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Conclusion : la représentation des risques

USAGERS PUBLICS, USAGERS PRIVES

Ainsi cette typologie des usagers nous aura permis de distinguer d’une part les usages sur un modèle professionnel des usages sur un modèle domestique et d’autre part trois types d’usagers, s’inscrivant dans l’espace domestique ou au moins dans un espace privé (éventuellement ouvert au public mais avec de fortes restrictions à la libre circulation).

Le premier partage n’oppose pas exactement les usagers disposant d’équipement de télésurveillance sur leur lieu de travail d’usagers disposant de tels équipements à leur domicile ; ce qui les distingue est davantage une définition de l’espace. Dans un cas, il s’agit de fournir des outils à la surveillance, essentiellement interne, du local, cette surveillance devant s’exercer tant sur les dangers externes que sur les acteurs internes. Le dispositif anti-intrusion a donc souvent les caractéristiques d’un dispositif de contrôle interne, même si ce contrôle revêt dans un certain nombre de cas de figure le visage de la protection des acteurs et non nécessairement de la suspicion à leur égard. La sécurité est une préoccupation centrale qui est traitée par un ensemble d’outils techniques et de moyens humains ; la télésurveillance n’est qu’une des pièces du système mis en place et même lorsqu’il y a intervention d’une société spécialisée dans la télésurveillance, elle doit agir en corrélation avec les responsables de la sécurité de l’entreprise ou de l’institution. Les configurations mises en place dépendent donc fortement des modèles plus généraux d’organisation de la sécurité mis en place dans ces lieux.

Tout différent est le cas des usagers pour lesquels la configuration spaciale ne joue pas un rôle déterminant dans le choix de la télésurveillance, ni dans le type de configurations privilégiées. En définitive, et contrairement à ce que l’on aurait pu penser, les technologies choisies font assez peu la différence entre les types d’usagers qui y recourrent. On peut faire l’hypothèse, confirmée par nos enquêtes auprès des professionnels, que la demande est très fortement formatée en la matière par l’offre, et que le client n’a qu’une assez faible marge de manœuvre dans le choix des dispositifs à mettre en œuvre. Il s’agit toujours d’une combinatoire de quelques éléments prédéterminés (capteurs volumétriques, capteurs de contact, centrale…) ; encore l’usager n’a-t-il pas toujours la possibilité d’opérer des choix quand la prestation lui est vendue «clef en main». Ce qui confirme cette hypothèse, c’est que mêmes les gardiens de la forteresse ont tendance à dire que leur choix s’est fait sur le prix ou sur un critère de proximité, et non sur le matériel : “ils proposent tous la même chose” nous expliquait-on à la question, probablement assez erronée : “comment avez-vous procédé au choix du télésurveilleur ?” En revanche, ce qui distingue les trois types d’usagers (les gardiens de la forteresse, les pragmatiques du local et les pousse-bouton), c’est le lien qu’ils établissent avec le télésurveilleur et la manière dont ils sollicitent le dispositif. Chacun des trois types d’usagers définit, à travers les relations mises en place avec le télésurveilleur, la manière dont il conçoit et dont il vit son propre espace et les relations avec le tissu local.

En définitive, cette enquête sur la télésurveillance met en évidence quelques caractéristiques de la relation que les acteurs entretiennent avec leur espace. Précisons qu’il s’agit principalement d’espace urbain ou sub-urbain (notre enquête n’ayant pas, rappelons-le, porté sur le monde rural). Les trois types d’usagers dessinent trois modalités différentes de rapport à l’environnement ; dans le premier cas, pour les gardiens de la forteresse, l’extérieur est vécu essentiellement comme menacant, l’acteur est dans une position d’isolement, dans le deuxième cas, les pragmatiques du local activent des réseaux de sociabilité (basés éventuellement mais non exclusivement sur la proximité géographique) ; dans le

Anthropologie de la télésurveilllance en milieu privé

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troisième cas, l’outil technique ne modifie en rien la manière dont les usagers vivent leur rapport à l’environnement.

La notion de tissu urbain paraît en définitive assez mal adaptée à la manière dont les acteurs concoivent leur territoire : ils ne se pensent pas dans un tissu urbain, qui suppose une trame, une co- présence du collectif indépendante de chaque particulier. Certains se pensent comme des gens isolés, dépourvus de rapport avec le milieu qui les entoure ; il n’y a pas de relations d’intérêt réciproque, les menaces peuvent aussi bien venir du proche que du lointain, du coutumier que de l’inconnu. D’autres jouent la carte des relations conviviales en s’intégrant dans un réseau de voisinage que la télésurveillance permet de renforcer ou même d’établir. Il apparait en définitive que le choix d’un dispositif sociotechnique spécifique en matière de télésurveillance -avec une insistance particulière sur les modalités d’intervention privilégiées - correspond à des configurations spécifiques de l’espace.

Table des matières

Introduction...2

Les formes de la télésurveillance ...3

Les réseaux de la télésurveillance...4

Méthodes et enquête...9 Le travail documentaire ...10 L’enquête de terrain...12 Cartographie de la télésurveillance...15 a) du côté du client...15 b) du côté du télésurveilleur...19

c) circulation entre le télésurveilleur et le client...21

Les interventions ...23

Formes des relations entre les acteurs...28

a) trois formes d'organisation...29

Une relation de service ...31

La télésurveillance sous-traitée ...32 L’intégration verticale...33 b) les conflits ...35 L’attibution de responsabilités ...35 Le maintien de l’ordre...37 Organisation et responsabilités ...40 Usages et pratiques...45 Introduction ...45

des usages professionnels ...47

Usages domestiques de la télésurveillance ...55

La décision d’installation ...55

Le choix de l’entreprise et de la prestation...62

Des relations de confiance ...62

Anthropologie de la télésurveilllance en milieu privé

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Typologie des usagers ...70

Les gardiens de la forteresse...70

Des équipements ...70

Le partage des rôles...75

Le pragmatique du local ...79

Une évaluation des risques ...79

Définir la sécurité ...82

Un réseau d’échanges ...83

Le pousse-bouton...84

Une contrainte externe...86

Conclusion : ...88

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