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Comportement mécanique d’un sol érodé par suffusion

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CHAPITRE 1. ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE

1.4. Comportement mécanique d’un sol érodé par suffusion

Du point de vue de la structure interne d’un matériau soumis à la suffusion, on a vu que la porosité augmente en raison de l’évacuation des particules fines mais que cela est ensuite compensé, au moins en partie, par le tassement du sol. Ce dernier implique des arrangements

43 importants entre grains grossiers ver un nouvel état d’équilibre mécanique et, par conséquent, une modification significative de la structure primaire du sol. La relation contrainte-déformation du sol érodé s’en trouve donc vraisemblablement modifiée par comparaison à l'échantillon de sol non érodé. Des conséquences sont donc attendues quant à la résistance du sol post-érosion, a priori plutôt dans le sens d’une diminution. Mais peu d'études approfondies existent pour le moment dans la littérature concernant cet impact de l'érosion sur le comportement mécanique des sols.

Scholtes et al. (2010) ont montré, en s’appuyant sur des études numériques, que la relation contrainte–déformation du sol était effectivement modifiée par la suffusion, passant d’un comportement dilatant à un comportement contractant. Ce changement implique une diminution significative de l’angle de frottement interne qui passe par exemple dans leur cas de 24,2° pour le sol non érodé à 20,8° pour le sol érodé (Figure 1.17).

Figure 1.17 : Enveloppe de rupture de Mohr-Coulomb correspondant à l’échantillon numérique DEM avant et après perte de particules fines (Scholtès et al., 2010).

Chang et al. (2012) ont effectué des essais de compression monotone sur une série d’échantillons de sols érodés sous différents états de contrainte (isotrope, compression et extension). Leurs résultats, comparables à ceux obtenus numériquement (DEM) par Scholtès et al. (2010) et Aboul Hosn (2017), montrent que la relation contrainte-déformation du sol évolue, après érosion, vers un comportement de plus grande contractance en conditions drainées (Figure 1.18). Ils ont également obtenu une diminution de la résistance du sol au

44 cisaillement drainé, probablement en lien direct avec l’augmentation de l’indice des vides global. Par ailleurs, des résultats complémentaires de Ke & Takahashi (2012) montrent que la diminution de la résistance de sol peut être causée par la perte des particules fines actives, c’est-à-dire impliquées dans la transmission des efforts internes, et le réarrangement des grains plus grossiers. La résistance au cisaillement des sols érodés, estimée à partir d’essais de pénétration au cône (CPT), présente une relation non linéaire avec le gradient hydraulique maximal appliqué comme on peut le voir sur la Figure 1.19 avec une diminution de plus en plus marquée de la résistance au cisaillement lorsque le gradient hydraulique appliqué augmente.

Figure 1.18 : Relation contrainte–déformation de l’essai triaxial drainé sur le sol non érodé et les sols érodés sous différentes conditions de contrainte initiale (Chang & Zhang, 2012).

45 Figure 1.19 : Relation entre la résistance des sols érodés normalisée et le gradient hydraulique

maximal appliqué (Ke & Takahashi, 2012).

Xiao & Shwiyhat (2012) ont montré de leur côté que la résistance à la compression du sol après érosion augmentait pour un sol à granulométrie discontinue mais diminuait pour un sol à granulométrie continue. Il n’est pas proposé d’interprétation claire pour ce résultat qui a été également observé par Ke & Takahashi (2014b) comme le montre la Figure 1.20.

Les essais de Ke & Takahashi (2014a, 2014b) ont aussi montré que, comparativement à un sol non érodé, le déviateur de contrainte d’un échantillon érodé soumis à un cisaillement drainé est supérieur à petites déformations (moins de 1%) puis inférieure au-delà. Pour les essais non drainés, l’échantillon érodé présente un déviateur de contrainte qui est plus grand au pic mais qui, après le pic, passe au-dessous de la valeur du sol intact. L’incohérence apparente de ces comportements mécaniques des sols érodés est vraisemblablement liée au changement de la structure du sol induit par l’érosion. Il est probable que l’échantillon de sol érodé présente de fortes hétérogénéités suite à une perte de particules fines plus importante dans des zones d’écoulements préférentiels. Les analyses de Chang & Zhang (2011), Ke & Takahashi (2014b) et Moffat et al. (2011) ont ainsi montré que la teneur en fines après érosion n’était pas la même dans les différentes couches horizontales de l’échantillon. Par ailleurs, ce type d’hétérogénéité transversale (c’est-à-dire perpendiculairement à la direction principale d’écoulement) induite par suffusion a également été observé par Sail et al. (2012), Luo et al.

46 (2012) (Figure 1.21). L’augmentation de la résistance au pic pourrait par exemple être due à l’accumulation de fines dans certaines zones de l’échantillon dont le squelette granulaire se trouverait renforcé. Des études de la microstructure du sol érodé en termes de distribution en particules fines et de réarrangement des particules grossières sont nécessaires pour mieux comprendre le comportement du sol à la suffusion et proposer des explications sur ces résultats contradictoires au niveau du comportement mécanique d’un sol érodé.

L’étude de la microstructure du sol érodé, dans l’objectif d’interpréter plus finement le comportement mécanique, est également une des motivations fortes de ce travail de thèse. Par de la visualisation interne de l’échantillon de sol par mesures de tomographie à rayons X, il s’avère possible de répondre pour partie aux interrogations soulevées ci-dessus et ainsi mieux comprendre la différence de comportement entre sol érodé et sol non érodé. La technique utilisée est décrite dans le Chapitre 2 et les résultats obtenus sont présentés dans le Chapitre 4.

Figure 1.20 : Essai triaxial non drainé sur sol non érodé et sol érodé (Ke & Takahashi, 2014b).

47 Figure 1.21 : Canaux concentrés de migration des fines (Luo et al. 2012).

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