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Comportement mécanique de la peau sous l’effet de la traction

3. Prétension et comportement hyperélastique du tissu cutané

3.3. Comportement mécanique de la peau sous l’effet de la traction

Phase II : phase non linéaire au cours de laquelle les fibres de collagène se déplissent (Brown 1973). Lors de cette phase, le chargement augmente exponentiel- lement en fonction de l’extension.

Phase III : phase linéaire également. Elle est caractérisée par une raideur croissante de la peau sous fortes déformations. Aux cours de cette phase, les fibres de collagène sont directement soumises au chargement (Brown 1973). Le comportement viscoélastique de la peau est associé à l’interaction des fibres de collagène avec la substance fondamentale (Dunn & Silver 1983).

Figure 3.13.: Courbes contrainte-déformation de la peau abdominale selon et à travers la médiane cranio-caudale (tirée de Daly(1966))

Cependant, le comportement mécanique de la peau dépend de la direction de sollicitation. Un exemple typique sur le comportement anisotrope de la peau est illustré par la figure (3.13). En effectuant des essais de traction sur la peau abdominale, Daly (1966)) a montré que la peau est plus extensible dans le sens cranio-caudale que dans le sens transversal (figure3.13). En effet, comme les fibres sont orientées à travers l’abdomen à l’état détendu (Cox 1941), la peau abdominale est plus rigide selon cette direction (Brown 1972).

Chapitre 3 Prétension et comportement hyperélastique du tissu cutané Eprouvette E´elastique(MPa)

initial final E visqueux(MPa) initial final Homme (23ans) 10% 1000% 2.10 4.30 41.0 45.0 1.1 4.6 25 46 Femme (87ans) 10% 1000% 0.60 1.08 15.0 7.30 0.26 1.85 5.4 8.5

Table 3.1.: Modules de Young élastique et visqueux obtenus à partir des courbes contrainte-déformation incrémentales (Silver et al. 2001).

Figure 3.14.: Courbes contrainte-déformation incrémentales (élastiques et vis- queuses) de la peau humaine (tirée deSilver et al. (2001))

Par ailleurs, le comportement élastique de la peau a été découplé du compor- tement visqueux parSilver et al.(2001) en effectuant des essais de traction uniaxiale incrémentale sur de la peau thoracique et abdominale obtenue sur cadavres, d’un jeune homme de 23 ans et d’une femme de 87 ans (figure 3.14). Les éprouvettes de peau ont été soumises à une déformation incrémentale respectivement, de 0.01 et de 10 par minute. A chaque incrément, la contrainte est mesurée à l’état initial de chargement puis à l’état d’équilibre après relaxation de la peau à une déformation maintenue. Le niveau de contrainte enregistré à l’état initial cumule la part élastique réversible et la part irréversible visqueuse de la réponse du tissu. Après relaxation, le niveau enregistré correspond à la seule part élastique. Les fibres de collagène agissent comme renforts de la substance fondamentale quand la direction de sollicitation est

3.4 Conclusion

alignée avec l’orientation privilégiée des fibres. Les courbes contrainte-déformation incrémentales élastiques et visqueuses sont construites en joignant respectivement les contraintes élastiques et les contraintes visqueuses correspondant aux différentes déformations. Les valeurs relevées à partir de ces essais sont données par le tableau (3.1).

3.4. Conclusion

Les études issues de la littérature sur le comportement mécanique de la peau en corrélation avec sa microstructure, montrent que la peau est un matériau complexe anisotrope, non linéaire, dépendant du temps et prétendu in vivo.

L’anisotropie a été mise en évidence pour la première fois par (Langer 1978a,b)

en étudiant la tension cutanée. Langer a montré que la peau in vivo est en état de tension et que cette tension est plus forte selon certaines directions appelées les lignes de clivage. Ces lignes sont établies en joignant les grands axes des plaies ovales réa- lisées, en perforant systématiquement la peau du cadavre avec un instrument rond. Les axes des plaies ovales sont considérés comme étant les directions d’anisotropie spontanée de la peau.

Les lignes de clivage ont été depuis longtemps considérées et ont permis aux chirurgiens de choisir des directions d’incision compatibles avec une meilleure cica- trisation. D’autres techniques existent pour identifier les lignes de tension. Ce sont les lignes de rides proposées par Kraissl (1951) ou les lignes de la peau détendue proposées par (Borges & Alexander 1962). Cependant, une incohérence entre les lignes identifiées a été observée. L’identification des lignes d’extensibilité minimale (ou la rigidité maximale) est une méthode non invasive pour identifier les lignes de tension.

L’origine de la tension cutanée a été attribuée à l’orientation préférentielle des fibres de collagène par (Langer 1978a), mais aussi des fibres élastiques par (Zahouani & Humbert 2006). Cependant, les différents auteurs s’accordent que la peau présente une extensibilité minimale selon les lignes de tension. Par ailleurs, lors d’une incision, la peau se rétracte. La rétraction est attribuée à la tension cutanée. L’orientation de la rétraction dépend de celle des lignes de tension. La tension, la rétraction et les lignes de tension cutanée sont donc étroitement liées et interdépendantes.

La quantification de la rétraction et de la tension cutanée sont d’un grand in- térêt chirurgical. Trois méthodes de mesure de la tension cutanée ont été proposées dans la littérature. Deux méthodes in vivo qui consistent à mesurer la tension cu-

Chapitre 3 Prétension et comportement hyperélastique du tissu cutané tanée à partir de la sollicitation mécanique de la peau, respectivement en extension uniaxiale et en succion, et une méthode ex vivo qui consiste à mesurer l’effort néces- saire pour remettre des pièces de peau initialement circulaires dans leur géométrie in vivo.

La réponse de la peau à la sollicitation mécanique en traction montre que la peau a un comportement mécanique non linéaire orthotrope. Le comportement non linéaire a été associé à la réponse au chargement des fibres de collagène très denses dans le derme. A des faibles déformations, les fibres élastiques résistent faiblement au chargement montrant une phase linéaire de faible module d’élasticité dans la courbe contrainte-déformation. A des grandes déformations, les fibres de collagène résistent fortement au chargement montrant une phase linéaire de fort module d’élasticité dans la courbe contrainte-déformation empêchant ainsi une défaillance mécanique prématurée de la peau.

Enfin, la construction des courbes contrainte-déformation incrémentales ex- plique le comportement viscoélastique de la peau. Ce comportement a été associé à la résistance de la substance fondamentale à l’orientation des fibres de collagène. Du fait de la viscoélasticité de la peau, le préconditionnement reste une autre propriété importante pour étudier le comportement mécanique de la peau mais qui n’est pas prise en compte dans la présente étude.

Chapitre 4

Modèles de comportement

mécanique de la peau

4.1. Introduction

La modélisation biomécanique de la peau permet tout d’abord de prédire le comportement mécanique de la peau en vue d’une planification chirurgicale ou d’une greffe d’un substitut cutané. Elle permet aussi d’améliorer les techniques de diag- nostic des maladies de la peau. Plusieurs modèles de comportement mécanique de la peau ont été proposés dans la littérature. Cependant, aucun de ces modèles n’est entièrement satisfaisant pour simuler complètement le comportement mécanique de la peau en raison de la complexité de la structure du matériau, des conditions expé- rimentales (conditions initiales et conditions aux limites), de l’interaction entre les différents constituants de la peau, et enfin du comportement mécanique lui même (non linéaire, anisotrope, dépendant du temps et prétendu à l’état naturel). En outre, une seule surface de la peau est accessible pour les essais de caractérisation in vivo.

Principalement deux approches ont été adoptées dans la littérature pour mo- déliser le comportement mécanique de la peau, l’approche phénoménologique et l’ap- proche structurelle. Tandis que l’approche phénoménologique permet de décrire le comportement mécanique d’un matériau, l’approche structurelle permet de prédire et d’expliquer son comportement en se basant sur sa microstructure et l’interaction entre les différentes composantes du matériau. En d’autres termes, les paramètres identifiés avec le modèle phénoménologique n’ont pas de signification biologique, alors que ceux identifiés avec le modèle structurel décrivent le comportement méca- nique de chaque composante du matériau. Avec le modèle structurel, le comporte- ment global du matériau est donc déterminé en combinant les comportements des éléments structurels (réponse micro-structurelle). Les modèles phénoménologiques et structurels sont classés en modèles élastiques (indépendants du temps) et visco- élastiques (dépendants du temps). Nous nous sommes intéressés aux modèles hy-

Chapitre 4 Modèles de comportement mécanique de la peau