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Comparaison de nos résultats avec la littérature

lit-térature

Hao Zhao et Guillaume Bourque ont publié en 2009 une extension de la méthode EMRAE (Efficient Method to Recover Ancestral Events) qui, à partir de segments conservés, permet de retrouver les réarrangements qui ont eu lieu [Zhao et Bourque, 2009]. Ils ont appliqué leur méthode à 6 génomes modernes de Boreoeutheriens : l’humain, le chimpanzé, le macaque rhésus, la souris, le rat et le chien. Les nombres de réarrangements qu’ils ont trouvés pour chacune des branches de l’arbre des espèces sont présentés au dessus des branches de l’arbre phylogénétique de la figure III.9.

De Euarchontoglire, l’ancêtre commun de l’humain et de la souris, jusqu’à la souris nous avons trouvé 196 inversions, 51 translocations réciproques, une fission et 6 fusions (figure III.3). Ces nombres sont à comparer aux 230 inversions, 5 tanslocations, 19 transpositions et 5 fissions/fusions, obtenus en cumulant les nombre de réarrangements de la figure III.9, depuis Euar-chontoglire jusqu’à la souris. La dernière valeur (fissions/fusions) semble être égale à la variation du nombre de chromosomes, en valeur absolue, entre les deux extrémités de la branche. Cette valeur doit donc être comparée à la valeur absolue de la différence entre les nombres de fusions et les fissions que nous avons trouvés. Comme notre simulateur n’effectue pas de transposition, nous regroupons les translocations et les transpositions trouvées par Zhao et Bourque. La somme de ces deux derniers nombres correspond au nombre de

réarrangements inter-chromosomiques, ils en trouvent 5 + 19 = 24 dans la

lignée de la souris, ce chiffre peut être comparée à nos 51 translocations ré-ciproques. Le tableau III.2 regroupe les comparaisons des triplets (inversions, réarrangements de segments inter-chromosomiques et variation du nombre de chromosomes par fissions/fusions).

inter-chromoso-Figure III.9 – Nombres d’évènements de réarrangements chromo-somiques prédits par EMRAE dans la phylogénie de 6 espèces (hu-main, chimpanzé, macaque rhésus, souris, rat et chien) avec une résolution des segments conservés de 10 kb. Les quatre nombres au

dessus de chaque branche sont respectivement les nombres d’inversions, de translocations, de transpositions, et de fissions/fusions prédits. Figure tirée de [Zhao et Bourque, 2009].

Inversions Réar. inter-chrom. Fission/Fusion Euarchontoglire → souris EMRAE 230 24 5 MagSimus 196 51 5 Euarchontoglire → humain EMRAE 124 27 2 MagSimus 152 3 2

Chien → Boreoeutheria → Euarchontoglire

EMRAE 184 27 14

MagSimus 160 24 14

Tableau III.2 – Comparaison des nombres de réarrangements chro-mosomiques trouvés avec EMRAE et MagSimus. Pour les dernières

valeurs, nous avons additionné les nombres de réarrangements dans la branche de Boreoeutheria jusqu’au chien avec ceux de Boreoeutheria jusqu’à Euar-chontoglire en comptant la fission comme une fusion.

miques dans la lignée de l’humain. Alors que nous n’avons inféré que 3 translo-cations réciproques, Zhao et Bourque trouvent 27 transpositions. Avec notre calcul précédent (section III.2.6), nous devrions inférer ces réarrangements inter-chromosomiques, qui sont sensés être perçus comme des translocations (mis à part leurs 3 points de cassures). Nous pensons que nous n’avons pas vu ces transpositions car notre résolution est plus grossière que celle de Zhao et Bourque. Leurs segments conservés ont une résolution qui descend jusqu’à 10 kb, alors que la taille moyenne de nos gènes est de 24 kb (section I.1.8). De plus les segments transposés trouvés par Zhao sont généralement très courts (< 50 kb). Ce qui conforte l’hypothèse que nous n’avons pas identifié ces segments conservés car nos gènes sont trop grands et peut-être aussi par ce qu’ils ne couvrent pas de manière uniforme les chromosomes : les segments conservés de Zhao sont possiblement dans des régions pauvres en gènes. Il n’est pas étonnant que les nombres de fissions/fusions soient les mêmes étant donné que ces réarrangements sont assez simples à inférer via la comparaison des nombres de chromosomes modernes. Les nombres d’inversions sont assez proches des nombres trouvés par Zhao et Bourque, mis à part dans la lignée de la souris, où nous avons trouvé 15% moins d’inversions qu’EMRAE. En-core une fois nous pensons que la résolution des segments conservés explique probablement cette différence, car la lignée de la souris est la lignée dans laquelle ils ont trouvé le plus d’inversions courtes (< 50 kb). Enfin, avec MagSimus nous inférons plus d’inversions dans la lignée humaine qu’EMRAE. Nous n’avons pas vraiment d’explication à fournir pour cette différence et

une étude plus approfondie serait nécessaire pour la comprendre.

De manière générale il peut sembler surprenant que, étant donné les faibles valeurs de sensibilités et spécificités d’EMRAE [Zhao et Bourque, 2009], nous aboutissions à des résultats très similaires. Nous l’expliquons en rappelant que le calcul de sensibilité et de spécificité d’EMRAE semble avoir été conçu non pas pour refléter la sensibilité et la spécificité d’EMRAE à retrouver les réarrangements réels sur la base de 3356 segments conservés (« blocs de synténie »), mais pour démarquer EMRAE de MGR1, ce pourquoi seuls 100 segments conservés sont utilisés dans les simulations. De plus, la sensibilité et la spécificité d’EMRAE sont calculées par rapport aux réarrangements effectués lors de leurs simulations, alors que notre calcul et celui d’EMRAE concerne les réarrangements dont il reste des traces en fin d’évolution (sec-tion III.3.5).

Même si quelques écarts existent entre nos résultats et ceux d’EMRAE, la majorité des nombres d’évènements sont très proches et la comparaison permet de confirmer quelques tendances générales de l’évolution des Boreoeutheriens. Il s’avère y avoir environ dix fois plus d’inversions que de réarrangements inter-chromosomiques. Il semble qu’il y a peu de fissions et de fusions de chromosomes. De plus la lignée de la souris donne l’impression d’avoir expérimenté 60% plus de réarrangements que la lignée humaine, lors du même temps évolutif. Enfin, les nombres de réarrangements inter-chromosomiques sont manifestement très variables d’une lignée à l’autre.

Ces résultats similaires n’enlèvent rien à l’intérêt de MagSimus. EMARE n’est pas un simulateur et, par exemple, il est incapable de fournir des génomes ancestraux de référence à partir desquels évaluer des logiciels de génomique comparative, similairement à ce qui a été fait dans la section II.4.3.

Nos résultats sont par contre assez éloignés de ceux obtenus dans un autre travail [Miklós et Tannier, 2010]. Car les auteurs trouvent peu d’inversions (34) et de nombreuses translocations réciproques (112) dans la lignée de la souris. Les auteurs considèrent également les translocations non réciproques (télomériques) et ils en trouvent 53.