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Introduction générale

CHAPITRE 1 ETAT DE L’ART

1 Etat de l’art

1.3 Charge d’espace

Mandana TALEB, Université Paul Sabatier, 2011 Etat de l’art

1.3 Charge d’espace

1.3.1 Définition

Lorsqu’un diélectrique est soumis à des contraintes électrique, thermique ou mécanique, nous pouvons observer dans certaines régions du matériau un excès de charges électriques que nous appelons charges d’espace. La charge d’espace est un facteur majeur dans le comportement diélectrique des isolants (la fiabilité à haute tension, le facteur de dissipation diélectrique en fonction de la température et la fréquence). Le rôle de la charge d’espace dans le vieillissement diélectrique des isolants fait l’objet d’études approfondies depuis plus de soixante dix ans [Von 37], [Diss 92] et [Diss 95].

1.3.2 Origine

Dans ce chapitre, nous traitons des mécanismes physiques de base qui s’appliquent à la formation de la charge d’espace dans le diélectrique. La charge d’espace a différentes origines (Figure 1-7):

 La génération de charges dans le diélectrique : polarisation des dipôles (a), porteurs ioniques intrinsèques ou extrinsèques (b), électro-dissociation d’espèces neutres (c).

 La génération de charges aux interfaces : injection de trous à l’anode (d) et d’électrons à la cathode (e), états de surface (f), réactions chimiques (g) [Laur 99]. -e -e d e b f c g a Méta l Diélectrique ions

Figure 1-7 : Schéma récapitulatif des situations possibles pour la génération de charges. a) dipôles, b) porteurs ioniques, c) électro dissociation d'espèces neutres, d) injection de trous, e) injection d’électrons, f)

états de surface, g) réaction chimique.

Les porteurs de charges sont différenciés selon leur origine. Ils sont dits intrinsèques s’ils sont générés à l’intérieur du matériau, et extrinsèques s’ils proviennent de l’extérieur. Mis à part les dipôles, la charge d’espace, intrinsèque ou extrinsèque, peut se déplacer dans le diélectrique. Le déplacement de charges provoque des accumulations de charges et l'intensification locale du champ qui peuvent être périlleuses pour les matériaux et les équipements. La Figure 1-8 montre la formation de charges d’espace dans un diélectrique

soumis à une contrainte électrique en raison de trois processus différents: a) la polarisation des dipôles électriques sous l'effet du champ électrique, b) la migration des porteurs ioniques pour former des hétérocharges aux électrodes, c) l'injection de charges aux interfaces qui conduit à la formation d’homocharges dans le diélectrique.

Figure 1-8 : Profils de densité de charge d'espace (ρ) dans l’isolant pour un champ électrique appliqué dans le cas a) de la polarisation des dipôles, b) de la migration des porteurs ioniques, c) de l’injection de

charges aux interfaces.

1.3.3 Théorie des bandes

La théorie des bandes a initialement été élaborée pour les matériaux semi-conducteurs puis étendue au cas des isolants. Celle-ci stipule que lorsque des atomes ou des molécules s’assemblent pour former un solide, les niveaux d’énergie discrets s’élargissent et forment des bandes. La bande la plus élevée occupée par les électrons, Ev, est appelée bande de valence (HOMO), et la première bande non occupée, Ec, est appelée bande de conduction (LUMO, cf. Figure 1-9.a) [Diss 92], où :

 χ (Affinité électronique) : énergie nécessaire pour amener un électron du bas de la bande de conduction au niveau du vide.

 E (Niveau de Fermi) : niveau de référence appelé également potentiel F électrochimique.



φ

(Travail de sortie) : énergie minimum pour amener un électron du niveau de Fermi d’un matériau dans le vide.

 E (Energie d’ionisation) : énergie nécessaire pour amener un électron de la bande de i valence au niveau du vide.

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 Niveau du vide : correspond à l’énergie potentielle d'un électron à un point où la force d'attraction entre les électrons et la surface du matériau est négligeable, autrement dit, il correspond à l’énergie d’un électron entièrement sorti du matériau.

Figure 1-9 : a) Diagramme de bandes d'un isolant idéal b) d'un isolant réel.

Les propriétés électroniques et optiques d’un matériau découlent de sa structure de bandes. Dans le cas des diélectriques, la bande de valence et la bande de conduction sont séparées par la bande interdite ou gap, qui est de l’ordre de 8.8eV pour le polyéthylène [Hoff 91]. Même à température ambiante, quasiment aucun électron ne peut passer de la bande de valence à la bande de conduction.

1.3.4 Piégeage dans le diélectrique

Dans la bande interdite, en théorie, aucun état d’énergie n’est disponible. En réalité, il existe des défauts de structure dans les polymères dus par exemple à la présence d’impuretés : additifs, agents de réticulation, antioxydant…etc. Ces défauts de structure se traduisent par des états d’énergie intermédiaires dans la bande interdite (Figure 1-9.b), qui peuvent piéger des charges dans le polymère. Ces états d’énergie sont considérés comme des pièges à trous lorsqu’ils sont au-dessus de la bande de valence, et des pièges à électrons lorsqu’ils se situent juste en dessous de la bande de conduction. Des mesures de courants thermostimulés (CST ou TSC en anglais) ou de luminescence thermostimulée (LT ou TL en anglais), induits par rayons X permettent d’approcher la nature et la profondeur des pièges dans le polyéthylène [Ieda 84].

Les pièges peuvent être profonds ou peu profonds selon leur origine. Les pièges profonds sont dus généralement à des défauts chimiques (agents de réticulation, antioxydants, additifs…). Par contre, les pièges peu profonds sont dus au désordre physique. Les pièges se distribuent dans la bande interdite selon la morphologie de l’isolant. Par exemple, Chowdry considère une distribution de pièges discrète pour les matériaux cristallins, et plutôt une distribution continue pour les matériaux amorphes [Chow 74].

Les charges, une fois injectées dans le diélectrique peuvent être piégées dans les niveaux d’énergie situés dans la bande interdite. En effet, elles viennent d'abord se piéger dans les pièges les plus profonds dans lesquels les charges peuvent rester de quelques minutes à plusieurs jours [Tey 01]. L'augmentation de la densité de charges permet le remplissage d'une

grande partie des pièges profonds, laissant place à une conduction par hopping dans des pièges peu profonds, où le temps de résidence est faible [Meu 00], [Leroy 04].

Meunier et son collaborateur [Meu 00], [Meun 01] ont établi une relation entre le temps de résidence des électrons piégés et les propriétés moléculaires d’un polyéthylène. Le temps de résidence d’un électron dans un piège chimique est supérieur à celui des pièges physiques par plusieurs ordres de grandeurs comme le montre la Figure 1-10.

Figure 1-10 : Distribution logarithmique des densités de pièges en fonction du temps de résidence des électrons, la ligne épaisse et les triangles correspondent aux défauts physiques et chimiques

respectivement. Résultats de calculs effectués par Meunier [Meun01].

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