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CONCEPTS ASSOCIES

Dans le document 2010-2011 (Page 31-34)

La notion d’anosognosie est indiscutablement liée à celle de la conscience de soi. En effet, quelle que soit la définition proposée pour l’anosognosie, elle renvoie généralement à la conscience de soi en termes d’absence ou de perte. La conscience de soi (consciousness ou self-awareness) désigne la faculté mentale de l’être humain à être l’objet de sa propre conscience et ainsi à accéder et à appréhender ses perceptions internes (comme son propre corps), les aspects de sa personnalité, de son identité personnelle, de ses actes et donc en résumé de son existence (Gil, 2007 ; Gil et al., 2001 ).

Décrites en ces termes, les notions d’anosognosie et de conscience de soi supportent l’une et l’autre l’existence d’une entité englobant l’ensemble des connaissances spécifiques à un individu. Cette entité correspond au concept du self. Il s’agit d’un concept complexe qui met en valeur l’identité d’un individu et contient toutes les informations qui le décrivent, comme les buts auxquels il aspire, ses souvenirs, ses pensées, ses émotions, ses traits de personnalité, ses attitudes, etc. (Duval, Desgranges, Eustache, & Piolino, 2009).

Le self est envisagé comme une entité qui évolue au cours de la vie de l’individu en fonction de ses objectifs personnels, de l’évolution du contexte social dans lequel il vit et des statuts auxquels il accède au cours de son existence (Mograbi, Brown, & Morris, 2009).

L’accès au self est possible par l’intermédiaire des souvenirs autobiographiques. Les souvenirs contenus dans la mémoire autobiographique peuvent être de deux natures différentes (épisodiques ou sémantique) et sont chacuns accessibles à la conscience selon une voie spécifique (autonoétique ou noétique) (Tulving, 1985). Le terme de souvenir épisodique autobiographique désigne un souvenir personnel vécu pour lequel le contexte temporel et spatial ainsi que des détails précis liés au souvenir sont récupérés en mémoire (Tulving, 2002). La remémoration de ce type de souvenir est associée à une conscience autonoétique qui permet la reviviscence mentale de l’épisode à partir son contexte d’encodage (processus de recollection). Les souvenirs sémantiques autobiographiques, quant à eux, permettent également d’accéder au self et concernent les connaissances générales passées de l’individu. Il peut s’agir des noms et prénoms de connaissances, d’adresses personnelles, d’événements génériques et des concepts de soi (self-concept) (Tulving, 1985). L’accès à ces souvenirs est possible par l’intermédiaire de la conscience noétique. Le contexte dans lequel l’information a été apprise ne peut pas être remémoré et est basé sur un processus de récupération lié à la familiarité plutôt qu’à la recollection d’informations (voir Piolino, Desgranges,

& Eustache, 2009).

Une conception récente de la mémoire autobiographique évoque une relation dynamique entre cette dernière et le self. Ainsi Conway (2005) suggère que tout individu cherche à maintenir une cohérence et une certaine stabilité de lui-même et donc de son self. Dans cette optique, les souvenirs d’expériences vécues (souvenirs autobiographiques) sont encodés de sorte à servir la construction et la maintenance du self.

L’anosognosie

D’autres processus cognitifs de haut niveau, à savoir les fonctions exécutives, ont également été associés à l’anosognosie. Les fonctions exécutives permettent de faciliter l’adaptation de l’individu lorsqu’il est confronté à des situations complexes ou nouvelles pour lesquelles ses habilités cognitives ou les comportements habituellement pratiqués ne suffisent pas.

Un nombre important de tâches distinctes ont été attribuées aux processus exécutifs dont l’inhibition de réponses dominantes, l’initiation de comportements, la planification de l’action, la génération d’hypothèses, la flexibilité cognitive, le jugement et la prise de décision ainsi que la gestion des feedback (Collette, Hogge, Salmon, & Van der Linden, 2006). Les corrélats neuronaux des fonctions exécutives ont été largement mis en évidence au niveau des régions frontales. Des corrélations entre ces mêmes régions frontales et des mesures d’anosognosie ont également été montrées.

Finalement, des études s'intéressant à la conscience de soi chez des patients traumatisés crâniens rapportent également des corrélations entre les mesures de conscience de soi et les fonctions exécutives (Bivona et al., 2008 ;Bogod, Mateer, & MacDonald, 2003 ).

Le domaine affectif, par le biais des émotions, a également été associé à l’anosognosie et à la conscience de soi. L’émotion peut se définir par une manifestation physique liée à la perception d'un événement dans l'environnement externe, ou dans "l'espace mental" (interne). La relation qui lie le self et l’émotion a été mise en évidence à partir d’études explorant la mémoire autobiographique. Conway et Pleydell-Pearce (2000) suggèrent que l’émotion module l’encodage, la récupération et la consolidation des souvenirs en mémoire. Cette influence de l’émotion est notamment mise en évidence pour les souvenirs à valence émotionnelle positive. Un souvenir associé à une émotion positive permet une meilleure récupération qu’un souvenir à valence émotionnelle négative ou ayant un impact émotionnel trop intense.

D’autres études, ne portant pas sur la mémoire, supportent également l’existence d’un lien entre la conscience de soi et l’émotion par l’intermédiaire du concept de ‘self-conscious emotion’ (Takahashi, Yahata, Koeda, Matsuda, Asai, & Okubo, 2007 ; Tracy & Robins, 2004; pour une revue, voir Leary, 2007).

Ces théories proposent que les émotions soient générées par des processus de réflexion et d’évaluation de soi-même (self-reflexion et self-evaluation) ou encore par l’inférence de la pensée d’autrui pour soi-même. Parmi les émotions générées, on trouve le sentiment de culpabilité, d’embarras,

d’anxiété sociale, et de fierté. Le « self-conscious emotion » joue un rôle important qui guide les comportements et motivations des individus afin d’adhérer aux normes et à la morale, le but étant de protéger le bien être social de l’individu (voir, Leary, 2007).

Les liens explicités ci-dessus entre l’anosognosie, la conscience de soi, le self, la mémoire autobiographique, les fonctions exécutives et l’émotion évoquent l’existence d’un système complexe lié à la réflexion et à la conscience de soi, influencé à la fois par des facteurs cognitifs et psychologiques.

5. DOMAINES DANS LESQUELS EST SUSCEPTIBLE DE S’EXPRIMER

Dans le document 2010-2011 (Page 31-34)