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Résultats obtenus lors des tests

IV.1.2. Complexes inertes et complexes labiles

L’une des réactions fondamentales dans la chimie de coordination est le remplacement de l’un des ligands du métal par un autre ligand ; cette réaction est appelée « réaction de substitution ». Ces réactions procèdent selon une palette de vitesses très étendue ; le temps de réaction peut en effet aller de quelques nanosecondes, pour les aqua-ions de cuivre(II), à plus de 300 ans pour les aqua- ions d’iridium(III) ; la constante de vitesse s’étalant sur plus de 18 ordres de grandeurs. Ru3+ Ti3+ Ni2+ Pd2+ Zn2+Cd2+ Hg2+ Cu2+ Ru2+ Pt2+ Be2+ Sr2+ Rb+ Ca2+ Ho3+ In3+ V3+ Fe3+Ga3+ Ir3+ Rh3+ Cr3+ Al3+ V2+ Co2+Fe2+Mn2+ Yb3+ 10 10 10 8 10 6 10 4 102 10 0 10- 2 10 -4 10 -6 10 -8 10 -10 LiNa+ + tH2O/ s kH2O/ s -1 10 -10 10 -8 10 -6 10 -4 10-2 10 0 10 2 10 4 10 6 10 8 10 10 TmEr3+ 3+ Dy3+ Tb3+ Gd3+ Cr2+ K+ Mg2+ Eu2+ Ba2+ Cs+ kex / s-1

Figure IV.5. La figure montre le temps de résidence d’une molécule d’eau dans la

première sphère de coordination d’un ion métallique donné, ainsi que la constante de vitesse de l’échange correspondant, kex = 1 / tex

(illustration tirée de la référence [76]). .

Il est en général admis de séparer les complexes en deux catégories : les complexes labiles et les complexes inertes. Cette description empirique est basée sur le temps employé par la réaction de substitution pour se faire. Taube a proposé un modèle pour ces réactions dans lesquelles un ligand coordonné au métal central est

remplacé par un autre ligand [61] : M L L L L L L M L L L X L L + X + L

Si le processus est complété en moins d’une minute (à 298 K avec une concentration de réactifs valant 0,1 M), le complexe sera considéré comme étant labile ; si la réaction prend plus de temps, le complexe sera alors dit inerte [49,61]. Cette propriété est naturellement liée au type d’ion et à son état d’oxydation.

Il est maintenant bien établi que les complexes de chrome(III) [61], de cobalt(III) [107], de rhodium(III) [8-9,59,106] et d’iridium(III) [10] sont particulièrement inertes [93]. On constate que cela concerne les complexes de métaux d3 ou de métaux d6 à spin bas. Orgel [94], puis Jørgensen [95] avaient déjà mis en évidence, au milieu du siècle dernier, le fait que la stabilisation due au champ des ligands est déterminante pour la cinétique d’une réaction de substitution ou d’échange.

Basolo et Pearson [50] ont utilisé une approche basée sur le champ des ligands afin d’essayer de rationaliser ces observations. En se basant sur les travaux de Hush [93], ces auteurs ont montré comment il est possible d’associer l’énergie liée à l’effet de stabilisation due au champ des ligands (LSFE) à l’inertie d’un complexe d’un métal dn donné, ainsi qu’à son mode de réaction de substitution (ceci en termes de

Doct). En comparant l’énergie LSFE associée au complexe octaédrique de départ à

l’énergie associée aux états de transition impliqués dans les deux mécanismes d’échange envisageables, il est possible de déterminer quel mécanisme sera préférentiellement suivi.

Les deux mécanismes d’échange possibles sont le mécanisme limite associatif, dans lequel le métal a un nombre de coordination plus élevé à l’état de transition (mécanisme analogue à la réaction SN2 organique), et le mécanisme limite

(mécanisme analogue à la substitution SN1 organique). Le mécanisme limite

associatif implique donc un état de transition hepta-coordonné alors que le mécanisme limite dissociatif implique un état de transition penta-coordonné. L’espèce penta-coordonnée peut exister avec une symétrie pyramidale à base carrée ou trigonale bipyramidale, alors que l’espèce hepta-coordonnée sera de symétrie pentagonale bipyramidale.

Il est donc possible d’évaluer l’énergie due à la stabilisation du champ des ligands en faisant comme approximation que la magnitude du champ des ligands ne varie globalement pas lors du changement de coordination (variation du nombre de ligands), ceci se justifiant par le fait que la perte d’un ligand est compensée par la modification des distances de liaisons des ligands restant. La variation de l’énergie de stabilisation due à l’effet du champ des ligands entre le complexe de départ et l’état de transition est appelée « énergie d’activation du champ des ligands » (LFAE). Une diminution de cette énergie de stabilisation (LFAE > 0 selon la définition proposée) amènera donc une contribution positive à l’énergie d’activation globale requise par le processus (augmentation), alors qu’une contribution négative produira une diminution de l’énergie d’activation requise. L’énergie d’activation due au champ des ligands n’est toutefois qu’une composante de l’énergie d’activation totale ; il faut encore tenir compte en effet des énergies de rupture et de formation des liaisons des groupes entrant et sortant.

Les résultats collectés par ces auteurs ont pu cependant montrer que l’énergie requise pour les complexes d3 et d6 à spin bas est positive, quelque soit le type de coordination ou la géométrie de l’état de transition [50].

x2-y2 z2 xy xz, yz z2 x2-y2, xy xz, yz Octaèdre Pyramide à base carrée (penta-coordonnée) Bipyramide pentagonale (hepta-coordonnée)

Figure IV.6. La contribution de l’énergie de stabilisation des ligands pour un ion

d3 octaédrique vaut – 1,2×D

oct. Les énergies estimées pour l’état de

transition penta-coordonné et pour l’état de transition hepta- coordonné valent respectivement – 1,0×Doct et –0,774×Doct, et

conduisent à des « énergies d’activation » dues au champ des ligands de + 0,2×Doct (penta-) et + 0,426×Doct (hepta-).

D’après l’exemple présenté dans la figure IV.6, on pourrait penser que le mécanisme impliquant un état de transition penta-coordonné sera favorisé pour les systèmes d3 car l’énergie d’activation requise est plus faible que pour le mécanisme passant par un état de transition hepta-coordonné. Les études successives sur les mécanismes d’échange ont cependant montré que cette conclusion est fausse [1,3-4,51-54]. Les calculs simplifiés des énergies d’activation dues au champ des ligands ne permettent donc pas une prédiction du mécanisme suivi ; il faudrait pour cela utiliser un meilleur modèle de l’état de transition et tenir compte des effets de la seconde sphère de coordination.

Ces calculs ont cependant l’intérêt de montrer que l’énergie d’activation due au champ des ligands est une contribution importante à l’enthalpie libre d’activation de Gibbs DG‡

IV.1.3. Mécanismes de substitution et d’échange de solvant :