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Il a été nécessaire de répéter des dizaines de fois la décoration de Bitter, demandant quelques heures de préparation par expérience, pour obtenir les résultats présentés dans ce chapitre. Les dicultés rencontrées et le manque de reproductibilité rendent impossible la poursuite de l'objectif xé au départ, à savoir la caractérisation de l'ancrage intrinsèque aléatoire dans les lms minces nanostructurés de plomb.

Malgré cela, nous avons mis en évidence la structure des vortex dans le NbSe2 et dans un lm mince de Pb, grâce à la bonne résolution spatiale oerte par la décoration de Bitter. En dépit des défauts et des déformations du réseau, le calcul de la fonction de corrélation de paires dans ces matériaux indique clairement que l'organisation en réseau triangulaire est présente. La portée de l'ordre est plus longue dans le NbSe2que dans le Pb, car les vortex y interagissent à des distances plus grandes, proportionnelles à la valeur de λ.

En vue de pallier les faiblesses de l'expérience et ainsi améliorer le taux de réussite de la décoration, plusieurs pistes sont envisageables. Elles devraient orir des solutions au manque d'in-

3.5. CONCLUSION ET PERSPECTIVES 47

formations sur les conditions à l'intérieur de l'enceinte et apporter des améliorations au niveau de la maîtrise des paramètres expérimentaux. Tout d'abord, une augmentation du volume de l'enceinte limiterait les variations de la pression dues à l'échauement du lament. Une meilleure stabilité de la température serait ainsi garantie. De plus, l'utilisation d'une valve électronique régulant la pression automatiquement assurerait un contrôle plus précis de la taille des particules magnétiques. L'augmentation de l'intensité du courant lors de l'évaporation pourrait également être gérée au- tomatiquement et garantirait ainsi un taux d'accroissement constant. Enn, Letellier propose un moyen de diminuer les inhomogénéités de l'énergie cinétique des particules magnétiques en ca- nalisant le ux de particules. De cette façon, leur vitesse est contrôlée en remplaçant le régime turbulent par un écoulement laminaire [26].

Dans la suite du texte, nous allons nous intéresser à une autre technique de visualisation magnétique, la microscopie à sonde Hall à balayage. Celle-ci ore non seulement la possibilité d'étudier les vortex en régime statique, tout comme la décoration de Bitter, mais également leur dynamique.

Chapitre 4

Microscopie à sonde Hall en régime

stationnaire

4.1 Introduction

Dans le chapitre précédent, la décoration de Bitter a été utilisée pour étudier l'organisation des vortex dans le NbSe2 et le Pb supraconducteurs. Cependant, cette technique présente plusieurs inconvénients. Tout d'abord, elle n'ore pas la possibilité de quantier le champ magnétique local, mais est seulement sensible aux valeurs extrémales du prol du champ. Ensuite, il s'agit d'une technique invasive, car les particules déposées sur la surface sont magnétiques et interagissent par conséquent avec les vortex [36]. Un autre point à soulever est qu'il est dicile de nettoyer la surface et d'en enlever toutes les particules. De plus, la durée de l'expérience et le manque de reproductibilité mettent un frein à une exploitation plus poussée du dispositif. Enn, la décoration de Bitter ne donne accès qu'à une image gée et ex situ du réseau de vortex et empêche toute caractérisation des propriétés dynamiques. Pour toutes ces raisons, l'utilisation de la microscopie à sonde Hall à balayage (SHPM) constitue une alternative de choix. En eet, cette technique est capable de fournir des informations sur le prol du champ magnétique en régime stationnaire1, mais elle ouvre également l'accès à une visualisation dynamique. De plus, l'échantillon est réutilisable à volonté car les mesures sont prises sans contact.

4.1.1 Microscopie à sonde Hall à balayage

La SHPM est une technique permettant de mesurer localement le champ magnétique à l'aide d'une sonde au fonctionnement basé sur l'eet Hall. Elle ore la possibilité d'atteindre une résolu- tion spatiale d'environ 200 nm et une sensibilité d'environ 100 nT Hz−1/2.

Le premier dispositif expérimental implémentant la SHPM fut réalisé par Kronick en 1958, avec une sonde Hall en bismuth [37]. La première utilisation de cette technique pour visualiser la surface de supraconducteurs remonte à 1962, avec l'étude menée par Broom et Rhoderick sur des lms minces supraconducteurs de type I [38]. Les limitations de la sensibilité et de la résolution spatiale furent levées en 1978 grâce à l'invention des hétérostructures semi-conductrices à dopage modulé par Dingle [39]. Celles-ci améliorent la mobilité des porteurs de charge bien au-delà des possibilités oertes par les matériaux existant naturellement en concentrant les électrons sur des

1. c'est-à-dire sans variation temporelle du champ magnétique mesuré

50 CHAPITRE 4. MICROSCOPIE À SONDE HALL EN RÉGIME STATIONNAIRE

surfaces à deux dimensions. De nos jours, le compromis entre résolution et sensibilité (voir gure 3.1) oert par la SHPM lui accorde une place de choix pour l'étude des vortex supraconducteurs, mais aussi des domaines magnétiques [40].

Malgré la petite taille des surfaces étudiées (généralement 16 × 16 µm2), la large gamme de températures et de champs magnétiques où cette technique fonctionne rend son utilisation possible dans de nombreuses situations. De plus, la sonde ne perturbe pas le champ magnétique à la surface de l'échantillon, car elle n'entre jamais en contact avec lui2. Enn, la SHPM est capable non seulement de mesurer la réponse du supraconducteur soumis aux champs magnétiques constants, mais également aux champs variables.

4.1.2 Objectifs

Le travail réalisé à l'aide de la SHPM est décomposé en deux parties. La première phase, traitée dans ce chapitre, vise à étudier la réponse d'un lm supraconducteur nanostructuré de plomb en régime stationnaire, c'est-à-dire pour un échantillon plongé dans un champ magnétique constant. La distribution spatiale des vortex et le prol du champ magnétique local seront mesurés pour plusieurs amplitudes du champ magnétique appliqué et à diérentes distances de la surface, au centre et au bord de l'échantillon.

Tout d'abord, nous détaillerons le comportement du lm supraconducteur dans l'état Meiss- ner, c'est-à-dire lorsque le champ magnétique est complètement expulsé (ZFC). Il sera pour cela nécessaire de développer un modèle théorique pour le prol du champ magnétique au-dessus de l'échantillon. Nous tenterons alors d'estimer la distance entre la sonde Hall et l'échantillon et lon- gueur de pénétration du lm de plomb. Nous étudierons ensuite les eets de commensurabilité se manifestant lorsque l'échantillon est refroidi dans un champ magnétique (FC). En eet, leur observation est fortement conditionnée par la qualité du matériau et la faible inuence de l'ancrage intrinsèque aléatoire. Nous en proterons pour visualiser des vortex interstitiels et à double quanta de ux et dénir les conditions nécessaires à leur présence.

Dans la seconde partie du travail avec la SHPM, traitée dans le chapitre suivant, quelques modications seront apportées au dispositif expérimental an d'étudier le régime dynamique, of- frant une opportunité unique de visualiser les déplacements des vortex et la dissipation d'énergie à l'échelle microscopique.