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Partie I Introduction

Chapitre 1.2: Comment intégrer les connaissances taxonomiques et fonctionnelles de la

1.2.3 Les Collemboles: un modèle biologique pertinent pour étudier les sols

Dans le cadre de cette thèse, les Collemboles ont été choisis comme proxys, c’est-à-dire en tant qu’indicateurs de la qualité biologique du sol.

Principales caractéristiques morphologiques des collemboles

Les Collemboles sont des hexapodes aptérygotes, autrement dit des invertébrés portant trois paires

de pâtes et dépourvus d’ailes.

Ils forment un groupe monophylétique qui s’articule en quatre ordres et qui reflètent quatre morphotypes: Poduromorpha, Entomobryomorpha, Symphypleona et Neelipleona (Figure 5). Leur taille peut être très variable, de moins d’un dixième de millimètre jusqu’à 3-4 millimètres pour

certaines espèces à l’état adulte. Leur grande variabilité morphologique est la base de la classification taxonomique actuelle dont les principaux aspects sont détaillés ci-dessous (Hopkin, 2007).

Tête:Elle porte une paire d’antennes, divisées en plusieurs segments, qui sont richement dotées en

organes sensoriels. A la base des antennes, les Collemboles portent très fréquemment des organes post-antennaires (PAO). Ce sont des organes sensoriels spécifiques pour la détection de la

température et de l’humidité. Leur forme est très variable et comprend des vésicules simples ou composées. La tête peut porter deux taches oculaires, chacune composée de 1 à 8 ocelles au

maximum. Le nombre d’ocelles augmente généralement si l’espèce vit en surface, tandis que les

espèces qui habitent dans le profil du sol sont souvent dépourvues d’ocelles. L’appareil buccal est très complexe et s’articule en lèvres (labrum supérieur et labium inferieur), maxilles, mandibules,

et palpes qui sont des organes sensoriels.

Thorax et pattes: Le thorax se compose de 3 segments, chacun portant une paire de pattes. Les pattes sont articulées en 6 éléments: epicoxa, subcoxa, coxa, trochanter, fémur et tibia. Chaque patte se termine par une griffe, sur laquelle se distingue l’unguis, c’est-à-dire la griffe supérieure. Un autre élément est souvent observable, il s’agit de l’empodium, en position opposée à la griffe. Abdomen: Il peut être composé de 6 segments au maximum. Le premier segment porte le tube

ventral, essentiel pour réguler les échanges osmotiques au sein de l’animal. Le troisième segment

porte le rétinacle qui permet l’ancrage de la furca. Cette dernière est un organe qui permet aux Collemboles de sauter pour s’échapper en cas de danger (prédation) et qui est attaché au quatrième

segment abdominal. Toutefois, la fusion de plusieurs segments de l’abdomen peut être très fréquente chez certains genres de Collemboles.

Les illustrations proposées en Figure 5 permettent de visualiser les détails du plan corporel décrit ci-dessus.

Figure 5: Représentation des principales caractéristiques morphologies des quatre morphotypes de

Collemboles (Hopkin, 2007). A- Vue latérale de Ceratophysella bengtssoni (Ågren, 1904), un exemplaire

de Poduromorpha qui mesure environ 1.0 mm de longueur. B- Vue latérale de Isotoma viridis (Bourlet,

1839), un exemplaire de Entomobryomorpha qui mesureenviron 4.0 mm. C- Vue latérale de Sminthurus

viridis (Linnæus, 1758), un exemplaire de Symphypleonade environ 3.0 mm de longueur. D- Vue latérale de

Megalothorax minimus (Willem, 1900),un petit exemplaire de Neelipleona qui mesure à peine 0.4 mm. (Les

Quelques notions sur leur biologie

Les Collemboles sont présents à tous les niveaux de la chaine trophique du sol. Certaines espèces se

nourrissent principalement de la microflore, impactant l’activité d’autres décomposeurs (Marshall, 2000; Neher et al., 2012). D’autres sont des nécrophages, ou encore des détritivores qui consomment la litière en décomposition (Hopkin, 1997). Finalement, certaines espèces consomment la matière organique dérivée de la rhizosphère (Fujii et al., 2014). Par ailleurs, les collemboles sont

la proie d’autres animaux du sol comme les Araignées Linyphiides, les Acariens Gamasides, les Coléoptères Staphilinides et Carabides.

En termes de préférences écologiques, les Collemboles s’adaptent à une grande variété d’habitats et de microhabitats2. Cela permet de distinguer les espèces généralistes, capables de vivre dans une

gamme très variée d’habitats et microhabitats, des espèces dites spécialistes, qui peuvent être retrouvées uniquement dans un éventail environnemental limité à cause de leur exigences (Auclerc

et al., 2009; Gillet and Ponge, 2003; Hopkin, 1997; Salmon et al., 2014).

La capacité reproductive des collemboles est très variable puisque nous retrouvons à la fois des espèces à reproduction sexuée, des espèces qui pratiquent la parthénogenèse, ou encore certaines capables de se reproduire avec les deux stratégies.

Toutefois, les connaissances actuelles sur les mécanismes physiologiques ne sont pas homogènes sur toutes les espèces, et beaucoup d’efforts restent encore à faire pour corriger cela (Fujii et al., 2014). Il a été démontré que le stockage des contaminants intervenait principalement dans la muqueuse intestinale et que la détoxification, via excrétion, était assurée au moment de leur mue (Humbert, 1977). Toutefois, malgré l’existence de ce mécanisme physiologique, une pollution métallique importante des sols peut affecter les communautés de Collemboles, sélectionnant les espèces plus tolérantes (Fiera, 2009; Santorufo et al., 2014).

La disponibilité des ressources trophiques (la qualité et quantité de la litière et de matières organiques) et la qualité physico-chimique du sol sont des facteurs locaux très importants qui influencent les communautés de Collemboles (Detsis, 2009; Devigne et al., 2016; Endlweber et al., 2009; Filser, 2002; Filser et al., 2000; Fujii et al., 2014; Loranger et al., 2001; Potapov et al., 2016).

2 Nous distinguons le microhabitat de l’habitat selon les définitions proposés dans le thesaurus de la base de

données BETSI (Pey et al. 2014). Ici, le microhabitat correspond à la plus petite partie de l’environnement

qui compose l’habitat, tandis que l’habitat a été défini comme une aire plutôt homogène (en faisant référence

à la liste d’habitats du CORINE Land Cover) de l’environnement ou les espèces vivent

Enfin, ces petits organismes sont aussi sensibles aux changements de l’hétérogénéité du paysage

(Heiniger et al., 2014; Martins da Silva et al., 2012; Ponge et al., 2003; Querner et al., 2013).

Des organismes ordinaires qui remplissent des fonctions importantes dans les sols

Jusqu’à aujourd’hui, environ 8000 espèces de collemboles ont été identifiées dans le monde, mais la véritable biodiversité des Collemboles est probablement encore largement sous-estimée (Deharveng, 2004; Cicconardi et al., 2013). Ils sont présents pratiquement dans tous les écosystèmes terrestres (Hopkin, 1997), et représentent, avec les Acariens, environ 95% des microarthropodes du sols (Seastedt, 1984). Les Collemboles atteignent une densité de plusieurs

milliers à plusieurs dizaines de milliers d’individus par mètre-carré (Cluzeau et al., 2012) et, en moyenne, ils apparaissent avec une richesse d’environ 50 à 60 espèces dans un écosystème donné (Petersen, 2002).

Puisqu’ils sont pour la plupart détritivores ou prédateurs de bactéries et de champignons, les

Collemboles jouent un rôle fondamental dans les processus écologiques de décomposition de la matière organique et du cycle de nutriments. Ils impactent les services écosystémiques tels que la séquestration du carbone, ainsi que la préservation de la fertilité et de la microstructure des sols, (Brennan et al., 2006).

Leur grande variabilité d’espèces et de traits fait des Collemboles des très bons indicateurs (Vandewalle et al., 2010) vis-à-vis de plusieurs types de stress et perturbations environnementales: climat (Makkonen et al., 2011), feux de forêt (Malmström, 2012), urbanisation (Santorufo et al. 2015), usage du sol (Salmon et al., 2014), successions végétales dans les marais salants (Widenfalk et al., 2015), etc.