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3.1.3

Observations

L’obtention des courbes de rotation par spectroscopie `a fente (longue) a long- temps ´et´e la r`egle, faute d’instrumentation mieux adapt´ee. La spectroscopie `a fente n’´echantillonne la galaxie que sur un seul axe que l’on cherche `a faire co¨ıncider avec l’axe dynamique : dans une galaxie en rotation, les composantes radiales et verti- cales du vecteur vitesse sont n´egligeables ; cet axe optimise donc la mesure de la composante azimutale (la rotation), puisque sa projection le long de la ligne de vis´ee est alors maximis´ee. La spectroscopie `a fente suppose donc intrins`equement que la dynamique interne de la galaxie est relax´ee et anim´ee d’un mouvement de rotation axisym´etrique, et que la position de la fente est situ´ee le long de l’axe dynamique. Si cette hypoth`ese semble justifi´ee dans la plupart des cas pour les galaxies spirales locales (voir par exemple les r´esultats du relev´e GHASP : (Garrido et al., 2002) et suivants ; voir ´egalement la figure 3.5), la situation est moins ´evidente pour les ob- jets distants, notamment parce que le taux d’interaction est plus ´elev´e dans l’Univers distant (voir chapitre 2).

L’obtention de courbes de rotation dans les galaxies distantes a ´et´e rendue pos- sible grˆace `a l’av`enement des t´elescopes de la classe des 8-10 m`etres `a partir de raies d’´emission comme [OIII], Hβ ou [OII]. Les plus grands relev´es atteignent aujourd’hui

couramment z∼1 (Vogt et al., 1993; Vogt et al., 1996; Vogt et al., 1997). Il existe peu de courbes de rotation au-del`a : en utilisant le spectrographe `a fentes NIRSPEC au Keck, (Erb et al., 2003) ont obtenu des courbes de rotation pour 16 galaxies Lyman-break (LBGs) `a 2.0 ≤ z ≤ 2.6 en utilisant la raie Hα d´ecal´ee dans le proche

IR. Les courbes de rotation les plus lointaines ont ´et´e obtenues grˆace `a l’instrument ISAAC au VLT par (Pettini et al., 2001) sur des LBGs `a z∼ 3 (voir figure 3.3). La plupart des courbes de rotation des galaxies distantes montrent des gradients de vi- tesse sans v´eritable plateau qui sont malgr´e tout interpr´et´ees comme la preuve d’un mouvement de rotation. Cependant, la plupart de ces galaxies ont des morphologies perturb´ees, ce qui pourrait remettre en question cette interpr´etation.

3.2

Champs de vitesse

La seule mani`ere de v´erifier si les hypoth`eses sous-jacentes `a l’utilisation de la courbe de rotation sont valides ou non est de disposer d’un champ de vitesse. Ce dernier repr´esente la vitesse radiale1

non plus le long d’un unique axe mais sur l’en- 1

le long de la ligne de vis´ee : `a ne pas confondre avec la vitesse radiale qui correspond `a la premi`ere composante du vecteur vitesse dans le plan de la galaxie.

CHAPITRE 3. M´ETHODOLOGIE : CIN´EMATIQUE DES GALAXIES LOINTAINES

Fig. 3.3 – Courbe de rotation de la galaxie Q0347-C5 situ´ee `a z=3.234 (Pettini et al., 2001). A gauche : diagramme position-vitesse dans la raie [OIII] ; `a droite : courbe de rotation, non corrig´ee de l’inclinaison. Le gradient de vitesse est interpr´et´e comme un mouvement de rotation.

semble de la galaxie : l’information cin´ematique obtenue est alors bidimensionnelle. Les hypoth`eses sous-jacentes `a l’interpr´etation des champs de vitesse sont identiques `a celles des courbes de rotation : c’est la capacit´e `a juger de la validit´e de ces hy- poth`eses (voir figure 3.4) et la pr´ecision de la courbe de rotation qui en est d´eduite qui sont accrues, car on dispose alors de l’ensemble de l’information cin´ematique sur la galaxie (Warner et al., 1973). En revanche, leur obtention ne n´ecessite plus d’hypoth`ese sur la position de l’axe dynamique (positionnement de la fente).

La mod´elisation des champs de vitesse repose sur la d´etermination de cinq para- m`etres : la vitesse syst´emique (due au flot de Hubble et ´eventuellement le mouvement de fuite vers Virgo pour les galaxies locales), l’inclinaison du disque, la position du grand axe dynamique et les coordonn´ees du centre de rotation. Le meilleur ajuste- ment de ces param`etres permet de d´eterminer la courbe de rotation. L’ajustement d’une courbe de rotation `a partir d’un champ de vitesse est un probl`eme d’optimisa- tion non-lin´eaire `a 6 inconnues. La difficult´e dans ce genre d’optimisation est qu’en g´en´eral il est tr`es difficile de faire converger les algorithmes si on ne leur donne par d`es le d´epart des param`etres relativement proches des solutions. C’est pour cette raison que des m´ethodes semi-automatiques ont ´et´e mises au point, consistant `a ajuster l’ensemble des param`etres par essais successifs (Amram, 1991). D’autres m´e- thodes consistent `a ajuster d’abord les param`etres constants sur toute la galaxie (par exemple la vitesse syst´emique) et `a ajuster ensuite ceux qui peuvent varier sur des ellipses de rayons variables (Begeman, 1989). De nombreuses ´etudes ont ´et´e consacr´ees `a la mod´elisation des champs de vitesse et `a l’´etablissement des courbes de rotation les plus pr´ecises possibles (par exemple : (van der Kruit et Allen, 1978; Beauvais et Bothun, 2001; Fridman et al., 2005)). Une fois le mod`ele de rotation soustrait du champ de vitesse observ´e, il est alors possible d’´etudier en d´etail les

3.2. CHAMPS DE VITESSE

Fig. 3.4 – Simulations num´eriques de champs de vitesse. (a) : courbe de rotation plate utilis´ee pour simuler une rotation axysim´etrique ; les unit´es de l’axe des abs- cisses sont arbitraires (pixels). (b) : champ de vitesse (256x256) simul´e `a partir de la courbe de rotation pr´ec´edente en supposant un PA=60 deg et une inclinaison de i=50 deg. La structure de ce champ de vitesse est caract´eristique des courbes de rotation plates et permet de juger directement de la validit´e de l’hypoth`ese d’un mouvement de rotation axisym´etrique. (c) : champ de vitesse pr´ec´edent auquel a ´et´e ajout´e une composante radiale (gaussienne de hauteur 30km/s dont le pic est localis´e sur un cercle de rayon de 80 pixels, et de σ=10 pixels) dans le but de simuler un mouvement non circulaire. La diff´erence avec le champ de vitesse pr´ec´edent montre clairement que la dynamique de l’objet n’est plus purement rotationnelle. (d) : Carte de r´esidus entre les champs (c) et (b) : cette carte permet de faire apparaˆıtre les mouvements non circulaires qui peuvent ˆetre li´es `a des mouvements verticaux par rapport au plan de la galaxie (composante Vz) ou radiaux (composante Vr) comme c’est le cas dans

ce mod`ele. Dans les cas r´eels, le meilleur ajustement de la composante azimutale de la vitesse `a une mod`ele de rotation est utilis´e pour soustraire un champ de vitesse de rotation au champ de vitesse observ´e, et ainsi ´etudier les mouvements non circulaires r´esiduels (voir texte).

CHAPITRE 3. M´ETHODOLOGIE : CIN´EMATIQUE DES GALAXIES LOINTAINES

mouvements non circulaires r´esiduels (voir figure 3.4 ; (Beauvais et Bothun, 1999; Amram et al., 1998; Fuentes-Carrera et al., 2004).

Les premi`eres tentatives d’obtention d’un champ de vitesse ont naturellement consist´e `a varier la position de la fente le long de la galaxie (van der Kruit, 1976). Le premier “vrai” champ de vitesse a en fait ´et´e obtenu par (Argyle, 1965) sur M31 `a partir de donn´ees HI. Malgr´e la faible r´esolution spatiale des observations radio, la raie HI `a 21 cm s’est rapidement impos´ee comme le traceur compl´ementaire id´eal du gaz ionis´e, car il s’´etend 3 `a 4 fois plus loin que le disque optique, ce qui permet d’atteindre plus facilement le plateau de la courbe de rotation (Rubin et al., 1980; Rubin et al., 1982). Les raies millim´etriques du CO ont permis d’´etendre les courbes de rotation dans les parties centrales des galaxies, l`a o`u le gaz HII ou HI fait d´efaut ou est fortement obscurci par la poussi`ere (Sofue, 1996; Sofue, 1997). La comparaison entre ces trois principaux traceurs `a des rayons interm´ediaires a donn´e d’excellent r´esultats (Sofue, 1996; Sofue et al., 1999b) et confirme aujourd’hui notre connaissance de la cin´ematique du gaz dans les galaxies spirales locales.

Dans l’optique, les premiers champs de vitesse ont ´et´e obtenus par interf´erom´e- trie Perot-Fabry (Court`es, 1960; Court`es, 1964). Cette technique est tr`es largement utilis´ee dans l’Univers local o`u elle se r´ev`ele particuli`erement efficace (voir figure 3.5), permettant d’obtenir un cube de donn´ees (x,y,λ) en environ une paire d’heures (Schommer et al., 1993; Amram et al., 1995; Hernandez et al., 2005). Le survey GHASP a permis d’obtenir les champs de vitesse d’environ 200 galaxies locales (Amram et al., 2002; Garrido et al., 2002; Garrido et al., 2003; Garrido et al., 2004; Garrido et al., 2005). Le but du relev´e est de fournir un ´echantillon homog`ene de champs de vitesse `a z=0, pouvant servir de r´ef´erence pour des observations `a plus grand z, d’´etudier l’influence de l’environnement sur la dynamique, et de mod´eliser de mani`ere approfondie la cin´ematique du gaz (Amram et al., 2002). Ce relev´e sera dans le futur combin´e avec le relev´e WHISP qui a pour objectif d’obtenir la cin´ema- tique HI pour environ 400 galaxies, afin d’en ´etudier la distribution et la cin´ematique du gaz neutre en fonction du type morphologique, de la luminosit´e et de l’environ- nement (van der Hulst et al., 2001). La combinaison des relev´es WHISP et GHASP permettra d’´etablir des courbes de rotation suffisamment pr´ecises et ´etendues pour ´etudier en d´etail la distribution de masse d’un grand ´echantillon de galaxies locales.