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Colombie R E 1964 Aggrav.

Cuba, États-Unis R, G DI 1960 Aggrav.

Les deux cas placés sous cette rubrique ont subi une évolution négative en 2018. Cela ne va pas, pour le moment, jusqu’à imposer de les en retirer mais indique que cette éventualité - soit parce que le conflit revient en arrière, soit parce qu’il se transforme -, qui impliquera la réintroduction du conflit dans une autre rubrique ne doit pas être écartée. Il faut, en tout cas, laisser passer le temps pour avoir confirmation que le conflit est bien en voie de terminaison.

Pour les deux cas à l’examen, à moyen et long terme, les perspectives d’évolution semblent assez différentes. Dans le cas de Cuba on peut envisager que passé l’épisode Trump, on reviendra à la politique de normalisation soit à la fin du conflit. Dans le cas colombien, on voit mal en revanche, comment l’Etat pourrait venir à bout des groupes armés, qui se sont emparés du pays et reprendre le contrôle de son territoire.

(112) La situation en Colombie

Au cours de la décennie qui suivit la Violencia (1948-1953), période de guerre civile entre les conservateurs et les libéraux, la Colombie vit apparaître plusieurs mouvements de guérilla, marxistes- léninistes - les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) en 1964, castriste, l’Armée de libération nationale (ELN) en 1965 et l’armée populaire de libération (EPL) en 1967- opposés au « Front national » constitué par les anciens adversaires. Elles s’en prenaient à la privatisation des ressources naturelles, luttant pour le monde rural pauvre. Dans les années 1980, l’expérience Betancour ayant échoué, la violence a repris entre la guérilla, l’armée et les grands propriétaires fonciers ruraux ont commencé à organiser des groupes paramilitaires de droite pour se protéger de la guérilla. Ces organisations, dont la plus importante était l’United Self-Defense Forces of Colombia (AUC), officiellement dissoute en 2006, ont également été très génératrices de violence. Apparu à la fin des années 1960, le trafic de drogue a alimenté le conflit et est devenu lui-même producteur de violence. Assurant une grande part de la production mondiale de Coca, l’économie de la drogue a colonisé les institutions et provoqué une crise avec les Etats Unis, soutien du régime, au cours des années 1990. Les deux grandes organisations de la drogue, le cartel de Medellin et celui de Cali ont été démantelés mais leur éclatement, en environ 300 groupes de trafiquants, a compliqué la lutte contre la drogue. En dépit du soutien du « plan Colombie » lancé par B Clinton en 1998 et de ses méthodes « musclées », A. Uribe, au pouvoir entre 2002 et 2010, n’est pas parvenu à réduire les FARC ni à en finir avec la culture du Coca et les relations avec les voisins vénézuélien, surtout, et équatorien, accusés de soutenir les FARC se sont détériorées. Ces relations se sont améliorées sous la présidence de M. Santos et les négociations de paix entre le gouvernement colombien et les FARC ont commencé en septembre 2012. Toutefois, s’il constituait un beau résultat, l’accord de paix du 24 août 2016 avait échoué lors du référendum du 2 octobre et la nécessité de renégocier un accord modifié, acquis le 12 novembre 2016, montrait que cet accord était loin de faire consensus sur le plan national. L’année 2017 fut bonne. Mais nous avions toutefois estimé qu’il faudrait encore du temps, une avancée de la négociation avec l’ELN, une application correcte de l’accord avec les FARC, et le maintien de la politique du gouvernement au-delà de l’élection présidentielle (2018), pour que l’horizon s’éclaircisse, ajoutant que « la route devrait être longue encore ».

En 2018, la mise en œuvre de l’accord de paix de 2016 entre le gouvernement et les FARC s’est poursuivie, mais avec difficulté et des fractions dissidentes refusent de les appliquer. Par ailleurs, les groupes criminels impliqués dans le trafic de drogue et d’autres activités illégales restent très violents et continuent de menacer à la fois la population civile et les institutions gouvernementales. Le problème principal est maintenant celui des réseaux criminels de la drogue, qui s’affrontent pour le contrôle des territoires et des itinéraires du trafic. En 2016, 69% des terres de culture de coca dans le monde étaient situés en Colombie. La situation est aggravée par le fait que l’instabilité politique au Venezuela et la faible surveillance des frontières crée des zones de refuge pour les guérilleros et les criminels. Le 7 août 2018, I. Duque est devenu le nouveau président colombien. De droite et très critique de l’accord de paix avec les FARC, il a promis d’être plus dur avec les guérilleros et les organisations criminelles. Il a suspendu les pourparlers de paix avec l’Armée de libération (ELN) en septembre 2018. Le Barometer notait 8 conflits en Colombie dans son numéro de 2010, il en répertorie 11 en 2018, les deux plus violents, de niveau 4- étant celui qui oppose le gouvernement aux cartels et aux groupes paramilitaires et celui qui oppose cartels, groupes paramilitaires et groupes militants de gauche (AGC, Los Caparropos, FARC dissidents, ELN, EPL…)

La tendance esquissée en 2016 et 2017 est donc menacée et la fin de la violence reste toujours un objectif de long terme. Le classement de la Colombie dans la catégorie des conflits en voie de terminaison, même pour les FARC et le gouvernement était probablement une anticipation. Si la tendance de 2018 se confirme et, à plus forte raison s’aggrave, elle devra revenir dans la catégorie des conflits actifs.

(113) Le conflit Etats-Unis Cuba Repères

La plus grande île des Caraïbes est à moins de 150 kms des côtes de la Floride et elle verrouille le golfe du Mexique. Annexe des Etats-Unis avant même d’être devenue indépendante de l’Espagne, elle était travaillée depuis longtemps par le souci de l’indépendance. Elle ne l’obtient, en 1902, qu’avec le soutien des Etats-Unis et en subissant leur interventionnisme (amendement Platt, base de Guantanamo). L’économie de l’île et le régime de Batista sont dans les mains des Américains, quand F Castro entre en scène. Renversant l’ordre établi (réforme agraire notamment), il entre inévitablement en conflit avec les intérêts des Etats-Unis et se rapproche aussi de l’autre puissance de l’ordre bipolaire, Moscou.

Très rapidement se constitue un des conflits qui ont marqué la guerre froide. Ce conflit est ponctué de quelques épisodes majeurs – le débarquement de la baie des cochons en 1961, les missiles soviétiques et la crise de Cuba en 1962. Après qu’ils aient été retirés, viendra le temps de l’embargo et de la mise à l’index de Cuba (exclusion de l’OEA en 1962). Cuba est très caractéristique de la volonté des Etats-Unis de contrôler l’espace qui les entoure et même les Amériques, et d’y interdire l’implantation, surtout politico-militaire, d’autres puissances. Du côté cubain, cet épisode ne se résume pas à la proximité entre Cuba et l’URSS. Il exprime surtout le besoin de l’indépendance, dans un contexte difficile, la volonté de faire entendre sa voix et de participer au combat pour la libération des peuples (soutien aux guérillas en Amérique latine, chef de file du camp antiimpérialiste parmi les non- alignés, intervention militaire en Angola).

Dans une situation économique beaucoup plus difficile à l’époque de M. Gorbatchev et après la fin de l’URSS, Cuba va faire l’objet de deux renforcements de l’embargo, en 1992 (loi Torricelli) et 1996 (loi Helms-Burton), visant à faire chuter le régime. Il y résistera, en procédant à des réformes, en supportant des conditions plus dures et au prix des tensions dans une société devenant moins égalitaire. A aussi contribué à sauver le régime de Castro le

tournant à gauche de l’Amérique latine à la fin des années 1990. Il offrira un rôle à F Castro, en association avec H Chavez avec la création de l’Alternative bolivarienne pour les Amériques. Cet espace est consolidé avec l’arrivée au pouvoir d’E Moralès et la montée en puissance économique de la Chine. Cuba, alors que son leader vieillit et cède sa place à son frère, a retrouvé, une place et même un rôle.

C’est dans ce contexte que se produira le rapprochement avec les Etats-Unis, après l’élection de B Obama. Il sera marqué, fin 2014 par la reprise des relations diplomatiques, puis en juillet 2015 par le rétablissement des ambassades et en mars 2016 par la visite officielle à Cuba du Président américain, mais pas par la levée complète de l’embargo. En revanche Cuba a été enlevé de la liste américaine des Etats parrains du terrorisme.

Ce rapprochement était bilatéral. A priori, ce sont surtout les Etats-Unis qui bougent. B Obama les adapte au nouveau contexte interaméricain et international. Il allège notamment le fardeau qui pesait sur les Etats-Unis dans leurs relations avec l’Amérique latine. Mais, pour Cuba, la normalisation est aussi un choix majeur. F et R Castro ne peuvent ignorer qu’être moins isolé signifie aussi, inévitablement, le retour d’une présence américaine interventionniste.

L’arrivée tonitruante de D. Trump, affichant sa volonté de rupture avec la politique de son prédécesseur, a interrompu cette évolution. Elle s’est traduite par diverses restrictions (sur les déplacements des Américains à Cuba, sur les échanges bénéficiant à l’armée et aux services de sécurité cubains…), sans aller jusqu’à la rupture des relations diplomatiques. Ces mesures affectent Cuba, spécialement l’essor de son tourisme. En même temps, elles donnent à Cuba, plus de temps pour s’adapter à la sortie de son isolement.

Situation en 2018

En avril 2018, la fin de l’ère Castro- Miguel Diaz-Canel, vice-président succédant à R Castro-, n’a pas infléchi la politique de D Trump. Il n’est pas inutile de signaler que ce durcissement correspond avec l‘affaiblissement de la gauche en Amérique latine, après la disparition d’H Chavez en 2013, et une véritable offensive des Etats-Unis au Venezuela, pour obtenir la fin du régime de N. Maduro. On peut cependant penser que, passée la poussée hostile à la normalisation avec Cuba, les Etats-Unis reviendront à la ligne du rapprochement. Washington ne peut ignorer que Cuba isolé pourrait représenter une opportunité pour la Chine.

II.6. Conflits dépassés

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Tableau 33. Les conflits dépassés en 2018

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