II. Procédé de Fonderie
II.3 Résultats expérimentaux
II.3.2 Comportement du lingotin et du radeau inclusionnaire
La fusion du lingotin de 8,6 kg se déroule toujours selon quatre étapes distinctes :
Etape 1 : Tout d’abord, le lingotin commence par s’échauffer, puis par fondre
par son pied (situé en fond de creuset). Sa partie haute, encore solide, bascule et s’appuie
sur la paroi du creuset de fusion [Figure 19, a., b.].
Etape 2 : Le lingotin fond progressivement faisant ainsi glisser sa partie
supérieure encore solide contre la paroi du creuset.
Etape 3 : Une fois la quasi-totalité du lingotin fondue, il reste en surface du
bain un disque de métal solide [Figure 20]. Ce « glaçon », comme le dénomment les
opérateurs, est mis en mouvement par l’agitation de la partie liquide le supportant, ce qui
conduit à des contacts répétés avec la paroi du creuset.
max : 7,4 % min : - 3,4 %
Ecart (%)
mm
mm
max : 6,1 % min : - 4,9 %
Ecart (%)
mm
mm
max : 4,6 % min : - 2,7 %
Ecart (%)
mm
mm
z
r
32
Etape 4 : Enfin, après fusion du « glaçon », le bain est maintenu totalement
liquide avant la coulée.
D’après l’ensemble des enregistrements vidéo réalisés, on constate que la fusion du lingotin
suit un cycle assez reproductible pour l’ensemble des fusions comme le montre le Tableau 5.
Référence Charge B7C3 B8C2 B8C3
Etapes 1 et 2 (s) 132 128 131
Etape 3 (s) 149 170 180
Etape 4 (s) 60 60 60
Temps de fusion total (s) 341 358 371
Tableau 5 : Répartition en temps entre la période de chute et de fusion du lingotin.
Figure 19 : Une charge conventionnelle de 8,6 kg avec les bords supérieurs
et inférieurs chanfreinés (à gauche),
Fusion partielle du lingotin (a. et b.) avec appui de sa partie supérieure,
encore solide, contre la paroi du creuset (étapes 1 et 2) (à droite).
Analyse qualitative de l’évolution du radeau d’inclusions
A partir des observations à la caméra HD et avec l’appareil photo, nous avons pu
établir les constats qui suivent.
D’un point de vue hydrodynamique, la surface du bain de métal liquide est relativement
calme durant la fusion du lingotin et devient plus agitée lorsqu’il ne reste plus que le lingotin
circulaire en surface du bain et lors du maintien en température du bain.
Les inclusions (pour le moins une fraction d’entre elles) sont capturées en surface du bain
liquide pour former un radeau, très visible optiquement, ce qui montre la faible mouillabilité
des particules.
Si l’on s’intéresse au comportement des inclusions en surface du bain au cours de la fusion,
nous pouvons observer les mécanismes d’apparition des inclusions en surface. Pour
Bord supérieur
Bord inférieur
a.
20 mm
20 mm
b.
33
l’ensemble des fusions filmées dans leur intégralité, on peut résumer les phénomènes en
fonction des quatre étapes du procédé de fusion :
Lors des étapes 1 et 2, des agrégats de petites tailles arrivent au milieu de la
surface du bain entre la paroi du creuset et la périphérie du lingotin. Ces derniers
viennent se regrouper le long de la paroi interne du creuset, mais aussi en
périphérie du lingotin. Les radeaux sont les zones claires du bain [Figure 20].
Pour l’étape 3, il est intéressant de constater que seul le radeau externe présente
une croissance importante et régulière à l’inverse du radeau interne qui n’évolue
que très peu. Ceci est dû au fait qu’à chaque contact entre la paroi interne du
creuset et le lingotin, une partie des inclusions, en périphérie de ce disque de métal
flottant, adhère au radeau externe.
Enfin lors de l’étape 4, une fois le lingotin complètement fondu, l’ensemble des
inclusions en surface se localise dans le radeau externe et plus aucune remontée
n’est détectée (avec la définition de la caméra) en milieu du bain liquide comme
c’était le cas au cours des étapes 1 et 2. La largeur de ce radeau n’est pas
axisymétrique, et ceci pour l’ensemble des fusions filmées durant la phase de
maintien en température [Figure 20].
Figure 20 : Image extraite en cours de fusion d’une charge d’AM1.
Durant ces différentes étapes, du fait des mouvements du métal liquide, on constate
que le métal mouille en partie les parois du creuset situées hors du bain liquide. Le métal s’y
dépose et semble se solidifier. Lorsque le bain de métal liquide vient à nouveau mouiller la
partie où s’est précédemment déposé du métal, il semble y avoir décrochage de particules
qui viennent se localiser en périphérie du bain comme montré sur les clichés de la Figure 21.
Les vignettes 1 et 2 montrent clairement le mouillage de la paroi interne du creuset de fusion
et la formation d’un dépôt de métal liquide hors du bain. Les vignettes 3 et 4 montrent le
décrochage et l’incorporation de ce dépôt au sein de la pellicule externe. Le dépôt est
repérable par un cercle de couleur verte lors de sa formation et par un cercle de couleur
bleue lors de son incorporation au sein du radeau. On note que les mécanismes de
Radeau interne
Radeau externe
Paroi creuset
Lingotin
(« glaçon »)
20 mm
34
mouillage du creuset par le métal liquide s’effectuent en de multiples endroits à proximité de
la surface liquide, repérables sur la vignette 2 par des flèches de couleur verte [Figure 21].
1. 2.
3. 4.
Figure 21 : Introduction de particules au sein du bain lors du mouillage du creuset par le métal liquide.
Il semble donc que les mécanismes de mouillage / démouillage puissent être à l’origine
d’une pollution supplémentaire du bain venant s’ajouter à celle mise en évidence par la suite.
Analyse de l’évolution du radeau inclusionnaire.
L’évolution temporelle de la fraction de la surface du bain occupée par le radeau est
représentée sur la Figure 22 pour cinq fusions au comportement bien représentatif.
Rappelons que la phase de maintien en température a une durée standard de 60 s. Pour
une des fusions analysées cette durée a été portée à 240 s.
La surface couverte par le radeau atteint environ 15 % de la superficie du bain, ce qui peut
être considéré comme une surface importante au regard de la propreté de l’alliage de départ.
Cela correspond, si l’axisymétrie est respectée, à une surface de radeau de 1299 mm².
La majorité des bains, à l’exception de l’essai référencé B8C2 présentant une
stabilisation de la propreté inclusionnaire, possède le même ordre de grandeur pour la
20 mm
20 mm 20 mm
35
vitesse de croissance du radeau en surface de l’ordre de 3.10
-2%.s
-1. On remarque aussi
que le taux d’occupation en surface pour trois des quatre fusions, évalué toutes les 30 s, a
continué à augmenter après la fusion totale du lingotin. Ce comportement est aussi observé
pour la fusion pour laquelle la phase de maintien a été volontairement prolongée.
Figure 22 : Evolution du taux d’occupation de la population inclusionnaire en surface du bain liquide au
cours d’un cycle industriel classique (fusion + maintien en température).
L’absence de différents régimes de croissance du radeau inclusionnaire [Figure 22], au
cours du cycle de fusion, et ce notamment lorsque la majorité du bain est liquide, remet en
cause l’hypothèse selon laquelle les contacts répétés du lingotin [Figure 19 et Figure 21]
seraient source d’alimentation de particules exogènes en surface du bain liquide
(arrachement de particules d’alumine composant le creuset). L’augmentation de la taille du
radeau, durant et après la fusion complète, ne peut donc s’expliquer que par une pollution
exogène du bain, liée à une interaction (mécanique et/ou chimique) entre le métal liquide et
le creuset.
Analyse de la morphologie du radeau inclusionnaire
On constate que le radeau, lors de la phase de maintien en température, est composé
par une multitude de particules parfaitement indépendantes les unes des autres [Figure 23].
Nous avons ici utilisé l’appareil photo numérique Nikkon D2Xs qui dispose d’une meilleure
définition ; à la surface du bain, 1 pixel correspond à une aire de 6,3.10
-4mm
2.
Fin de fusion du lingotin
Coulée
36
Figure 23 : Distribution des agrégats d’inclusions au sein du radeau
au cours de la phase de maintien en température.
On remarque que le radeau est composé d’agrégats de formes et de tailles variées et
que la disposition des agrégats au sein du radeau ne suit pas un schéma particulier [Figure
23]. Une estimation de la taille des particules au cours de cette phase a été possible à partir
de clichés pris avec l’appareil photo numérique [Figure 24].
Figure 24 : Distribution en taille des agrégats d’inclusions présents
au cours de la phase de maintien en température.
Les particules ont une taille moyenne de 2,9 mm (avec un écart type de 0,6 mm pour
un échantillonnage de 200 agrégats). Il a été remarqué au cours des tous premiers instants
de fusion du lingotin et ce jusqu’à sa fusion complète, la remontée de particules de tailles
inférieures aux particules composant le radeau inclusionnaire au cours de la phase de
maintien en température. La limite de définition de la caméra, les fortes perturbations de la
surface du bain liquide et l’éloignement important de la caméra par rapport à la surface du
bain ne permettent pas d’estimer la taille des particules aux tous premiers instants du cycle
de fusion. L’évolution de croissance en taille des particules entre le début de la fusion et la
fin de la phase de fusion du lingotin laisse penser à des phénomènes de regroupement tels
37
que des mécanismes d’agrégation et d’agglomération. Ces aspects seront discutés par la
suite [cf. section III.2].
Dans le document
Comportement des oxydes dans un procédé de fonderie d'alliages base nickel
(Page 33-39)