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Face à l’augmentation exponentielle du trafic sur les réseaux (particulièrement sur Internet) et les applications de plus en plus gourmandes en ressources, les opérateurs ne peuvent plus se contenter du surdimensionnement pour assurer une bonne qualité d’expérience à leurs clients et aux utilisateurs finaux. Il y a deux raisons à cela : le surdimensionnement n’assure aucune garantie dans le pire des cas, alors que certaines applications ont besoin de cette garantie ; et l’augmentation continuelle de la capacité des réseaux (qui est la principale ressource, et la plus contrainte) se ralentit et ne contrebalance plus l’augmentation du trafic.

Une gestion plus intelligente des ressources réseau est nécessaire. Une solution possible est de définir des garanties de QoS et les offrir en tant que produit à valeur ajoutée. Cette solution permettrait d’optimiser l’utilisation des ressources, mais également de créer une nouvelle source de revenus pour les opérateurs. En effet, la plus grande partie des revenus générés par le réseau est récupérée par les fournisseurs de services et de contenus. Alors que la plus grande partie des investissements est assurée par les opérateurs et les domaines de transit afin de fournir une capacité suffisante. La QoS monnayé peut leur assurer un retour sur investissement et ainsi les inciter à améliorer la capacité des réseaux.

Le déploiement de la QoS au sein d’un même domaine est techniquement possible. Plusieurs mé-canismes sont disponibles pour l’assurer. Mais dans un contexte inter-domaine, ce déploiement s’avère beaucoup plus complexe. La principale difficulté étant les intérêts économiques divergents des domaines, dont la conséquence est une absence de coopération technique. Or, assurer la QoS est impossible sans coopération. Le projet européen ETICS a défini plusieurs modèles possibles pour une coopération entre les domaines afin de permettre le déploiement d’une QoS en inter-domaine. Différentes solutions sont proposées selon le degré de confiance et l’implication des différents domaines. Ces solutions se basent sur la négociation de SLA, en centralisé ou en distribué et selon plusieurs scénarios. C’est dans ce cadre que les contributions de la thèse se situent. La première étant de proposer des méthodes de calcul de stratégies optimales pour les domaines qui fournissent les SLA, que ce soit de manière exacte ou en utilisant des algorithmes d’apprentissage comme dans le chapitre 2, ou bien en adaptant les méthodes d’apprentissage à la prise en compte de la réputation des domaines comme dans le chapitre 3. Nous avons également proposé des algorithmes polynomiaux pour le calcul de chemins dans des réseaux hétérogènes où les domaines utilisent différents protocoles et où il faut prendre en compte l’encapsulation de certains protocoles dans d’autres. Ces solutions seront détaillées dans les chapitres 4 et 5.

Après avoir défini la QoS et présenté certains mécanismes de déploiement en intra-domaine, nous avons rappelé dans ce chapitre le fonctionnement des réseaux inter-domaine (principalement Internet) aujourd’hui, aussi bien sur le plan économique que technique et protocolaire. Nous avons expliqué les difficultés de déploiement de la QoS en inter-domaine et les possibles solutions proposées par le projet ETICS. Enfin, nous avons placé les contributions de cette thèse dans ce contexte. Les chapitres suivants détaillerons ces contributions.

Première partie

Négociation de SLA dans les réseaux

inter-domaine

2

Négociation de SLA

2.1 Introduction

Dans la première partie de cette thèse, nous nous intéressons au problème de la négociation de SLA du point de vue du domaine fournisseur. Cela consiste pour lui à choisir la meilleure offre à faire en réponse à une requête de QoS venant d’un client, meilleure dans le sens où elle maximise les revenus à long terme du domaine fournisseur. Plusieurs paramètres sont à prendre en compte : le prix du SLA, sa probabilité d’échec, les offres des concurrents, la fonction de choix du client, etc. Ces paramètres ne sont pas forcément indépendants, ce qui rend le problème plus complexe. De plus, le choix d’une offre à l’instant présent peut influer sur les paramètres des négociations futures (typiquement, le provisionnement d’un SLA et sa consommation de ressources influent sur la probabilité d’échec des SLA futurs). Dès lors, comment déterminer une stratégie qui maximise les revenus à long terme du ou des domaines fournisseurs ?

Les situations où le fournisseur est en monopole et la situation où plusieurs fournisseurs sont en concurrence n’est pas la même. Dans le premier cas, il s’agit d’un problème d’optimisation, sachant que le client n’a pas le choix car il ne reçoit qu’une seule offre. Dans le second cas, les stratégies optimales sont différentes si les fournisseurs sont égoïstes où s’ils collaborent.

En posant des hypothèses simples sur certains paramètres (durée et prix des SLA, état des ressources, probabilités d’échec), le choix de stratégie peut se modéliser en un problème d’optimisation classique : le problème du cycle de poids moyen maximum. Trouver un tel cycle dans le graphe des états du fournisseur permet de trouver une stratégie optimale. Cette méthode permet également de déterminer les stratégies optimales de plusieurs fournisseurs s’ils collaborent. Si les fournisseurs sont égoïstes, les stratégies op-timales peuvent générer moins de revenus qu’en cas de collaboration. Nous montrons que la différence peut être arbitrairement grande.

Les méthodes citées ci-dessus présentent néanmoins plusieurs inconvénients : elles ne sont pas scalables pour un grand nombre de SLA et elles nécessitent de connaître parfaitement tous les paramètres du réseau. Elles ne peuvent donc pas être implémentées à grande échelle. Une solution ne nécessitant pas de connaître tous ces paramètres et passant à l’échelle est l’utilisation d’algorithmes d’apprentissage. Ces algorithmes ne se basent que sur l’historique des négociations de SLA pour « apprendre » quelle offre faire selon les situations. Nous avons adapté et implémenté trois algorithmes d’apprentissage (Learning Reward Inaction, Q-Learning et SARSA) avec différentes politiques. Les simulations montrent que face à un client qui n’apprend pas, ces algorithmes convergent très vite vers la stratégie optimale. Dans le cas où deux fournisseurs concurrents utilisent les algorithmes d’apprentissage, quelques politiques se montrent meilleures que d’autres mais il n’y a pas d’ordre total concernant l’efficacité.

Ce chapitre est organisé de la manière suivante : la section 2.2 rappelle le problème ainsi que quelques travaux antérieurs dans le domaine. La section 2.3 présente le modèle que nous utilisons pour la négo-ciation de SLA. La section 2.4 étudie le cas d’un client et d’un fournisseur en situation de monopole. La section 2.5 étudie le cas où deux fournisseurs concurrents collaborent et le cas où ils sont égoïstes. La section 2.6 discute des limites des méthodes utilisées. La section 2.7 présente les différents algo-rithmes d’apprentissage et leur adaptation au problème de négociation de SLA. La section 2.8 compare ces algorithmes grâce à des résultats de simulations. Enfin, la section 2.9 conclut le chapitre.

Figure2.1 – Processus de négociation de SLA.

2.2 Négociation de SLA

2.2.1 Définition du problème

Rappelons que nous nous intéressons au problème de la négociation de SLA du point de vue du domaine fournisseur de SLA en nous plaçant dans le scénario suivant : le client envoie une requête demandant une certaine QoS pour une durée déterminée, le domaine fournisseur choisit une offre parmi ses SLA pré-calculés et l’envoie, ainsi que son prix, au client. Si le client reçoit plusieurs offres de différents domaines fournisseurs, il en choisit une et en informe le fournisseur. Si le client ne reçoit qu’une seule offre, il l’accepte forcément, le fournisseur est en situation de monopole. Le SLA est ensuite instancié. La figure 2.1, déjà présentée en chapitre 1 et replacée ici par commodité, illustre ce processus.

Ce processus peut se placer dans plusieurs scénarios envisagés par ETICS :

– Dans un scénariopull distribué, et particulièrement dans un processus en cascade, un domaine est d’abord fournisseur du domaine qui le précède, puis à son tour client du domaine qui le suit. – Dans un scénariopushtotalement centralisé, le rôle du client sera tenu par l’entité neutre qui envoie

une requête aux domaines. Chacun d’eux choisit un SLA et le propose à l’entité neutre.

– Dans un scénario push centralisé par domaine, le processus de négociation de SLA se produit une seule fois entre le client et le domaine voisin qui agrège les offres.

Bien que placé dans différents scénarios, le processus de négociation de SLA est le même. Comme les domaines peuvent être des clients et des fournisseurs, nous distinguerons le domaine fournisseur en l’appelantNetwork Service Provider (NSP) dans la suite de cette thèse.

2.2.2 Négociation de SLA et prise en compte du risque d’échec

Le problème de négociation de SLA et la prise en compte du risque d’échec dans l’allocation de ressources sont deux problèmes généralement traités séparément. Dans [53], Groléat Et Pouyllau pro-posent l’utilisation d’algorithmes d’apprentissage pour la négociation de SLA. Suksomboon et al.[109] analysent le problème de négociation de SLA par une approche basée sur la théorie de jeux. Ils spécifient les stratégies qui permettent d’atteindre un équilibre dans certains cas.

En ce qui concerne la prise en compte du risque d’échec dans l’allocation de ressources, Xiaet al.[117] proposent une stratégie de provisionnement qui minimise le risque de violation de SLA et permet le

calcul de chemins à risque minimum dans les réseaux WDM14. Les auteurs stipulent que la prise en compte statistique de la disponibilité d’un chemin n’est pas suffisante pour minimiser le risque d’échec. Ils proposent de prendre en compte des paramètres plus pertinents comme les différents types d’échecs, le seuil de disponibilité souhaité, etc.

Ces travaux ne font pas la relation entre la négociation de SLA (compétition pour être sélectionné par le client) et stratégie de provisionnement à long terme (comment minimiser le risque d’échec des SLA). En modélisant la probabilité d’échec par une fonction des ressources déjà provisionnées, la négociation de SLA peut se voir comme un problème d’optimisation.

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