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f Conduire des négociations nombreuses et complexes (personnels, syndicats, médecins, directions, patients, familles, autres

I- Relever le défi de la complexité de la fonction d’encadrement à l’hôpital

III.3 Renforcer la reconnaissance statutaire et financière des cadres

I.2.2. f Conduire des négociations nombreuses et complexes (personnels, syndicats, médecins, directions, patients, familles, autres

S’il est une dimension de la fonction d’encadrement qui prend une place prépondérante, c’est bien la négociation. En effet, les cadres se retrouvent de plus en plus souvent en situation de conduire des négociations complexes avec des interlocuteurs aussi différents que leurs demandes.

On observe un déplacement de la gestion des situations de négociation vers l’encadrement. Les pôles font bouger les lignes et les jeux de pouvoir suivent cette vague. Des négociations, qui auparavant se faisaient soit entre professionnels au sein des équipes ou entre médecins eux-mêmes, soit avec les directions fonctionnelles et notamment la DRH pour les syndicats, sont maintenant du ressort des cadres de pôle. Les droits des patients et leurs attentes représentent un nouvel axe renforcé par le poids des associations et celui de la crainte de la médiatisation d’un incident mineur ou majeur. Les patients et leur famille s’adressent plus fréquemment aux cadres, premier relais de l’administration de l’hôpital, pour exprimer leur mécontentement et attendent des réponses concrètes de leur part, à défaut d’en recevoir de la part du corps médical et de l’administration.

Mais le changement le plus marquant et le plus difficile à gérer reste le domaine de la gestion des ressources humaines. Le rapport au travail a beaucoup changé et les professionnels mettent au premier plan leur vie personnelle. On laisse naturellement le cadre gérer les trous dans le planning, l’absentéisme de dernière minute.

Les directions fonctionnelles s’appuient fortement sur les connaissances et expertises des cadres. Ils en font des interlocuteurs privilégiés et les interpellent en première intention pour négocier des dossiers sans pour autant les impliquer dans la décision finale.

Pour toutes ces raisons, les cadres sont, de fait, très souvent soumis à des injonctions paradoxales qui complexifient les négociations et n’ont pas nécessairement été préparés à cela.

Invisibles et pourtant au cœur de l’organisation, les cadres vivent les changements liés aux transformations de l’hôpital. La pression des demandes de l’institution et des patients, la logique de la performance, l’attente des équipes, sur fond de nouvelles règles d’organisation et de fonctionnement des structures, renvoient plus que jamais au noyau dur de la fonction d’encadrement, à la richesse irremplaçable de l’alliance entre qualités personnelles et aptitudes professionnelles. Qualités personnelles autour de l’écoute, de la disponibilité pour son équipe, de la valorisation du travail des collaborateurs, de la rigueur déontologique et aptitudes professionnelles autour de l’acceptation et la gestion de l’incertitude, de la capacité à s’organiser, à prendre la mesure des contraintes, à se créer des marges de manœuvre dans une organisation en tension.

Ceci conduit à porter un nouveau regard (c’est en tout cas celui que la mission a posé) sur le métier de cadre à l’hôpital, sur ses dimensions déjà à l’œuvre mais mal connues et sur celles qui vont naître : une extension du champ d’action, de plus grandes marges à négocier pour adapter l’organisation aux résultats attendus pour les soins des patients, une nouvelle manière d’écouter, d’analyser, de proposer et de décider. Pour chacune des dimensions classiques du métier de cadre, manager, formateur et expert, apparaissent de nouveaux enjeux et donc de nouvelles compétences à développer.

II Construire et développer les compétences des cadres hospitaliers

Sur la formation des cadres, le débat était déjà ouvert. La mission l’a réactivé. C’est le sujet qui a le plus suscité de prises de parole sur le forum internet, il a toujours été très présent dans les débats régionaux et au cours des auditions. Les positions ne sont unanimes ni sur le constat, ni sur les évolutions à porter. Mais rares sont les demandes de ne rien modifier en ce domaine car l’accord sur la perception des changements majeurs pour l’hôpital et pour les cadres (cf. chapitre 1) interroge en conséquence les compétences des cadres, et donc la manière dont ils sont sélectionnés et préparés à exercer leur métier, ainsi que la possibilité de trouver tout au long de leur vie les ressources pour continuer à assumer leurs responsabilités.

La formation initiale aurait pu apparaître comme le point clef des propositions en ce domaine. Mais ce n’est pas le point de vue que la mission a développé en se situant pleinement dans l’approche par les compétences telle que les formateurs eux-mêmes l’expriment aujourd’hui.

La logique compétence et la logique curriculum doivent se substituer à terme à la seule logique connaissance qui, pendant de longues années, a été le paradigme organisateur des parcours de formation. Cette logique présupposait que l’acquisition des savoirs constitués suffisait à un individu, après l’obtention d’un diplôme, pour occuper un poste avec une efficacité à peu près garantie. Dans l’approche par les compétences, la construction et le développement de celles-ci ne relèvent pas seulement de la formation mais résultent de parcours professionnalisants. Une organisation dont la structure et le fonctionnement favorisent les apprentissages collectifs en développant une logique de professionnalisation, est dite une « organisation apprenante ». Dans une entreprise apprenante s’opère une réflexion intellectuelle qui crée et développe la compétence collective. « Ce sont l’intensité réflexive à l’événement et la diversité des événements auxquels un individu peut être confronté qui engendrent une expérience réellement transposable, qui génèrent un apprentissage » (ZARIFIAN Ph, 2001). Les propositions de la mission concernent non seulement les formations initiales et continues, mais aussi les modalités de détection des futurs cadres, l’accompagnement des cadres par des ressources externes en conseil et expertise, la recherche en management ainsi que l’évaluation des pratiques professionnelles managériales comme incitation à un apprentissage réflexif continu. En conclusion de ce chapitre, nous proposons un dispositif pour mettre en œuvre ces transformations.

Tout en identifiant les questions spécifiques posées à certaines filières professionnelles, ces propositions qui s’adressent à tous les cadres hospitaliers doivent aussi contribuer à créer « un groupe homogène doté de connaissances communes et de représentations partagées » (Charles Gadéa et Sophie Divay, 2007). Au-delà des seuls cadres hospitaliers, ce sont tous les « managers » des hôpitaux, directeurs et médecins compris, que la mission imagine dans une vision partagée et associe donc dans le développement des compétences d’encadrement.

II.1 Repérer les futurs cadres

Alors que l’extension de la dimension managériale (cf. 1.3) pour les cadres fait appel à des capacités comportementales de plus en plus nombreuses, les hôpitaux ne se donnent pas suffisamment les conditions de détecter des talents de cadres. Pourtant, cette détection devrait pouvoir largement être mise en œuvre dès qu’il s’agit de concours interne et a fortiori lorsque qu’une ancienneté professionnelle est exigée pour se présenter au concours, comme c’est le cas pour les cadres de santé. Or, même pour ces derniers, repérer les personnes susceptibles de devenir cadres, tester leur capacité et les accompagner dans ce changement ne se fait pas systématiquement. La systématisation des « faisant fonction de cadres », selon l’appellation consacrée et discutable, qui devrait permettre de tester en « grandeur réelle » des capacités à encadrer, apparaît plus souvent comme la conséquence d’une difficulté à recruter des cadres que comme l’effet d’une politique de détection de potentiels de cadres.

La mission préconise de mettre fin à la position bancale de « faisant fonction de cadre » et de rendre systématiques des mises en situation permettant de vérifier les réelles dispositions à manager dans toutes les démarches de promotion interne professionnelle conduisant à l’encadrement.