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Partie I Approches pour la mesure de la fragilité et la détection des

1.3 Conclusion

La fragilité des personnes est évaluée essentiellement par le corps médical à travers une analyse de leurs capacités motrices. Les médecins analysent la marche des personnes à travers des tests cliniques. Ils peuvent, également, utiliser des outils de mesure pour quantifier la marche.

1.1 L’œil expert à travers les tests cliniques

L’analyse de la marche à travers l’œil humain est une méthode souvent utilisée dans le monde médical, car peu coûteuse. Les médecins observent une éventuelle pathologie ou fragilité chez les personnes âgées en s’aidant d’outils tels que la vidéo, le chronomètre, le mètre et les tests cliniques. De nombreux tests ont été mis en place pour aider l’évaluation faite par le médecin. Aucun consensus n’a été posé sur le choix des tests à effectuer. Le médecin peut donc choisir parmi un large échantillon de test. La liste suivante n’est pas exhaustive, mais elle permet de citer quelques tests couramment utilisés durant la consultation des patients en cabinet :

— le test des « dix mètres de marche » où le médecin calcule le nombre de pas et/ou chronomètre le temps pour faire cette tâche ;

— le test « up and go » où le médecin calcule le temps mis par la personne pour s’asseoir, se lever, marcher sur 3 m et revenir s’asseoir ;

— le test de « durée de l’appui unipodal » où le médecin calcule le temps durant lequel la personne tient l’équilibre sur un pied sans se tenir ;

— le test de la « vitesse de marche confortable » où le médecin calcule la vitesse du patient marchant « normalement » ;

— le test de « Tinetti » permettant, à l’aide d’un questionnaire et de petits exercices, de juger de la qualité de la marche et de l’équilibre.

Chapitre 1. Panorama des approches pour l’analyse de la fragilité à l’hôpital

Figure 1.1 – Représentation de la marche humaine en diagramme bâton par Marey.

Ces tests permettent de fournir une évaluation de la qualité de la marche et de l’équilibre de la personne pour ainsi évaluer son état. Chaque médecin peut avoir un regard différent sur les résultats. Pour pallier au manque d’objectivité, d’autres techniques existent.

1.2 Outils d’analyse du mouvement

Les systèmes de mesure du mouvement sont utilisés dans divers domaines et pour divers objectifs. Ils peuvent être utilisés :

— pour étudier la marche (normale ou pathologique) de la personne dans le domaine médical ou biomécanique ;

— pour analyser le corps en activité dans le domaine du sport ;

— pour étudier l’influence de différents dispositifs sur la marche en ergonomie ;

— pour analyser la marche humanoïde dans le but de la comprendre et la reproduire dans le cadre de la robotique ;

— pour simuler la marche et l’intégrer dans des personnages virtuels dans le domaine de l’animation et la simulation de synthèse.

L’objectif commun des différents domaines est de quantifier la marche, de l’analyser dans un contexte spatio-temporel. Dès la renaissance, le sujet intéresse les scientifiques. Léonard de Vinci, Galilée et Newton analysaient déjà la marche. Mais le premier instrument de mesure naquit avec l’apparition de la chronophotographie. Cette technique consiste à prendre des photographies lors d’un mouvement pour le décomposer et le représenter sous la forme d’un diagramme de bâton comme illustré par la figure 1.1 [Marey, 1894]. En 1878 Eadweard Muybridge et en 1882 Étienne-Jules Marey utilisèrent les premiers cette technique. Muybridge analysa le mouvement du cheval et Marey le mouvement de l’oiseau en vol. Ces travaux ont constitué les prémisses du développement de nombreux outils de mesure du mouvement humain. Aujourd’hui, il existe de nombreux systèmes pour mesurer le mouvement. Nous les séparons en deux catégories : les systèmes nécessitant de placer des capteurs sur la personne et ceux sans capteurs embarqués.

1.2.1 Systèmes avec capteurs embarqués sur la personne

Différents capteurs, à poser sur le corps de la personne, existent permettant de fournir plus ou moins d’indications sur la marche. Le capteur de plus bas niveau, car apportant peu d’in-formation, est le podomètre, comptant simplement le nombre de pas effectués par la personne lorsqu’elle marche. Cet outil peut être utile également, en dehors du cabinet du médecin, pour

mener des recherches. Par exemple, en 2002 Silva et al.[Silvaet al., 2002] ont réalisé une étude

1.2. Outils d’analyse du mouvement

Figure 1.2 – Le système Walkmeter c est inspiré du locomètre de Bessou.

sur le nombre de pas par an effectués par des personnes et ont cherché des spécificités selon la catégorie de personne (homme, femme, personne obèse, etc.).

Les capteurs de mouvements (les capteurs infrarouges passifs) fournissent également un seul indicateur qui est la vitesse de marche. Un exemple d’utilisation peut être donné avec l’étude

en 2010 réalisée par Hagler et al. [Hagleret al., 2010]. Ils ont eu l’idée d’installer 4 capteurs

infrarouges (PIR) au plafond du domicile des personnes âgées. Le but était d’observer un éventuel déclin à travers la vitesse de la marche et ainsi poursuivre l’analyse en dehors du cabinet du médecin .

Le locomètre de Bessou est l’instrument représenté à la figure 1.2. Il est composé d’une boite de laquelle deux câbles sortent, pour être attachés aux deux talons. Ainsi, ce système fournit la mesure des déplacements longitudinaux des câbles. Plusieurs paramètres de la marche en sont déduits comme la longueur des pas, la fréquence du pas, la durée des appuis, etc. Ce système est limité par la longueur des câbles. Un exemple d’utilisation pour les personnes hémiplégiques est

présenté dans l’article de Condouretet al. en 1987 [Condouret et al., 1987].

Il existe également des chaussures munies de capteurs de pression permettant de récupérer les positions spatio-temporelles des pieds. A partir de ces positions, des valeurs telles que la vitesse de marche, les longueurs de pas peuvent être calculées.

Les accéléromètres, les gyroscopes ou les goniomètres ([Bourke et al., 2007], [Wu, 2000]) sont

des capteurs posés sur la jambe de la personne. Ils permettent d’analyser la marche et plus précisément l’accélération du corps ou l’angle des différents segments de la jambe lors de la marche. Ces systèmes sont posés sur les parties molles de la jambe donc il est nécessaire de vérifier qu’ils ne bougent pas au cours de la séance. De plus, le positionnement de ces capteurs varie selon la personne qui les pose.

Les systèmes optoélectroniques à marqueurs actifs s’insèrent dans cette catégorie (comme le système Selspot). La personne marche dans le champ de vision des caméras qui captent la lumière émise par les capteurs, posés sur la personne à différents endroits du corps. Cette tech-nique permet d’obtenir très précisément les trajectoires spatiales et ainsi d’en déduire un certain nombre de paramètres comme les longueurs de pas, les angles des différents segments du corps, etc. Chaque capteur est alimenté par un câble, ce qui limite les déplacements de la personne. Il existe également des systèmes optoélectroniques à marqueurs passifs permettant aux capteurs de ne plus être reliés à des câbles d’alimentation. Les systèmes Vicon et Qualisys, par exemple, sont

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des systèmes à marqueurs passifs. Ces systèmes consistent à positionner, en certains points clés du corps, des marqueurs réfléchissant un signal infrarouge émis par les caméras. Ainsi, la position 3D des différentes parties du corps est évaluée et permet, tout comme les systèmes à marqueurs actifs, de calculer les longueurs de pas, les durées, les angles entre les segments, etc. Les systèmes optoélectroniques restent des systèmes assez contraignants et coûteux. A chaque nouvelle instal-lation du système, une phase de calibration est nécessaire pour définir un repère commun entre toutes les caméras et les renseigner sur leur position les unes par rapport aux autres. Comme tout système à capteurs embarqués, le positionnement des capteurs reste dépendant de leur pose et peut bouger au cours de la marche. De plus, certains capteurs peuvent durant la marche être occultés par les segments corporels. Pour analyser correctement le mouvement de la personne, six caméras au minimum sont généralement nécessaires. Ces dispositifs sont toutefois très utili-sés dans différents secteurs, notamment en milieu hospitalier, pour la simulation de personnages virtuels, pour le sport, pour la biomécanique, etc.

L’électromyographie (EMG) est un système permettant d’enregistrer l’activité électrique mus-culaire en positionnant des électrodes sur le corps ou à l’intérieur du corps sur les muscles à étudier. Cette technique est assez controversée, car l’activité électrique enregistrée peut provenir de l’activité de muscles voisins et non pas de celui que l’on cherche à analyser.

1.2.2 Systèmes sans capteur embarqué sur la personne

Des systèmes sans capteurs embarqués sur la personne peuvent également être utilisés, la laissant libre lors de ses mouvements. Les plates-formes de force sont des outils sans capteurs embarqués sur la personne. Ces systèmes sont composés d’une simple plateforme (d’environ 60*60 cm) placée sur le parcours de marche. Ils permettent de mesurer les forces appliquées par le pied sur la plateforme lors de la marche.

Les tapis roulants instrumentés (figure 1.3) constituent également des systèmes permettant d’analyser la marche. Ils sont constitués de plateformes de force. L’avantage, comparé à la simple plateforme de force, est que le tapis analyse un grand nombre de pas successifs. La personne marche au rythme imposé par le tapis. La vitesse de marche de la personne n’est donc pas naturelle et ne peut pas être prise en compte pour juger de la qualité de la marche. D’autres paramètres comme la longueur de pas et les forces du pied sur le tapis peuvent être analysés.

Les tapis actimètriques (figure 1.4) permettent également d’enregistrer la pression plantaire exercée par le pied sur le tapis. La force appliquée par le pied est alors calculée, permettant de déduire des paramètres tels que la longueur de pas, la vitesse de marche, etc. Ce système laisse la personne libre de marcher mais il est limité par sa taille. Ce genre de tapis n’excède pas les 6 m de long.

1.3 Conclusion

Le milieu hospitalier est le premier endroit où l’on retrouve des systèmes analysant le mouve-ment des personnes dans le but d’évaluer le degré de fragilité d’une personne. La plupart de ces outils sont coûteux et nécessitent une expertise technique forte pour leur mise en œuvre. C’est pourquoi, chaque institut développe ses propres protocoles d’analyse, suivant les outils qu’ils ont à leur disposition.

1.3. Conclusion

Figure 1.3 – Le tapis roulant instrumenté de la société Biometrics.

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