• Aucun résultat trouvé

LIEU DE TRANSITION ET DE LÉGITIMATION

CHEZ MARADAN, LIBRAIRE, RUE GUÉNÉGAUD, N o 9.

________ ________

1817.

Sans qu'on puisse la considérer comme un modèle absolu, dans un corpus où les variations titrologiques sont nombreuses (tant dans la façon d'intituler et de sous- intituler que de présenter le nom de l'auteure), la page de titre du roman de Fanny

Messageot de Tercy nous apparaît typique de quelques caractéristiques majoritaires, desquelles ressort l'allégement général de la page de titre par rapport à la pratique des Lumières.

On y voit tout d'abord, comme c'est le cas dans une majorité de romans, le titre formé exclusivement d'un anthroponyme, en l'occurrence le nom complet (prénom et patronyme avec particule) de son héroïne, non accompagné de sous-titre (minoritaire dans notre corpus) ni d'indication générique paratitulaire (il est vrai que ce n'est pas encore systématiquement l'usage à l'époque). Le cryptonyme de « Mme de T... » sert à désigner l'auteure, dont le sexe et le statut civil sont certains, mais non la véritable identité; de cette dénomination de l'auteure observée dans notre corpus parmi plusieurs autres variantes (anonymat complet, pseudonymat, onymat complet ou partiel48), on ne peut inférer aucune tendance majoritaire significative. Comme c'est souvent le cas dans notre corpus, cependant, le nom de l'auteure porte en annexe — jouant une fonction de recommandation — les titres de deux de ses ouvrages précédents, Cécile de Renneville et Marie Bolden. Il faut noter que ces deux titres — qui ne désignent pas des romans épistolaires — se présentent selon le même modèle que celui de Louise de Sénancourt, étant exclusivement formés du nom complet de l'héroïne.

En matière de forme, comme dans la majorité des préfaces, le titre ne fait pas mention du mode narratif choisi pour ce roman, l'épistolaire; on peut ainsi le dire dépourvu d'appellation générique. Le lecteur ne peut être certain que d'une chose, c'est que Louise de Sénancourt est l'héroïne, sinon l'objet principal du roman, mais rien ne désigne son statut de correspondante. Le modèle de titre utilisant exclusivement l'anthroponyme (le cas le plus fréquent dans notre corpus) est porteur d'une incertitude qui ne peut exister avec un titre où apparaît l'appellation

48. Un onymat complet consiste à donner le nom véritable de l'auteure, par exemple « Pauline de

Bradi », auteure des Lettres d'une dame grecque, écrites de l'île de Corse; un onymat partiel ne donne que le patronyme, sans le prénom, par exemple « Mme la baronne de Staël-Holstein », auteure de

générique, tel que Lettres d'Octavie, jeune pensionnaire de la maison de Saint-Clair ou Pauline de Vergies ou Lettres de madame de Staincis. Mais cette incertitude est-elle vraiment un problème quand la forme n'est plus une préoccupation, au profit du fond, comme en témoigne le titre typiquement « thématique », au sens où l'entend Genette49, de Fanny Messageot de Tercy ? Louise de Sénancourt est effectivement scriptrice de 16 des 43 lettres que compte ce roman polyphonique, surpassant plusieurs autres correspondants, mais le héros masculin du récit, le baron de Saint- Alban, la dépasse, en en écrivant 24, même si son nom n'a pas le privilège d'apparaître dans le titre.

Ce que nous avons surtout voulu faire ressortir avec la page de titre de Louise de Sénancourt, c'est non seulement l'absence sur cette vitrine du roman de tout signe visant à faire croire à l'authenticité des lettres, ce qui aurait été une marque d'attachement au modèle narratologique des années 1760-1780, mais également un désintérêt face à une forme, le roman par lettres, qui a cessé d'être originale et qui apparaît désormais comme un mode narratif comme un autre, ce que confirmera à son tour le discours préfaciel. Même si à moitié anonyme, l'auteure, qui a déjà deux romans à son actif, en présente un troisième dont la forme importe peu et dont on ne sait qu'une chose : l'héroïne sera une jeune aristocrate, particule oblige, du nom de Louise de Sénancourt.

Mais puisqu'il ne faut pas considérer cette page de titre comme un modèle absolu, arrêtons-nous à certaines caractéristiques majoritaires et minoritaires concernant l'ensemble des titres. L'étude des modes de titrologie dans notre corpus peut nous éclairer sur divers phénomènes : l'évolution du titre du récit épistolaire, du titre du roman féminin, de la pratique titrologique romanesque en général au XIXe siècle. Ne perdant pas de vue ce dernier point, nous tenterons de montrer que l'évolution du titre suit celle du paratexte général du roman épistolaire féminin, où

de plus en plus, contrairement à la pratique des Lumières, l'auteure revendique l'écriture du texte et le qualifie de « roman ». Parmi les variables dont nous tiendrons compte se trouvent la disparition du sous-titre et de la fonction appellative dans le titre, la réduction de la longueur des titres et l'utilisation graduelle et massive de l'anthroponyme, en l'occurrence les noms des personnages principaux (majoritairement féminins) dans le titre.

Sur les 72 titres de romans épistolaires féminins que nous avons répertoriés entre 1793 et 1837, 35 titres, soit moins de la moitié, sont accompagnés d'un sous- titre ou d'un second titre (c'est une diminution par rapport au corpus 1761-1782). De même, la longueur du premier titre est réduite et la page de titre allégée dans son ensemble. Cela, de façon générale, correspond à ce que Claude Duchet avait remarqué à partir de l'étude détaillée d'une liste de titres de romans parus sous la Restauration : disparition du second titre, réduction du premier et allégement de toute la page de titre allant souvent de pair50. Dans notre corpus, cette réduction du titre se fait le plus souvent au profit de l'effacement de l'appellation générique (surtout en sous-titre) et de l'emploi, qui semble se généraliser, des seuls anthroponymes (surtout féminins) dans une majorité de titres. Toutefois, le nombre quand même important de sous-titres (même dans les dernières années de notre corpus) nous fait penser que la façon d'intituler un roman épistolaire dépend d'une tradition dont on se défait difficilement, en comparaison avec d'autres formes romanesques plus typiques du XIXe siècle. Mais il faut aussi rappeler que la pratique de sous-titrer un roman, même si elle est en perte de vitesse, n'est pas totalement absente du roman du XIXe siècle, dont quelques-uns des monuments sont sous-intitulés : Madame Bovary porte le sous-titre de Mœurs de province et Notre- Dame de Paris, de 1482.

50. Claude Duchet, loc. cit., p. 56-58.

Plus qu'une fonction appellative, le titre du roman épistolaire féminin du début du XIXe siècle joue davantage une fonction référentielle. En d'autres termes, il oublie la forme pour annoncer des problématiques ou des thématiques auxquelles s'attacheront les romans : la famille (par exemple, la Famille de Nancy, ou Lettres d'Eliza Alberti), le couple (Émilie et Alphonse), un groupe féminin (Trois femmes). Pour reprendre la terminologie de Leo H. Hoek, spécialiste en matière de titrologie, notons également la présence non négligeable de « titres à opérateur spatial51 » — donc désignant des lieux (matériels ou géographiques) : le Château noir, Lettres d'une dame grecque, écrites de l'île de Corse —, ainsi qu'à « opérateur temporel52 » — désignant une époque précise ou des moments historiques : Lettres trouvées dans des portefeuilles d'émigrés, Lettres de la Vendée, Euphémie ou les Suites du siège de Lyon. Le discours intitulant peut également contenir la fonction édifiante que le lecteur retrouvera dans le reste de l'appareil paratextuel, surtout en préface, et dans le texte (par exemple, les Malheurs de la jalousie ou Lettres de Murville et d'Eléonore Melcour, Vingt-quatre heures d'une femme sensible ou Une grande leçon). Enfin, ce qui corroborera nos conclusions sur la disparition de la fonction appellative au profit de la fonction référentielle, l'apparition de l'anthroponyme dans le titre ne semble pas avoir de lien direct avec l'accession ou non au rang de scripteur pour le personnage dont il est question et qui est souvent le héros ou l'héroïne du roman. La fonction référentielle — l'annonce d'une intrigue construite autour d'un personnage particulier — l'emporte dans le titre sur la fonction appellative — qui aurait apporté des précisions sur la forme du roman.

Il faut à cet égard rappeler qu'une forte majorité de pages de titres de récits épistolaires du Siècle des lumières accordait une grande importance, non pas à

51. Leo H. Hoek, op. cit., p. 128. 52. Ibid., p. 129.

l'indication générique53, mais à la fonction appellative du titre (ou du sous-titre), ce dernier arborant le plus souvent les référents formels « Lettres » (par exemple, Lettres portugaises de Guilleragues) ou « Correspondance » comme premiers termes, souvent suivis par « de... » (par exemple, Lettres d'une Péruvienne de Mme de Graffigny) ou « de... à... » (par exemple, Lettres de Milady Juliette Casteby à Milady Henriette Campley, son amie de Mme Riccoboni). On peut penser que cette mention de la forme du texte était en grande partie due au fait que le recueil de lettres fictives était présenté comme véritable, donc ne tenant pas du roman. Le titre ou le sous-titre se devaient alors de jouer le même rôle que le reste de l'appareil paratextuel (préface ou postface, notes infrapaginales du pseudo-« éditeur », etc.) et de convaincre le lecteur. La fonction appellative du titre disparaît graduellement dans notre corpus, phénomène davantage du XIXe siècle que féminin selon toute évidence, les œuvres masculines présentant la même particularité. Il n'y a que 22 exceptions en matière d'appellation générique dans le titre au sein de notre corpus de 72 titres; il s'agit de moins d'un titre sur trois. Dans 12 cas, l'appellation générique est contenue dans le premier titre :

Lettres trouvées dans la neige (1793) d'Isabelle de Charrière,

Lettres trouvées dans des portefeuilles d'émigrés (1793) d'Isabelle de Charrière,

Lettres de la Vendée (1801) d'Émilie Toulongeon,

Correspondance du comte Callidon avec Madame Francine B*** (1801) de Lucy Oudard,

Lettres de Clémence et d'Hippolite (1806) de Mme Cazenove d'Arlens,

Correspondance de deux amies (1806) de Mme de Pont-Wulliamoz,

Lettres d'Octavie, jeune pensionnaire de la maison de S.-Clair (1806) de Sophie de Renneville,

Lettres de Louise et de Valentine (1811) de Mme Ducos,

53. L'indication générique au sens strict est le plus souvent paratitulaire, par exemple :

« Tragédie », « Comédie », « Essai », « Roman ». On la retrouvait et on la retrouve toujours habituellement en annexe du titre (sous le sous-titre ou sous le titre lorsqu'il n'y a pas de sous-titre).

Lettres d'une dame grecque, écrites de l'île de Corse (1815) de Pauline de Bradi,

Lettres de Nanine à Sinphal (1818), attribué à Germaine Necker,

Correspondance de deux jeunes amis (1820) de Mme de Genlis,

Lettres à Marcie (1837) de George Sand.

Notons que deux de ces titres sont des romans d'Isabelle de Charrière (née en 1740), la doyenne de notre corpus, qui pratiquait le genre romanesque épistolaire bien avant la Révolution. Le fait que l'on trouve certaines pratiques de la forme traditionnelle ou des anciennes exigences éditoriales n'est pas étonnant chez celle qui, par ailleurs, ne sous-intitulait jamais ses romans. Avant la Révolution, elle avait successivement publié les Lettres neuchâteloises (1784), les Lettres de mistriss Henley (1784) et les Lettres écrites de Lausanne (1785 et 1787). On peut ainsi considérer les deux titres de 1793 comme la poursuite, dans le cadre d'une œuvre romanesque épistolaire déjà amorcée, d'une pratique de titrologie. En aval du corpus, il faut également tenir compte du statut exceptionnel des Lettres à Marcie (1837), tout à fait marginales sur le plan formel, comme nous le verrons plus loin, et auquel contribue le titre, dont la forme « Lettres à » a été choisi sciemment par Sand, selon nous, de façon à s'opposer au modèle traditionnel des « Lettres de » ou « Lettres de... à... ». En ce sens, l'appellation générique, loin de s'inscrire chez cette auteure dans la tradition, est plutôt son dépassement, sa remise en question.

L'appellation générique peut être également reléguée en sous-titre. Il y a neuf exemples de ce cas, mais on remarque une nette diminution lorsqu'on se dirige en aval du corpus :

Adèle de Sénange, ou Lettres de Lord Sydenham (1794) de Mme de Souza,

Les Malheurs de la jalousie, ou Lettres de Murville et d'Eléonore Melcour (1796) de Louise de

Cortambert,

Pauline de Vergies, ou Lettres de madame de Staincis (1799) de Claire de Tott,

Minna, ou Lettres de deux jeunes Vénitiennes (1802) de Mme Levacher de la Feutrie,

Valérie, ou Lettres de Gustave de Linar à Ernest de G*** (1804) de Mme de Krüdener,

La Famille de Nancy, ou Lettres d'Eliza Alberti (1807), ouvrage anonyme, sous la signature

cryptonymique « Mme Sur... de Fl*** »,

Il y a des choses plus extraordinaires, ou Lettres de la marquise de Cézanne à la comtesse de Mirville

(1811) de Mme d'Antraigues,

La Société au dix-neuvième siècle, ou Souvenirs épistolaires (1825) de Mlle de Coligny.

Dans un unique cas, enfin, la fonction appellative se trouve à la fois dans le premier titre et dans le sous-titre :

Correspondance de deux amies, ou Lettres écrites d'Evian en Chablais à Baden en Autriche (1806) de

Mme de Pont-Wulliamoz.

Ces exemples de titres sont minoritaires dans notre corpus, contrairement au roman épistolaire du XVIIIe siècle. Il faut tout d'abord voir dans ce phénomène un signe de l'époque, le raccourcissement des titres faisant règle au début du XIXe siècle. Une deuxième explication réside toutefois dans le fait que les romancières n'essaient plus de prétendre à l'authenticité des lettres qu'elles présentent lorsqu'elles pratiquent le roman épistolaire, comme la suite de ce chapitre le montrera à propos du passage de la préface de type dénégatif des Lumières à la préface authentique. Le nombre important de titres dépourvus de l'appellation générique soulève également la question de la fonction conative du titre, fortement liée à celle du caractère « démodé » du récit épistolaire après la Révolution, une génération s'étant déjà écoulée depuis la parution des chefs-d'œuvre comme la Nouvelle Héloïse et les Liaisons dangereuses. En d'autres mots, l'appellation générique disparaît fort probablement également pour des raisons commerciales ou publicitaires, le libraire craignant sans doute de ne pouvoir écouler un stock de

romans épistolaires, alors que la mode est au roman monumental, bientôt balzacien, et croyant que le lecteur averti ou critique pourrait être peu attiré par une page de titre avouant une allégeance à cette forme dépassée.

Autre signe d'époque, outre les fréquents référents géographiques, historiques ou de thématique familiale et conjugale, l'élément majoritairement employé dans les titres de notre corpus est l'anthroponyme seul. Claude Duchet, dans son article « Éléments de titrologie romanesque », a relevé l'accent mis sur le nom propre dans les titres des romans de la Restauration54. Effectivement, dans notre corpus, l'utilisation exclusive d'un seul ou de deux noms propres coordonnés est l'option la plus fréquente dans le choix du premier titre (44 cas) ou du sous-titre (2 cas), soit dans les deux tiers des cas. La présence du nom complet (prénom et patronyme) de l'héroïne comme seul élément du titre se retrouve dans 15 textes, avec une augmentation substantielle lorsqu'on se dirige en aval du corpus, augmentation qu'il faut voir comme d'autant plus significative compte tenu de la diminution du nombre de romans avec le temps. Ce sont :

Adèle de Sénange, ou Lettres de Lord Sydenham (1794) de Mme de Souza,

Claire d'Albe (1798) de Sophie Cottin,

Marie de Sinclair (1799) de Mme Ducos,

Sophie de Beauregard, ou le Véritable Amour (1799) de la comtesse de La Grave,

Pauline de Vergies, ou Lettres de madame de Staincis (1799) de Claire de Tott,

Élise Duménil (1801) de la marquise de Montalembert,

Amélie Mansfield (1802) de Sophie Cottin,

Laure d'Estell (1802) de Sophie Gay,

Mathilde de Puiseley (1803) de Marguerite Desbrosses,

Julie de Saint-Olmont, ou les Premières Illusions de l'amour (1805) de Mme Gallon,

54. Claude Duchet, loc. cit., p. 57.

Marie de Valmont (1812) d'Augustine Dégotty,

Athanasie de Réalmont (1817) de Louise Brayer de Saint-Léon,

Louise de Sénancourt (1817) de Fanny Messageot de Tercy,

Marie de Courtenay (1818) de Joséphine de Sirey,

Marguerite Aimond (1822) de Mme de Cubières.

On peut ajouter à cette liste de 15 titres, dont on remarquera que trois seulement sont formés de patronymes sans particule, deux situations où c'est le sous-titre qui est composé exclusivement du nom complet (prénom et patronyme) de l'héroïne :

Le Courrier russe, ou Cornélie de Justal (1807) d'Adélaïde Chemin,

Le Voile, ou Valentine d'Alte (1813) d'Adèle Cuellet,

ce qui porte le nombre à 17 titres.

Par contre, le nom complet du héros masculin comme seul titre n'apparaît que dans trois romans :

Alphonse d'Armoncourt, ou la Belle-Mère (1797) de Mme de Sancy,

Adolphe de Morni, ou les Malheurs de deux jeunes époux (1805) de Mme d'Argebouse,

Alphonse de Lodève (1807) de la comtesse de Golowkin.

Il n'y a qu'un seul cas de titre formé uniquement du patronyme du héros masculin, sans le prénom, mais avec le titre civil :

Mylord Clive, ou l'Établissement en Suisse (1810) de Charlotte Bournon-Malarmé.

Aucun cas semblable n'est relevé parmi les titres formés d'anthroponymes féminins. Il faut encore signaler que le modèle du nom féminin formé d'un titre civil (« Madame de » ou « Mademoiselle de ») suivi du patronyme, qui est souvent

celui du nom de l'auteure comme on l'a vu, n'apparaît qu'une seule fois, en sous- titre et accompagné de la fonction appellative. Il s'agit du roman

Pauline de Vergies, ou Lettres de madame de Staincis (1799) de Claire de Tott.

L'absence de titres exclusivement formés du titre civil et du patronyme du personnage féminin s'explique sans doute par le fait qu'il répéterait le modèle du nom de l'auteure. On le trouve par ailleurs dans de nombreux romans masculins du XIXe siècle : c'est le cas, après notre corpus, des canoniques Madame Bovary (de Flaubert) et Mademoiselle Fifi (de Maupassant), mais aussi, durant notre période, de Mademoiselle de Maupin (de Gautier), ainsi que de nombreux romans de Jules Sandeau, dont Mademoiselle de Kérouare et Mademoiselle de la Seiglière.

Selon Leo H. Hoek, les titres formés uniquement d'un prénom sont plus romantiques55 que ceux formés de l'anthroponyme complet. Dans notre corpus, il y en a quatorze, parmi lesquels onze sont féminins. Ce sont :

Hélène (1797) de la baronne de Wiesenhuetten,

Illyrine, ou l'Écueil de l'inexpérience (1798) de Suzanne Giroust de Morency,

Lise, ou les Hermites du Mont-Blanc (1801) de Suzanne Giroust de Morency,

Rosalina, ou les Méprises de l'amour et de la nature (1801) de Suzanne Giroust de Morency,

Euphémie, ou les Suites du siège de Lyon (1802) de Suzanne Giroust de Morency56,

Minna, ou Lettres de deux jeunes Vénitiennes (1802) de Mme Levacher de La Feutrie,

Delphine (1802) de Germaine de Staël,

Valérie, ou Lettres de Gustave de Linar (1803) de Mme de Krüdener,

55. Leo H. Hoek, op. cit., p. 282.

56. Il faut noter le manque d'originalité dans la pratique titrologique de Suzanne Giroust de

Morency, qui intitule ses quatre récits épistolaires érotiques sans s'écarter une seule fois du même modèle, le seul prénom de l'« héroïne » — Illyrine, Lise, Rosalina, Euphémie — formant le premier titre, celui-ci étant suivi, selon le modèle en vogue au XVIIIe siècle et dans ce type de récit, par un

Éloïse (1809) de Félicité de Choiseul-Meuse,

Flaminie, ou les Erreurs d'une femme sensible (1813) de Fanny Raoul,

Caroline, ou les Inconvénients du mariage (1815) de Carolina Maurer.

Par contre, trois titres seulement sont exclusivement formés d'un prénom masculin :

Stanislas (1811) de Charlotte Bournon-Malarmé,

Olivier, ou le Secret (1822) de Claire de Duras,

Jacques (1834) de George Sand.

Sur la présence importante, toutes époques et tous genres confondus, de l'anthroponyme dans le titre — que cet anthroponyme soit ou non accompagné d'autres éléments —, Leo H. Hoek explique dans la Marque du titre :

Acte de parole illocutionnaire, le titre présente le co-texte sous un nom spécifique et procède à une personnification dont l'effet est une fétichisation de l'humanisme. On

Documents relatifs