6 Discussion 6.1 Confrontation des résultats à la question de recherche et réponse Les synthèses des résultats des deux groupes d’articles de recherche analysés nous ont permis de faire ressortir trois thématiques qui sont utilisées pour construire cette discussion. Ces thématiques sont : l’efficacité et le soulagement à court terme de la douleur, l’efficacité et le soulagement à long terme de la douleur ainsi que l’impact du traitement sur la qualité de vie. Les résultats mis en lumière en regard de ces trois thèmes nous permettent ensuite d’apporter une réponse à notre question de recherche. 6.1.1 Efficacité du traitement et soulagement à court terme de la douleur Dans les six articles de recherche analysés, une diminution significative de l’intensité de la douleur a été observée entre avant et après le traitement. Dans chacune de ces études, l’intensité de la douleur a été mesurée soit à l’aide d’une échelle visuelle analogique (Visual Analogue Scale, VAS) de 0 à 100, soit à l’aide d’une échelle d’évaluation numérique (Numeric Rating Scale, NRS) de 0 à 10. D’autres échelles spécifiques ont également été utilisées suivant les études. Ainsi, les études analysées montrent que toutes les modalités thérapeutiques de gestion de la douleur retenues ont démontré une certaine efficacité dans la diminution à court terme de la douleur chronique. L’efficacité du massage s’est révélée significative dans l’étude la comparant à un entretien (Seers et al., 2008) mais cela n’est pas le cas dans l’étude la comparant à l’acupuncture (Norrbrink & Lundeberg, 2011). Dans les deux études portant sur l’acupuncture, une diminution significative de la douleur à court terme a été démontrée par les auteurs (Nayak et al., 2001 ; Norrbrink & Lundeberg, 2011). Les deux études portant sur l’hypnose (Jensen et al., 2005, 2009) ont permis d’observé l’efficacité de cette intervention dans le soulagement de la douleur à court terme. 6.1.2 Efficacité du traitement et soulagement à long terme de la douleur Parmi les six articles de recherche analysés, cinq études ont évalué l’efficacité des interventions à long terme. Ces évaluations de suivi ont été effectuées entre 2 et 12 mois selon les études. Nous pouvons ainsi relever que le soulagement à long terme de la douleur après acupuncture s’est maintenu uniquement dans l’étude de Nayak et al. (2001). L’hypnose s’est révélée efficace pour le soulagement à long terme de la douleur, dans les trois études analysées (Jensen et al., 2005, 2008, 2009). En effet, l’amélioration des scores de douleur après traitement s’est maintenue à trois mois. Certains participants ayant suivi un traitement par hypnose ont appris à pratiquer l’autohypnose. Ils ont donc continué à utiliser l’intervention durant la période d’évaluation post-traitement, ce qui n’est pas le cas des participants ayant reçu l’acupuncture ou le massage. L’utilisation de l’autohypnose pourrait ainsi expliquer le maintien des bénéfices du traitement à long terme comparativement aux autres interventions. 35 6.1.3 Impact du traitement sur la qualité de vie Les différentes études analysées montrent que les modalités de traitement retenues ont également des effets bénéfiques sur les symptômes fréquemment associés à la douleur et exerçant une influence sur la qualité de vie. Les auteurs ont ainsi évalué l’inconfort lié à la douleur, l’anxiété, la dépression, l’interférence de la douleur avec les activités quotidiennes, le degré de satisfaction par rapport à l’intervention, le contrôle perçu sur la douleur et le coping. Néanmoins, ces différentes mesures ne se retrouvent pas nécessairement dans les six articles de recherche analysés. Une étude démontre ainsi que le massage peut avoir des effets bénéfiques pour diminuer l’anxiété associée à la douleur chronique (Seers et al., 2008). Toutefois, selon les études analysées, le massage ne semble pas avoir d’effet sur les autres symptômes fréquemment associés à la douleur (Norrbrink & Lundeberg, 2011 ; Seers et al., 2008). L’acupuncture semble quant à elle, avoir un effet bénéfique sur l’inconfort lié à la douleur, sur l’interférence de la douleur avec les activités de la vie quotidienne ainsi que sur le bien-être général (Nayak et al., 2001 ; Norrbrink & Lundeberg, 2011). Cependant, à l’exception de l’inconfort lié à la douleur, ces bénéfices ne se maintiennent pas à long terme. Finalement, l’hypnose a des effets bénéfiques sur l’inconfort lié à la douleur. Elle engendre également une augmentation significative du contrôle perçu sur la douleur, qui pourrait être justifiée par l’utilisation de l’autohypnose (Jensen et al., 2005, 2008, 2009). 6.1.4 Réponse à la question de recherche Cette revue de littérature a permis l’analyse d’articles de recherche portant sur trois thérapies non-pharmacologiques, à savoir le massage, l’acupuncture et l’hypnose. Ces thérapies peuvent avoir une efficacité sur la diminution de l’intensité de la douleur chronique chez le blessé médullaire ainsi que sur certains symptômes fréquemment associés à cette douleur. Le massage semble avoir une efficacité limitée sur la gestion de la douleur et uniquement à court terme. Bien qu’il n’ait pas un effet marqué sur la diminution de la douleur, il contribue à diminuer l’anxiété. Celle-ci étant souvent étroitement liée à la douleur, sa diminution peut aider à la gestion de la douleur et ainsi contribuer à l’amélioration de la qualité de vie. Même si le massage n’a pas d’influence sur les autres symptômes fréquemment associés à la douleur, les participants ayant reçu cette intervention se disent satisfaits de ce traitement. De plus, ils le décrivent comme agréable et relaxant. Le massage pourrait alors être utilisé par les infirmières notamment après administration d’un traitement pharmacologique, en attendant l’apparition de son effet thérapeutique. En ce qui concerne l’acupuncture, elle semble plus efficace que le massage pour la gestion de la douleur chronique chez le blessé médullaire. De plus, son efficacité apparaît plus importante chez les blessés médullaires souffrant de lésion incomplète et de douleurs nociceptives. L’acupuncture semble 36 également permettre d’améliorer l’état de santé général et le bien être psychologique, ce qui peut contribuer à améliorer la qualité de vie. Parmi les trois interventions non-pharmacologiques retenues, l’hypnose semble être l’intervention la plus efficace pour la gestion de la douleur chronique chez les blessés médullaires, particulièrement chez ceux souffrant de douleur neuropathique. Cette thérapie semble également avoir une efficacité sur le contrôle perçu sur la douleur et sur l’inconfort lié à la douleur. Bien que notre revue de littérature nous amène à penser que les trois thérapies non-pharmacologiques retenues peuvent avoir une certaine efficacité sur la gestion de la douleur chronique chez les blessés médullaires, elle ne contient qu’une seule étude comparant deux types de thérapies entre elles. Il nous est donc difficile d’affirmer avec certitude quelle intervention non-pharmacologique est la plus efficace. De plus, en regard des limites énoncées précédemment, il est nécessaire de considérer nos conclusions avec précautions. Concernant l’utilisation du massage, de l’acupuncture et de l’hypnose par les infirmières, nous pouvons avancer que ce sont des thérapies pouvant relever des compétences de l’infirmière, bien qu’elles n’aient pas été étudiées et exercées durant notre formation. Seuls quelques rudiments sur le massage de détente ont été abordés. Toutefois, il existe des formations complémentaires permettant aux infirmières d’apprendre et d’exercer ces thérapies. Il existe un Certificate of Advanced Studies (CAS) en « Art et techniques hypnotiques dans les domaines de la santé et du domaine social » mis sur pied conjointement par la HES-SO Valais, l’Hôpital du Valais, l’Ecole d’études sociales et pédagogiques et l’Institut Romand d’Hypnose Suisse (Institut Romand d’Hypnose Suisse, S.d.). Au Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV), l’hypnose est utilisée pour la gestion de la douleur et de l’anxiété par des infirmières spécialisées notamment auprès des grands brûlés, en chirurgie plastique et reconstructive ou en pédiatrie (Centre Hospitalier Universitaire Vaudois, 2013). Concernant l’acupuncture, il existe des formations d’une durée variable dispensées par des institutions privées et ouvertes au personnel soignant, dont les infirmières. Cependant, d’après nos recherches, il ne semble pas exister de telles formations dispensées par le CHUV ou une HES-SO pour les infirmières. Seules des formations pour les médecins sont proposées par le CHUV. Quant au massage, il ne semble pas non plus exister de formations complémentaires de type CAS. Toutefois, il apparaît que le CHUV propose des cours de formation ouverts aux infirmières. Dans cet établissement, le massage ne semble pas être utilisé principalement pour la gestion de la douleur mais plutôt employé dans une perspective de détente et de bien-être, comme c’est le cas par exemple dans le service d’isolement de médecine (Schopper & Currat-Zweifel, 2006). En réponse à notre question de recherche, nous pouvons donc avancer que le massage, l’acupuncture et l’hypnose sont des thérapies non-pharmacologiques pouvant être utilisées par les infirmières afin de diminuer la douleur chronique chez le blessé médullaire. 37 Dans le document Soulagement de la douleur chronique chez le blessé médullaire : interventions non-pharmacologiques applicables par l'infirmière (Page 41-44)