos deux continents.

En matière d’échanges universitaires, le mouvement doit être amplifié.

À travers le monde, un étudiant mobile sur 10 est Africain, soit un taux de mobilité deux fois supérieur à la moyenne mondiale26. La France reste encore la première destination des étudiants Africains

26 Campus France, Les Notes n° 16, La mobilité internationale des étudiants africains, novembre 2017.

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avec 150 000 étudiants venus d’Afrique, soit 44 % des étudiants étrangers.

Quant à l’Europe communautaire, elle représente désormais moins de 45 % des destinations des étudiants africains, un chiffre en forte baisse27. Dans l’autre sens, il existe trop peu de partenariats d’universités européennes – c’est-à-dire d’universités des 28 États membres avec leurs homologues africaines – qui permettraient à des étudiants européens d’effectuer une mobilité sur le continent africain. Une perte d’influence qui, à terme, pourrait être dommageable pour l’UE. La Chine, de son côté, accélère son soft power. Outre la cinquantaine de centres Confucius ouverts en Afrique au cours des cinq dernières années, le pays offrirait 80 000 bourses aux étudiants africains en 2018 selon les chiffres officiels du ministère chinois de l’Education, soit 300 fois plus qu’il y a 10 ans.

Une communauté de savoirs, animée par des échanges entre chercheurs de la diaspora, chercheurs africains et chercheurs européens, peut permettre de stimuler les connaissances mutuelles sur les deux continents, notamment une recherche appliquée aux problématiques africaines et européennes, qu’il s’agisse des questions de santé, d’agriculture, d’environnement, de services à la personne, de migration, de sécurité et de défense, etc.

Une communication européenne décomplexée

Une meilleure connaissance passe également par une meilleure reconnaissance de ce qui se fait déjà. L’UE souffre de son manque de visibilité sur le terrain. Les États membres mobilisent des montants

27 Ibid.

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considérables en matière d’aide comme de prêts. Malgré les moyens mobilisés souvent supérieurs, l’UE perd du terrain face à d’autres acteurs, tels que la Chine, la Turquie, les pays du Golfe, le Maroc, dont l’investissement dans les infrastructures ou les montants d’aide sont largement relayés. Les États-Unis également rivalisent d’imagination pour donner de la visibilité à leur aide.

L’UE doit travailler à mieux communiquer sur ses actions et ses valeurs en Afrique en faisant de ses projets des projets « africains » à part entière dont l’impact doit être systématiquement valorisé. Cette valorisation passe par des influenceurs africains qui connaissent parfaitement leur terrain, par des groupements de la société civile influents dans leur périmètre. Il ne s’agit pas d’enjoliver la réalité mais de mieux dire ce que l’UE fait en Afrique. Cela constitue un complément indispensable à toute nouvelle action, afin de donner leur pleine mesure aux moyens engagés. Pourquoi ne pas appliquer le principe communautaire de subsidiarité, qui permet notamment de faire émerger les sujets universitaires et économiques comme sujets européens de prédilection ? Toutefois, cela reste conditionné par la capacité de l’Union européenne à formuler une ambition politique lisible pour l’Afrique, ce qui s’est avéré difficile jusqu’à présent.

Un travail de mise en cohérence de son action, pour la rendre plus identifiable et aisée à appréhender sur le terrain, est également indispensable. À ce titre, la refonte prochaine des instruments financiers européens à destination de l’Afrique doit veiller à garantir la lisibilité et à renforcer la facilité d’appréhension des outils financiers.

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