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33charges de travail trop importantes pour les jeunes pairs) C’est pourquoi la formation et l’implication

Dans le document Expérimentations en matière de santé (Page 33-35)

des jeunes pairs comme celle des adultes qui les entourent est un pré-requis incontournable.

Indépendamment des méthodes pédagogiques adoptées, la transmission des messages de santé exige de s’appuyer sur des professionnels compétents et qui bénéficient de formation régulièrement et reconnus comme tel par les jeunes. Les jeunes bénéficiaires du projet « Printemps santé 2010 » porté par Vitré Communauté, l’ont bien rappelé : s’ils se tournent plus facilement vers leurs pairs en cas de problème, le dialogue avec un adulte de confiance est indispensable pour obtenir des informations fiables sur les risques de santé encourus et les structures d’aide existantes.

Qu’ils s’appuient sur le processus d’identification des jeunes à d’autres jeunes ou la relation de confiance entre adultes et jeunes, les actions doivent partir des habitudes et des environnements familiers des jeunes bénéficiaires. Les messages de prévention de la santé ont d’autant plus d’écho que leurs contenus et modalités intègrent des valeurs et goûts partagés par les jeunes. Les exposés théoriques sur les comportements à risque restent en décalage avec les usages des élèves et leurs modes de sociabilité. Les informations de prévention en matière de santé doivent aussi s’adosser aux expériences vécues par les jeunes. Une autre exigence est d’inscrire ces projets dans un temps suffisamment long pour produire un changement dans les comportements.

A l’heure actuelle, aucune étude ne permet de distinguer les approches et méthodes d’éducation à la santé selon leur efficacité. Les méthodes d’évaluation mobilisées jusqu’à présent permettent difficilement de recueillir des données statistiques objectives et fiables quant aux effets des différentes actions sur les comportements des jeunes. Les analyses existantes se concentrent davantage sur l’évolution des représentations des jeunes pairs et les modalités de leur mobilisation. Un premier travail de capitalisation mené dans le cadre du FEJ avait appelé à réfléchir sur la mise en place d’une « mesure chiffrée de l’impact des projets sur les jeunes bénéficiaires (…) » afin notamment « de différencier l’effet d’une campagne d’information classique de celui de l’implication de jeunes

médiateurs »36.. Des évaluations d’impact mobilisant différentes méthodes d’éducation à la santé

sur les jeunes permettraient ainsi d’identifier les outils les plus efficaces.

Le repérage et la prise en charge des jeunes exposés à des risques de santé publique et éloignés du système de soins et de protection sociale nécessitent autant d’agir sur les modalités d’accès que les logiques de recours aux soins. Faciliter les démarches administratives et financières d’accès aux droits suffit-il à lever les obstacles du recours aux soins des jeunes ? Agir sur le niveau de connaissance des jeunes concernant leurs droits et les ressources disponibles encourage-t-il les jeunes à solliciter les professionnels de santé ? Les problèmes d’accès aux soins comme la décision de (non) recourir à un professionnel de santé ne relève pas uniquement d’un déficit informationnel. Aller consulter un médecin généraliste comme prendre conscience des risques de santé supposent

36.  Pretari A., Valdenaire, M. (2013), « Quelles méthodes pour l’évaluation des projets d’éducation à la santé par les pairs ? », La

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également de disposer de suffisamment de ressources psychosociales37 pour franchir le seuil des

structures de soins. Les résultats de « PresaJe » ont montré que les initiatives intervenant sur les dimensions psychosociales de la santé des jeunes favorisent un meilleur rapport des jeunes à leur propre santé : consultation d’un praticien généraliste, consultation d’un psychologue, examens de santé, prise de conscience de sa santé et des risques encourus, obtention d’une couverture ou complémentaire santé. Pour cela, il est important de prendre en considération la relation de confiance qui se noue entre les jeunes bénéficiaires et un professionnel du secteur social ou médical. Cette dimension avait par ailleurs été soulignée par Isabelle Parizot dans son analyse sur le recours aux soins des exclus dont le rapport au statut social et à la prise en charge médico-sociale dépend pour partie de l’investissement qu’ils perçoivent chez le personnel soignant38.

Les résultats des expérimentations insistent sur la nécessité de combiner aide financière et accompagnent individualisé des jeunes Si, l’accompagnement des jeunes en situation de vulnérabilité se borne à l’écoute sans leviers financiers, les conseils risquent de « rester lettre morte », constatent les évaluateurs de « Pour l’essaimage d’une Culture Santé chez les 16/25 ans ».

Les dispositifs d’enquête mobilisés pour l’évaluation des projets fournissent également des données inédites sur l’état de santé des jeunes en situation de précarité. Parallèlement à leur état de santé physique, les jeunes en insertion présentent un état de santé psychique particulièrement dégradé. Aussi, il n’est pas étonnant de constater une propension notable parmi ces jeunes enquêtés à consulter un psychologue après avoir bénéficié d’un entretien avec un médecin. L’intervention du psychologue auprès de jeunes en insertion n’est pas sans interroger un certain processus de psychologisation des questions sociales39. Pour autant, les jeunes ne sont pas soumis à un suivi

thérapeutique ou une analyse clinique de leurs problématiques socioprofessionnelles. Les formes d’empathie et d’écoute mobilisées par les psychologues peuvent être restauratrices d’une certaine confiance en soi et contribuer à renouveler de part et d’autre les représentations entretenues entre les jeunes et les professionnels sociaux ou médicaux. Être écouté par un professionnel neutre et bienveillant peut avoir pour conséquence d’activer des ressources psychosociales telles que l’estime et la confiance en soi, la capacité à se projeter, à se sentir utile qu’a pu mettre à mal un parcours de vie « accidenté ». Cet ensemble de dispositions constituent autant de leviers transférables dans un processus d’insertion sociale et professionnelle.

37.  Les recherches de Pierre Chauvin et d’Isabelle Parizot ont démontré qu’au-delà des dimensions socio-économiques, les facteurs psychosociaux (le sentiment d’utilité, d’efficacité personnelle, la capacité à faire face aux difficultés, estime de soi, sentiment de discrimination…) pèsent fortement sur le renoncement aux soins. Pour une analyse plus étayée des facteurs psychosociaux du renoncement aux soins, voir par exemple : Chauvin P, Parisot I., (2007) Vulnérabilités sociales, santé et recours aux soins dans les quartiers défavorisés franciliens. Résultats d’enquêtes statistiques conduites dans des quartiers de la politique de la ville, Etudes et recherche, Editions de la DIV, 2007.

38.  Parizot I. (2003), Soigner les exclus, PUF, coll. Lien social, Paris et « Les inégalités sociales et territoriales de santé dans l’agglomération Parisienne » dans « Les disparités sociales et territoriales de santé dans les quartiers sensibles », Les documents de l’ONZUS, Délégation interministérielle de la Ville, n°1, 2009, Editions de la DIV.

39.  La littérature scientifique a largement documenté la question du traitement de la précarité sociale par l’action publique, dont Bresson, M. (2006) ; La psychologisation de l’intervention sociale : mythes et réalités, L’Harmattan, coll. Logiques sociales, Paris ; Fassin, D. (2006), Des maux indicibles. Sociologie des lieux d’écoute, La Découverte, 2004 ; Bresson, M. (dir.), La psychologisation de l’intervention sociale : Mythes et réalités, coll. « Logiques sociales », L’Harmattan, 2006.

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