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Dans ce chapitre ont été présentés les différents constituants et les procédés d’élaboration des composites ainsi que les moyens utilisés pour caractériser les matériaux composites élaborés. Une présentation sous forme de tableaux est réalisée pour permettre de retrouver rapidement une donnée lors de la lecture des chapitres suivants.

Beaucoup d’informations sur la résine RD10-603 restent confidentielles. Les essais de rhéolo- gie nous permettront de nous familiariser avec ce système et d’identifier les conditions permet- tant de diminuer la viscosité de la résine pour faciliter l’imprégnation du renfort fibreux par voie liquide. Cette étude fait l’objet du chapitre 3.

Ensuite, nous avons vu qu’une vingtaine de plaques sera fabriquée. Les paramètres considérés sont :

– Le procédé : prepreg (n°1 et n°2), RTM (∆P = 1 bar ou 3 bars), LRI, – L’état de dilution de la résine : non diluée ou diluée (de 1%pds à 5%pds),

– Le type de renfort : empilement de tissus 2D avec fibres de type n°1 et préforme 3D avec fibres de type n°2 (avec imprégnation dans la direction des fils de chaîne et de trame).

Chapitre 3

Caractérisation rhéologique de la

résine RD10-603

Sommaire

3.1 Recherche de conditions optimales pour favoriser l’écoulement de la résine . . . . 67 3.1.1 Caractérisation du comportement rhéologique de la résine . . . 68 3.1.1.1 Un système thixotrope et rhéofluidifiant . . . 68 3.1.1.2 Choix d’un modèle de comportement : la loi de Carreau . . . . 70 3.1.1.3 Évolution du comportement rhéologique de la résine avec la

durée de stockage . . . 70 3.1.2 Effet de la température sur la viscosité du système jeune . . . 73

3.1.2.1 Effet instantané de la température : une diminution de la visco- sité sur tout le domaine de cisaillement lorsque la température augmente . . . 73 3.1.2.2 Évolution des rhéogrammes à 10°C, 15°C et 20°C avec le temps :

répétition des essais à différents instants . . . 74 3.1.3 Diminution de la viscosité du système avec l’ajout d’un solvant : l’eau . 76 3.1.4 Description qualitative du comportement avec des modèles phénoméno-

logiques . . . 77 3.1.5 Synthèse des résultats et application au procédé . . . 79 3.2 Suivi de la réaction de géopolymérisation par mesures rhéologiques

viscoélastiques . . . . 81 3.2.1 Présentation de courbes caractéristiques du comportement de la résine

lors d’une sollicitation isotherme en régime oscillatoire . . . 81 3.2.2 Remarque préliminaire : influence de la maturité de la résine . . . 83 3.2.3 Influence de la température sur le comportement viscoélastique . . . 85 3.2.3.1 Résine non diluée . . . 85 3.2.3.2 Résine diluée à 2%pds . . . 86 3.2.4 Choix d’un critère pour déterminer le temps de prise de la réaction de

géopolymérisation . . . 86 3.2.5 Le critère choisi est-il impacté par la maturité de la résine ? . . . 89 3.2.6 Le critère choisi est-il dépendant de la fréquence de sollicitation ? . . . . 90 3.2.7 Compréhension des mécanismes de la géopolymérisation et des produits

obtenus grâce à ce critère . . . 91 3.2.7.1 Effet de la température sur le temps de prise de la réaction de

géopolymérisation . . . 91 3.2.7.2 Diagramme de prise de la résine RD10-603 . . . 92 3.2.7.3 Commentaire sur la valeur de la viscosité et sur celle des mo-

dules de cisaillement, au moment où ils se croisent, en fonction de la température et de la fréquence . . . 93

3.2.8 Synthèse des résultats et application au procédé . . . 95 3.3 Conclusion du chapitre . . . . 96

La résine RD10-603 est le précurseur de la matrice vitrocéramique des composites mis en œuvre dans ces travaux de thèse. Ce produit a été développé par Pyromeral Systems pour la production de composites performants et résistants à des niveaux de températures intermé- diaires. Ces matériaux sont actuellement réalisés par stratification de plis pré-imprégnés. Le but des travaux de thèse est d’adapter un procédé de mise en œuvre de composites par voie liquide comme l’infusion LRI ou l’injection RTM à la production de ces matériaux. La connaissance du comportement rhéologique de la résine et de ses évolutions en fonction de divers paramètres susceptibles de varier pendant la mise en œuvre est donc indispensable. La résine ayant des caractéristiques propres, une estimation de ses propriétés rhéologiques par comparaison avec la littérature s’avère complexe. Une étude du comportement rhéologique de cette résine est ainsi apparue nécessaire.

Le verrou technologique majeur identifié pour l’utilisation de cette résine afin de fabri- quer des composites par des procédés voie liquide est son importante viscosité. Par exemple, la viscosité de la résine RTM6, utilisée couramment pour mettre en œuvre un composite à matrice organique par LRI ou RTM, est de 30 mPa.s à 120°C, température de mise en œuvre préco- nisée [Hexcel, NC]. La viscosité de la résine RD10-603 peut atteindre au minimum une valeur voisine de 1 Pa.s, dans les conditions les plus favorables. Il a donc été décidé de mener une étude rhéologique de la résine afin d’identifier des voies permettant d’obtenir une viscosité la plus faible possible. Ceci fait l’objet de la première partie de ce chapitre. La sensibilité du com- portement rhéologique de la résine à différents paramètres tels que la vitesse de cisaillement, la température ou le temps a été étudiée. L’ajout d’un solvant, l’eau, dans la résine a également été réalisé pour diminuer la viscosité. Le comportement rhéologique des résines diluées a donc aussi été caractérisé. Nous verrons aussi que la durée de stockage de la résine, c’est-à-dire la durée entre la fabrication de la résine et le moment où la résine est caractérisée, impacte le comportement rhéologique. Cette étude du comportement de la résine est réalisée en écoule- ment. En effet, lors de l’imprégnation d’un renfort fibreux, la résine est sollicitée en écoulement. L’étude va donc concerner l’observation de l’évolution de différents rhéogrammes en fonction de plusieurs paramètres cités ci-dessus. Nous rappelons qu’un rhéogramme représente l’évolution de la contrainte de cisaillement ou de la viscosité en fonction de la vitesse de cisaillement.

La seconde partie du chapitre concerne la dépendance de la réaction de prise de la résine avec la température. Ceci est fait afin d’étudier le mécanisme de durcissement de la résine. Ces essais sont réalisés en régime oscillatoire. En effet, lorsque les plaques composites subissent le traitement thermique de prise, la résine ne subit aucun écoulement. Un critère de détermination du temps de prise est proposé et une passerelle vers le procédé établie.

Dans tout le chapitre, les mécanismes de la réaction de prise de la résine RD10-603 sont supposés être les mêmes que ceux de la réaction de géopolymérisation des géopolymères. La réaction de prise de la résine sera donc appelée « réaction de géopolymérisation » et la phase qui se crée par création de liaisons entre molécules lors de la polycondensation, la « phase de géopolymère en structuration ». Ce vocabulaire n’est pas représentatif de la nature chimique exacte de la résine RD10-603 mais a pour but d’utiliser des termes auxquels le lecteur a été familiarisé dans le chapitre bibliographique.

3.1. Recherche de conditions optimales pour favoriser l’écoulement de la résine

3.1 Recherche de conditions optimales pour favoriser l’écoule-

ment de la résine

Lors de l’imprégnation d’un renfort fibreux avec de la résine, par un procédé voie liquide LRI ou RTM, la résine va être cisaillée à plusieurs niveaux de vitesses. La vitesse de cisaillement est différente si l’écoulement se produit dans l’espace entre les mèches ou dans les mèches. L’ordre de grandeur dans chacun de ces domaines de la vitesse de cisaillement est représenté sur la figure 3.1. Il est estimé en considérant la vitesse moyenne du fluide ¯v donnée par la loi de Darcy et une épaisseur caractéristique e du domaine poral considéré :

˙γ = ¯v

e =

K η (1 − Vf) Le

∆P (3.1)

avec ˙γ la vitesse de cisaillement, K la perméabilité fixée à 5.10−11

m2 dans les espaces inter-

mèches et à 1.1012

m2 dans les espaces intra-mèches pour être dans un ordre de grandeur

réaliste [Arbter et al., 2011], η la viscosité dynamique prise égale à 1 P a.s, valeur proche du minimum de viscosité espéré, Vf le taux volumique de fibres estimé à 40%, ∆P le différentiel

de pression fixé à 1 bar, e la distance caractéristique d’écoulement fixée à 5 µm dans l’espace intra-mèches et à 50 µm dans l’espace inter-mèches. Cette dernière est estimée à partir des observations microscopiques réalisées et représentées sur la figure 3.2.

Nous pouvons constater que les vitesses de cisaillement évoluent, à pression imposée, de plusieurs ordres de grandeur au cours du procédé. Ceci explique que le comportement de la résine, dans cette partie, sera étudiée pour des vitesses de cisaillement allant de la plus faible valeur possible pour le rhéomètre, soit 0,006 s1, à une valeur de 200 s1, pour limiter le risque

d’éjection de matière pendant l’essai.

Figure 3.1 – Estimation de la gamme de vitesses de cisaillement que subit la résine lors de son écoulement au sein d’un renfort de mèches tissées

(a) Espaces intra-mèches (b) Espaces inter-mèches

Figure3.2 – Estimation de la distance caractéristique d’écoulement dans le renfort 2D qui sera utilisé dans ces travaux

3.1.1 Caractérisation du comportement rhéologique de la résine

Ce paragraphe détaille le comportement rhéologique de la résine "jeune". La résine est élabo- rée par Pyromeral Systems qui nous l’expédie ensuite. Les premiers résultats en écoulement sur le système qui sera dit "jeune" ont en fait été réalisés sur un système âgé de 3 jours. L’influence de la durée de stockage de la résine sera ensuite étudiée.

Nous rappelons que la résine est dérivée d’un système géopolymérique. Ce type de sys- tème est synthétisé par réaction d’un mélange d’aluminosilicates minéraux avec une solution aqueuse concentrée de silicates alcaline. Une fois que les deux constituants sont mélangés, la réaction de géopolymérisation peut démarrer dès la température ambiante. Cette réaction peut être décomposée en plusieurs étapes. La dissolution des particules solides issues du mélange d’aluminosilicates minéraux, la diffusion des monomères ainsi créés à travers la solution, la polycondensation des espèces dissoutes avec les silicates de la solution aqueuse qui crée des oligomères d’alumino-silicates qui réagissent ensuite entre eux pour donner naissance au réseau tridimensionnel. Cette dernière étape conduit à la formation d’un gel et, enfin, au durcissement du matériau. La résine est donc conservée au congélateur à -18°C en attendant d’être utilisée. Cette conservation à basse température a pour effet, a priori, de ralentir voire de stopper la réaction de géopolymérisation.

La résine RD10-603 sera donc considérée comme une suspension de particules solides dans un fluide interstitiel. Les particules sont des aluminosilicates et le fluide est la solution de silicates alcaline. Le comportement de cette solution sera considéré comme newtonien, comme l’a montré Bourlon dans ses travaux [Bourlon, 2010]. Pour des raisons de confidentialité, la nature des espèces en présence et les réactions qui se déroulent au sein du système restent inconnues. L’interprétation des résultats sera donc essentiellement basée sur la littérature des systèmes aluminosilicates en milieu alcalin.

3.1.1.1 Un système thixotrope et rhéofluidifiant

Un rhéogramme typique du système jeune, réalisé à 15°C, est présenté sur la figure 3.3.

Figure3.3 – Rhéogramme typique du système jeune à 15°C

Nous pouvons remarquer un comportement thixotrope qui est dû à un nécessaire à la déstructuration ou à la restructuration de la matière. Aux fortes vitesses de cisaillement, le phénomène est moins visible mais tout de même présent. Chaque mesure est faite en régime stationnaire, comme nous avons pu le dire dans le chapitre 2, c’est-à-dire que la mesure est réalisée lorsque la contrainte ne varie pas de plus de 5% pendant au moins 5 secondes. C’est cette tolérance qui explique l’hystérésis étroite sur la viscosité stationnaire du matériau. L’hystérésis serait beaucoup élargie si la vitesse de cisaillement variait de façon rapide et continue. Tous les points de mesures ont été pris après 7 à 8 secondes pendant la déstructuration et après

3.1. Recherche de conditions optimales pour favoriser l’écoulement de la résine 9 à 10 secondes pendant la restructuration. Lors de la montée en vitesse de cisaillement, la déstructuration du fluide conduit à diminuer provisoirement la profondeur de la barrière d’énergie potentielle des particules et, ainsi, diminue la viscosité apparente. Lors de la descente en vitesse de cisaillement, c’est-à-dire lors de la restructuration de la suspension, la viscosité apparaît donc plus faible [Coussot et Ancey, 1999]. Par la suite, nous étudierons essentiellement des écoulements stationnaires pour montrer l’évolution de la structure avec d’autres paramètres que ˙γ. Ceci permet de s’affranchir de l’effet thixotrope de la résine. Ainsi, nous ne tracerons, par la suite, que les rhéogrammes correspondant à la montée en vitesse de cisaillement, c’est-à-dire à la déstructuration. En effet, la montée en vitesse de cisaillement débute après un pré-cisaillement puis un repos qui favorisent un état initial du système, a priori, reproductible. La diminution en vitesse de cisaillement est impactée par l’organisation que les particules ont adoptée pendant le palier d’écoulement de 3 minutes à 200 s−1. D’autre part, le temps nécessaire à la stabilisation

de la structure, qui est inférieur à 10 secondes, est faible devant le temps caractéristique du procédé, d’environ 10 minutes, et aura peu d’impact sur la mise en œuvre de la résine.

Nous observons, sur un domaine de vitesse de cisaillement compris entre 0,01 s1 et 50 s1,

une diminution de la viscosité avec l’augmentation de la vitesse de cisaillement de la résine. Ce comportement est dit rhéofluidifiant. Aux extrémités du domaine de cisaillement cité, nous observons le début de deux domaines newtoniens.

Le comportement rhéofluidifiant est généralement expliqué par une modification de l’organi- sation de la structure du fluide, au niveau microscopique, sous l’effet de la vitesse de cisaillement. Nous avons explicité, dans le chapitre 1 (paragraphe 1.2.2, page 30), les phénomènes de structura- tion et de déstructuration des suspensions lorsqu’elles sont soumises à un cisaillement. Rappelons que la montée en vitesse de cisaillement peut être apparentée à la déstructuration du système et que la diminution en vitesse de cisaillement qui suit, à une structuration ou restructuration. Ici, nous pouvons néanmoins formuler des hypothèses plus précises sur la microstructure du fluide qui pourraient expliquer le comportement rhéofluidifiant constaté [Choplin et al., 2010] : 1. L’augmentation du glissement relatif des particules lors du cisaillement du

fluide [Romagnoli et al., 2012] :

Aux faibles vitesses de cisaillement, les interactions entre particules dominent. Le réseau de particules crée une forte résistance à l’écoulement et la viscosité résultante est élevée, mais la distribution des particules est peu perturbée grâce aux interactions inter-particulaires qui maintiennent les particules dans une configuration donnée. Lorsque la vitesse de ci- saillement augmente, les particules bougent les unes par rapport aux autres pour permettre l’écoulement. La structure change et les interactions entre particules ne sont plus capables de permettre aux particules de retrouver leur état initial. Les particules peuvent bouger plus librement qu’à faible vitesse de cisaillement et ainsi la viscosité diminue. Si le cisaille- ment devient trop important, la structure s’oriente et les particules forment des couches séparées par des couches de fluide interstitiel. À ce moment là, la viscosité atteint son minimum et le comportement atteint un plateau newtonien.

2. La rupture d’agrégats sous l’effet du gradient de vitesse [Chougnet et al., 2007] [Chougnet et al., 2008] :

Lorsque les forces d’attraction entre particules dominent, les particules forment des amas qui piègent du fluide dans leurs interstices. Lorsque la vitesse de cisaillement augmente, l’énergie de cisaillement sur les agrégats est suffisante et ils peuvent être cassés. La taille des agrégats diminue progressivement et le fluide piégé est alors libéré. La suspension devient de moins en moins visqueuse.

Cependant, nous considérerons dans ce chapitre, qu’aux faibles vitesses de cisaillement le fluide est structuré par les particules et leur interactions. Aux fortes vitesses de cisaillement, le fluide n’est plus structuré et est dans un état où seules les interactions hydrodynamiques dominent.

Nous considérerons simplement les deux points suivants. Aux faibles vitesses de cisaillement, la viscosité mesurée dépend fortement de l’énergie dissipée pour dé- placer les particules en suspension dans la solution. Aux fortes vitesses de cisaille- ment, la viscosité atteint une valeur qui représente proportionnellement la viscosité du fluide interstitiel. Ce fluide correspond à la solution de silicates alcaline.

La réalisation d’un rhéogramme dure 15 minutes (6 minutes à la déstructuration, 2 minutes d’écoulement à vitesse constante égale à 200 s1, puis 7 minutes pour la restructuration). Nous

considérerons que, à 15°C, sur ce laps de temps, la cinétique de la réaction de géopolymérisation est lente et qu’aucune évolution chimique n’a lieu. Nous vérifierons cette hypothèse dans la suite (voir paragraphe 3.1.2.2, page 74).

3.1.1.2 Choix d’un modèle de comportement : la loi de Carreau

Le comportement rhéologique observé peut être modélisé par une loi de Carreau [Carreau, 1972], introduite dans le chapitre 1 :

η − η

η0− η

=h1 + (τ ˙γ)2in−12

(3.2)