• Aucun résultat trouvé

1.4. Distribution et contamination des espèces hôtes

1.4.1. Chat domestique et chat forestier

Habitats fréquentés

En France, deux Félidés de taxons proches, le chat domestique et le chat forestier européen (Felis silvestris Schreber 1777), peuvent être responsables de la majeure partie de la contamination de l’environnement par les oocystes de T. gondii.

Bénéficiant d’une très grande capacité d’adaptation, le chat domestique a colonisé des habitats très divers, du cercle polaire à l’équateur (Turner et Bateson, 2000) : forêts (Coman & Brunner, 1972 ; Corbett, 1979 ; Fitzgerald & Karl, 1979), îles tropicales (Marshall, 1961; Dilks, 1979; Konecny, 1983) ou îles à climat froid, humide et venteux (Anderson & Condy, 1974 ; Derenne, 1976; Jones, 1977; Van Aarde, 1980; Pascal, 1980), régions agricoles à climat tempéré froid à tropical où alternent champs cultivés, pâtures et zones boisées (Hubbs, 1951, Laundre, 1977 ; Liberg, 1980), milieux arides (Bayly, 1976), savanes semi-arides (Seabrook, 1990), villages (Fagen, 1978; Izawa et al., 1982; Pontier et al., 1995), ou villes (Page et al., 1993 ; Oppeheimer, 1980; Haspel & Calhoon, 1989; Natoli & DeVito, 1991; Pontier et al., 1995). Tous ces milieux sont propices à la colonisation par des populations

naturelles de chats domestiques, en plus des chats apprivoisés que leurs propriétaires peuvent laisser vagabonder à l’extérieur des maisons. Seuls les chats strictement confinés dans les habitations n’appartiennent pas à ces populations, ce qui n’exclut pas totalement qu’ils puissent constituer un risque de toxoplasmose pour leur propriétaire, en fonction de leur régime alimentaire.

La densité des chats domestiques ainsi que la structure de leurs populations est fortement reliée à l’abondance et à la distribution des ressources (Turner & Bateson, 2000). Dans les zones non anthropisées (subantarctique ou zones arides) où les chats harets survivent exclusivement grâce à la prédation, leurs populations sont très peu denses (1 à 10 chats / km², Derenne, 1976 ; Van Aarde, 1980). A l’inverse, en milieu urbain, les populations de chats errants nourries par l’homme vivent en très forte densité (> 1000 chats / km², Page et al., 1993 ; Calhoon & Haspel, 1989). Le milieu rural représente une situation intermédiaire : le régime alimentaire des chats est basé sur la prédation et l’apport de nourriture par l’homme, la densité de leurs populations est moyenne (10 à 200 chats / km², Liberg, 1980 ; Pontier et al., 1995).

En France, comme sur toute son aire de distribution, le chat forestier, autre hôte définitif, peut représenter un risque non négligeable de contamination de l’environnement. Actuellement, la zone de présence du chat forestier en France est le quart nord-est du pays, ainsi que les Pyrénées (Stahl & Léger, 1992). Son milieu de vie habituel est constitué par de grands massifs forestiers de plaine, de colline, de basse et moyenne montagne ainsi que par leurs bordures, dans un paysage où la densité de la population humaine est faible et où l’habitat rural est regroupé (Stahl et Léger, 1992). Le chat forestier peut également fréquenter des milieux diversifiés lors de la chasse, comme des lisières de prairies, des parcelles de recolonisation forestière ou des clairières de régénération (Stahl & Léger, 1992). La densité des chats forestiers semble être assez homogène, allant de 1 à 5 pour une surface de 10 km² (Stahl et al., 1988). Elle est donc proche des densités observées chez le chat domestique en milieu non anthropisé (1 à 3 chats/km² dans les îles Kerguelen ; Say et al., 2002).

Compte-tenu de la diversité de la distribution et de la structure des populations de chats, le rôle respectif du chat forestier et du chat domestique dans le cycle de T. gondii varie probablement en fonction de l’environnement. La structuration et le fonctionnement des populations de chats en relation avec la transmission de T. gondii feront notamment l’objet de la suite de ce mémoire.

Epidémiologie de la toxoplasmose chez le chat

L’estimation de la séroprévalence chez le chat domestique a fait l’objet de nombreux travaux (revue in Tenter et al., 2000). Cependant, la comparaison des résultats est difficile car les tests sérologiques employés et les modalités de recrutement des animaux diffèrent d’une étude à l’autre, tandis que les informations concernant le mode de vie et d’alimentation des individus testés sont le plus souvent approximatives (AFSSA, 2005). Il apparaît cependant que la séroprévalence dans les populations de chats domestiques est très variable géographiquement, de 5 à 10% dans les populations étudiées en Asie (Lin et al., 1990 ; Nogami et al., 1998) à plus de 70% dans certaines populations étudiées au Brésil (Garcia et al., 1999) ou en Amérique du Nord (Lappin et al., 1992). En France, la séroprévalence était de 43% lors d’une étude conduite en Gironde et portant sur 549 chats issus de la clientèle de cliniques vétérinaires testés par immunofluoresence indirecte, au seuil de 1:50 (Cabannes et al., 1997). Chez le chat forestier, une seule étude a permis d’estimer la séroprévalence (100%) sur un petit nombre d’individus échantillonnés en Ecosse (N = 23 ; McOrist et al., 1991), mais cette forte valeur n’a pas été confirmée par l’étude d’autres populations.

Comme les anticorps anti-T. gondii persistent pendant au moins six ans et probablement même à vie (Dubey et al., 1995b, Tenter et al., 2000), la séroprévalence des populations de chats est, a priori, d’autant plus élevée que la population est composée d’individus âgés, les chats les plus vieux ayant le plus de chance d’avoir été en contact avec le parasite au cours de leur vie. Par ailleurs, la séroprévalence varie selon le mode de vie des chats et est ainsi généralement plus élevée chez les chats errants que chez les chats vivant chez un propriétaire. Cette différence est mise en relation avec le régime alimentaire des individus : les chats errants qui chassent activement montrent généralement une prévalence plus forte que les chats de propriétaire qui consomment essentiellement de la nourriture commerciale (Tenter et al, 2000). La séroprévalence diffère également en fonction de l’environnement et de la disponibilité des hôtes intermédiaires : les chats domestiques vivant en milieu rural sont plus souvent porteurs d’anticorps anti-T. gondii que ceux vivant en milieu urbain ou suburbain (Tenter et al, 2000).

Par ailleurs, Gauss et al (2003) rapportent que les chats vivant dans un groupe de plus de cinq individus ont une séroprévalence plus importante que ceux vivant seuls. Les auteurs attribuent cette différence à la proximité entre les chats du groupe social et la possibilité d’être exposé aux fèces possiblement contaminés d’un autre chat du groupe social. De plus, plusieurs études montrent que des chats infectés par le Virus d’Immunodéfience Féline (FIV)

ou le Virus Leucémogène Félin (FeLV) pourraient avoir plus de risque d’acquérir la toxoplasmose que des chats sains (Lin et al., 1992 ; D’Amore et al, 1997 ; Dorny et al, 2002). Enfin, Nogami et al (1998) envisagent une variation inter-annuelle de la séroprévalence chez le chat domestique, sans pour autant disposer de données sur ce sujet.