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Le cimetière de Clamart ou le « Champ Rameau » : la création d’un espace funéraire mutualisé

Haut-Rhin

Annexe 6 : Études d’archives succinctes sur deux cimetières troyens C Roms

1. Le cimetière de Clamart ou le « Champ Rameau » : la création d’un espace funéraire mutualisé

Le 23 septembre 1776, une ordonnance de l’évêque de Troyes interdit les inhumations dans les cimetières intra-muros, ce qui oblige les paroisses mais également l’hôtel-Dieu à envisager d’autres lieux de sépultures. Cette décision est contestée, notamment par la fabrique de la paroisse de Saint-Jean-au-Marché1.

1.1 Les recours de la fabrique de Saint-Jacques-aux-Nonnains

Ainsi, le premier marguillier de cette paroisse réfute, devant l’assemblée des paroissiens réunie le 22 janvier 1777, l’interdiction d’inhumer dans le « cimetiere de St Jacques

aux Nonains dans lequel les paroissiens ont de temps immemorial droit de sepulture et par laquelle Mgneur l’Evêque ordonne de se pourvoir d’un nouveau cimetiere et ce pour Pasques prochain, temps auquel par suitte de son ordonnance il demeure interdit et defense faite de enterrer ». Il est décidé à l’issue de cette réunion de faire appel de

cette ordonnance (Arch. dép. Aube, 15 G 20, 1763-1784, fol. 62 r°). Le lendemain, il est annoncé à la même assemblée que l’avocat indique que « cet appel simple n’était pas

suspensif, que malgré cet appel Mgr de Troyes ferait executer son ordonnance, que c’était

la raison pour laquelle il conseillait de se pourvoir directement en parlement, d’y obtenir un arrêt » (Arch. dép. Aube, 15 G 20, 1763-1784, fol. 62 v°).

Il semble que l’exécution de l’ordonnance ait été suspendue. En effet, dans le registre des délibérations, il est mentionné, le 9 décembre 1777, qu’ « après l’interdit levé par

Monseigneur de Troyes sur le cimetiere St Jacques aux Nonains2, la compagnie devoit

s’occuper à se pourvoir d’un terrain convenable […] à l’effet d’y inhumer […] les corps. Il a été deliberé d’une unanime voix que MM les marguiliers en charges […] soient chargé de se pourvoir d’un terrain convenable, soit en ville ou dehors la ville » (Arch. dép. Aube,

15 G 20, 1763-1784, fol. 67 r°). Les paroissiens ont visiblement gagné du temps mais le transfert du cimetière s’est révélé inéluctable ; ils doivent « deguerpir le cimetiere St

Jacques pour le porter ailleurs au premier septembre prochain » [1778] (Arch. dép. Aube,

15 G 20, 1763-1784, fol. 69 v°). 1.2 Le cimetière du Champ Rameau

Nous n’avons pas encore réalisé le dépouillement du fond de l’hôtel-Dieu de Troyes mais le registre des délibérations de la fabrique de Saint-Jean-au-Marché nous apprend que l’hôtel-Dieu a acquis un terrain pour en faire un cimetière et qu’il propose d’en céder une partie. On sait ainsi, dans la délibération du 23 août 1778, qu’ « il avoit été convenu

qu’on prendroit un arpen de terrain dans le Champs Rameau que l’hopital de cette ville avoit acquis à desseins d’y etablir un cimetiere pour inhumer les corps […] que depuis quelques jours il avoit appris que l’hopital avoit promis le terrain au prix qu’il reviendroit par arpents apres que le mur de cloture seroit fait ainsi que la porte d’entrée » (Arch. dép.

Aube, 15 G 20, 1763-1784, fol. 69 v°). L’acquisition est validée par le roi comme l’indique la délibération du 22 novembre 1780 (Arch. dép. Aube, 15 G 20, 1763-1784, fol. 80 v°).

1. L’ensemble des registres de délibération des autres paroisses n’a pas été dépouillé, il est donc possible que d’autre fabriques aient engagé des contestations.

2. Le cimetière Saint-Jacques-aux-Nonnains accueille les morts de la paroisse Saint-Jean-au-Marché qui ne dispose que d’un petit cimetière et ceux de l’hôtel-Dieu, et ce depuis le Moyen Âge (Roms 2005).

La fabrique de Saint-Jacques entre également en négociation avec l’hôtel-Dieu comme l’indique la délibération de la fabrique de la paroisse de Saint-Jacques-aux-Nonnains du 31 août 1778 : « il a été arrêté par une delibération des paroissiens de la d. eglise du

treize mars dernier qu’il serait pris le parti de traitter avec Messieurs les directeurs des hopitaux de cette ville pour un quartier et terrain dependant et faisant partie d’une piece de terre acquise des heritiers et la veuve du S. Rameau sis hors la porte de la Madeleine de cette ville, qu’à ce este messieurs les marguliers en charge et Milloni ont eté autoriser à prendre les engagements convenables, tant relativement à ce terrain à acquérir que par raport à la construction du meur de cloture et de la porte qui ferme une partie de lad. pièce de terre » (Arch. dép. Aube, 14 G 1, 91ème dossier, 1780). La fabrique acquière

ainsi « vingt six cordes quinze pieds [1100 m²] de terrain, la première partie à droite en

entrant par la grande porte servant d’entrée commune, l’allée dans la longueur de ce terrain, comprise pour moitié, led. terrain faisant partie d’une plus grande pièce et tenant d’une part du levant à la ruelle Ste Jule, d’autre part au cimetière et la paroisse St Jean, lad. allée commune entre deux, d’un bout au cimetière et la paroisse Ste Madeleine, de l’autre à lad. ruelle ». La vente se fait moyennant la somme de 588 livres 10 sous et

l’obligation d’entretenir, avec les autres propriétaires, les « murs et cloture et porte dudit

cimetière terre » (Arch. dép. Aube, 14 G 1, 91ème dossier, 1780).

Les fabriques des églises Sainte-Madeleine et Saint-Panthaléon achètent chacune une parcelle du « Champ Rameau » à hauteur de 615 livres 9 sous et 324 livres (Arch. dép. Aube, 16 G 157, p. 31 ; 19 G 167*, 1777-1778, 7 r°).

Un plan détaillé de 1786 indique que ce terrain accueillant « les sépultures de l’hôtel

Dieu, de St. Etienne, St. Pentaléon, St. Jean, Ste. Madeleine et de St. Jacques ; jardin d’Antoine L’Ecuyer, jardinier, et partie du jardin de Mlle Paillon, [se trouve] près le vis-à- vis de l’église de Ste Julle » (Arch. dép. Aube, 1 E 839/4, 1786 ; fig. 32). Il fait également figurer les emprises des terrains (fig. 33).

N° C. [cordes] M²

1 Vignes de l’hotel Dieu 124 805,60

2 Cimetiere de l’hotel Dieu 74 ½ 484

3 Cimetiere de St. Etienne 7 ½ 48 ?70

4 Cimetiere de St.Pantaléon 20 130

5 Cimetiere de de St. Jean 100 649,70

6 Cimetiere de de St. Jacques 26 ¾ 173,80

7 Cimetiere de Ste. Madeleine 26 ¾ 173, 80

8 Jardin et maison d’Antoine L’Ecuyer 35 ½ 230,60

9 Partie du jardin de Mlle Paillon 86 558,70

Total cinq arpents une corde 501C 3254,90

Ce cimetière sert pendant 93 ans, certaines sépultures auraient été transférées dans le cimetière actuel, dit de La Haute Charme, et créé en 1871. L’emprise du cimetière de Clamart s’est étendue au fil des ans ainsi que le montre un plan de la ville de Troyes de 1853 (fig. 34). Bien que non indiqué sur le cadastre napoléonien, les parcelles 144 et 209 correspondent au cimetière de Clamart dont l’entrée se fait au débouché de la rue homonyme (fig. 35).

Fig. 32 Extrait du plan figuré géométriquement de cinq arpents une corde de terrain dont une partie est aujourd’hui en cimetiere […] (Arch.

dép. Aube, Fond de Mesgrigny, 1 E 839/4), 1786 - C. Roms, Inrap

1.3 Perspectives et objectifs

Les données sont encore partielles, il faudrait poursuivre dépouillement des registres de délibérations des paroisses concernées, ainsi que du fond de l’hôtel-Dieu et de la collégiale Saint-Etienne. En outre, une estimation du nombre de personnes inhumées peut être réalisée à partir des registres paroissiaux à notre disposition, à la médiathèque du Grand Troyes. Il est également possible que l’état civil, postérieur à 1790, nous informe sur les personnes inhumées. Enfin, les archives municipales, antérieures à 1790, pourraient donner des informations sur les acquisitions successives de terrains pour l’agrandissement du cimetière.

Par ailleurs, une partie du cimetière a fait l’objet de découvertes fortuites attestant de l’existence d’une nécropole antique (Lenoble, Deborde 1995). Les pistes d’investigation sont nombreuses.

Fig. 35 Extrait du cadastre de Troyes anciennement Saint-Martin-lès-Vignes de 1808, section C. L’emplacement du

cimetière de Clamart correspond aux parcelles 144, 209 (Arch. dép. Aube)