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CHAPITRE 6 : DISCUSSION GÉNÉRALE ET CONCLUSIONS

6.3 Choix méthodologiques pour la comparaison des méthodes

Le choix des méthodes s’est fait dans une perspective de facilité d’utilisation et d’accessibilité. Elles sont susceptibles d’être utilisées par des non-chercheurs d’expertise variable en ergonomie. D’ailleurs, dans le cadre de cette étude, elles ont toutes été appliquées à un échantillon de postes, tel qu'elles auraient été utilisées par un praticien, en respectant les recommandations proposées par les auteurs des méthodes.

Les comparaisons des méthodes se basent sur des catégories de risque. Le choix de ces catégories est en accord avec celles proposées par les auteurs des méthodes ou en accord avec les recommandations dans la littérature scientifique (Jones et Kumar 2010 ; Kee et Karwowski 2007 ; Lavender et al. 1999 ; Russell et al. 2007). Aux fins de cette étude, ce choix est justifié par le fait que la comparaison se veut le plus proche possible de la réalité des praticiens, utilisateurs de ces méthodes. Ce sont donc des catégories de risque qui sont susceptibles d’être utilisées par eux. Étant donné que le nombre de catégories de risque diffère d’une méthode à une autre, certaines catégories de risque ont été regroupées lorsque la méthode en proposait plus de trois. Ces choix s’inscrivent dans une perspective d’intervention. Les valeurs seuils de la catégorie de risque élevé ont été choisies sachant qu’une intervention au poste de travail doit être réalisée lorsqu’un risque important est présent et donc l’entreprise doit apporter des modifications au poste de travail. Par conséquent, si les regroupements de catégorie de risque utilisés ici, basés sur d’autres

travaux de recherche, avaient été différents, ils auraient sans aucun doute mené à des résultats différents en termes de répartition des postes selon les niveaux de risque.

D’autre part, une limite importante réside dans le fait que les liens entre les données épidémiologiques et les catégories de risque restent inconnus. Non seulement les catégories de risque équivalentes entre les méthodes comparées peuvent faire l’objet de débats, mais la division qui est faite dans les valeurs produites pour une méthode (i.e., selon les valeurs seuils choisies par les auteurs des méthodes), le peut aussi. Idéalement, les valeurs seuils seraient établies en fonction de la prévalence des TMS aux postes de travail. Pour l’instant, de tels résultats ne sont pas disponibles. Nous n’avions ainsi d’autre choix que de nous baser sur les recommandations des auteurs qui, eux, se sont en principe appuyés sur des recherches antérieures pour développer leurs méthodes. Par conséquent, les résultats ne nous permettent pas de déterminer quelle méthode ou quel choix de catégories de risque permet le mieux de prédire le risque réel. L'estimation du risque réel en termes de taux d’incidence des blessures musculo-squelettiques à chacun des postes étudiés aurait nécessité un effort colossal qui dépassait largement le cadre de cette étude (Jallon 2011).

Lorsque vient le temps d’effectuer des comparaisons entre méthodes, une autre difficulté réside dans le fait que certaines d’entre elles ont été développées pour analyser une tâche plutôt qu’un poste (ex. FIOH vs RULA). Kee et Karwowski (2007), par exemple, comparent les méthodes OWAS, REBA et RULA avec des données qui proviennent d’un échantillon de 301 postures. Toutefois, cette situation ne correspond pas toujours à la réalité de l’utilisateur. L’utilisateur voudra évaluer le poste et pas seulement une unique posture lors de l’une des multiples activités réalisées au poste. C’est sur cette base que nos choix méthodologiques ont été faits. Le choix d’évaluer les tâches les plus difficiles aux

postes de notre échantillon nous semblait la façon la plus raisonnable de procéder et celle qui correspondait le plus à ce qu’un praticien aurait probablement fait. C’est aussi ce choix que Jones et Kumar (2010) ont fait dans leur étude. La méthode QEC par exemple, à laquelle les méthodes RULA et REBA ont été comparées, bien qu’elle fournisse une évaluation pour le poste dans son ensemble, ses auteurs recommandent de se baser aussi sur la posture la plus critique pour l’analyse du poste (David et al. 2008).

Quant au choix d’utiliser la valeur la plus élevée (peak value) pour les comparaison avec les logiciels de modélisation biomécanique 3D SSPP et 4D WATBAK, les résultats montrent que malgré le fait d’avoir choisi de comparer les valeurs les plus élevées pour la compression, le cisaillement lombaire et le moment au dos, ces méthodes ressortent toujours comme étant moins sévères que les autres méthodes évaluant le risque au dos.

Afin de comparer une méthode comme celle du FIOH, certains choix méthodologiques ont dû être faits. Étant donné que les auteurs de la méthode ne proposent pas de façon de combiner l’évaluation des 14 items en un indice global ou intégré, ceci rend la comparaison plus difficile avec les autres méthodes. Si cette méthode est utilisée pour le dépistage des postes les plus à risque parmi un ensemble de postes, cela complique aussi les choses pour le praticien. Toutefois, étant donné que la méthode permet d’évaluer 14 items très variés (ex. contrainte thermique, posture et mouvements, communication et contacts personnels, etc.), un indice global ne nous permettrait pas de détecter un risque élevé quant aux facteurs de risque de TMS à un poste. L’indice global pourrait ne pas faire ressortir cet aspect d'un poste particulier par rapport à d’autres postes qui auraient pu obtenir le même pointage, mais pour des facteurs de risque bien différents (ex. contrainte thermique ou bruit). L’avantage d’une méthode comme le QEC, c’est qu’elle permet d’obtenir un indice

global, mais aussi un indice spécifique à chacune des zones corporelles. Comme la littérature ne fournit pas d’information quant aux facteurs de risque les plus dommageables pour les TMS, le regroupement des items de la méthode du FIOH, qui sont en lien avec les facteurs de risque de TMS, en un indice intégré sans appliquer de pondération aux éléments constitutifs, nous semblait approprié pour effectuer les comparaisons avec les autres méthodes. Des résultats de recherches futures pourront peut-être nous permettre de déterminer une pondération pour les 4 items constitutifs en lien avec les TMS pour cette méthode (i.e., poste de travail, posture et mouvements, levée de charge et répétitivité).

Dans l’ensemble, malgré les limites inhérentes à toute étude fondée sur des comparaisons, nous avons pu dégager plusieurs résultats novateurs en comparant 11 méthodes, ce qui nous permet ainsi de contribuer aux connaissances scientifiques ayant trait aux méthodes d'évaluation des facteurs de risque de TMS à un poste de travail.

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