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Partie I : Le tournant néolibéral de la relation euro-méditerranéenne : 57

2.   Chapitre II : Rapports public-privés dans le Plan Solaire Méditerranéen 93

Les politiques publiques de libéralisation des pays du sud sont mises en place dans le cadre du processus de Barcelone, puis elles sont renforcées par la conditionnalité de l’aide au développement européenne dans la Nouvelle Politique de Voisinage, enfin elles aboutissent à une action publique publique-privé dans l’UpM. Ce glissement de paradigme, décrit au chapitre précédent, s’appuie sur une série d’instruments politiques. Les modalités de mise en œuvre des instruments politiques tout autant que leurs finalités ont participé à l’instauration de ces nouveaux modes d’actions de l’État.

L’évolution institutionnelle du partenariat Euro-méditerranéen peut se comprendre comme un glissement de la création des politiques publiques vers le management de l’action publique. Néanmoins, les États dans ce cadre ne sont pas écartés du processus. La relation euro- méditerranéenne reste un enjeu majeur pour les gouvernements comme le laisse penser la rivalité entre l’Allemagne et la France. Nous remarquons cependant que l’issue de cette rivalité est moins déterminante que la manière dont les groupes d’intérêts participent à l’action publique. C’est pour cela que, dans ce chapitre, je présente le cadre général des politiques énergétiques euro-méditerranéennes. Cette relation s’explique notamment par les trajectoires historiques des pays les plus impliqués et les plus influents dans cette relation : l’Allemagne, la France et l’Espagne. Dans ce chapitre, tout au long de l’étude des transformations institutionnelles au sein du partenariat, je montrerai comment celles-ci sont liées à l’émergence de la problématique des énergies renouvelables.

Le rôle des logiques publiques-privées dans l’élaboration du

Plan Solaire Méditerranéen : co-construction des politiques

publiques.

Pour analyser le glissement des politiques publiques autocentré vers une action publique multi- acteurs engendrés par la création de l’Union Pour la Méditerranée, je propose de changer d’échelle et d’étudier comment se sont impliqués les principaux États européens dans le Plan Solaire Méditerranéen.

L’Allemagne dans le Plan Solaire Méditerranéen : recette centralisée

et incorporation des énergies renouvelables dans le moule des

énergies conventionnelles.

L’Allemagne est la principale force en Europe dans les énergies renouvelables pour ce qui concerne le nombre d’emplois et de quantité de production. En effet, le secteur des énergies

Marie Gerin-Jean - La bureaucratisation néolibérale de l’énergie solaire au Maroc 94 renouvelables représente en 2014 plus de 370 000 emplois directs et indirects (IRENA 2014). La production éolienne allemande est environ cinq fois plus importante que celle de la France. L’Allemagne mène le secteur solaire européen avec une puissance photovoltaïque dix fois plus importante que celle de la France.

La sucess stories allemande est habituellement attribuée à une politique volontariste initiée à partir de la fin des années 80. Cependant, on remarquera qu’au départ, le soutien au secteur des énergies renouvelables est très limité en comparaison de celui dédié aux ressources fossiles et au nucléaire et se concrétise essentiellement par une aide financière et des crédits d’impôt aux secteurs de la recherche et du développement. Dans un second temps, la production des énergies renouvelables est centralisée et sa régulation s’impose sous le même mode que celui du secteur des énergies fossiles et nucléaires. Ce développement sur un mode centralisé est un échec. Ce qui est remarquable c’est que ce bilan négatif119 est surtout utilisé dans l’argumentation contre

l’investissement dans le secteur renouvelable comme le montre le sociologue Aurélien Evrard. Par la suite, le développement et l’institutionnalisation timides du secteur des énergies renouvelables se concrétisent par la création du ministère pour l’environnement et la sûreté nucléaire (BMU) en 1986, suite à l’accident de Tchernobyl et à la montée de l’antinucléaire notamment dans les coalitions politiques. Avant les années 2000, on note une résistance des compagnies d’électricité qui n’est contrebalancée que par les luttes institutionnelles ou les mesures en faveur des énergies renouvelables sous l’impulsion du Parlement allemand.

« Les groupes d’intérêts industriels du secteur des énergies renouvelables se sont constitués autour de la question des instruments de création d’un marché pour les énergies renouvelables. La stratégie de résistance passive développée par les compagnies d’électricité danoises ou allemandes, c’est-à-dire le refus de rémunérer les propriétaires d’énergie éolienne pour l’électricité injectée dans le réseau, a nourri le besoin de ces acteurs de s’organiser collectivement. En se professionnalisant, ces groupes ont, par la suite, considérablement augmenté leur capacité d’influence sur la politique énergétique de leur pays respectif. » p. 42 (Evrard 2013b)

Le groupe d’intérêts industriels qui m’intéresse particulièrement est celui de Desertec Industrial Initiative (DII) pour sa forte implication dans les agendas politiques des pays du sud de la méditerranée. La stratégie de la fondation DESERTEC et de son consortium industriel est, dès 2003, de développer l’énergie solaire concentrée (CSP) à grande échelle. Cette vision est appuyée par un programme de la Banque Mondiale, le BEI et le gouvernement allemand120. Je

reviendrai en détail sur l’implication de ce consortium dans le développement des énergies solaires au Maroc dans le cinquième chapitre de cette thèse. Ce consortium allemand semble emblématique des modes de développement public-privé en Allemagne. Ce que nous retrouvons déjà dans le cas allemand, c’est la transformation grâce premièrement à la

119 C’est le cas du projet d’éolien à grande échelle Growian qui capte près de la moitié des fonds investis par le ministère de la Recherche dans l’éolien jusqu’en 1988.

120 La Banque Mondiale finance le « Clean Technology Fund Financing for Concentrated Solar Power in the Middle East and North Africa » depuis 2009 d’un montant total de 750, consulté le 09/12/2014 http://go.worldbank.org/3PGQ0PT6F0 et le gouvernement allemand au travers des études réalisées par le DLR

Marie Gerin-Jean - La bureaucratisation néolibérale de l’énergie solaire au Maroc 95 modification du mix énergétique, deuxièmement une transition technique. Cependant ces deux actions sont déconnectées du projet politique et social qui accompagne généralement la volonté de transition telle que l’étudie Laurence Raineau (Raineau 2011).

« Malgré leurs différences, les trajectoires nationales [Allemagne et France] conduisent au même constat : l’alternative et le secteur se sont transformés réciproquement, mais de manière inégale. Les secteurs électriques européens ont été conduits à s’adapter face à l’émergence des énergies renouvelables, lesquelles ont également évolué “au contact” du secteur électrique. Les acteurs du secteur ont intégré les technologies renouvelables tout en parvenant à les conformer à leurs normes dominantes et, par conséquent, à rejeter le projet alternatif dont elles étaient porteuses. » p.232 (Evrard 2013c).

L’histoire du développement des énergies allemandes est primordiale pour comprendre le projet de développement des énergies renouvelables au Maroc. D’une part parce que le gouvernement allemand est comme nous le verrons une force principale de cette action publique et d’autre part, car les dynamiques structurelles qu’observe Aurélien Evrard dans sa comparaison européenne doivent être analysées dans le contexte des pays du Sud. Pour conclure, je constate que le choix de technologie et de montage financier privilégie, au Maroc121 et en Allemagne,

des structures centralisées et une structure économique semblable au secteur des énergies dites conventionnelles.

L’expertise française dans le Plan Solaire Méditerranéen : les

trajectoires professionnelles publique-privés

Le soutien allemand à ses industriels du secteur solaire n’est pas sans lien avec la rivalité franco- allemande en termes de politique euro-méditerranéenne. En réaction à la vision proposée par la fondation DESECTEC, Nicolas Sarkozy lance « en grande pompe »122 l’Union Pour la

Méditerranée. Cependant, les noms, les contours et les objectifs de cette relation diplomatique ne se sont pas construits sans de fortes négociations avec le gouvernement allemand. En effet, à l’origine, « l’Union méditerranéenne », le projet initial de N. Sarkozy ne concernait pas l’ensemble des membres européens, mais uniquement les riverains méditerranéens123. L’Allemagne impose de gérer cette relation dans le cadre de l’Union européenne, l’institution

121 Comme nous le verrons dans le schéma du financement de la centrale d’Ouarzazate dans le cinquième chapitre.

122 DEGER Marc, Union Pour la Méditerranée : le naufrage du projet de Sarkozy, http://www.rue89.com/2010/11/16/union-pour-la-mediterranee-le-naufrage-du-projet-de-sarkozy-176175, consulté le 21 août 2015.

123 « Les discussions sur le projet d’Union Méditerranéenne puis d’Union Pour la Méditerranée ont marqué un moment de tension entre la France et l’Allemagne, cette dernière invoquant les risques d’éclatement de l’Union Européenne. Ces menaces à peine voilées ont été entendues et le projet initial qui n’impliquait que les pays directement riverains de la Méditerranée a été élargi à l’ensemble des pays membres de l’Union. » pp.15 (Moisseron 2012)

Marie Gerin-Jean - La bureaucratisation néolibérale de l’énergie solaire au Maroc 96 devient « l’Union Pour la Méditerranée » (Moisseron 2012). L’Allemagne a donc réussi à faire valoir sa place de chef de file dans le processus. La « rivalité franco-allemande » décrite par les universitaires et journalistes spécialistes de ces relations124 est intéressante au niveau de la

concurrence que l’on observe entre les deux principaux consortiums industriels. Le premier, DESERTEC est comme nous l’avons vu soutenu par le gouvernement allemand, il propose une véritable vision : produire, à partir des rayons du soleil dans le désert, jusqu’à l’ensemble des besoins en énergie de l’humanité. Cette vision est étayée par plusieurs études produites par des acteurs publics (DLR l’agence aéronautique spatiale) ou par DESERTEC. Dans la lancée et en réaction, les industries françaises s’organisent autour de MEDGRID, consortium soutenu directement par l’Agence française de Développement et le Réseau de Transport Electrique RTE français. Le consortium français ne propose pas quant à lui de vision, mais promet les moyens techniques d’interconnexion entre les pays et les continents pour transporter cette électricité produite dans le désert. MEDGRID est donc l’un des principaux groupes d’intérêt à défendre l’idée du PSM auprès de l’administration.

L’Union Pour la Méditerranée est, à ses débuts, un moyen de renforcement partisan avec des acteurs des partis de droite qui personnifient cette action. Concernant le Plan Solaire Méditerranéen, j’ai observé comment des personnages tels que ceux cités dans l’encart ci- dessous ont une influence importante sur l’orientation du projet.

« Sur le plan institutionnel, dans l’attente de la mise en place effective du secrétariat de l’Union Pour la Méditerranée (UPM), une instance de gouvernance informelle a su se constituer au sein du Plan Solaire Méditerranéen (PSM) afin de veiller à l’instruction et la coordination du plan ainsi qu’à l’analyse des projets. » (Borloo et Raoult 2009) Ces personnages lient leur carrière personnelle (souvent déjà en marge des circuits classiques de promotion interne aux ministères) avec le succès politique d’un projet. Je parle de carrières en marge lorsque ces fonctionnaires ne sont pas employés sur des projets en relation avec leur métier d’origine, l’action de leur ministère ou encore leur direction de rattachement. Nous illustrerons ce propos avec deux parcours d’acteurs emblématiques.

124 (Gougeon 2009)

Marie Gerin-Jean - La bureaucratisation néolibérale de l’énergie solaire au Maroc 97

1.1.1.2

L’encart : Les experts français Publics-Privés

Notre porte d’entrée, pour suivre le fil du réseau de relations entre les experts publics­ privés,  commence  avec  Philippe  Lorec,  dont  j’ai  été  l’adjointe  pendant  14  mois  d’observation  participante,  lorsqu’il  était  chef  du  « pôle  Financement  et  marchés  internationaux » à la Délégation interministérielle à la Méditerranée. 

Philippe  Lorec  peut  être  perçu  comme  l’homme  des  projets  pharaoniques.  Considéré  comme  le  père  du  Plan  Solaire  Méditerranéen,  il  n’en  est pas  à  son  premier  projet  ambitieux.  Il  participe  notamment  à  l’initiative  climat  « Paris­Nairobi » 125  du  ministre 

Borloo  qui  vise  à  connecter  électriquement  Paris  et  Nairobi.  Au  début  du  Plan  Solaire  Méditerranéen, il participait  aux réunions des hauts représentants à l’UPM  en tant que  membre  de  la  DGEC.  Pourtant  ses  études  comme  ingénieur  dans  le  secteur  micro­ informatique  et  de  l’armement  ou  son  expérience  dans  le  domaine  de  « l’intelligence  économique »126, ne le prédestinent par, forcément, à ces taches dans une action publique 

à l’étranger, relevant de l’aide au développement, à fortiori dans le secteur des énergies  renouvelables.  J’ai  observé  cependant  qu’il  tirait  sa  légitimité  en  partie  de  son  appartenance au ministère des Finances. En effet, lors des réunions, son détachement de  ce ministère à la DGEC puis à la  DIMED est régulièrement rappelé. Ce rattachement ou  affiliation  serait  en  effet  un  gage  de  pouvoir  et  de  compétence.  J’ai  donc  observé  une  hiérarchie  informelle entre les  personnes qui est directement liée  au type de  ministère  auquel elles sont rattachées. Ceci est d’autant plus visible dans des configurations telles  que la DIMED ou l’UPM, car la plupart sont détachées d’un autre ministère que celui qui  coordonne l’action. Dans l’équipe de la  DIMED Serge Tell, est détaché du ministère des  Affaires  étrangères,  Antoine­Tristan  Mocilnicar  du  ministère  de  l’Écologie  tout  comme  Gilles  Pennequin,  Michèle  Gendreau­Masalou  est  retraitée  de  divers  postes  de  hauts  fonctionnaires,  Olivier  DE  SAINT­LAGER  du  ministère  des  Affaires  étrangères  et  enfin  Nathalie  Philes  qui  est  la  seule  des  services  du  Premier  ministre.  Ces  hiérarchies  sont 

125 L’initiative paris climat « ParisNairobi » entendait apporter des solutions à la question de l’accès à l’énergie pour les « pays en développement » dans le cadre des négociations climatiques en facilitant la mise en œuvre des projets d’énergie propre (clerc-touré 2011).)

126 Élément de CV de Philipe Lorec : Diplômé de IHEDN international et géopolitique, ENSTA ParisTech — École Nationale Supérieure de Techniques avancées et de l’Université Pierre et Marie Curie (Paris VI) d’un DEA, Microelectronique. Il est considéré comme un des hommes de l’intelligence économique « Philippe Lorec débute en 1992 comme directeur de projet à la Direction Générale pour l’Armement (DGA)

et passe, en 1997, chargé de mission Intelligence économique au sein de la Direction des Relations

économiques extérieures (DREE). Deux ans plus tard, il est promu à la tête du Bureau “Veille économique stratégique” de la DREE. Poste qu’il quitte en 2002 pour devenir conseiller du directeur jusqu’en 2004. Il participe entre temps à la rédaction du rapport Carayon. Après avoir intégré le cabinet de François Loos, il est nommé en 2006 au ministère de l’Industrie où il est chargé de coordonner l’Intelligence

Marie Gerin-Jean - La bureaucratisation néolibérale de l’énergie solaire au Maroc 98 formulées explicitement par les acteurs : « aujourd’hui, on a plus de pouvoirs parce qu’on  est dépendant directement du Premier ministre », ou « à grade égal, je suis au­dessus d’elle  parce que ce grade au ministère des Finances a plus de valeur qu’au service du Premier  ministre ». (DIMED et Gerin­Jean 2014)  De même, le second représentant pour la France à l’UPM dans le cadre du plan solaire est  Antoine Tristan Mocilnicar, sa proximité idéologique avec Henri Gaino ne se limite pas à  leur « vision » (Mocilnikar 2012) de l’UPM, mais, par exemple, à une implication politique  commune dans le mouvement contre le mariage pour tous.  Ce qui m’intéresse particulièrement, c’est les relations qu’entretiennent les acteurs entre  eux,  telles  que  les  coécritures  de  rapports  ou  livres,  direction  d’organisation,  affiliation  institutionnelle. 

Source : Marie GERIN-JEAN

Philipe  Lorec  coécrit  un  dossier  (Mandil,  Christophe­Alexandre  Paillard,  Olivier  Appert,  Fadhil  Chalabi,  Chris  Lambert  et  Lorec)  avec  Claude  Mandil  qui  est  un  des  experts  énergétiques les plus influents en France. En 2011, Claude Mandil est vice­président d’un  groupe consultatif ad hoc dit « Feuille de route énergie 2050 » auprès de la Commission  européenne.  En  2012,  il  est  coauteur  avec  l’économiste  Jacques  Percebois  du  rapport 

Marie Gerin-Jean - La bureaucratisation néolibérale de l’énergie solaire au Maroc 99 « Rapport  Énergies 2050 » 2,  commandé  par Éric  Besson127.  Ils  recommandent  alors  de 

prolonger la durée de vie du parc nucléaire existant et le développement de la génération 4,  rejetant les options de réduction du nucléaire et d’investissement significatif dans les autres  types d’énergies comme le renouvelable (Mandil et Percebois 2012). Enfin, après avoir été  président  de  l’institut  français  du  pétrole  et  directeur  de  l’Agence  Internationale  de  l’énergie, il est aujourd’hui membre du conseil d’administration du conseil de Total SA.  Le  coauteur  du  rapport,  Jacques  Percebois,  est  l’un  des  experts  les  plus  sollicités  sur  l’énergie en Méditerranée notamment suite à son livre « l’énergie » (Percebois et al. 2010).  L’avant­propos du principal ouvrage de Percebois (second auteur du rapport Énergie 2050,)  est  rédigé  par  Jean  Tirole,  récompensé  du prix de  Suède  en  économie.  Il  est  considéré  comme un de ces experts controversés128 les plus influents129, si l’on en croit le président 

français à propos de la loi Macron passée en utilisant l’article 49.3 « vous avez travaillé sur  le droit des faillites qui a inspiré une partie du projet de loi croissance­activité dont on a vu  combien il était approuvé par le parlement » cité in (Dusseaulx 2015), lorsqu’il s’adresse à  J.Tirole,  lors de  sa  remise  de  la  Légion  d’Honneur61. De plus  ses travaux  sur  l’incitation 

participent  à  la  justification  théorique  de  l’utilisation  des  PPP,  au  motif  que  la  contractualisation  évacuerait  les  conflits  d’intérêts  entre  le  « principal »  ici  le  commanditaire  et  « l’agent »  le  sous­traitant130.  En  dehors de  ses  travaux  sur  l’énergie, 

Jacques Percebois écrit une note sur les partenariats énergétiques (Percebois 2011) pour le  think  tank  l’IPEMED  (L’Institut  de  Prospective  Économique  du  Monde  Méditerranéen).  Enfin, Jacques Percebois et Claude Mandil ont un rôle dans le développement des énergies  en Méditerranée notamment à travers leur participation à des sessions de formation des  fonctionnaires tunisiens, organisées par le CEA à travers l’INSTN (INSTN et Ouerfalli 2013).  L’IPEMED est, comme nous l’avons vu, déterminant dans le positionnement politique de la  France sur la Méditerranée. En plus des conférences, publications ou autres évènements  organisés par le think tank, ces membres sont directement liés à des positions d’influence  politique  élevées.  Son  fondateur  Jean­Louis  Guigou  est  le  mari  d’Élisabeth  GUIGOU,  membre  d’IPEMED,  mais  surtout  députée  et  présidente  de  la  Commission  des  Affaires  étrangères  de  l’Assemblée  nationale,  ancienne  ministre  de  la  Justice.  Par  ailleurs,  le  président du conseil de surveillance est Xavier Belin (président du Groupe Sofiprotéol­Avril  et président du syndicat agricole FNSEA), figure controversée de l’industrie française ciblée 

127 À ce moment Éric, Besson est ministre de l’Industrie et de l’Énergie et de l’Économie numérique durant la présidence de N. Sarkozy

128 « Gentil régulateur ou affreux libéral ? À peine nobélisé pour ses travaux sur “l’analyse de la puissance du marché et de la régulation”, l’économiste Jean Tirole est l’objet d’une controverse » (Jaques 2014) 129 Voire exerçant une “domination des orthodoxes qui stérilise le débat public » selon l’économiste Gilles Rotillon (Rotillon 2015)

130 LAFFONT,J.J.&TIROLE,J. 1993 A Theory of Incentives in Procurement and Regulation,Cambridge, MIT

Marie Gerin-Jean - La bureaucratisation néolibérale de l’énergie solaire au Maroc 100 par la  campagne « les requins » d’ATTAC et autres  ONG  (les requins,  association ATTAC  2015). 

Concernant, la politique énergétique euro­méditerranéenne le Think Tank s’inscrit dans la  continuité de l’idée de la communauté européenne de l’énergie de J.Delors.131 En effet, 

l’Observatoire Méditerranéen de l’énergie OME et le think tank IPEMED soutiennent l’idée  de Communauté euro-méditerranéenne de l’énergie, ce à quoi s’opposait en 2012 A­T.  Mocilnikar responsable Environnement et Développement durable au sein de la mission  interministérielle  de  l’Union  Pour  la  Méditerranée  qui  souhaitait  une  convergence  réglementaire  minimum  (Entretien  du  25/01/2012),  mais  soutient  aujourd’hui  cette  position notamment pour la suite du PSM (Gerin­Jean 2013b)

La place de la figure de l’expert dans cette action publique est fondamentale ; d’une part, elle participe à la diffusion de la rationalité de bureaucratie néolibérale. D’autre part, elle est le symptôme d’une technicisation de la politique qui opacifie les enjeux politiques du développement des énergies renouvelables au Maroc. Cependant comme je l’ai montré ce consensus technique ne permet pas d’évacuer les conflits et les intérêts divergents (mise en concurrence des États tout comme des entreprises). Dans la partie qui suit, nous allons étudier la trajectoire espagnole dans le marché des énergies renouvelables. L’Espagne n’est pas un

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