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Partie 2 Partie expérimentale

2. Choix des supports visuels

Afin d’analyser l’acquisition des moyens d’expression des déplacements causés par les apprenants thaïlandais du français, nous avons utilisé des séquences vidéo représentant des déplacements de différents types. Cette méthodologie du recueil du corpus pour l’étude de l’expression du déplacement est devenue traditionnelle dans les travaux expérimentaux en acquisition des langues. En effet, le mouvement est bien représenté et la durée courte de la vidéo permet au locuteur de se concentrer sur le mouvement et ne pas être attiré par d’autres informations, ce qui serait le cas de vidéos plus complètes comme les films et les dessins animés. En choisissant cette méthodologie, nous nous basons donc sur les travaux de Hickmann (2003, 2006), Hendricks (1998) et autres.

Les vidéos choisies sont de courte durée, de 5 à 7 secondes environ. Elles mettent toutes en scène un agent animé (un humain ou un animal – personnage d’un dessin animé) ou un groupe d’agents animés. Ces derniers effectuent un déplacement d’un objet (une entité inanimée) qui est éventuellement déformée. Nous avons emprunté la plupart des séquences aux Projet « Cut and Break Clip » et « Put Project : The Cross-Linguistic Encoding of Placement Events» mené au département de Langue et Cognition au sein de

l’institut de psycholinguistique Max Planck15

. Les supports créés pour ces projets sont

librement accessibles sur le site http://fieldmanuals.mpi.nl/. Nous sommes donc

reconnaissants envers les chercheurs de Max Planck Institute pour cette possibilité de travailler sur les supports qu’ils ont élaborés. Ces supports sont d’une très bonne qualité et fournissent le nombre d’informations nécessaires pour la description du déplacement.

Cependant, les projets antérieurs n’étaient pas basés sur les déplacements causés mais sur les déplacements en général. Nous avons donc trouvé qu’il nous manquait de variabilité dans les supports. Nous avons donc choisi quelques passages vidéo dans le

dessin animé « Tom and Jerry »16. Ce dessin animé très connu présente un grand nombre

de déplacements de différents types y compris les déplacements causés. Les séquences tirées du dessin animé ont cependant une particularité. Leur vitesse est supérieure à celle présente dans les autres clips vidéo. Nous avons donc légèrement ralenti la vitesse pour rendre les clips plus accessibles à la tâche de description. Le support est donc composé de deux types de séquences : des séquences mettant en scène des humains dans des contextes naturels ou institutionnels en train de manipuler des objets, et des séquences tirées du dessin animé présentant un personnage animal en train de manipuler un objet mais dans un contexte plus imaginaire.

Parmi ces 15 séquences vidéo, sept séquences vidéo expriment le déplacement causé avec une déformation de l’objet, par exemple, ‘déchirer un tissu’ (Figure 1) et ‘gratter le mur (Figure 2).

Figure 1 : Déchirer un tissu

15 Le département de Langue et Cognition de l’institut Max Planck de psycholinguistique a constitué un site

intitulé « L&C Field Manuals and Stimulus Materials » qui rassemble une vaste base de données concernant la linguistique cognitive.

16

« Tom and Jerry » appelé Tom et Jerry en français est une série de courts-métrages animés américains. L’histoire entre les deux principaux protagonistes Tom le chat et Jerry la souris est basée sur les tentatives infructueuses de Tom pour attraper Jerry. En raison de l’intelligence de la souris, Tom n’a jamais réussi à s’en emparer. De plus, la souris Jerry est accompagnée de beaucoup d’amis, tels que le chien Spike et l’oiseau Titi, qui l’aident à survivre.

Figure 2 : Gratter le mur

Quatre séquences vidéos présentent le déplacement causé sans déformation de l’objet mais impliquant le franchissement de frontière. Dans ces séquences, nous avons des déplacements comme ‘verser l’eau d’une boîte de conserve dans une casserole’ (Figure 3) et ‘glisser une brique d’un livre dans un bol’ (Figure 4).

Figure 3 : Verser l'eau

Figure 4 : Glisser une brique

Finalement, quatre séquences montrent le déplacement causé sans déformation de l’objet ni de franchissement de frontière, par exemple ‘poser des livres sur une table avec les bras’ (Figure 5) et ‘tirer une bouée au long de la rivière’ (Figure 6).

Figure 5 : Poser des livres

Figure 6 : Tirer une bouée

Les six figures (captures d’écran) ci-dessus représentent les stimuli utilisés dans le cadre de notre analyse. Nous pouvons retrouver ces captures d’écran dans l’annexe 4.

Par ailleurs, cinq clips d’entraînement sont proposés à chaque participant pour qu’il ait l’habitude de la tâche et se sente à l’aise pour exprimer le déplacement causé par l’être humain ainsi que par l’animal. En plus, parmi les 15 séquences vidéo, cinq clips distracteurs ont été insérés pour que les participants ne s’attendent pas toujours à devoir exprimer un seul type de déplacement, dit déplacement causé. Tous les clips distracteurs présentent des déplacements spontanés comme ‘descendre de l’escalier’ et ‘marcher à l’arrière’. Ils sont intercalés à intervalles réguliers : un clip distracteur est donné tous les deux à trois clips expérimentaux.

La passation des clips se fait dans un ordre que nous avons prédéfini (cf. Tableau 1 ci-dessous). Nous avons fait en sorte qu’il n’y ait pas plus de deux déplacements similaires qui se suivent et ceci pour éviter que les participants soient influencés par le déplacement précédent. Tous les participants suivent le même ordre pendant l’expérimentation. L’ordre des séquences vidéo après l’entraînement est présenté dans le tableau 1 ci-dessous :

Clips Expression du déplacement Explication

Clip 1 couper X en deux déformation

Clip 2 déchirer X en deux déformation

Clip 3 sortir X de Y déplacement avec franchissement de

frontière

Clip 4 descendre de l’escalier en courant - distracteur -

Clip 5 poser X dans Y déplacement avec franchissement de

frontière

Clip 6 poser X avec la bouche déplacement sans franchissement de

frontière

Clip 7 marcher à l’arrière - distracteur -

Clip 8 pousser X déplacement sans franchissement de

frontière

Clip 9 déchirer X déformation

Clip 10 verser X déplacement avec franchissement de

frontière

Clip 11 marcher vers la chaise - distracteur -

Clip 12 casser X déformation

Clip 13 enlever X de Y déformation

Clip 14 poser X avec les bras déplacement sans franchissement de

frontière

Clip 15 entrer dans la maison en marchant - distracteur -

Clip 16 poser X à l’aide d’un livre déplacement avec franchissement de

frontière

Clip 17 tirer X déplacement sans franchissement de

frontière

Clip 18 sortir d’un bâtiment en enjambant

la fenêtre - distracteur -

Clip 19 faire un trou déformation

Clip 20 couper X déformation

Tableau 2: Ordre des séquences vidéo

À partir de ce tableau, nous pouvons voir que certaines séquences vidéo mettent en scènes les mêmes actions. Ainsi par exemple, les clips 2 et 9 montrent l’action de ‘déchirer un objet’. Ils diffèrent cependant par la nature de l’Agent qui effectue l’action. Dans le premier cas, il s’agit d’un être humain (cf. figure 7 ci-dessous). Dans le second cas, c’est le chat - personnage du dessin animé qui effectue l’action (cf. figure 8).

Figure 7 : Un être humain déchire X (clip 2)

Figure 8 : Un animal déchire X (clip 9)

Le nombre d’agents mis en scène est également pris en compte. Ainsi dans le clip 1 (figure 9 ci-dessous), il s’agit d’un seul agent faisant l’action. En revanche, dans le clip 20 (figure 10), ce sont les deux personnages du dessin animé, le chat et la souris, qui procèdent l’action.

Figure 9 : Un Agent coupe X en deux (clip 1)

Par ailleurs, la même action peut être exprimée de différentes manières. Par exemple, le fait de ‘poser un objet’ (action réalisée dans les clips 5, 6, 14 et 16) est réalisée de manière variée : avec la main (clip 5, figure 11), avec un autre membre du corps humain (clips 6 et 14, figures 12 et 13) et à l’aide d’un objet (clip 16, figure 14).

Figure 11 : Poser X avec la main (clip 5)

Figure 12 : Poser X avec la bouche (clip 6)

Figure 13 : Poser X avec les bras (clip 14)

Finalement, les mêmes actions exprimant des manières différentes, peuvent aussi se différencier par la mise en lumière d’un fond spécifique. Concernant toujours la même notion de ‘poser un objet’, certaines séquences montrent explicitement le franchissement de frontière (clip 5 et 16, figures 11 et 14 ci-dessus). En revanche, les séquences 6 et 14 (figures 12 et 13 ci-dessus) présentent le déplacement sans franchissement de frontière.