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Chimie en solution : de la molécule à l’assemblage

Mélange de différents clusters

I.1.4 Chimie en solution : de la molécule à l’assemblage

I.1.4.1 Suivi cinétique par spectroscopie Visible-PIR (Proche InfraRouge)

Pour commencer, nous avons choisi de suivre l’évolution de la réaction en solution par spectroscopie visible proche infrarouge. En effet, l’ajout d’eau dans la suspension du complexe

[U(OTf)3(CH3CN)3] conduit à sa solubilisation mais également à la lente décoloration de la solution.

Compte tenu de ce changement de couleur, la spectroscopie d’absorption visible a été choisie.

A t = 0 (courbe en bleue, Figure II.8), dans la zone 500-1000 nm, le spectre UV présente quatre bandes situées à 543, 633, 755 et 914 nm. La bande à 914 nm a été attribuée dans la littérature aux

transitions provenant des chromophores [U(CH3CN)9]

3+10

tandis que les bandes situées à 543 et 633 sont plutôt considérées être des transitions f-d qui sont assez basses en énergie pour être observées

avec les complexes d’uranium(III).11 Ces bandes sont notamment responsables des couleurs assez

intenses des complexes d’uranium(III).

Le suivi cinétique de cette ré action a été réalisé par spectroscopie Vis-PIR en réalisant un spectre tous les quart d’heure pendant 30h (Figure II.8). Plusieurs points sont à noter. D’abord, les bandes situées autour de 900 nm et de 755 nm disparaissent entièrement puis l’intensité des bandes situées

entre 500 et 700 nm diminuent. Une seule bande assez large avec un maximum à 640 nm (ε = 300 cm-1

M-1) subsiste à la fin de la réaction qui est complète au bout de 25h.

Figure II.8 : Suivi cinétique par spectroscopie Vis-PIR de la réaction [U(OTf)3(CH3CN)3]n avec deux

équivalents d’eau en présence de triflate de potassium dans l’acétonitrile. Chaque ligne noire représente deux heures. (ligne bleue, t = 0 ; ligne rouge t=25h)

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 500 600 700 800 900 1000 A b s Longueur d'onde (nm)

80

Le temps de réaction est une information précieuse car elle précise que cette réaction d’hydrolyse n’est pas instantanée et qu’il faut malgré tout plusieurs heures pour former l’assemblage. Ensuite, la présence de la bande à 640 nm à des valeurs de coefficient d’extinction assez faible est en accord avec

la présence d’U(IV) en solution.10 Cette bande peut être attribuée à une transition f-f, ce qui explique

probablement la diminution de l’intensité des bandes au cours de la réaction (entre 500 nm et 700 nm). Les bandes de transition f-d sont remplacées par les bandes de transition f-f interdites par les règles de Laporte, ce qui conduit donc à la diminution des valeurs d’ε. Habituellement, les bandes de transition

f-f de l’uranium(IV) situées à cette énergie sont assez fines.10 Dans ce cas, la bande est large et assez

diffuse, ce qui pourrait indiquer la présence d’un mélange d’espèces en solution. Une autre bande très large apparait vers 780 nm lors de la réaction.

Si la présence de l’uranium(IV) peut être confirmée grâce à la présence de la bande vers 640 nm, la présence d’U(V) est assez difficile à confirmer par cette spectroscopie car les bandes de transitions f-f

sont très peu intenses et apparaissent de façon non ambiguë plutôt vers 750 nm12,13 (voir chapitre III.).

Cependant, la bande très large qui apparait à 780 nm à la fin de la réaction pourrait être attribuée à la présence d’U(V). En effet, de nombreux composés d’U(V) présentent une transition interdite f-f vers

cette longueur d’onde.12,13 Le fait qu’elle n’apparaisse que vers la fin de la réaction (entre 15h et 25h)

serait également en accord avec une oxydation plus lente de l’uranium(III) vers l’uranium(V) que vers l’uranium(IV). Cependant, la largeur de cette bande complique passablement les interprétations.

I.1.4.2 Spectres Visible-PIR de cristaux du cluster « U6O8K2 » (1)

Afin de vérifier la présence d’un mélange en solution par spectroscopie Vis-PIR, nous avons voulu comparer le spectre UV d’un des clusters pur au spectre obtenu à la fin de la réaction in situ. Cette opération est délicate car les cristaux des clusters ont des couleurs très proches, ce qui rend leur distinction difficile, et ils cristallisent à peu près tous en même temps. Cependant, il semble que le

cluster « U6O8K2 » (1) soit moins soluble dans le mélange CH3CN/

i

Pr2O. En effet, de nombreux

cristaux de celui-ci apparaissaient sur les parois du tube de cristallisation aux abords de l’interface des deux solvants. En prenant soin de ne récupérer que ces cristaux, le spectre d’absorption Vis-PIR a pu être effectué.

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Figure II.9 : Spectres Vis-PIR d’absorption dans l’acétonitrile. Réaction du complexe [U(OTf)3(CH3CN)3]n avec deux équivalent d’eau en présence de triflate de potassium dans

l’acétonitrile après 25h (bleu). Cristaux du cluster 1 (rouge).

0 0,02 0,04 0,06 0,08 0,1 0,12 450 550 650 750 A b s Longueur d'onde (nm)

Le spectre du cluster 1 n’est pas identique à celui du spectre mesuré in situ. La comparaison des ε n’est pas possible car les cristaux n’ont pas pu être pesés. Cependant, les maximas des bandes d’absorption ne sont pas identiques. In situ des bandes apparaissent à des longueurs d’onde de 480, 540 et 640 nm et vers 780 nm tandis qu’elles apparaissent à des longueurs d’onde de 555, 640 et 670 nm pour le cluster 1. La présence d’espèces supplémentaires à la fin de la réaction est suffisamment claire au vu de la différence entre les deux spectres sans même avoir besoin d’attribuer les bandes de façon spécifique. De plus, l’absence de la bande vers 780 nm dans le cas du cluster 1 pourrait

renforcer son attribution à la présence d’U(V) dans le mélange in situ car le cluster « U6O8K2 » (1) ne

contient que des ions uranium tétravalents et ne présente pas cette bande.

Ces résultats indiquent la présence d’un mélange en solution, ce qui explique la difficulté de favoriser la synthèse d’un cluster en particulier. Il semble que cette différence soit principalement due à la présence de différents degrés d’oxydation pour l’uranium (IV et V). La spectroscopie d’absorption ne permet pas en revanche de confirmer la présence des assemblages en solution.

I.1.4.3 RMN du fluor

La RMN du 19F a également été réalisée sur le mélange de clusters dans l’acétonitrile. En effet,

nous avons vu que les différents cœurs ne possèdent pas la même charge. La présence de fluor dans des environnements différents pourrait donc conduire à l’observation des différentes espèces en solution. Malheureusement, un seul pic très large est observé à un déplacement chimique proche de celui du triflate seul en solution dans l’acétonitrile (δ = 83,5 ppm avec le TFA pris comme référence

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externe). La présence d’un seul pic indique un échange rapide des triflates en solution entre les

différents cœurs « U608 » (1-4). L’augmentation ou la diminution de la température (-35°C à 60°C) n’a

pas permis de modifier ce résultat malgré l’affinement du pic et l’évolution du déplacement chimique (quelques ppm d’écart entre la température la plus basse et celle la plus élevée).

Le suivi cinétique de la réaction a également été réalisé à l’aide de cette spectroscopie mais ne

conduit qu’à l’augmentation de la largeur du pic (w1/2 = 200 Hz à t = 0 et w1/2 = 11000 Hz à t = 25h).

La cinétique de réaction est en accord avec celle observée par spectroscopie Vis-PIR. En solution et à l’échelle de temps de la RMN, les triflates échangent rapidement, ce qui peut expliquer que l’on retrouve différents modes de coordination lors des cristallisations.

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