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Depuis 2001, les verres autonettoyants (SCG) Activ et Bioclean sont commercialisés par les sociétés européennes Pilkington (GB) et Saint Gobain (F), spécialistes verriers. Ces verres sont basés sur les propriétés photocatalytiques et superhydrophiles d’une couche

sub-micronique de photocatalyseur TiO2 déposée à leur surface. Sous irradiation UV (solaire),

TiO2 réagit avec l’oxygène et l’eau de l’atmosphère pour produire des radicaux libres (OH,

O2•-, …), capables d’induire des réactions d’oxydo-réductions. Ainsi, ces espèces éliminent

les salissures organiques adsorbées à la surface du verre par combustion lente à température ambiante. De plus, la photogénération de ces radicaux induit simultanément un phénomène de

« superhydrophilie » à la surface de la couche de TiO2, qui participe à la propriété

autonettoyante des verres, en présence d’eau (pluie).

Dans le cadre du projet européen « Self-Cleaning Glass » (6ème PCRD), plusieurs

laboratoires européens dont IRCELYON (Institut de Recherches sur la Catalyse et l’Environnement de Lyon) collaborent avec les deux groupes industriels Saint Gobain et Pilkington afin d’étudier les propriétés de surface de ces vitrages. L’objectif du projet « Self-Cleaning Glass » a été de définir un test de standardisation pour évaluer les propriétés autonettoyantes. Dans ce cadre, notre travail a consisté à mieux comprendre les phénomènes

d’interaction entre la fine couche de TiO2 et les salissures réelles, ainsi que les mécanismes

physico-chimiques photocatalytiques impliqués.

L’étude bibliographique sur la nature des polluants responsables de la salissure des vitrages, nous a permis de sélectionner différents composés pour notre étude, notamment

l’acide stéarique C17H35COOH (AS), choisi comme molécule modèle représentative des

salissures « grasses ».

Le test défini pour évaluer les propriétés photocatalytiques des verres autonettoyants consiste à déposer la molécule modèle sur le substrat de verre préalablement nettoyé et de la dégrader sous irradiation UV en suivant son évolution par spectroscopie FTIR. Le dépôt est réalisé par spin-coating afin d’obtenir des dépôts se rapprochant le plus des couches réelles de polluants.

Nous avons tout d’abord établi un étalonnage de l’épaisseur de la couche polluante déposée à la surface de l’échantillon de verre par la technique de Langmuir-Blodgett. La corrélation entre la mesure FTIR des bandes de l’acide stéarique et le nombre de couches déposées par la technique de Langmuir-Blodgett a permis de déterminer l’épaisseur du dépôt de polluant en nanomètre. La vitesse de dégradation du polluant a pu alors être exprimée en

nanomètre par minute. Il est à noter que l’épaisseur de la couche d’acide stéarique n’influence pas ou peu la vitesse de dégradation du polluant au contact du verre autonettoyant pour la gamme d’épaisseur de 7 à 150 nm.

L’influence de différents paramètres sur l’efficacité photocatalytique des verres autonettoyants a été étudiée.

Le prétraitement de l’échantillon de verre autonettoyant avant utilisation, notamment le traitement sous irradiation UV, a un effet important sur l’activité photocatalytique et la propriété superhydrophile du SCG. Afin d’obtenir un nettoyage permettant la meilleure activité photocatalytique et une grande mouillabilité de la surface, le traitement sous irradiation UV doit être réalisé en présence d’UV-C.

Il a été démontré que l’augmentation de la température et de l’intensité du flux a un effet positif sur les performances photocatalytiques des verres autonettoyants. La sélection de la

gamme de longueurs d’onde d’irradiation est très importante, puisque les photons émis dans

les UV-C sont plus efficaces que ceux émis dans les UV-A. Cependant, l’activité

photocatalytique du verre dépend de la capacité de la couche de TiO2 à absorber les photons.

En présence d’UV-C, Bioclean est plus efficace qu’Activ, alors que le phénomène est inversé avec les UV-B, Activ étant plus efficace que Bioclean. De plus, certains composés peuvent être sensibles aux UV-C et se dégrader par photochimie, notamment les molécules aromatiques (bleu de méthylène).

Le test principalement utilisé pour la caractérisation des performances photocatalytiques des verres autonettoyants est le test en phase adsorbée avec l’acide stéarique afin de se placer dans les conditions les plus représentatives des conditions réelles d’application des vitrages. Cependant, trois autres tests ont été employés afin de compléter notre étude : deux tests en phase aqueuse et un test en phase gazeuse. Les polluants dégradés sont l’acide malique (test standard du laboratoire) et le bleu de méthylène en phase aqueuse, l’acétylène en phase gazeuse. La gamme de longueurs d’onde d’irradiation UV a également été étudiée avec les deux tests en phase aqueuse. L’influence sur l’activité photocatalytique des verres est similaire dans les trois cas. Néanmoins, dans le cas de l’acide malique sous irradiation UV-A et B, la différence d’efficacité entre les deux verres autonettoyants est moins marquée que dans les autres cas ; tandis que dans le cas du bleu de méthylène, aucune différence n’a été observé entre les deux verres sous irradiation en présence d’UV-C.

De nombreux contaminants de nature inorganique ont été identifiés sur les vitrages lors de l’étude des salissures par le LISA (Laboratoire Interuniversitaire des Systèmes

Atmosphériques, Université Paris 12), partenaire du projet. Leur impact sur les propriétés

photocatalytiques a été étudié en prenant pour modèle le sulfate de calcium (CaSO4, 2H2O),

l’un des plus abondants contaminants atmosphériques trouvé à la surface des verres exposés à l’église St Eustache (site de test du LISA à Paris). La présence de ce sel diminue nettement les performances autonettoyantes lorsque celui-ci est en contact direct avec la couche photocatalytique.

L’étude de l’effet du vieillissement en chambre climatique de Bioclean a été réalisée avec le test de dégradation d’AS. Quelles que soit les conditions de vieillissement (haute humidité, brouillard salin ou attaques acides) du verre autonettoyant, très peu d’impact sur ses performances photocatalytiques a été noté.

Par ailleurs, nous avons caractérisé les propriétés superhydrophiles de la couche de

TiO2 par la mesure de l’angle de contact d’une goutte d’eau à la surface du substrat. Celui-ci

est de l’ordre de 50-60 degrés avant irradiation de la surface et de 10 degrés après irradiation sous UV pour les verres autonettoyants. La superhydrophilie de la surface n’est cependant pas un phénomène permanent. Le temps de stockage entre le prétraitement sous UV et le dépôt est un paramètre important à prendre en compte lors du développement d’un test standard.

L’étude de la dégradation de différentes familles de polluants a été réalisée afin de corréler la nature du polluant aux performances photocatalytiques des verres autonettoyants. Les vitesses de dégradation des différents composés de la famille des acides gras, des alcanes et des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) ont été étudiées en fonction de la longueur de chaîne hydrocarbonée ou du nombre de carbones. Les molécules les plus petites sont les plus rapidement dégradées. De plus, les alcanes et les acides gras ont une vitesse de disparition plus importante que les HAP.

Une couche de polymère linéaire à base d’acide polyacrylique (PAA) a également été dégradée. Cependant, la diminution du signal FTIR du PAA ne permet pas de déterminer si le

composé organique est complètement dégradé, le verre absorbant en dessous de 2200 cm-1.

Actuellement, les standards nationaux et/ou internationaux dédiés aux verres autonettoyants sont basés uniquement sur les qualités optiques de ces produits. Il n’existe pas encore de tests standards sur les propriétés autonettoyantes.

Notre travail a permis de mettre en évidence les paramètres importants à prendre en compte lors de la mise en place d’un test standard, notamment le prétraitement du verre, les

conditions d’irradiation, la température, la nature du polluant, le type de réaction (phase adsorbée, aqueuse ou gazeuse) et la présence de contaminant inorganique. Il est donc nécessaire de définir l’objectif exact du test standard afin d’établir la liste des paramètres appropriés. Le phénomène autonettoyant correspondant aux propriétés photocatalytiques,

mais aussi superhydrophiles d’une couche de TiO2, est très complexe. Aussi, un test standard

sur la fonction autonettoyante sera différent de celui sur les performances photocatalytiques des verres.