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Nous avons vu dans ce chapitre que des données interférométriques dans le proche infrarouge nous ont permis de confirmer deux modèles existants déjà dans la litéra-ture : nous avons apporté une confirmation sur la présence d’un disque interne pour T Cha et nous avons mis en avant l’importance de la lumière diffusée pour IM Lup. Nous serons même en mesure prochainement d’apporter des précisions à ces deux modèles que les autres mesures observationnelles n’étaient pas capables de révéler.

Les données obtenues avec Spitzer/IRS et AMBER sont des données d’une grande complémentarité. En effet, ce sont bel et bien les mêmes régions des disques que nous avons pu mettre en évidence : les régions les plus internes (typiquement

≤ 1 UA). Et par l’intermédiaire de ces deux techniques observationnelles nous

au-rons obtenu des informations complétement différentes. Alors que nous avons été en mesure de contraindre la minéralogie de la poussière avec Spitzer/IRS, nous avons pu contraindre la morphologie des disques grâce aux mesures AMBER. Il semble d’ailleurs intéressant de noter ici, que ces observations interférométriques sont les premières observations de TTauri réalisées avec l’instrument AMBER. Les modifi-cations apportées à l’instrument ces dernières années ont grandement amélioré sa stabilité et cela promet de belles années ainsi que de beaux résultats pour l’interfé-rométrie au VLTI.

Collaborations

Au cours des trois années de ma thèse, j’ai eu plusieurs opportunités de colla-boration. Toutes ne correspondaient pas au même travail ou à la même expertise : que ce soit de la réduction de données, l’analyse minéralogique de spectres ou des projets d’instrumentations. Je résume donc dans ce chapitre ces différents travaux en insistant plus particulièrement sur mes contributions. Ces différents travaux ont donné lieu à 4 publications acceptées dans différents journaux, et 2 publications actuellement soumises à différents éditeurs.

5.1 Études minéralogiques individuelles de disque

au-tour d’étoiles jeunes

Au delà des études sur un large échantillon que nous avons vu dans les cha-pitres précédents, j’ai collaboré sur plusieurs études individuelles d’objets bien do-cumentés. Autant l’un des principaux intérêts des grands échantillons est l’aspect statistique, qui permet de voir quelles sont les tendances qui se dégagent sur les pro-priétés fondamentales, les études d’objets individuels sont très complémentaires. En effet, les études multi-objets que j’ai menées durant mon travail s’appuient unique-ment sur des données Spitzer/IRS, car rassembler d’autres observations pour tout l’échantillon IRS représentait un travail trop imposant dans le cadre d’une thèse. Au contraire, les études individuelles sont fondées sur tout un ensemble de données, allant d’observations interferométriques millimétriques aux rayons X en passant par le domaine visible et infrarouge.

5.1.1 Disque d’une naine brune

J’ai collaboré avec Hervé Bouy1pour étudier le disque autour d’une naine brune (2MASS J04442713+2512164) située dans le nuage du Taureau. Ces travaux ont donné lieu à une publication : Bouy et al. (2008). L’étude s’oriente sur la structure géométrique et la composition minéralogique du disque autour de cette étoile de faible masse. Les observations regroupent de la photométrie dans le domaine vi-sible, proche infrarouge et millimétrique, de la spectroscopie optique et infrarouge moyen, de l’interférométrie millimétrique et de l’imagerie dans le proche infrarouge, ce qui a permis de contruire la SED complète de cette naine brune (de type spectral M7.25, la SED de l’objet étant présentée en haut de la Figure 5.1). La présence de

Figure 5.1 – Figure du haut : SED de la naine brune 2MASS J04442713+2512164 avec les modèles MCFOST superposés. Figure du bas : Modélisation du spectre IRS avec deux continua différents : l’un issu des modèles de disque MCFOST, l’autre un polynome de second degré.

disques autour des étoiles de faible masse était encore en question il y a quelques années, mais plusieurs études (comme par exemple Guieu et al. 2007 sur les naines brunes du Taureau) ont montré que la formation de ces objets tend à ressembler fortement à la formation des TTauri. Concernant la minéralogie des poussières au sein de ces disques, elle était peu connue et les quelques études qui ont été faites sur le sujet (comme par exemple Apai et al. 2005) se concentraient principalement sur la raie des silicates amorphes à 10 µm. Pour ce projet, j’ai plus particulièrement par-ticipé à la réduction des données Spitzer/IRS ainsi qu’à la modélisation du spectre IRS : le but étant de déterminer la minéralogie de la poussière dans les couches superficielles du disque. Étant donné que nous avions à notre disposition toute la distribution spectrale d’énergie, il a été possible d’estimer un continuum d’émission à partir des modèles de disques, calculés avec le code de transfert radiatif MCFOST (voir Pinte et al. 2006 pour plus de détails). En utilisant ce continuum pré-calculé, nous avons été en mesure de comparer les résultats avec un continuum estimé par notre procédure de modélisation (un polynôme de second degré). A cette époque, la procédure de modélisation était différente de celle décrite dans le Chap. 3 : l’esti-mation du continuum se faisait donc avec un polynôme de second degré et le volet analyse bayésienne n’était pas encore implémenté. Le graphique du bas de la Fi-gure 5.1 montre le spectre IRS, les deux continua utilisés et les spectres synthétiques résultant des simulations minéralogiques. Dans les deux cas le spectre observé est bien reproduit par le modèle. Entre ces deux simulations, les résultats sont en bon accord, ce qui nous a conforté dans le choix de ce type de continuum. Au final, j’ai obtenu les résultats suivants sur la minéralogie de ce disque autour d’une naine brune :

– La raie à 10 µm est majoritairement produite par des grains de taille inter-médiaire (1.5 µm). Ce résultat est robuste étant donné que les deux continua utilisés donnent environ∼ 95% de grains de 1.5 µm pour la composante chaude.

– La partie à plus grande longueur d’onde (20-30 µm) est elle aussi bien repro-duite avec des grains de taille intermédiaire, mais les résultats divergent légè-rement en fonction des continua utilisés. Le continuum polynomial retourne une grand majorité de grains de 1.5 µm (à 90%) pour 10% de grains de 0.1 µm. Le continuum estimé à partir des modèles de disque quand à lui retourne une composition avec 40% de grains de 1.5 µm et 60% de grains de 0.1 µm. Ceci s’explique principalement par la différence de forme entre les deux continua pour la partie 20-30 µm du spectre : le continuum polynomial laisse plus de flux autour de 25 µm, ce qui semble favoriser les grains plus gros (étant donné qu’ils ont des profils d’émission plus larges que les petits grains).

– La fraction de grains cristallins dans la région à 10 µm est de l’ordre de ∼ 5%,

et ce avec les deux continua utilisés.

– La fraction de grains cristallins est comprise entre 40% et 65% pour la partie à plus grande longueurs d’onde, respectivement pour le continuum polynomial et le continuum modélisé. Cette différence s’explique encore une fois par le fait que le continuum polynomial laisse plus de flux sous le spectre vers 25 µm : les grains amorphes permettent plus facilement de combler le flux manquant que

2MASS 04442713

0.05

0.10

0.15

F

ν

[Jy]

10 15 20 25 30

λ [µm]

-0.06

0.00

0.06

Residuals

Figure 5.2 – Modélisation du spectre de la naine brune 2MASS J04442713+2512164, montrant les résidus de la modélisation, avec la version la plus récente de la procédure, telle que décrite dans le Chap. 3

les grains cristallins, qui à cause de leurs profils d’émission piqués comblent mal un manque de flux.

Au final, la minéralogie dans ce disque circumstellaire semble être dominé par des grains dont la taille est de l’ordre du micromètre, et ce pour les deux régions, froide et chaude. D’un autre côté, la tendance pour les fractions de grains cristallins est quand même confirmée avec les deux continua : il y a plus de cristaux dans les régions froides que dans les régions chaudes, ce qui rappelle le paradoxe de cristallinité que nous avons trouvé dans les Chap. 2 & 3. Pour expliquer ce résultat, il faut trouver des processus d’amorphisation des grains cristallins se mettant en place dans les régions les plus internes, par l’intermédiaire des rayons X ou des vents particulaires provenant de l’objet central (voir Glauser et al. 2009 ou Riaz 2009). Néanmoins, ce résultat sur la simple présence de silicates cristallins dans le disque autour d’une étoile de faible masse (résultat similaire à celui de Merín et al. 2007) est intéressant en lui-même. Même autour d’une étoile moins lumineuse qu’une étoile de Herbig ou une étoile TTauri, la température dans le disque peut être suffisament élevée pour cristalliser des grains amorphes.

La Figure 5.2 montre la reproduction du spectre de 2MASS J04442713+2512164 avec la version la plus récente de la procédure de modélisation telle que nous l’avons vu dans le Chap. 3 ainsi que le nouveau continuum, constitué d’une loi de puissance ainsi que d’un corps noir. Les résultats donnent toujours une fraction de cristalli-nité d’environ 6% pour la composante chaude, montrant ainsi la robustesse de la

Figure 5.3 – Spectre IRS d’IM Lup et le résultat de la modélisation de la raie à 10 µm.

procédure, et une fraction cristalline d’environ 10% pour la composante froide. Cet écart pour la composante froide s’explique encore par la différence de continuum utilisé : plus de flux laissé sous le spectre, implique plus de grains amorphes pour combler plus facilement le continuum bas utilisé. Toujours est-il que la tendance est toujours présente, avec au moins autant, voire plus de grains cristallins dans les régions froides que dans les régions proches de l’étoile.

5.1.2 IM Lup une étoile passée sous la loupe

IM Lup est une étoile TTauri de la constellation du Loup, connue pour posséder un disque circumstellaire massif grâce aux mesures d’excès infrarouge et millimé-triques. Le disque est résolue dans le domaine visible et infrarouge et nous avons entrepris avec C. Pinte2 et collaborateurs, de modéliser ce disque, pour lequel j’ai obtenu et réduit le spectre IRS. L’analyse des observations s’est déroulée principa-lement en deux étapes : tout d’abord une modélisation du disque avec le code de transfert radiatif MCFOST, avec des calculs pour une grille de paramètres et une analyse bayésienne dans le but d’identifier les meilleurs paramètres. Puis ensuite, une modélisation détaillée des raies de silicates que j’ai effectué avec mes propres ou-tils, similaires à ceux utilisés dans Bouy et al. (2008). Une description plus détaillée de cette étude (Pinte et al. 2008b) se trouve dans la Section 4.2.

Pour ce travail, j’ai donc été en charge de la modélisation du spectre infra-rouge IRS et de la détermination de la minéralogie de la poussière. Pour cet objet nous avions aussi à notre disposition un continuum estimé à partir de la SED. La Figure 5.3 montre le spectre IRS dans sa totalité ainsi que le résultat de la modé-lisation de la raie à 10 µm dans l’encart supérieur droit. Comme il apparaît sur la Figure 5.3, la modélisation de la partie à plus grande longueur d’onde n’a malheu-reusement pas été très concluante. En effet, à cette époque où nous utilisions une procédure différente à celle présentée dans le Chap. 3 et aucun des modèles que nous avons essayé ne reproduisait le spectre de manière satisfaisante. Cela peut s’expli-quer par la difficulté de choisir un continuum adapté. Néanmoins, la partie à 10

µm a pu être reproduite avec une qualité et une robustesse aux différents continua

plus que satisfaisante. Ce travail a d’ailleurs permis d’apporter des contraintes as-sez fortes sur la minéralogie des grains de silicates dans les couches supérieures du disque. Avec tous les modèles que nous avons obtenu, il s’est avéré qu’un besoin en grains de taille micromètriques étaient nécessaires pour reproduire correctement la raie à 10 µm. Au final, comme expliqué dans la Section 4.2, les apports combinés des différentes techniques observationnelles ont permis de considérablement augmenter notre connaissance de cet objet et de son disque circumstellaire.

Ces deux projets m’ont avant tout appris à collaborer avec d’autres scientifiques n’étant pas forcément experts dans mon domaine. Il a donc fallu faire un effort de synthèse sur les résultats obtenus et leurs implications pour une étude dans un cadre bien plus large que la spectroscopie infrarouge.

5.2 Autres projets nécessitant la réduction de données

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