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Chapitre I. Contexte géologique général et gisements aurifères du Craton Ouest-Africain

Chapitre 5 : Etude de la minéralisation

V. Etude des inclusions fluides

V.5 Comparaison avec les données IF d’autres gisements du craton Ouest africain

Le tableau révisé de Coulibaly et al. (2008) récapitule la diversité des types d’IF et leurs caractéristiques compositionnelles et thermométriques pour plusieurs gisements aurifères du COA (Tableau 16). Nous y avons bien évidemment ajouté les résultats de cette étude mais également celles d’autres gisements étudiés depuis 2008, p. ex., Bepkong et Julie au Ghana (Amponsah et al., 2015 ; 2016), Loulo, Morila et Kalana au Mali (Hammond et al., 2011 ; Lawrence et al., 2013 ; Lambert-Smith et al., 2016 ; Sangaré, 2016). Les IF étudiées au niveau des trois gisements de la ceinture de Syama partagent un grand nombre de caractéristiques avec celles rencontrées dans plusieurs gisements du COA. On retrouve en effet, les trois principales compositions de fluides décrites dans le COA: type 1 / inclusions riches en volatils avec des IF à CO2 ≥ 80 mol% ; type 2 / inclusions aquo-carboniques riches en H2O (-NaCl) ;

type3 / IF aqueuses avec des salinités variables.

Les données présentées par certains auteurs ont déjà été l’objet d’une synthèse à l'échelle du COA (p. ex., Klemd et al., 1996, Schmidt Mumm et al, 1997, Schmidt Mumm, 1998). Ces auteurs faisaient remarquer que les caractéristiques des fluides des gisements aurifères du COA différaient des autres gisements orogéniques par la présence fréquente d'IF à CO2-N2.

Les deux compositions contrastées de fluides (type 1 et 2) sont rencontrées dans de nombreux gisements aurifères du COA. Les deux types diffèrent essentiellement par leur teneur en eau ; dans le type riche en composés volatils, le CO2 (+ N2 + CH4) dépasse souvent les 80%, tandis

que dans le type riche en eau, la teneur en volatils n'excède jamais les 20%. L'abondance d'IF à CO2-N2 est une caractéristique singulière des gisements orogéniques d'Afrique de l'Ouest

par rapport aux sites canadiens ou australiens, où les IF contiennent souvent un fluide à H2O-

CO2 à faible salinité (Groves et al., 1998) et avec un XCO2 compris entre 0.2 et 0.3 (p. ex.,

Phillips et Evans, 2004 ; Bodnar et al., 2014, Fig. 59).

Les deux types d’IF se retrouvent fréquemment au sein d’un même gisement mais les proportions de chacune des deux populations varient fortement d’un gisement à l’autre. Par exemple, dans la plupart des gisements ghanéens de la ceinture d’Ashanti (voir synthèse dans Klemd et al., 1996) et de la ceinture de Wa – Lawra, avec le gisement de Bepkong (Amponsah et al., 2015), la grande majorité des IF appartiennent au type CO2-N2 (CH4)

137 2008) au Burkina Faso ainsi qu’à Yaouré – Angovia en Côte d’Ivoire (Coulibaly et al., 2008). Enfin, dans de nombreux gisements, on peut retrouver les deux types d'IF bien représentés. C'est notamment le cas dans le Prospect d’Abwasso (Wille et Klemd, 2004) et d’Ayanfuri (Schmidt Mumm et al., 1997) au Ghana, de Larafella (Klemd et Ott, 1997) et de Taparko (Bourges et al., 1998) au Burkina Faso. On trouve également des IF « mixtes » à H2O-NaCl-

CO2-N2 comme à Julie (Amponsah et al., 2016) au Ghana, Guibaré (Dubois et al., 2001) au

Burkina Faso, Kalana (Sangaré et al., 2016), Loulo (Lawrence et al. (2013) et Gounkoto (Lambert-Smith et al., 2016) au Mali.

Dans les divers gisements, les IF riches en composés volatils présentent une très grande gamme de densité apparente, les densités les plus élevées pouvant atteindre les 1.15 g/cm3 (p.ex. Abosso – Damang, Ghana, Tableau 16). Les IF aqueuses sont fréquemment décrites comme secondaires et postérieures à la population riche en volatils. Les températures de fusion de la glace indiquent généralement un fluide à faible salinité (moyenne de 10.5% pds éq. NaCl pour l’ensemble des gisements) et des températures eutectiques compatibles avec une solution dominée par NaCl. Cependant, des salinités plus élevées ont été déterminées: 14 à 19% pds éq. NaCl à Diabatou, (Klemd et al., 1997), 18% pds éq. NaCl dans la mine d'or d’Ashanti (Oberthür et al., 1994) et jusqu’à 23% pds éq. NaCl à Loulo (Lawrence et al., 2013). Dans le cas d’Ashanti, des températures eutectiques très faibles (-57.3 à -38.3 ° C) indiquent des solutions ioniques complexes comprenant probablement du CaCl2 et du MgCl2

(Oberthür et al., 1994). Toutes les Th se situent entre 72° C (Mine d’Ashanti au Ghana,

Schwartz et al. (1992) et 460° C (Gounkoto au Mali, Lambert-Smith et al. 2016).

Selon Schmidt-Mumm et al. (1997), la chimie particulière des IF des gisements ouest- africains reflète une nouvelle catégorie de fluide minéralisateur, qui s’étendrait jusqu’au craton sud-américain (Schmidt-Mumm, 1997 ; Vélasquez et al., 2014). Les arguments de Schmidt-Mumm incluent les points suivants: i) la présence fréquente d'IF à CO2 dans la

plupart des gisements d'or ; ii) la grande extension régionale de cette composition fluide incluant le COA et le craton du Guiana ; iii) la concordance des pressions de fluide calculées à partir des densités les plus élevées avec celles estimées à partir de la minéralisation. Selon Schmidt et al. (1997), les variations de densité ne peuvent pas être interprétées comme un phénomène post-piégeage car elles n'auraient pas pu être responsables d'une telle caractéristique à l'échelle régionale. Elles seraient alors attribuées au modèle "valve-sismique" (Sibson et al., 1988) appliqué aux gisements orogéniques associés à une shear-zone. Schmidt- Mumm (1998) a attribué la nature chimique particulière du fluide au processus de

138 dévolatilisation en profondeur, son drainage au niveau d’une shear-zone sans rééquilibrage avec les roches encaissantes.

Au contraire de Schmidt-Mumm et al. (1997), Klemd (1998) estimait que le fluide initial pouvait être à H2O-NaCl-CO2-N2 (-CH4). Selon cet auteur, l'eau était présente dans le fluide

au moment de la minéralisation. Cette hypothèse est supportée par deux arguments majeurs : i) le fait que les inclusions riches en eau sont largement présentes dans les gisements du COA et peuvent coexister avec des inclusions riches en composés volatils dans le même gisement, comme dans la mine Ashanti ; ii) la très forte altération hydrothermale des roches encaissantes de la minéralisation (chloritisation, séricitisation, épidotisation etc…) autour des veines de quartz (Klemd et Hirdes, 1998).

Le processus de démixtion de fluides peut être responsable de la production d'un fluide riche en volatils. Ce processus a souvent été proposé pour certains gisements orogéniques du COA (Klemd et Hirdes, 1998). Mais dans beaucoup de gisements, les inclusions aqueuses sont décrites comme secondaires, donc postérieures et non liées à la minéralisation. Déjà Schwartz et al. (1992) avaient considéré que les inclusions à N2-CO2 étaient les conséquences des

modifications post-piégeage des inclusions. Ceci peut expliquer les variations de densité observées dans tous les échantillons. Le procédé de démixtion comprend la migration différentielle de H2O (-NaCl) et de CO2 le long des joints de grains (Klemd et al., 1997,

Klemd, 1998) et leur séparation soit par immiscibilité à des températures inférieures à 350 ° C, soit par extraction sélective pendant la déformation. En conséquence seules les veines de quartz qui se forment dans des conditions PT élevées présenteront des inclusions de CO2-N2,

alors que les veines formées à des conditions PT inférieures contiendront des inclusions H2O-

NaCl-CO2-N2 (Klemd et Hirdes, 1998). Wille et Klemd (2004) ont présenté des

microphotographies convaincantes montrant des caractéristiques de déformation et de recristallisation dynamique, qui semblent confirmer des modifications post-piégeage des inclusions.

Si les différents auteurs cités ci-dessus s’accordent pour une origine métamorphique des fluides, certains auteurs ont invoqué l’intervention de fluides magmatiques dans la genèse des minéralisations comme dans le gisement de Gara du district de Loulo (Lawrence et al., 2013) et celui de Morila (Hammond et al., 2011), ce dernier étant considéré comme un gisement de type « intrusion-related gold system ». A Gara, Lawrence et al. (2013b) signalent la présence de fluides hyperalcalins de type saumure, une température de piégeage élevée (> 400°C) et des valeurs négatives des isotopes du carbone (δ13C de -14.4 à -4.5 ‰) qui s’accordent avec un

139 apport de fluides magmatiques dans le système hydrothermal. Toutefois, au sein de ce même district de Loulo, dans le gisement de Yaléa,, on aurait essentiellement deux types de fluides, CO2 – N2 – (CH4) et H2O - NaCl qui dériveraient de la démixtion d’un fluide primaire à CO2

– H2O – NaCl - ±N2 - ±CH4 issu de la déshydratation des métasédiments lors du

métamorphisme. Pareillement, Hammond et al. (2011) à Morila, à partir des compositions isotopiques en oxygène des fluides (ä18Oeau = 10.9 ± 0.3‰) et de leur salinité relativement

élevée (12–16 % pds éq. NaCl) considèrent que les fluides associés aux minéralisations peuvent être reliés à un épisode magmatique-hydrothermal ; un processus de démixtion serait ensuite à l’origine de la diversité d’inclusions rencontrées dans le gisement, avec des IF riches en CH4-N2 vapeur, des IF à H2O - NaCl diluée et des saumures ; par contre, on ne retrouve

pas le type de fluide « classique » des gisements orogéniques à H2O–CO2±N2 de faible

salinité dans ce gisement. En revanche ce type de fluide primaire a été reconnu dans le gisement de Kalana, ainsi que des IF à H2O – NaCl considérées comme dérivant du premier type lors de modifications post-piégeages.

En conclusion, les caractéristiques des fluides rencontrés dans les trois gisements de la ceinture de Bagoé sont celles que l’on retrouve classiquement dans les divers gisements du COA pour lesquelles une origine métamorphique est privilégiée. On pourrait s'attendre à ce qu’une telle composition de fluide, avec CO2 >> H2O, soit présente dans de nombreuses

provinces aurifères orogéniques autres que les seuls gisements du COA, mais ce n’est pas le cas. C’est pour cela que certains auteurs (p. ex., Goldfarb et al., 2017) réfutent l’hypothèse d’un processus secondaire comme la démixtion ou les processus post-piégeages pour expliquer ces caractéristiques particulières et proposent comme Schmidt-Mumm et al. (1997), que cette composition atypique de fluide reflète une caractéristique inhabituelle de la zone de source du fluide au niveau du COA.

VI. Estimation des conditions métamorphiques des roches encaissantes de

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