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En ce qui concerne le spectre d’émission en régime impulsionnel, on constate qu’il est effectivement possible de favoriser le mode laser à 1066 nm par rapport à celui à 1063 nm

comme le montre la figure4.6. Néanmoins si l’on cherche à comparer ce nouveau dispositif

avec le laser à un cristal présenté dans le chapitre 3, le fait d’avoir mis deux cristaux au

lieu d’un seul ne résout pas entièrement les instabilités, ceci étant dû au recouvrement des

courbes de gain des deux cristaux. Le couplage entre les modes est encore une fois source

de fluctuations de la puissance émise entre les différentes longueurs d’onde, ces instabilités

étant toutefois nettement moins importantes que celles observées avec le laser à 1 cristal

grâce à une diminution importante du couplage.

Par ailleurs et contrairement à ce qui était attendu, les impulsions à 1065 nm et 1066

nm restent très majoritairement alternées. La figure4.7présente le comportement typique

observé avec une émission non synchronisée des deux longueurs d’onde d’intérêt, bien

que l’on puisse observer quelques épisodes d’émission simultanée (figure 4.8). Il apparaît

donc que le mécanisme de déclenchement d’un mode par l’autre ne fonctionne pas dans

ces conditions. La cause de cet échec vient probablement du recouvrement des intensités

dans l’absorbant saturable, ce que semblent confirmer les résultats présentés dans la partie

suivante. En effet, comme nous l’avons expliqué dans le chapitre 2, les champs électriques

des modes amplifiés forment des ondes stationnaires dans la cavité, les recouvrements

Figure 4.7 – Enregistrement d’une série d’impulsions typique du laser impulsionnel passif à 2

cristaux.

des intensités de ces champs étant à l’origine des différents coefficients de couplage entre

modes. Ainsi en régime impulsionnel, lorsqu’un mode atteint son seuil de déclenchement,

le blanchiment consécutif de l’absorbant saturable n’est pas homogène sur toute l’épaisseur

de l’absorbant mais ne se produit que sur les plages où l’intensité de ce mode est

maxi-male : le blanchiment de l’absorbant est donc périodique spatialement. Si les zones encore

non saturées correspondent aux maxima de l’intensité de l’autre mode (c’est-à-dire si les

champs des deux modes sont en quadrature), la diminution des pertes vues par ce dernier

est nulle et il ne peut alors être amplifié simultanément.

A ce stade de la réflexion, il est intéressant d’étudier la question du positionnement de

l’absorbant saturable dans la cavité. En effet, rappelons que le coefficient de recouvrement

des modes dans l’absorbant est calculé à partir du produit des intensités normalisées des

modes (c’est-à-dire les fonctions en sin2) :

Ci,k =

Rz

as

+l

as

z

as

sin2m

i

πn

g

z

L

sin2m

k

πn

g

z

L

dz

Rz

as

+l

as

z

as

sin2m

i

πn

g

z

L

dz

(4.1)

oùzasest la position de l’absorbant saturable dans la cavité. Les coefficientsCi,k dépendent

donca prioridezaset on pourrait alors s’appliquer à trouver la meilleure position possible

pour maximiser le recouvrement des modes dans l’absorbant, c’est-à-dire maximiser leur

couplage. En considérant une position z dans la cavité pour laquelle les intensités des

champs sont exactement en phase, cherchons à déterminer la longueur nécessaire pour que

les intensités des champs reviennent à nouveau en phase. Les longueurs d’onde des deux

98 Chapitre4. Laser bi-longueurs d’onde à deux cristaux

Figure 4.8 – Enregistrement d’une série d’impulsions du laser impulsionnel passif à 2 cristaux

dans les mêmes conditions expérimentales que la figure4.7.

modes que nous considérons sont séparées de 1 nm environ, c’est-à-dire qu’ils se déphasent

spatialement de 1 nm à chaque période. Par ailleurs la longueur d’onde des modes étant

d’environ 1 µm, les amplitudes de ces deux champs seront donc à nouveau en phase après

environ 1µm

1 nm = 1000 périodes, soit 1 mm. Si l’on considère les intensités des champs,

les périodes spatiales sont divisées par 2, donc les intensités seront à nouveau en phase

après environ 500µm : c’est la période du produit des intensités, la fonction intégrande en

haut de l’équation 4.1. Or tous nos absorbants ayant une épaisseur supérieure à 500 µm,

ils contiennent tous au moins une période complète de cette fonction (voir figure 4.9). En

d’autres termes, il apparaît que la positionzasde l’absorbant aura finalement peu d’effet sur

le couplage entre modes étant donné que l’absorbant contiendra toujours de grandes plages

sur lesquelles les intensités des modes se recouvrent mal (voire pas du tout), ce qui explique

pourquoi les deux longueurs d’onde ne parviennent pas à se déclencher simultanément.

Il semble donc qu’il n’y ait pas de moyen simple de synchroniser les deux longueurs

d’onde de notre laser. En supposant que l’on choisisse des cristaux émettant à des

lon-gueurs d’onde plus éloignées afin de supprimer le recouvrement des courbes de gain, le

faible couplage des modes dans l’absorbant saturable serait encore un obstacle à l’émission

simultanée en régime impulsionnel (d’autant plus si les longueurs d’onde sont plus

éloi-gnées). Une première solution pourrait être d’utiliser un absorbant de très faible épaisseur

et d’ajuster finement sa position afin de le placer sur une zone où le recouvrement des

intensités des deux modes est maximal. Afin de maintenir un coefficient de transmission

constant, il faut alors augmenter la concentration d’atomes de chrome dans la matrice de

Figure 4.9 – Evolution de l’intensité à deux longueurs d’onde différentes en fonction de la

posi-tion dans l’absorbant. Si l’absorbant est trop épais, celui-ci contiendra toujours des zones de faible

recouvrement des intensités (partie droite de la figure).

YAG. Ceci n’est a priori pas une limite puisque la concentration molaire maximale de Cr

possible est de 3%, ce qui correspond à une épaisseur d’absorbant d’environ 0, 66 µm si

l’on choisit de conserver une transmission de 89%. En revanche, la limite concerne plutôt

l’épaisseur d’absorbant : les cristaux proposés dans le commerce ne sont en général pas

disponibles à des épaisseurs inférieures à un dixième de millimètres, ce qui serait suffisant

avec les cristaux que nous avons utilisés mais deviendrait encore trop épais si l’on venait

à choisir des longueurs d’onde séparées de plus de 2 nm. Le problème peut également

venir des temps de répétition des deux modes que l’on ne parvient pas à égaliser avec cette

configuration compacte. Cheng et al. (Cheng et al. 2010) ont en effet réussi à synchroniser

deux longueurs d’onde amplifiées par deux cristaux différents en utilisant une

configura-tion plus complexe. Le recouvrement temporel entre les impulsions n’est néanmoins pas

optimal et il est possible que le succès de leur dispositif soit dû à l’éloignement spectral

des deux longueurs d’onde émises impliquant de nombreuses zones de recouvrement dans

l’absorbant.

Nous nous sommes donc intéressés à des solutions permettant de maîtriser l’émission

des impulsions. La plus utilisée est probablement le déclenchement actif, qui consiste à

insérer dans la cavité un élément dont le coefficient de transmission peut être contrôlé

électriquement en agissant sur son indice de réfraction. Si l’on impose une transmission

totale alors que les inversions de population dans les deux cristaux sont très importantes,

les deux longueurs d’onde seront émises simultanément (Zhao et al.2010). Cette solution

ne présente donc aucune incertitude pour peu que le temps de pompage des cristaux soit

100 Chapitre4. Laser bi-longueurs d’onde à deux cristaux

suffisamment long, néanmoins le coût important de cet appareil ne correspond pas aux