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Nous avons pu constater, lors de l’analyse des données, qu’il n’y avait pas de différences significatives entre les enseignants 1-2 Harmos et 3-4 Harmos, c’est pour cela que nous ne l’avons pas précisé. Nous avons remarqué que les enseignants interrogés partageaient souvent le même point de vue. Toutefois, les arguments émis comprenaient quelques nuances. Au terme de notre analyse, nous pouvons dire que les hypothèses que nous avions émises ne correspondent pas entièrement à nos représentations au début de cette analyse.

Les pratiques sont très variées et concernent plusieurs domaines, elles sont transdisciplinaires. Néanmoins, elles ne sont pas pratiquées avec la même intensité. Il est frappant de constater que la petite souris n’a pas ou peu sa place dans la classe alors que nous pensions qu’elle y était essentielle. Comme le relève Pilot (2004), ce choix et l’accès à cette organisation de classe est inégale, car cela dépend du choix pédagogique de l’enseignant.

Nous avions émis l’hypothèse que ces personnages étaient des figures emblématiques utilisées par les enseignants alors qu’en réalité, il ne s’agit que d’un prétexte pour travailler les objectifs du plan d’études, les motiver et leur faire plaisir. Comme le précisent Archambault & Chouinard (2009, p. 205), face à un élément qu’il connaît et qui le touche, l’élève sera plus enclin à participer et entrer dans les apprentissages, ce qui pourrait expliquer une telle pratique.

Nous nous sommes rendus compte que la majorité des enseignants interrogés n’ont pas conscience des enjeux et des valeurs véhiculés par ces personnages surnaturels, ni de leur influence sur le développement. Par ailleurs, lorsque les enseignants sont questionnés sur ce sujet ils ne sont pas à l’aise et ne peuvent pas affirmer avec certitude leur propos, “je ne sais pas s’il a vraiment des valeurs, parce que bon, le père Noël ça ressemble aussi beaucoup au Coca” (Ens 1) ; “je ne sais pas si ça a une réelle influence sur leur développement en tant que tel, après c’est assez porteur” (Ens 10). Contrairement à ce que pensent les enseignants, la petite souris et le père Noël influencent réellement le développement de l’enfant. Larivée, Sénéchal et Baril (2010) mentionnent que la rupture avec le personnage surnaturel est une étape dans le développement de l’enfant qui permet le passage au monde adulte. Bien que ces traditions soient aujourd’hui moins bien conservées, leur considération permet d’avoir un aperçu sur le développement cognitif des enfants et leur participation active à la culture (Breen, 2004). Finalement, tous les enseignants s’accordent sur l’importance des rituels communs pour aider l’enfant à structurer son temps et ses apprentissages dans la journée. Ces rituels permettent de rassurer l’enfant, Hatchuel (2005) dit qu’ “une importante fonction des rituels consiste à marquer la séparation des temps et des espaces en instituant notamment les limites entre l’école et la maison” (p. 94). “moi, je pense que ça les rassure quand ils arrivent à l’école. Ils se sentent en sécurité. Ils savent comment ça va se passer” (Ens 5).

5. Conclusion

Notre problématique de départ était de comprendre les pratiques enseignantes au sein des différentes classes interrogées autour des personnages surnaturels. Nous voulions comprendre les divergences d’opinions, d’arguments et de pratiques les concernant. Est-ce que les enseignants avaient conscience de la raison pour laquelle ils mettaient en place des rituels autour de ces personnages et quels en étaient les impacts ? Cette recherche avait également pour but d’acquérir des compétences et des connaissances pour nos futures pratiques enseignantes.

En lien avec nos a priori, nous avons constaté que les pratiques et les avis sont divergents. Chaque enseignant a ses propres façons de faire concernant le père Noël et la petite souris, mais certains éléments se rejoignent grâce aux représentations universelles de ces personnages : le père Noël et la petite souris qui apportent des cadeaux.

Contrairement à nos hypothèses, nous avons constaté que les enseignants ne considéraient pas le père Noël et la petite souris comme un facteur développemental mais uniquement comme un prétexte visant la motivation des élèves à rentrer dans les apprentissages. D’autre part, ils utiliseront le père Noël et la petite souris comme un thème générique (les fleurs, la ferme, la mer, le printemps, etc.) pour atteindre les objectifs du plan d’études.

Nos idées reçues sur la petite souris ont été bouleversées lorsque nous avons découvert qu’elle n’avait pas réellement sa place en classe à cause de son appartenance à la sphère privée (le père Noël aussi pourtant…) et aux diverses représentations et rituels autour de cette croyance (fée des dents, corbeaux, petite souris, …).

Nous avons constaté que le père Noël est utilisé majoritairement dans les branches principales (mathématiques, français, arts visuels et activités créatrices et manuelles), tandis que la petite souris ne se retrouve qu’en français, au fil des lectures et des contes, voire en activités créatrices et manuelles sous formes de boîtes à dents.

Les enseignants ne parlent pas de la petite souris, excepté si un élève le mentionne. Lorsque cela arrive, ils accueillent le récit, prennent soin de la dent tombée et éventuellement questionnent l’élève sur les rites pratiqués à la maison. Les enseignants s’accordent sur le fait

que cette croyance appartient à la famille. Ils ne parleront donc pas du personnage surnaturel, mais de l’animal (la souris) et des dents afin que tous les élèves soient concernés. À l’inverse du père Noël qui, lui, est une figure emblématique de notre société et de Noël. Les enseignants mettent souvent en avant sa présence inévitable et omniprésente durant la période de Noël (dans les médias, les magasins, les rues...).

Nous avons également été surpris que peu d’enseignants citent les valeurs telles que la gentillesse, la bonté, le partage comme étant des valeurs véhiculées par le père Noël. Ils les attribuent plutôt à la fête de Noël et dans les réponses, ils confondent parfois le père Noël et la fête de Noël.

Les valeurs concernant la petite souris n’ont pas été abordées dans cette recherche car ce n’est pas un symbole unique reconnu par notre société, du moins helvétique et romande. Elle n’est pas représentée comme un symbole universel au même titre que le père Noël, ce qui rend difficile l’établissement d’une séquence pédagogique. Tous les enseignants ne lui attribuent pas consciemment les apports tels que le rite de passage, la réduction de l’angoisse, la socialisation et le développement de l’imaginaire. Certains ont en tout de même conscience et sont plus réceptifs face à ces éléments. Ce fait est surprenant au vu de toutes les recherches menées jusqu’à ce jour sur les bienfaits de ces personnages chez l’enfant. Contrairement à ce que nous pensions, aux yeux des enseignants la petite souris n’a pas forcément sa place dans la classe. Il serait intéressant de mener la même recherche auprès des élèves afin d’observer leurs représentations et les bienfaits de ces personnages et voir si elles diffèrent de celles des enseignants.

Comme nous le pensions, les personnages de contes sont régulièrement sollicités dans les classes. Les enseignants les utilisent énormément pour créer des séquences pédagogiques et permettre aux élèves de rentrer plus facilement dans les apprentissages. Pilot (2004) écrit que les enseignants laissent souvent une place importante aux contes et à l’univers merveilleux afin d’aider et de motiver les élèves face à l’acquisition d’apprentissage. C’est un fait que nous avons constaté dans chaque entretien mené.

À l’opposé de nos représentations, les enseignants interrogés rencontrent peu de conflits liés au père Noël et à la petite souris. C’est peut-être dû au fait qu’ils restent neutres et qu’ils ne mettent pas en avant ces deux personnages dans la classe. De manière générale, lorsqu’un conflit survient auprès des élèves, les enseignants les laissent débattre librement, puis

interviennent si besoin. Ils respectent la liberté de croire, les convictions de chacun et font en sorte que les élèves en fassent autant avec leurs camarades. Concernant les parents, les enseignants prennent le temps de les écouter et de trouver une solution commune, voire un compromis. Ils font en sorte que l’enfant ne se sentent pas exclu et adaptent leurs pratiques en conséquence.

Nous nous sommes confrontés à certaines limites lors de notre recherche. Premièrement, d’un point de vue théorique, très peu de recherches ont été effectuées sur la petite souris, ce qui rendait notre cadre théorique pauvre en références. Deuxièmement, il était difficile de se focaliser uniquement sur l’enseignant et de ne pas dériver sur l’aspect de l’élève, les deux étant fortement liés. Troisièmement, nous trouvons que dix instituteurs ne sont pas représentatifs du collectif enseignant et qu’il est difficile d’émettre une recherche prenant en compte tous les avis. Quatrièmement, deux biais à cette recherche ont été trouvés : d’une part, la majorité des enseignants interrogés ont plutôt un avis négatif sur ces personnages et ces rituels, ce qui influence les résultats et les représentations. D’autre part, notre positionnement positif face à ces rituels a pu influencer notre discours face à la récolte des données. Finalement, les rituels liés à la petite souris étant perçus comme privé, les enseignants n'oseraient pas s'affirmer sur les représentations et les apports du personnage, contrairement au père Noël où les avis sont plus tranchés.

Comme prolongement, nous pourrions éventuellement nous concentrer sur la petite souris et les représentations des élèves et des enseignants afin de confronter les deux avis. Cette comparaison nous donnerait des pistes non négligeables pour comprendre les apports, la gestion du conflit et les représentations du personnage. Dans un second temps, nous pourrions envisager de considérer le vécu de l’enseignant par rapport à ces rituels et à leur rupture, ce qui pourrait peut-être expliquer certaines réponses ou réactions.

En conclusion, même si nous étions positionnés favorablement à ces pratiques et à ces personnages, grâce aux apports pratiques et théoriques récoltés lors de cette recherche, nous prendrons désormais en considération le facteur de la classe et de la famille afin de mieux gérer notre enseignement. Ainsi, nous veillerons à ne pas trop en faire pour ne pas l’imposer aux élèves qui ne pratiqueraient pas ces rituels et ces croyances.

6. Bibliographie

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