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Conception d’antenne reconfigurables et problèmes associés

Méthodologie de conception d’antennes reconfigurables

2.2 Conception d’antenne reconfigurables et problèmes associés

Avant de rentrer dans les détails techniques de la conception d’une antenne reconfigurable, il est important de noter qu’il n’y a pas une, mais plusieurs méthodes de conception d’une telle antenne, et que la suite de ce chapitre se contentera d’évoquer la méthode qui a été suivie au long de la thèse. Cependant, il peut être intéressant d’évoquer de manière plus abstraite les problématiques liées aux antennes reconfigurables avant de détailler plus avant les solutions choisies dans les travaux ici présentés.

Fig. 2.1 : Conception top-down (rouge) ou bottom-up (vert et bleu) d’une antenne reconfigurable

Il faut tout d’abord se poser la question du point de départ de la conception ; on peut commencer par rechercher une géométrie d’antenne adaptée aux contraintes (de dimensions, de robustesse, de fréquence, etc.) et qui semble a priori adaptée à l’ajout de fonctionnalités reconfigurables8. Mais le point de départ peut aussi être le composant : si ce dernier possède des propriétés intéressantes dans le domaine radiofréquences, il peut servir de base à la conception d’une antenne mettant en avant ses performances ; c’est le cas par exemple des RF-MEMS dont les antennes reconfigurables sont une application naturelle (faible consommation, faible encombrement, excellentes propriétés RF, cf. 2.4.3). Enfin, le point de départ le plus intéressant, mais aussi le plus délicat, est la recherche d’une fonctionnalité

8 Voir section 2.3.1

Fonctionnalité

Géométrie d’antenne Composants de

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précise. Il faut associer dès le départ une géométrie et des composants pour essayer d’obtenir un comportement bien précis. On a donc une opposition entre deux démarches « bottom-up » qui consistent à choisir des composants (respectivement une antenne), puis une antenne (respectivement des composants) pour obtenir une fonctionnalité et une démarche « top- down » où l’on s’impose une fonctionnalité précise que l’on essaie d’obtenir en choisissant à la fois une géométrie et des composants, opposition illustrée par le schéma Fig. 2.1.

Il faut également se poser la question de la nature des composants qui seront employés dans l’antenne, car ils influencent fortement la conception de l’antenne. Tout d’abord, quel est le type de reconfigurabilité du composant ? Il peut s’agir d’un changement d’état discret (comme un interrupteur) ou continu (comme une varicap) ; cela conditionne directement la fonctionnalité finale de l’antenne. Celle-ci est donc aussi soumise aux technologies de fabrication disponibles qui détermine les composants utilisés (gravure directe sur substrat ou composants soudés a posteriori). Par ailleurs, ces composants sont actifs, ce qui ajoute des problématiques spécifiques ; leur consommation peut être une contrainte a priori forte, de même que leur tenue en puissance. En outre, des problèmes de non linéarité (comme par exemple l’autocommutation d’interrupteurs MEMS à forte puissance [77]) peuvent apparaître. Enfin, il est nécessaire de les alimenter en courant continu ; ce peut être à la fois perçu comme problématique, lorsque les circuits de polarisation sont ajoutés en fin de conception, ou comme un degré de liberté supplémentaire, lorsqu’ils sont intégrés dès les premières phases du design : ils peuvent être utilisés pour faciliter l’adaptation de l’antenne à certaines fréquences, et permettent une marge de manœuvre supplémentaire lors de son optimisation.

Le problème du nombre de composants employés dans l’antenne est également complexe. Au delà du coût de l’antenne, qui peut parfois faire partie des contraintes et qui, de manière triviale, augmente avec le nombre des composants, l’ajout d’éléments actifs a un effet à la fois positif et négatif. Pour quelles raisons peut-il être nécessaire d’employer un nombre plus important de composants ? La première résulte du composant lui même, et plus exactement de ses performances intrinsèques : il est parfois nécessaire, pour obtenir la même fonctionnalité d’utiliser plusieurs composants de moindres performances (pour des questions de disponibilité, moyens techniques et technologiques, etc.) plutôt qu’un unique élément de meilleure qualité. La seconde raison qui peut amener à multiplier les composants sur une antenne est tout simplement la fonctionnalité que l’on cherche à obtenir, et à laquelle on ne

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notamment lors des phases d’optimisation), mais aussi, a posteriori, dans le cadre de l’évolutivité du système (mise à jour du comportement de l’antenne). Cependant, cela crée également des inconvénients ; la complexité accrue de l’antenne pose des problèmes de fiabilité : si un composant est défectueux, quelles en sont les conséquences sur le comportement de l’antenne, et comment détecter l’élément incriminé ? Par ailleurs, les contraintes géométriques sont également plus fortes, notamment sur le positionnement (les composants ne doivent pas se superposer) et sur le routage des circuits de polarisation. Enfin, cette augmentation a un impact négatif sur le temps de calcul des propriétés électromagnétiques de la structure ; de manière simpliste, si une antenne mono-accès est simulée en t secondes, sa modification en une antenne à N accès entraîne un temps de simulation de N x t secondes.

La notion de temps de calcul est importante, puisqu’elle peut influencer la démarche même de conception de l’antenne. En effet si l’on dispose de moyens de calculs importants, ou si l’antenne est structurellement simple (donc rapide à calculer), on s’oriente assez naturellement vers une conception reposant sur l’optimisation. En revanche si l’antenne est complexe ou si le nombre de ports augmente significativement, la conception sera plus empirique, c’est à dire qu’on va tenter d’assimiler la géométrie de l’antenne à un assemblage d’éléments analytiquement simples, et dont on peut tenter de prévoir l’effet (en se basant notamment sur des simulations paramétriques). On reviendra plus précisément sur les problématiques d’optimisation d’antenne et de temps de calcul dans le chapitre suivant, mais il est important de noter qu’une conception centrée sur l’optimisation, si elle paraît plus simple (c’est l’algorithme d’optimisation qui « travaille ») ne l’est pas forcément : le développement de la fonction de coût, surtout dans le cas d’antennes multi-accès, peut être très délicat. D’autre part, lors d’une optimisation, il n’est pas possible de contrôler l’évolution de l’algorithme (qui peut générer des résultats inutilisables si la fonction de coût est mal conçue), par opposition à une démarche empirique où l’on procède par modifications successives. En revanche, l’utilisation d’algorithmes d’optimisation permet d’explorer une partie de l’espace des géométries engendré par les différents paramètres beaucoup plus grande qu’en procédant de manière intuitive.

Directement associée au temps de calculs est leur précision, et plus précisément leur adéquation avec les résultats de mesure. Or il n’est pas évident d’insérer des composants dans

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une antenne. On verra par la suite9 en détails qu’il est possible, par l’intermédiaire d’une modélisation sous forme d’antenne multi-ports, d’insérer les caractéristiques électriques de composants dans une antenne. Il subsiste cependant une difficulté fondamentale : si le comportement « circuit » du composant est correctement modélisé, il n’a sur la structure aucune extension spatiale ; les relations complexes entre tensions et courants (1D) sont modélisées, mais l’interaction électromagnétique du composant avec les champs électromagnétiques qui l’entourent (3D) n’est pas prise en compte. On peut supposer que cette interaction devient significative pour des composants électriquement gros et à forte constante diélectrique (ou diamagnétique ou métallisés) et qu’elle reste négligeable pour des composants de petite taille devant la longueur d’onde, de permittivité et susceptibilité peu élevées. Si cette hypothèse est vérifiée expérimentalement, cette approximation peut poser problème, notamment pour certains composants, comme les bobines, qui sont à la fois volumineux et très métallisés (et parfois ferromagnétiques) ; les seules solutions sont soit de commettre délibérément des erreurs de calcul dues à des approximations erronées, ou de modéliser l’intégralité du composant (dans le logiciel électromagnétique), ce qui au delà de la difficulté intrinsèque d’une modélisation précise de composants parfois complexes, amène à des temps de calculs prohibitifs.

Dans la suite de ce chapitre, nous détaillerons la méthode qui a été le plus utilisée au cours de la thèse pour développer des antennes reconfigurables. En se basant sur une géométrie d’antenne a priori adaptée au problème, on modifie cette dernière, en lui ajoutant des composants de reconfiguration. Si la recherche d’une fonctionnalité précise n’est pas nécessairement le point de départ de la conception, elle permet toutefois de guider les modifications de l’antenne de base. Enfin, la démarche est également de complexifier progressivement la structure (composant parfait, puis composants réalistes et enfin ajout des circuits de polarisation) afin de limiter au plus les temps de calculs dans les phases préliminaires de conception, ce qui permet une approche empirique plus spontanée (on peut « jouer » avec les paramètres de l’antenne et voir rapidement l’impact des modifications) ou une exploration plus approfondie de l’espace d’optimisation.

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