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II. Organisation du tendon

III.1. Le comportement mécanique du tendon

Le tendon est un élément essentiel de l’appareil locomoteur. Ainsi, il parait important de rappeler comment fonctionne un tendon puis de montrer ses comportements biomécaniques notamment ceux rencontrés lors de son étirement.

Le tendon étant une structure de type filiforme, plusieurs paramètres mécaniques y sont mesurables. Dans la littérature, on distingue généralement les principales caractéristiques mécaniques suivantes :

- la force maximale (valeur déterminée au point de rupture du tendon sur la courbe force-élongation). Plus la valeur de la force maximale augmente plus la structure est dite résistante.

- la raideur (la pente de la zone linéaire de la courbe force-élongation). Plus la valeur de la raideur augmente plus la structure est dite raide.

- la résistance maximale à la traction (ou contrainte maximale) c’est à dire la valeur de la force en fonction de l’aire de section du tendon lors de l’étirement (= Fmax/section finale). Plus la valeur de la contrainte maximale augmente, plus le tendon est résistant à la traction,

- la déformation longitudinale c’est à dire la valeur de l’élongation du tendon par rapport à sa longueur initiale lors du test d’étirement. Plus la déformation augmente, plus la structure est dite déformable en longueur.

- le module de Young ou module d’élasticité c’est à dire la valeur de la pente de la zone linéaire de la courbe (contrainte -déformation longitudinale). Plus la valeur du module d’élasticité augmente plus le tendon est rigide

- le stock d’énergie c’est à dire la valeur de l’énergie nécessaire pour arriver à la valeur de la force maximale du tendon. Plus la valeur du stock d’énergie augmente, plus la capacité de stockage d’énergie augmente.

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Il faut tout signaler que ces différents paramètres mécaniques du tendon varient considérablement d’une espèce animale à l’autre mais aussi au sein de la même espèce en fonction du rôle physiologique joué par le tendon. D’autres facteurs de variations sont aussi connus comme l’intensité de l’activité physique ou l’âge de l’animal.

Dans des conditions physiologiques actives normales (pendant la marche par exemple), le tendon utilise en moyenne 30% de sa force maximale déterminée au point de rupture (Malaviya

et al., 1998) et moins de 25% de sa contrainte maximale (Carlstedt et Nordin,1989). Lorsque la

contrainte appliquée sur un tendon dépasse sa résistance maximale à la traction il y a généralement rupture de la jonction tendon-os (Norman, 1985) et c’est donc la liaison tissu mou (tendon) – tissu dur (os), au niveau de l’enthèse, qui est probablement la zone de plus grande faiblesse mécanique.

Il est important d’analyser la relation "force - longueur" comme première étape de la compréhension de la mécanique du tendon. En effet, le tendon a une structure relativement raide comme le montre le fait que sa longueur augmente relativement peu quand la force d’étirement exercée augmente de façon importante (Figure III-1). A titre d’exemple, les valeurs de la raideur des tendons de l’homme est de 161 N/mm dans le tendon tibialis anterior, 150 N/mm pour le tendon gastrocnemius et jusqu'à 760 N/mm pour le tendon triceps surae (Maganaris et al., 2004). La rigidité relative du tendon est aussi montrée par la valeur relativement élevée de son module d’élasticité moyen [(0.67-1.07) GPa dans le tendon d’Achille de l’homme (Lichtwark et Wilson, 2005) et 1.2 GPa dans le tendon tibialis anterior de l’homme (Maganaris et Paul, 1999)]. En comparaison une fibre en verre à une rigité moyenne de 74 GPa. Mais les tendons sont aussi caractérisés par une résistance à la traction relativement élevée puisque, par exemple, la valeur de la contrainte maximale du tendon patellaire de l’homme est de 40 MPa avec une valeur moyenne de la force maximale qui de 3346 N (Reeves et al., 2003). Cette valeur de la force maximale varie considérablement entre les tendons ainsi qu’entre les espèces. Ainsi, dans le tendon superficial

digital flexor du poulet, cette valeur moyenne de la force maximale est de 36 N (Benevides et al.,

2004). Par ailleurs, les tendons peuvent également se déformer de façon élastique de 1-2% de leur longueur initiale pour le tendon extensor carpi radialis, de 3-4% pour le tendon flexor carpi

ulnaris ou de plus de 16% pour le tendon d’Achille du lapin (Lieber et al., 1991) et de plus de

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Les grandes variabilités de la force maximale et des valeurs de la déformation longitudinale et transversales entre espèces et entre tendons produit une grande variabilité au niveau des autres paramètres mécaniques mesurés tel que la contrainte maximale, la raideur et le module d’élasticité.

Les tendons répondent initialement à la traction par un redressement et un alignement des fibres striées du collagène. Une fois que ces fibres se sont redressées, l’élongation supplémentaire du tendon se réalise par un glissement relatif des fibrilles et des fibres de collagène par rapport à la matrice non-collagénique (Screen et al., 2002). Ce comportement du tendon est dit viscoélastique et est du principalement à la présence de collagène et d’eau intracellulaire ainsi qu’à l’interaction entre le collagène et les protéines non collagéniques (Wang, 2006). Ainsi, grâce à cette viscoélasticité élevée, le tendon est relativement déformable, dans des conditions physiologiques normales, comme c’est le cas pendant la locomotion (déformation longitudinale élevée) où une faible force lui est appliquée (Jozsa et Kannus, 1997). Une augmentation trop forte de la déformation du tendon peut aussi parfois induire des dommages physiques importants dans le tendon. Par exemple, ce phénomène est remarqué chez le cheval où 46% des dommages tendineux constatés chez les chevaux de course sont dus à l’augmentation trop forte de la déformation (strain injuries) (Williams et al., 2001).

Pendant son étirement mécanique, le tendon présente une relation non linéaire entre la contrainte (stress) et la déformation (strain) où l’on distingue classiquement trois régions (Figure III-2):

- (1) le pied de courbe (toe region). Cette région est caractérisée par une raideur très faible c'est-à-dire, une légère augmentation de la contrainte avec une augmentation considérable de la déformation.

- (2) une région linéaire, dans laquelle les fibres de collagène s’orientent progressivement dans la direction de la force ce qui augmente la valeur de la raideur du tendon. Dans cette région, le comportement mécanique du tissu est tout à fait réversible et on parle donc de zone de déformation plastique.

- (3) la région de la rupture dans laquelle les fibres de collagène et les autres constituants du tendon sont le plus fortement sollicités. A cette étape, la structure du tendon est endommagée de façon irréversible (Wang, 2006 ; Benevides et al., 2004).

Figure III-3. L’énergie élastique est la surface sous la courbe contrainte-déformation (Buchanan et Marsh, 2002).

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Ces relations entre la contrainte et la déformation avant la rupture sont déterminées par les propriétés intrinsèques des fibres de collagène et des autres composants structuraux du tendon (Benevides et al., 2004).

Le stockage d'énergie est une caractéristique extrêmement importante des tissus collagéneux de type tendons ou ligaments. Ces tissus doivent en effet être capables de stocker et de transmettre l'énergie du mouvement d’une façon élastique durant leur déformation mécanique (Silver et al., 2001). Ce phénomène est important pour faciliter la locomotion ou le mouvement du membre. Chez la dinde, Silver et al., (2000) rapportent que la force produite par le muscle

gastrocnemius est stockée dans le tendon (sous forme d’énergie élastique) durant sa déformation

mécanique et non pas dans le muscle. A l’inverse de la fonction de stockage, les tendons et les ligaments sont aussi capables d’absorber de l’énergie pendant le mouvement afin de se protéger et de protéger les articulations d’éventuels dégâts (Freeman et al., 2005). Ces auteurs suggèrent aussi que durant le mouvement du membre, l’énergie est stockée dans les régions flexibles de la molécule de collagène. Les résultats d’analyse des séquences d’acides aminés du collagène rapportés par Silver et al. (2001) et Freeman et al., (2005) indiquent que les régions de la molécule de collagène qui manquent de proline et d’hydroxyproline sont plus flexibles que celles qui contiennent la séquence glycine-proline-hydroxyproline (Gly–Pro-Hyp). Freeman et al., (2005) suggèrent alors que ces zones de la molécule de collagène sont les plus capables de stocker l’énergie durant la déformation mécanique du tendon.

Buchanan et Marsh, (2002) rapportent que plus le tendon est raide plus il a de capacités à stocker de l’'énergie, c’est-à-dire que pour un changement similaire de longueur, plus d’énergie sera stockée dans un tendon plus raide (Figure III-3, courbe A). Par contre, pour des valeurs de force maximales similaires, moins d’énergie sera stockée dans un tendon plus raide (Figure III-3, courbe B).