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Les différentes cibles thérapeutiques de l’allergie alimentaire et le rôle des lymphocytes T régulateurs

Comme vu précédemment, la réponse allergique est une réponse immunologique complexe, impliquant différentes populations cellulaires et différentes réponses cytokiniques. L’étude de la physiopathologie de l’allergie, vu plus haut, induisant une meilleure compréhension des mécanismes immunologiques impliqués, permet de définir les différents points clés qu’il est potentiellement envisageable de contrôler afin de réguler les réponses allergiques.

En premier lieu, l’allergie est une réponse Th2 exacerbée. Ainsi toute stratégie permettant d’inhiber le développement d’une réponse Th2 serait potentiellement bénéfique afin de traiter les allergies. A l’heure actuelle, il n’existe aucun traitement disponible, ni en cours de développement, en raison du caractère multifactoriel de mise en place de la réponse Th2 allergique. Aussi, le paradigme du déséquilibre Th2 devient rapidement insuffisant pour expliquer l’immuno-pathologie de l’allergie (Magnan et Humbert 2005). Durant les premières phases de l’allergie, il est avancé un défaut de l’activation des lymphocytes Treg pour expliquer l’activation importante des lymphocytes Th2 (Magnan et Humbert 2005). En effet, les Treg ont un rôle crucial dans la régulation des réponses Th2 (Venuprasad et al. 2010). Martin et al. ont démontré l’implication des tTreg dans le contrôle de l’allergie en utilisant des souris humanisées NOD/SCID. Après transfert de PBMC et activation des Treg, seules les souris ayant reçu les cellules des patients sains ont résisté au déclenchement de l’allergie alors que les souris ayant reçu les PBMC des patients allergiques ont été malades. Ces résultats suggèrent l’existence d’un défaut fonctionnel de tTreg chez les patients allergiques, ne permettant plus de contrôler la réponse Th2 (Martin et al. 2012). Aussi, des études récentes ont démontré le rôle particulièrement important des pTreg dans la régulation Th2 (Josefowicz

et al. 2012). De même, les Tr1 suppriment de manière similaire la réponse allergique Th2 en

diminuant la production d’IL-4 par les cellules T effectrices via la sécrétion d’IL-10 et de TGF-β et en exprimant le CTLA4 et PD-1. Selon les observation d’Akdis, leur nombre serait réduit dans le sang périphérique des sujets allergiques (M. Akdis et al. 2004). D’autres types de Treg sont impliqués dans le contrôle des réponses allergiques. Notamment, plusieurs

auteurs ont démontré que les Treg RORγt+ induisent une régulation des manifestations

inflammatoires de l’intestin, en contrôlant la réponses Th2 (Ohnmacht et al. 2015) et Th17 (Sefik et al. 2015), leur conférant un rôle protecteur dans l’allergie. Aussi, l’invalidation

76 conditionnelle de l’IL-10 spécifiquement dans les Treg, entraine une suceptibilité accrue des animaux à l’induction de l’allergie (Rubtsov et al. 2008) et est suffisante pour induire une colite chez ces souris (Rubtsov et al. 2008), suggérant le role primordiale des Tr1 dans le régulation de l’hypersensibilité.

De la même façon, l’IL-5 fut longtemps considérée comme une cible intéressante dans la régulation des réponses allergiques. Impliquée dans le recrutement des populations responsables de l’inflammation locale allergique, sa neutralisation représente donc une piste prometteuse. De la même façon, des traitements symptomatiques peu efficaces contribuent à bloquer la dégranulation des effecteurs, constituant une autre cible potentiellement intéressante à neutraliser afin de traiter l’allergie. Cependant plutôt que de développer de nouvelles stratégies thérapeutiques, l’utilisation des Treg pourraient servir d’alternative prometteuse dans la mesure où ils contribuent à contrôler l’allergie en inhibant directement le recrutement local et la dégranulation des mastocytes et des basophiles via une interaction OX40-OX40L (Gri et al. 2008) et en diminuant l’expression du FceRI à la surface des cellules effectrices (Kashyap et al. 2008).

Les thérapies visant à bloquer les IgE, acteur central dans les phénomènes allergiques, présentent un intérêt certain dans l’allergie alimentaire. Aussi, les Treg contribuent au contrôle de l’allergie en inhibant la synthèse d’IgE spécifiques et en induisant la production d’IgG4 spécifiques (F. Meiler et al. 2008) et d’IgA, deux classes d’immunoglobulines réputées protectrices dans l’allergie. Ce changement d’isotype d’immunoglobuline, observé notamment lors des différents protocoles d’immunothérapies spécifiques, serait induit par les tTreg, mais également par les Tr1 (F. Meiler et al. 2008) sous la dépendance de l’IL-10 et du TGF-β. En effet, la sécrétion d’IL-10 par les Tr1 permet l’inhibition de la synthèse d’IgE (Punnonen et al. 1993) et le swicth vers les IgG4, tandis que le TGF-b permet l’induction de la synthèse d’IgA (Cazac et Roes 2000).

Les molécules d’activation des lymphocytes T et plus particulièrement les molécules de co-stimulation ont un rôle important dans l’initiation et l’entretien des réponses allergiques. Différentes stratégies ciblant ces molécules sont déployées, notamment le CD28, molécule de surface des lymphocytes T qui se lie aux CD80 et CD86 présents sur les cellules présentatrices d’antigènes et qui peut être bloqué par la molécule régulatrice CTLA-4. Là encore, les Treg sont capables de neutraliser ces signaux de co-stimulation et d’inhiber ainsi les réponses allergiques notamment les Tr1 comme décrit plus haut (K. Wu et al. 2007).

77 En agissant sur l’ensemble des checkpoints de l’allergie, à savoir le contrôle de la synthèse d’IgE, la régulation de la balance Th1/Th2 ainsi que la diminution du recrutement et de la dégranulation des effecteurs, les Treg se situent au centre du processus de régulation de l’allergie. Ainsi, l’amplification thérapeutique des Treg constitue une alternative très intéressante dans le but de traiter les maladies allergiques. Cependant les différentes difficultés techniques inhérentes à la production de Treg de grade clinique, nous orientent préférentiellement vers l’utilisation de l’IL-2 faible dose. Ainsi, tester l’administration d’IL-2 faible dose dans un modèle préclinique d’allergie alimentaire n’a jamais encore été réalisée et constitue le principal objectif de cette thèse.

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Objectifs et principes expérimentaux

Ce travail de thèse avait un double objectif : (i) établir la preuve de concept de l’utilisation d’IL-2 faible dose comme outil thérapeutique de l’allergie dans une étude préclinique utilisant un modèle murin d’allergie alimentaire à l’ovalbumine ; (ii) étudier les mécanismes immunologiques associés à la protection induite sur le long terme suite à l’administration d’IL-2 faible dose.

1. Preuve de concept de l’utilisation de l’IL-2 faible dose dans le