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La confiance des familles envers le médecin généraliste : une notion primordiale

C) Discussion sur les principaux résultats

3. La confiance des familles envers le médecin généraliste : une notion primordiale

Les familles de notre étude ont une grande confiance envers leur médecin généraliste. En effet, la moyenne des scores de confiance de 0 à 10 est de 8.66/10.

Ce résultat va dans le même sens que ceux obtenus dans de nombreuses études, comme par exemple la thèse de 2014 portant sur la confiance qu’ont les parents en leur médecin généraliste pour le suivi de leur enfant. Elle retrouvait que 95% des parents avaient confiance en leur médecin généraliste. (53)

L’étude de 2013 précédemment citée portant sur 1342 adultes a trouvé qu’ils accordent une confiance de 7.4/10 en leur médecin généraliste. (52)

Cette notion de confiance apparait d’autant plus primordiale qu’il s’agit dans notre étude du seul facteur statistiquement significatif ayant une influence sur le fait que les parents consultent leur médecin traitant. Plus la confiance est élevée, plus les parents le consultent concernant les difficultés scolaires de leurs enfants. Il n’y a pas eu de différence statistiquement significative avec d’autres facteurs, tels que le sexe du médecin, l’âge de l’enfant, l’âge des premières difficultés ou encore la situation familiale.

35 La thèse sur la confiance des parents envers leur médecin généraliste pour la santé de leur enfant (53) retrouve comme facteurs prédictifs de cette confiance : la capacité d’écoute et la disponibilité. Une étude réalisée dans le JAMA retrouvait que les médecins généralistes américains interrompaient leurs patients en moyenne 23 secondes après qu’ils aient pris la parole. (54) Une autre étude parue dans le BJM en 2002 montrait que lorsqu’on laisse le patient s’exprimer avec des techniques d’écoute active, 78% des patients ont exprimé leur demande en moins de deux minutes. (55)

Aujourd’hui, la compétence du médecin en termes d’écoute et de communication, est primordiale.

4. La consultation pour difficultés scolaires : une amélioration possible

Lorsque les parents ont consulté leur médecin généraliste spécifiquement pour parler des difficultés scolaires de leurs enfants, la moyenne de satisfaction de cette consultation a été de 7.15/10. Ce chiffre nous parait correct mais pourrait probablement être amélioré grâce à plusieurs facteurs comme des consultations plus longues et une meilleure connaissance des médecins généralistes sur le sujet.

Selon une étude de 2009 portant sur 55 médecins généralistes, le manque de temps pour le dépistage et le suivi des difficultés scolaires est en effet évoqué par 70% d’entre eux. (56)

Une étude menée en 2013 (57) interrogeant 91 médecins a retrouvé que seulement 5% d’entre eux estimaient leurs connaissances sur le sujet, bonnes. Pourtant, 76 % s’estimaient y être confrontés. 84% des médecins interrogés n’avaient pas connaissance des recommandations de l’HAS de 2005 portant sur le dépistage individuel de l’enfant de 28 jours à 6 ans et 73 % ne connaissaient pas l’existence des tests de dépistage tels que l’EDA, l’ERTL 4 ou l’ERTLA 6.

L’amélioration de la formation des médecins généralistes parait donc nécessaire. Dans le programme des Epreuves Classantes Nationales (ECN), un item unique traite du développement psychomoteur des nourrissons et enfants (58). Son intitulé est « Développement psychomoteur du nourrisson et de l'enfant : aspects normaux et pathologiques (sommeil, alimentation, contrôles sphinctériens, psychomotricité, langage, intelligence). L'installation précoce de la relation parents-enfant et son importance. Troubles de l'apprentissage ». Ses objectifs sont :

- Diagnostiquer une anomalie du développement somatique, psychomoteur, intellectuel et affectif.

- Repérer de façon précoce les dysfonctionnements relationnels et les troubles de l'apprentissage.

36 Cet item fait partie, avec 362 autres, des items nécessaires à connaître pour les ECN.

C'est un début pour améliorer la formation des futurs médecins. De même, la formation de pédiatrie au cours de l’internat de médecine générale évolue avec le développement de stages libéraux de pédiatrie permettant aux internes de réaliser des stages durant lesquels ils sont plus confrontés à ces thématiques de développement psychomoteur et troubles des apprentissages. Par la suite, il existe des formations pour les médecins généralistes qui souhaitent se former aux troubles des apprentissages, par exemple lors de Formations Médicales Continues (FMC). Il existe également des Diplômes Universitaires (DU) dans de nombreuses villes de France, d’une durée en générale d’un an, ouverts aux médecins généralistes et permettant une formation approfondie.

Les troubles des apprentissages étant de plus en plus étudiés et reconnus ces dernières années, des réseaux ont été créés dans de nombreuses régions avec par exemple RESODYS en Provence Alpes Cotes d’Azur, crée en 2002. Les missions de RESODYS telles que définie par l’Agence Régionale de Santé (ARS), sont : (59)

- De contribuer à la mise en place et au fonctionnement d’un réseau de soins pluridisciplinaire et pluri-partenarial destiné à améliorer la qualité de vie et l’intégration scolaire d’enfants souffrant de troubles spécifiques de l’apprentissage. - De développer des projets de recherche scientifique fondamentale et appliquée

dans le domaine de cette pathologie.

- De concevoir et organiser la formation initiale et continue des professionnels du réseau, des « Médecins Réseau », en adéquation avec les résultats des recherches scientifiques pour améliorer la prévention, et la prise en charge.

Les médecins généralistes peuvent être membre de RESODYS et ainsi faire partie de la prise en charge pluridisciplinaire des enfants en réseau.

5. Le rôle du médecin traitant

Orienter l’enfant vers des professionnels de confiance semble être l’une des missions principales du médecin généraliste pour les parents dans notre étude, ce qui est en accord avec d’autres études. (52) A l’issue de la première consultation, la grande majorité des médecins aorienté l’enfant chez un autre professionnel de santé : 63.8% des médecins ont orienté leur patient vers un ou une orthophoniste, ce qui est légèrement moins que ce qui a été retrouvé dans d’autres études où le médecin orientait plus fréquemment chez l’orthophoniste, par exemple pour 80% des médecins dans une étude de 2009. (56)

37 Cependant, moins de la moitié des parents pensent que le médecin généraliste doit jouer un rôle central, de coordination alors que cette notion de coordination nous parait primordiale et faire entièrement partie du rôle du médecin généraliste.

Selon la WONCA (l’Organisation Mondiale des Médecins Généralistes), les compétences du spécialiste en médecine de famille sont bien définies et sa mission n’est en aucun cas d’acquérir des connaissances étroites sur la dyslexie ou la dyspraxie. En tant que premier contact avec le système de soins, le médecin généraliste doit identifier tout trouble ou retard d’acquisition ou de développement de l’enfant et utiliser de façon efficiente les ressources du système de santé afin de pouvoir orienter vers un autre confrère ou un centre spécialisé lorsqu’un trouble est suspecté. (60)

Toujours d’après la WONCA, le rôle de coordination est un point clé de l’efficience des soins de santé de première ligne de bonne qualité. Lorsque le médecin généraliste revoit l’enfant, son rôle serait d’effectuer la synthèse des différents professionnels consultés, réexpliquer aux parents et à l’enfant la prise en charge qui a été entreprise, jouer un rôle de soutien pour la famille. Il doit ainsi être informé, avec l’accord des parents, des bilans effectués par les médecins spécialistes.

Développer le travail d’équipe autour du patient avec des professionnels de santé permet d’améliorer la qualité des soins.

Un parcours de soins coordonné a été mis en place par la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie. (61) Il consiste à confier au médecin traitant la coordination des soins pour le suivi médical d’un patient. Les patients ont le libre choix de leur médecin traitant et doivent ensuite le déclarer à leur caisse d'Assurance Maladie. Ils peuvent changer de médecin

traitant à tout moment. Si un patient n’a pas déclaré de médecin traitant, ou s’il consulte un

autre médecin sans avoir été orienté par son médecin traitant, il est hors du parcours de soins coordonnés et sera moins bien remboursé par l’Assurance Maladie. Par cette réforme, le système de soins a été recentré autour du médecin généraliste, ce qui participe à la

revalorisation de la médecine générale. Depuis janvier 2016 la désignation d’un médecin

traitant a été étendue aux enfants de moins de 16 ans. Sur les 2 millions d’enfants qui étaient suivis par un médecin traitant au 31 décembre 2017, 88 % l’étaient par un médecin généraliste, 11 % par des pédiatres, le 1 % restant étant suivi par un médecin d’une autre spécialité. (62) Un autre rôle du médecin généraliste que ceux que nous avions cités dans les réponses du questionnaire a été souligné à plusieurs reprises : soutenir le reste de la famille. Un parent écrit « autre rôle : se préoccuper de la santé du reste de la famille ! Car se rendre à tous les rendez-vous médicaux, les prises en charge diverses, impacte la santé des parents et des autres enfants. En tant que parents, on priorise son enfant et on ne fait aucun dépistage pour

38 nous. » Un autre dit « nous soutenir et nous réexpliquer le langage des spécialistes. Expliquer à l’enfant son trouble, ce qu’aucun spécialiste n’a fait. » Le médecin généraliste doit ainsi être, comme défini dans la WONCA, un médecin de famille.

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VI. Conclusion

De nombreux enfants sont en difficultés scolaires et ont un parcours chaotique. Les conséquences sont nombreuses : anxiété, faible estime de soi, dépression, conflits familiaux, insertion socioprofessionnelle difficile. Les causes de ces difficultés scolaires sont variées, souvent intriquées, et de nombreux professionnels médicaux et paramédicaux peuvent intervenir.

Nous avons voulu, en décrivant le parcours de ces enfants à travers un questionnaire rempli par 122 parents, estimer la place qu’avait eue leur médecin généraliste.

Dans notre étude, les premières difficultés scolaires ont été repérées le plus souvent par les parents et les enseignants. Le premier professionnel de santé consulté a été l’orthophoniste pour 44,3% des enfants, le médecin généraliste en seconde position pour 25.4%. Un diagnostic a été établi pour 92 enfants et cela a pris un peu plus de deux ans en moyenne. La majorité des parents estime que leur médecin généraliste n’a pas joué de rôle central dans le parcours de leur enfant. 67 ne l’ont pas consulté, évoquant avoir été orientés chez l’orthophoniste directement par l’enseignant ou ne le pensant pas compétent dans ce domaine.

Le seul facteur statistiquement significatif ayant amené les parents a consulté leur médecin généraliste pour les difficultés scolaires de leurs enfants est la confiance envers ce dernier. Notre étude montre que plus la confiance envers le médecin est élevée, plus ils le consultent.

Médecin de premier recours, le médecin généraliste doit ainsi être un acteur privilégié de dépistage, de prévention et de coordination. Il doit repérer et dépister les anomalies, examiner l’enfant, éliminer les diagnostics différentiels, orienter vers les professionnels adaptés, informer l’enfant et sa famille, les accompagner, et coordonner la prise en charge.

Avec l’intérêt porté aux troubles des apprentissages ces dernières années, la meilleure connaissance qui en découle, la création de réseaux et la valorisation de la médecine générale, nous pouvons espérer l’amélioration du parcours de soins de ces enfants dans les années à venir. Pour cela, nous pouvons également imaginer qu’une meilleure sensibilisation du rôle du médecin généraliste dans les difficultés scolaires pourrait être véhiculée auprès des parents, par exemple dans les médias ou via une affiche dans la salle d’attente des cabinets médicaux.

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VII. Abréviations

CIM : Classification Internationale des Maladies

OMS : Organisation Mondiale de la Santé

DSM : Diagnostic and Statistical manual of Mental disorders

CFTMEA : Classification Française des Troubles Mentaux de l’Enfant et de l’Adolescent

SLI : Specific Language Impairment

HAS : Haute Autorité de Santé

EHPI : Enfant à Haut Potentiel Intellectuel

QI : Quotient intellectuel

WISC : Wechster Intelligence Scale for Children

TED : Trouble Envahissant du Développement

TSA : Troubles du Spectre Autistique

TOC : Troubles Obsessionnels Compulsifs

DREES : Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques

DPL 3 : Dépistage et Prévention Langage à 3 ans

ERTL 4 : Epreuve de Repérage des Troubles du Langage à 4 ans

ERTLA 6 : Epreuve de Repérage des Troubles du Langage et des Apprentissages à 6 ans

ZUS : Zone Urbaine Sensible

CMV : Cyto Mégalo Virus

EDA : Evaluation Des fonctions cognitives et Apprentissages ULIS : Unités Localisées pour l’Inclusion Scolaire

SEGPA : Section d’Enseignement Général et Professionnel Adapté

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VIII. Annexes

A) Annexe 1 : Critères diagnostic du DSM-V : TDAH (APA, 2013)

A) Un mode persistant d’inattention et/ou d’hyperactivité-impulsivité qui interfère avec le fonctionnement ou le développement, et caractérisé par (1) et/ou (2) :

1. Inattention : Six (ou plus) des symptômes suivants ont persisté pendant au moins 6 mois, à un degré qui ne correspond pas au niveau de développement et qui a directement des conséquences négatives sur les activités sociales et académiques/professionnelles.

Remarque : les symptômes ne sont pas seulement la manifestation d’un comportement d’opposition, d’une déficience, d’une hostilité ou de l’incompréhension de tâches ou d’instructions. Pour les grands adolescents et les adultes (âgés de 17 ans et plus), au moins 5 symptômes sont exigés) :

a) Souvent ne parvient pas à prêter attention aux détails ou fait des fautes d’étourderie dans les devoirs scolaires, le travail ou d’autres activités (ex : néglige ou oublie des détails, le travail n’est pas précis) ;

b) A souvent du mal à soutenir son attention au travail ou dans les jeux (ex : a du mal à rester concentré durant un cours, une conversation, la lecture d’un texte long) ;

c) Semble souvent ne pas écouter quand on lui parle personnellement (ex : leur esprit paraît ailleurs, même en l’absence d’une distraction manifeste) ;

d) Souvent, ne se conforme pas aux consignes et ne parvient pas à mener à terme ses devoirs scolaires, ses tâches domestiques ou ses obligations professionnelles (ex : commence le travail mais perd vite le fil et est facilement distrait) ;

e) A souvent du mal à organiser ses travaux ou ses activités (ex : difficultés à gérer des tâches séquentielles ; difficultés à conserver ses outils et ses affaires personnelles en ordre ; complique et désorganise le travail ; gère mal le temps ; ne respecte pas les délais fixés) ;

f) Souvent évite, a en aversion ou fait à contrecœur les tâches qui nécessitent un effort mental soutenu (ex : le travail scolaire ou les devoirs à la maison ; pour les adolescents et les adultes, préparation de rapports, formulaires à remplir, revoir un long article) ;

g) Perd souvent les objets nécessaires à son travail ou à ses activités (matériel scolaire, crayons, livres, outils, portefeuille, clés, papiers, lunettes, téléphone mobile) ;

h) Souvent se laisse facilement distraire par des stimuli externes (pour les adolescents et les adultes, cela peut inclure passer du « coq à l’âne ») ;

i) A des oublis fréquents dans la vie quotidienne (ex : faire les corvées, les courses ; pour les adolescents et les adultes, répondre à ses appels, payer ses factures, respecter ses rendez-vous).

2. Hyperactivité et impulsivité : Six (ou plus) des symptômes suivants ont persisté

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