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MISE EN ŒUVRE EXPÉRIMENTALE DE LA TOMOGRAPHIE DES PLASMAS

I. Choix de la configuration expérimentale optimale

Nous avons vu à plusieurs reprises lors du chapitre précédent, qu’en tomographie, la qualité de l’image reconstruite dépend à la fois du nombre d’angles de projection ainsi que de leur incidence angulaire par rapport à l’objet étudié. Dans notre cas, l’objet d’intérêt est un plasma d’arc électrique non axisymétrique dont le système expérimental de formation sera décrit dans le paragraphe II. Préalablement à la mise en œuvre du montage expérimental, il a donc été nécessaire de définir théoriquement la configuration optimale d’acquisition pour la tomographie dans le cas précis de notre objet. On entend par configuration optimale d’acquisition le nombre de visées et la direction de ces visées par rapport à un plasma thermique 3D qui permettront d’atteindre des reconstructions tomographiques de bonne qualité, tout en limitant la complexité et le coût du système expérimental envisagé.

La configuration optimale a pu être définie suite à une étude théorique de faisabilité de la tomographie des plasmas thermiques. Cette étude a été réalisée par Xavier Franceries lors d’un post-doctorat effectué en 2005 au sein de l’équipe AEPPT [Fra_1]. Nous allons donner quelques détails et résultats de cette étude théorique qui a permis de déterminer la configuration optimale d’acquisition ainsi que d’évaluer le nombre d’itérations nécessaire et suffisant pour obtenir une bonne reconstruction d’un plasma thermique non axisymétrique.

Afin de déterminer la configuration optimale, il faut prendre en compte essentiellement deux aspects : la complexité du système expérimental et la géométrie du plasma 3D. Cette problématique a pu être résolue par simulations numériques ; l’algorithme de reconstruction MART a été testé dans des conditions les plus proches de la réalité

expérimentale. Les données de base en terme d’émissivité ont été extraites d’un modèle 3D d’arc transféré déflecté par champ magnétique, proche de notre configuration expérimentale. Il s’agit d’un modèle développé par Gonzalez et al [Gon_1]. A partir de ces émissivités, ont été simulées les projections suivant divers angles de vue. Afin de s’approcher au mieux d’une situation réelle, les données de projection ont été bruitées puis filtrées tel qu’on pourrait le faire sur des mesures expérimentales.

Plusieurs configurations d’acquisition ont été testées dans cette étude. Le nombre de visées varie de 2 à 7 dont les directions sont : θ1= 0°, θ2 = 30°, θ3 = 45°, θ4 = 60°, θ5 = 90°, θ6 = 120°, θ7 = 135° par rapport au plasma. La position de ces directions par rapport à une section du plasma est représentée sur la figure 3.1. On remarquera que la direction θ5 est parallèle à la direction de déflection de l’arc et la direction θ1perpendiculaire.

Figure 3. 1: Disposition des directions de visée par rapport au plasma 3D.

Au total, sept configurations, à 2, 3, 4 et 7 angles de vue, créées à partir de différentes combinaisons des 7 angles de vue, ont été testées. Le choix des directions doit se faire par rapport à la forme du plasma. La nomenclature choisie par Franceries et al, que nous reprenons ici, est la suivante : une configuration est nommée « C » suivi du numéro des vues utilisées. Les 7 configurations qui ont été testées sont :

- C1.5 : 0° et 90° - C3.7 : 45° et 135° - C1.3.5 : 0°, 45° et 90° - C1.4.6 : 0°, 60° et 120° - C1.2.4.5 : 0°, 30°, 60° et 90° - C1.3.5.7 :0°, 45°, 90° et 135° - C1.2.3.4.5.6.7 : 0°, 30°, 45°, 60°, 90°, 120° et 135°.

La reconstruction tomographique a été appliquée sur un total de 11 sections transversales du plasma, espacées de 0.25mm, balayant la quasi-totalité de sa hauteur, la distance inter électrodes étant de 3 mm.

Dans un premier temps, les reconstructions tomographiques ont été effectuées dans un cas idéal, c’est-à-dire sans ajout de bruit dans les données de projection. Cette étude a permis de déterminer la meilleure combinaison d’angles de vue, parmi les 7 configurations testées, en fonction de la forme du plasma et elle a également permis de déterminer le nombre d’itérations nécessaires et suffisantes pour atteindre une reconstruction des émissivités locales de bonne qualité, la plus proche possible du modèle.

Pour quantifier la qualité des reconstructions, Franceries et al ont utilisé la formule du RMS dont nous avons donné une expression dans l’équation (2-35) ; néanmoins, comme il s’agit d’un cas test pour lequel les valeurs théoriques de l’émissivité locale sont connues, la formule du RMS a été appliquée directement sur les émissivités locales théoriques ε0 (issues

du modèle) et reconstruites ε, et non sur les projections mesurées et estimées comme dans l’équation (2-35). Son expression est donnée par (3-1) :

(3-1)

Les valeurs prises par le RMSε à chaque itération ont été reportées sur le graphe de la figure 3.2 pour les 7 configurations d’acquisition testées.

Figure 3. 2: Evolution du RMSε en fonction du nombre d'itérations.

Sur la figure 3.2, l’évolution du RMSε au fur et à mesure des itérations a été comparée pour chacune des configurations, ce qui a permis de mettre en évidence plusieurs points, en concordance avec les résultats des reconstructions tomographiques donnés sur la figure 3.3 :

- Selon la forme du plasma, certaines directions de projection sont nécessaires à la bonne reconstruction tomographique de l’objet. Dans le cas test, on peut voir sur la figure 3.1 que le plasma est symétrique de part et d’autre de l’axe y mais dissymétrique par rapport à l’axe x. La visée θ5 à 90°, parallèle à la direction de

déflection de l’arc, doit donc être prise en compte. Une conclusion comparable peut être faite pour l’angle perpendiculaire à cette visée essentielle, autrement dit l’angle θ1 à 0°, étant donné qu’il s’agit de la visée qui rend parfaitement compte de la déflection de l’arc. En conclusion, au vu de la géométrie du plasma 3D choisie pour cette étude, deux angles de visée sont essentiels : θ1 à 0°et θ5 à 90°.

- Plus le nombre de visées et la plage angulaire balayée sont importants, plus on améliore la qualité de la reconstruction et donc la vitesse de convergence.

- Etant donné la forme du plasma test, il semble que la configuration C1.3.5.7 soit pratiquement identique à la configuration C1.2.3.4.5.6.7 au bout de la cinquième itération. En effet, on observe seulement 2% de différence entre les deux valeurs du RMSε.

La même comparaison a ensuite été réalisée avec la formule du RMS calculées à partir des projections mesurées (simulées dans cette étude) et reconstruites. Au-delà de la 5ème itération, le RMS ne varie pas plus de 0.02%. Il a donc été considéré que le nombre de 5 itérations est un bon compromis entre le temps de calcul et une convergence suffisante de l’algorithme, et donc une bonne reconstruction tomographique. C’est donc le nombre d’itérations choisi par Franceries et al pour effectuer la reconstruction tomographique d’un plasma 3D.

Figure 3. 3 : Emissivités théoriques et reconstruites pour une section de plasma proche de la cathode [Fra_1].

La figure 3.3 reprend tous les résultats des reconstructions tomographiques, à la 5ème itération, obtenues pour chacune des 7 configurations étudiées. Elle représente une section du

plasma 3D, située proche de la cathode. On observe donc, sur les contours d’émissivités théoriques (en haut à gauche de la figure 3.3), un maximum d’émissivité en dehors de l’axe des électrodes. Cette particularité des sections très chaudes du plasma doit être restituée par les reconstructions tomographiques pour permettre une bonne interprétation physique. On constate que seules les configurations C1.3.5.7 et C1.2.3.4.5.6.7 permettent de reconstruire cette zone centrale du plasma où les émissivités décroissent. La configuration C1.2.3.4.5.6.7 donne en toute logique de meilleurs résultats que C1.3.5.7, étant donné que plus on a d’incidences angulaires de projection, meilleure est la reconstruction. Cependant, un système expérimental à 7 visées étant complexe et coûteux à réaliser, Franceries et al ont considéré que la configuration C1.3.5.7 représentait un bon compromis entre une complexité restreinte du montage expérimental et une bonne qualité de reconstruction.

Nous avons donc décidé de conserver la configuration d’acquisition définie comme optimale par Franceries et al suite à son étude théorique de faisabilité, c’est-à-dire 4 incidences angulaires d’acquisition tous les 45°, deux d’entre-elles étant situées respectivement parallèlement et perpendiculairement à la direction de déflection. Notre montage expérimental devra être configuré de la sorte ; autrement dit nos quatre visées à 0°, 45°, 90° et 135°, devront être disposées selon la figure 3.1.

Dans la suite de son article, Franceries et al réalise une étude sur l’influence du filtrage lorsqu’on se trouve dans des situations proches de la réalité expérimentale où les données sont bruitées. Il a, comme nous, utilisé un filtre de Parzen. Les conclusions qu’il avait pu établir pour un cas idéal de plasma 3D non bruité ne sont pas modifiées par l’ajout de bruit et du filtrage des données.

Une fois la configuration optimale d’acquisition définie, la mise en œuvre du montage expérimental devient alors possible. Dans le paragraphe II, nous décrivons le dispositif expérimental de formation de l’arc puis le paragraphe III est consacré à la description du système expérimental d’acquisition des projections selon la configuration optimale que nous venons de définir.