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Section I : Le respect de l'identité nationale

CONCLUSION DE LA PARTIE

La citoyenneté européenne a été créée dans le but de dépasser l'approche économique de la construction européenne et de rendre l'UE plus concrète, plus visible pour les nationaux des États membres619, voire de poser la première pierre d'une Europe politique. En superposant les deux citoyennetés (nationale/européenne), le citoyen est en mesure de garder un lien particulier avec son État tout en partageant des droits avec les ressortissants des autres États membres. La citoyenneté étant en quelque sorte un message destiné aux peuples afin qu'ils prennent conscience que l'UE n'est pas seulement une Europe des marchés, mais un espace où les individus ont leurs droits propres.

Toutefois, ce message ne semble pas être clairement saisi par ses destinataires620. D'où ce manque de conscience de l'existence et de la portée de la citoyenneté européenne, notamment en raison de son absence d'autonomie621 et au fait que les citoyens européens n'ont pas connaissance des droits qui en découlent, d'autant plus que ces droits sont peu nombreux, pas assez spécifiques, plutôt symboliques pour qu'ils soient simplement connus par leurs bénéficiaires. Laurence Burgorgue-Larsen affirme que la citoyenneté européenne « n'est guère identifiable instantanément dans la mesure où elle est marquée du sceau de l'illisibilité et de l'incohérence »622. Comment faire naître alors un sentiment d'adhésion des citoyens envers l'Union à travers

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619 Blumann et Dubouis, « Institutionnel », supra note 450 à la p 148.

620 Christine Bertrand, « Une citoyenneté européenne en quête d'une identité » dans Philippe Icard, dir, Une

citoyenneté européenne dans tous ses « États », Dijon, Éditions universitaires de Dijon, 2009 à la p 39.

621 Article 9 TUE: « [...]. La citoyenneté de l'Union s'ajoute à la citoyenneté nationale et ne la remplace pas ».

622 Laurence Burgorgue-Larsen, « Citoyenneté et identité européennes » dans Gérard Cohen-Jonathan et Jacqueline

Dutheil de la Rochère, dir, Constitution européenne, démocratie et droits de l'homme, Bruxelles, Bruylant, 2003 à la p 189.

une citoyenneté aussi incomplète623? Il est vrai que le processus chronologique de la citoyenneté n'est pas habituel : celle-ci a précédé la constitution d'un État. D'où l'incompréhension du citoyen européen face à l'utilité de cette citoyenneté qui de plus, est dépourvue d'espace public partagé et de culture politique commune624. La citoyenneté européenne ne peut se résumer non plus à un catalogue de droits. Ses initiateurs visaient qu'elle serait le vecteur d'une identité commune et d'un destin partagé. En effet, en déclarant que les nationaux des différents États membres étaient également citoyens d'un espace unique - l'UE - on misait que ceux-ci prendraient conscience de l'ampleur de la construction européenne. Toutefois, cette démarche volontariste pour susciter un sentiment d'appartenance à l'Union n'a pas obtenu les résultats escomptés en raison d'un contenu faible de la citoyenneté européenne et du manque de conscience de ce que représente la construction européenne, à savoir la faible lisibilité de l'action communautaire et le but utilitaire de la citoyenneté, simple « palliatif au déficit démocratique »625.

Dès lors, c'est bien la vocation identitaire de la citoyenneté européenne par rapport à la citoyenneté nationale qui est en cause. Mais aussi l'identité de l'UE par rapport à l'identité nationale626. L'identité de la citoyenneté européenne n'est qu'une facette de l'identité de l'UE. Bien que l'UE ait le mérite d'avoir stabilisé le continent européen, d'avoir rendu impossible une guerre entre États membres et d'avoir permis la création d'un marché commun, il n'en demeure pas moins qu'elle est aujourd'hui dépourvue de capacité d'attraction, dans la mesure où la !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

623 Hélène Manciaux, « L'introuvable citoyenneté de l'Union dans le projet de Constitution pour l'Europe » (200) 4

Europe aux pp 3-6.

624 Kastoryano, supra note 185 à la p 38.

625 Manciaux supra note 623 aux pp 3-6.

626 Une Déclaration sur l'identité européenne a été adoptée en 1973. Il convient de souligner toutefois que la moitié

du texte porte sur l'identité européenne dans les relations extérieures de la Communauté. En somme, ce texte ne définit pas réellement l'identité européenne, bien que des principes généraux soient rappelés : souci de préserver les cultures nationales, volonté de bâtir une société au service de l'homme, sauvegarde de la démocratie représentative, du règne de la loi, du respect des droits de l'homme, de la justice sociale, etc. Bertrand, supra note 620 à la p 40, note 5.

construction européenne peine à inspirer confiance et à être considérée comme une protection. Quant à la citoyenneté européenne, elle n'est pas comprise par ses titulaires, qui en ignorent les droits afférents pour l'apprécier et pas assez étoffés pour susciter un effet mobilisateur favorable à la construction européenne.

En ce qui a trait aux droits, ceux-ci apparaissent beaucoup trop symboliques et/ou pas assez spécifiques. Trop symbolique, lorsqu'il s'agit du droit à la protection diplomatique et consulaire (article 23 TFUE) ; le droit de présenter des pétitions au PE (article 24 alinéa 2 TFUE) ; le droit d'écrire aux institutions européennes dans l'une des langues de l'Union et de recevoir une réponse rédigée dans la même langue (article 24 alinéa 4). En outre, ces droits, la plupart du temps, ne sont pas spécifiques dans la mesure où ils peuvent être également reconnus à des personnes morales (liberté de circulation et de séjour). Certains de ces droits sont même reconnus aux ressortissants d'États tiers, à partir du moment où ils résident dans l'Union. À titre d'illustration, le droit de pétition (article 227 TFUE) est reconnu à tout citoyen de l'Union, mais aussi « à toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre ». La même formulation est reprise pour le droit de saisir le médiateur européen627 (article 228 TFUE) : « Un médiateur européen [...], est habilité à recevoir les plaintes émanant de tout citoyen de l'Union ou de toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre [...] ». Quant à la jurisprudence, elle a accordé que le droit à la protection diplomatique devant bénéficier aux nationaux d'États tiers qui résident dans un État membre628. Certes, il y a élargissement du champ d'application de ces droits, mais cette extension à d'autres qu'à des citoyens européens serait-elle en mesure d'éveiller chez ces derniers un !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

627 Ibid à la p 42.

628 CJE Affaires jointes Faraj Hassan c Conseil de l'Union européenne, Commission européenne, C-399/06, Chafiq

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