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En conflit avec le Conseil Général

B. Les accueillants : homogénéité et différenciations

5. En conflit avec le Conseil Général

Les organisations, les institutions structurées par des règles, entravent les réponses que veulent apporter les accueillants. Les agents ne sont pas compétents pour leur dire ce qu’est la compétence.

« C’est des gens qui sont sensés mais qui sont des bureaucrates. Donc, ils vont dire des choses désagréables parce qu’ils ne savent pas. Il faut pouvoir se dire, qu’ils sont limités parce qu’ils n’ont pas fait le métier, ils ne peuvent pas savoir ce que c’est. »239

« Ces supérieurs ils ont peut être eu de la théorie, ils ne connaissent rien à la pratique, ils

ne comprennent pas […] La hiérarchie veut que ça marche comme l’administratif»240

Le contrôle est légitime mais les discours sont contrastés. « C'est eux qui s'inventent des lois en plus. »241

« Une fois en neuf ans, On peut faire des choses graves. Il peut y avoir des abus et personne ne nous surveille»242

« S’il n’y avait pas de contrôle, je ne pourrai pas faire ce métier parce qu’avec les familles on peut avoir des problèmes graves. Avec ce contrôle on se sent protégé. J’ai une garantie, une responsabilité partagée. Je ne suis pas seule. On ne peut rien me reprocher, tout est clair. »243

Dans ce cas, le contrôle s’apparente à une forme de coopération en obtenant des services ce que l’on n’a pas, la caution, la sécurisation dont on a besoin.

Les services sont rarement cités comme un intermédiaire entre l’offre des accueillants qui ont besoin de travailler et la demande des personnes qui recherchent un accueil. Rien, ni personne ne garantit la proximité géographique entre le domicile de l’accueillant et celui du futur accueilli.

La fonction de tiers médiateur parait le plus souvent inexistante. Le soutien relaté par les accueillants est relatif sinon contesté. Son contenu semble ne pas avoir été clarifié. Il n’est pas légalement prévu dans les textes qui ne mentionnent pour les services du Conseil Général qu’une fonction de contrôle en direction des accueillants. Les remarques de ces

239 Accueillante, 63ans. Divorcée agréée pour 3. 240 Accueillante célibataire 55ans agréée pour 2 241 Accueillante 40 ans, mariée agrément pour 2 242 Accueillante 71ans, mariée, 1 accueilli 243 Accueillante, divorcée ,50 ans, agréée pour 2.

derniers témoignent d’une incompréhension de la position des services qui provoque colère et rancœur.

« Ils ne sont pas capables de nous trouver du travail. S’ils ne font rien à quoi bon le

règlement. Il n’y en a pas de suivi. Moi, j’aurai besoin de rien, qu’on me laisse ! Qu’on ne nous emmerde pas avec des conneries »244

« Non seulement vous vous débrouillez pour trouver des accueillis mais il faut leur faire une demande d’autorisation d’accueillir la personne. La loi ne prévoit pas ça, j’ai le droit de prendre qui je veux comme je veux. Après 5 refus, je ne suis pas passée par eux »245

« Ce n'est pas un soutien, bien au contraire ! Parce qu'ils sont là pour pinailler pour des choses qu'il n'y a pas peut être pas lieu de discuter, ils essaient de chercher un bug là où il n'y en a pas »246

« On ne nous écoute pas ça veut dire que les gens n’ont jamais confiance en vous. Elle est

là depuis 10 ans et on lui demande « tu te plais ? Tu te plais ici ? » C’est n’importe quoi ! »247

La demande d’intervention des services du Conseil Général, est rare et réservée aux situations compliquées « quand on ne peut pas faire autrement »248

La formation est également un motif d’incompréhension. À de rares exceptions, les accueillants ne sont pas demandeurs. Obligatoire, elle conditionne le renouvellement de l’agrément, on tente le plus souvent d’y échapper parce qu’elle ne tient pas compte des réalités et des contraintes d’organisation de l’accueillant. Elle se déroule sur des sites parfois très éloignés du domicile (80 kms), elle ne favorise pas le regroupement des accueillants voisins, et ne trouve pas de solution aux problèmes de remplacement. De plus, on n’utilise pas leurs savoirs qui pourraient nourrir leurs demandes.

« La plupart du temps on passe du temps à se présenter, il y a des personnes qui racontent

leur vie, et on n’apprend pas grand-chose. J’évite. Il y a des gens qui parlent beaucoup

244 Accueillant 63 ans, marié, travailleur handicapé, agréé pour 1 245 Accueillante célibataire 55ans agréée pour 2

246 Accueillante divorcée, 56 ans, 3 accueillis 247 Accueillante célibataire 55ans agréée pour 2 248 Op.cit

pour ne rien dire. Je ne vois pas l'intérêt de les rencontrer parce qu'il y en a qui fonctionne d'une façon, moi je fonctionne à ma façon. »249

« On a un devoir à mon avis, quand on est un Conseil Général, on a un devoir de rassurer les professionnels en leur donnant des éléments pour qu’ils puissent confortablement aborder le métier .Et ça on ne l’a pas ! On vous apprend comment on nettoie un bac à lessive. Je m’en fous de mon bac à lessive, de ma machine à laver. L’hygiène c’est important, mais l’accueil c’est autre chose. Je veux une formation sur comment accueillir et comment lâcher, comment accompagner sans posséder la personne »250

Chaque sujet, le contrôle des accueillants, le suivi des accueillis, la formation sont autant d’occasions pour les parties de prouver leur puissance respective, et jusqu’où chacune peut aller. Les accueillants s'efforcent d'échapper à la contrainte et tentent de faire pression pour conserver leur marge de manœuvre et leur espace de liberté en contestant la légitimité et l’expertise des services dominants. D’un côté, on a le discours institué organique, de l’autre, celui des valeurs, de la solidarité mécanique.

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