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b) Le complexe de St Sylvestre : encaissant granitique des pegmatites des Monts d’Ambazac

Mise en contexte

II.2. b) Le complexe de St Sylvestre : encaissant granitique des pegmatites des Monts d’Ambazac

1) Organisation d’ensemble et forme tridimensionnelle

D’Ouest en Est, les massifs de Brâme, Saint-Sylvestre et Saint-Goussaud forment un complexe granitique d’environ 100 km² qui a fait l’objet de très nombreux travaux car hébergeant, l’un des plus grands districts uranifères français, La Crouzille (Fig.II-5). Durant toute la période de l’exploitation (de 1948 à 1995), de nombreux auteurs ont participé à la description minéralogique, géochimique, géochronologique et structurale de ce complexe granitique afin de mieux contraindre le modèle métallogénique uranifère.

Figure II-5: Carte géologique simplifiée du Complexe Granitique de Saint-Sylvestre (Limousin, NO Massif Central). Les symboles noirs correspondent aux différents types de pegmatites affleurant dans le massif de

Saint-Sylvestre. Ces derniers seront discutés ultérieurement dans ce chapitre.

L’apport des données gravimétriques a permis de démontrer la forme laccolitique du complexe (Audrain et al., 1989). Il s’agit d’une intrusion de faible épaisseur (en moyenne 2 km), injectée entre l’unité parautochtone et l’UIG. Seul le granite de Saint-Goussaud à l’Est, est encaissé dans le parautochtone (Fig.II-5). Le massif de Brâme est bordé à l’Ouest par la faille normale de Nantiat orientée NNO-SSE. Le contact structural entre ce massif et le massif de

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Saint-Sylvestre est caractérisé par la faille dite de Noémie (orientée également NNO-SSE) et enfin, la faille de la RN20 de même orientation, qui vient recouper le massif de Saint-Sylvestre en plein cœur du district de La Crouzille. La faille normale de Nantiat a d’autant plus été étudiée qu’elle est impliquée dans de nombreux modèles de mise en place du laccolithe (e.g. Faure & Pons, 1991 ; Gébelin, 2004) tandis que, les contacts structuraux entre les massifs Brâme-St Sylvestre et les deux faciès granitiques du St sylvestre ont été mis en évidence lors de travaux miniers souterrains (données AREVA).

2) Structuration interne du Complexe Granitique de Saint -Sylvestre

La structuration interne du complexe granitique a été étudiée très en détails par Mollier & Bouchez (1982). Ils furent les premiers à proposer une carte d’orientation des structures et des foliations magmatiques à travers les massifs de Brâme, St Sylvestre et St Goussaud. De manière générale, l’étude des structures permet de mettre en relation la mise en place des granites avec la tectonique régionale à savoir, le fonctionnement des failles de Nantiat à l’Ouest (i.e. foliation magmatique verticalisée à son contact) et d’Arrènes-Ouzilly au Nord. Leurs travaux révèlent 2 orientations principales des foliations magmatiques. Une orientation NO-SE à pendage principalement subhorizontal, très bien représenté dans le massif de Brâme. La fabrique magmatique a enregistré la mise en place du laccolithe, injecté dans une pile de terrains métamorphiques (intercalés entre l’UPG et l’UIG) à foliation horizontale marquée et une faible linéation horizontale dirigée vers le NO. Une seconde famille de foliations magmatiques est aussi observable au cœur du complexe, orientée NNE et correspondant à la localisation des failles de Noémie et de la RN20. Quelques années plus tard, Nédélec & Bouchez (2011) ont interprété ces trajectoires de foliations magmatiques, délimitant les massifs de Brâme et St Sylvestre comme une importante zone de cisaillement normale dextre. Les mesures de foliations magmatiques E-O présentes sur la bordure Sud du complexe n’ont pas été prises en compte dans cette étude.

3) Pétrographie et géochimie des faciès granitiques : relations mutuelles

Comme mentionné précédemment, de nombreuses études pétrographiques et géochimiques ont été entreprises depuis les années 70 afin de caractériser les divers faciès présents dans le complexe granitique de St Sylvestre (e.g. Barbier & Ranchin, 1969 ; Burnol, 1974 ; Flageollet et al., 1974). Certaines différences géochimiques sont également observables à travers les données de sédiments de ruisseau analysés dans le cadre de l’inventaire minier national à partir des éléments tels que le Be, As ou encore P.

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L’inventaire des données disponibles sur les faciès granitiques de la zone d’étude est illustré dans la Table II-1.

Table II-1: Inventaire des données disponibles sur les différents faciès granitiques affleurant dans le complexe granitique de St Sylvestre, d'après Barbier & Ranchin (1969), Flageollet et al. (1974), et Burnol (1974).

Bien que le massif de St Goussaud soit régulièrement associé au faciès de St Sylvestre, il sera considéré dans cette étude comme un faciès à part entière, au regard des données pétrologiques et géochimiques. De la même manière, les faciès constituant ces trois massifs ne sont pas considérés comme leucocrates, le pourcentage d’éléments ferromagnésiens (e.g. biotite) estimé sur le terrain étant trop important (i.e. > 5 % sur roche totale).

D’après les données présentées dans la Table II-1, les trois granites constituant le complexe granitique de St Sylvestre se différencient par leur minéralogie (disparition de la biotite vers l’Est du complexe granitique) et par leur géochimie (magma de plus en plus sodique vers l’Est du complexe). De manière générale, la description des faciès qu’elle soit pétrographique ou géochimique a permis de mettre en évidence une évolution chimique du magma granitique lors de sa mise en place, de son extension latérale vers l’Est, et de sa cristallisation (i.e. augmentation de la teneur en éléments volatils tels que Li, Be). Le massif de Brâme se serait donc premièrement mis en place suivi des massifs de St Sylvestre et de St Goussaud. Le granite des Sagnes, le plus différencié serait le plus jeune du massif (comme en témoignent les teneurs élevées en Li et Be, Table II-1).

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4) Géochronologie et contraintes sur la mise en place du complexe granitique

Duthou (1977) fut le premier à dater des échantillons du faciès type Brâme et type St Sylvestre, respectivement à 360 Ma et 325 ± 18 Ma par la méthode Rb/Sr sur roche totale. Par la suite, Holliger et al. (1986) ont publié un âge U/Pb sur zircon et monazite échantillonnés à la frontièresdes massifs de Brâme et de St Sylvestre, commun pour ces deux granites à 324 ± 4 Ma.

Scaillet et al. (1996) ont daté le refroidissement du complexe granitique d’après la méthode

40Ar/39Ar sur 2 populations de micas échantillonnées à travers les trois massifs. Les âges de fermetures enregistrés à 301, 305 et 308-314 Ma d’Ouest en Est ont été interprétés par ces mêmes auteurs comme les températures initiales présentes en profondeur suivant une section verticale, de bas en haut : 301 Ma enregistré dans le granite de Brâme, 305 Ma enregistré dans le granite de St Sylvestre et enfin 308 Ma enregistré dans le granite de St Goussaud. Par le jeu des failles postérieures à la mise en place du laccolithe, ces températures de fermeture auraient été exhumées. D’après Scaillet al. (1996), des taux d’exhumations différents auraient été impliqués pour justifier les 14 Ma nécessaires au refroidissement du massif granitique.

Plus récemment, une campagne de datation par méthode U/Pb sur zircon a été relancée pour discriminer temporellement chacun des faciès constituant le complexe granitique de St Sylvestre

(Villaros et al., données non publiées). Deux âges fixés à 328,6 ± 3,4 Ma et 326, 6 ± 3,1 Ma ont été obtenus sur le granite de St Sylvestre. Le massif de Brâme a été daté à 324 ± 3 Ma, celui de St Goussaud à 336 ± 4,7 Ma et enfin le faciès à grain fin de Châteauponsac à 320,4 ± 4,4 Ma. L’âge obtenu sur le Brâme est cohérent avec celui de Holliger et al. (1986). Les âges obtenus sur le massif de St Sylvestre sont sensiblement les mêmes en tenant compte des barres d’erreurs > 3 Ma. En revanche, le massif de St Goussaud est plus vieux d’environ 10 Ma. Cet âge n’est ni cohérent avec le modèle thermique de refroidissement du complexe granitique proposé par

Scaillet et al. (1996), ni avec la classification géochimique et temporelle des faciès granitiques proposée par Cheilletz et al. (1992). De plus, les données géochimiques des différents massifs soulignaient une différenciation du magma latérale vers l’Est (i.e vers le massif de St Goussaud). L’âge U/Pb de ce massif vient donc contredire cette différenciation chimique dans le temps. Enfin, le granite de Châteauponsac est décrit comme le plus jeune du complexe granitique, d’environ 5 Ma. Cet âge est cohérent avec le caractère intrusif de ce faciès dans le massif du Brâme. Malheureusement, aucune datation n’est disponible sur le faciès granitique de Fanay, intrusif dans le massif de St Sylvestre, orienté principalement N-S et affleurant majoritairement le long de la faille RN20.

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A l’heure actuelle, aucune datation n’existe - à notre connaissance - sur le granite à éléments rares des Sagnes, en intrusion dans l’extrémité Sud-Est du massif de St Sylvestre. Il a été classiquement admis que ce dernier était à l’origine des pegmatites lithinifères affleurant dans le district de Chèdeville. L’une d’entre elles a été datée à 309 ± 0,9 Ma par Cheilletz et al. (1992). De ce fait, le granite des Sagnes et les pegmatites lithinifères du district de Chèdeville ont été rattachés temporellement à l’évènement magmatique à éléments rares qui a eu lieu à la fin de l’orogénèse Varisque (Marignac & Cuney, 1999), à laquelle sont rattachés également la rhyolithe de Richemont, les granites de Beauvoir, Montebras et de Chavance (cf. Fig.II-3).