• Aucun résultat trouvé

UN INQUISITEUR AU SERVICE DE LA FRANCE

Chapitre 2 Champion de la foi et agent du ro

« […] ; déshonorer Charles VII, prouver qu’il avait été mené au sacre par une sorcière, c’était sanctifier d’autant le sacre d’Henri VI ; si l’un était reconnu pour l’oint du diable, l’autre devenait l’oint de Dieu. »

Jules Michelet, Jeanne d’Arc (1412-1432), Paris, Hachette, 1853, p. 86.

Dans l’historiographie, le nom de Jean Bréhal est indissociable de l’office d’inquisiteur. Par ailleurs, la déclinaison de son identité dans les sources ne manque jamais de rappeler cette charge, et notre corpus comporte un dossier documentaire majeur : celui de la procédure en nullité de la condamnation de Jeanne d’Arc, une procédure inquisitoriale. L’homme est avant tout connu comme étant le « grand inquisiteur de la réhabilitation » de la Pucelle. L’action judiciaire de Bréhal n’a cependant pas laissé de traces équivalentes à celle des inquisiteurs des XIIIe ou XIVe siècles. La dignité inquisitoriale est revendiquée dans les écrits du dominicain jusqu’à la fin des années 1460, pourtant c’est principalement sur une cause que Jean Bréhal semble avoir été actif, dans les années 1450, lorsqu’il s’engage dans la révision du procès de Rouen. Cette affaire de foi est aussi une affaire d’État. Au cours de cette procédure peu commune, l’inquisiteur normand est omniprésent, et paraît mener la charge contre les juges de Jeanne. Il ne s’agit pourtant pas d’une entreprise privée et solitaire. Bréhal ne ménage pas ses forces pour justifier la nullité de la sentence de 1431, mais il n’est que la figure de proue d’un vaisseau portant le pavillon royal.

I. Une affaire de foi, des procès politiques A. Le dossier de l’inquisiteur

L’inquisiteur, défenseur de la majesté

Jusqu’au XIIIe

siècle, l'hérésie relevait du tribunal de l'évêque, chargé de juger la croyance des baptisés de son diocèse. Mais, parce qu’ils jugeaient les officialités inefficaces et impuissantes à éradiquer les hérésies, l'empereur d'Allemagne et le pape se sont orientés vers la création d'un tribunal d'exception confié à un juge ecclésiastique, et dont le prince assurerait l'efficacité temporelle. En rivalité avec l’empereur Frédéric et soucieux de conforter son pouvoir, Grégoire IX proclama en 1231 le droit exclusif de l’Église de juger les hérétiques et créa l'office d'inquisition qui s’appliqua donc d’abord à l'Allemagne et à l'Italie. Ce tribunal fut introduit en France du nord en 1233, et dans celle du midi au début de 1234. Ce qui ne devait probablement être qu’un tribunal temporaire et ad hoc, devint une justice à part entière dans toutes les affaires intéressant la défense de la foi, quoique souvent intermittente dans le nord du royaume capétien. Dès lors, les inquisiteurs, commis pour exercer cet office judiciaire, tireraient leur autorité du Saint-Siège. Ainsi, la formule consacrée, que l’on retrouve dans la documentation – qu’il s’agisse du procès de Jeanne d’Arc ou d’autres affaires –, souligne que l’inquisiteur agit en tant que auctorita apostolica

deputatus.

Tel un légat, il a reçu une délégation du siège apostolique pour intervenir dans la chrétienté. Dans son cas, il s’agit d’instruire des procès en matière de foi sur un ressort plus ou moins étendu. L’hérésie, plus particulièrement, est une atteinte à la majesté divine, ainsi que l’explique la décrétale Vergentis in senium d’Innocent III en 11991

. Concrètement,

Vergentis in senium fut adressée au clergé, aux consuls et au peuple de Viterbe, ville des

États de l’Église, alors en révolte contre Innocent III. Elle permit, en instrumentalisant l’hérésie, l’intervention du pape dans la ville. Foi et politique étaient d’ors et déjà indissociables. Sous couvert d’une majesté divine lésée par la dissidence hérétique, le pontife pouvait affirmer son pouvoir. Ce crimen maiestatis renvoie à une notion ancienne, le droit

1 H. M

AISONNEUVE, « Le droit romain et la doctrine inquisitoriale », dans Études de droit canonique dédiées à

G. Le Bras, 2, Paris, 1965, p. 931-942. Voir aussi la traduction de cette bulle proposée par Julien Théry dans

P. GILLI, J. THÉRY, Le gouvernement pontifical et l’Italie des villes au temps de la théocratie (fin XIIe-mi XIVe siècle), Montpellier, Presses universitaires de la Méditerranée, 2010, p. 553-561.

canonique s’inspirant ici directement du droit civil romain2

. La mise en place, au début du XIIIe siècle, d’une inquisition extraordinaire – avec une enquête ex officio permettant au juge d’user du secret et de faire dire l’erreur sous la forme de l’aveu –, relevant directement du Saint-Siège, s’inscrit bien dans la continuité de Vergentis in senium : elle traduit une logique de renforcement du pouvoir pontifical. Au nom du pape, l’inquisiteur « de la perversité hérétique » est donc un défenseur de la majesté divine, contre ceux qui l’ont offensée. Cependant, une majesté peut en cacher une autre.

Le cas Jeanne d’Arc : de multiples lèse-majestés

Sans revenir précisément sur les actes du procès de 1431, rappelons que les paroles subversives de Jeanne sur sa mission, ses prophéties et ses Voix, ainsi que ses actions transgressives suggèrent une atteinte à la majesté divine. C’est d’ailleurs ce pourquoi elle a été condamnée, comme hérétique, schismatique et invocatrice de démons, une première fois le 24 mai 1431, puis une seconde fois comme relapse, le 30 mai, après qu’elle eut repris ses habits d’homme. Le libelle d’Estivet formulait déjà une litanie de crimes – dont « déclarée sorcière », « invocatrice et conjuratrice de malins esprits », « mal pensante en et au sujet de notre foi catholique », « usurpatrice des hommages et du culte divin », « hérétique », etc. –, quelques mois auparavant3. Le procès de Rouen avait d’ailleurs repris des reproches antérieurs puisque l’accusation de « supersticions, faulses dogmatizaticions et autres crimes de lèse-majesté divine » était déjà avancée le 3 janvier 1430 dans la lettre adressée par « le roi

2 Sur la majesté antique, J-L F

ERRARY, « Les origines de la loi de majesté à Rome », Comptes rendus des

séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 127, 4, 1983, p. 556-572. Voir aussi les articles de Yan

Thomas : Y. THOMAS, « L’Institution de la majesté », Revue de Synthèse, n°3-4, juil.-déc.1991, p. 331-386 ; ID., « Arracher la vérité. La Majesté et l’Inquisition (Ier siècle, IVème siècle ap. J.C) », Le Juge et le Jugement dans

les traditions juridiques européennes, R. JACOB (éd.), Paris, 1996, p. 15-41 ; ID., « Les procédures de la majesté. L’enquête secrète à partir des Julio-Claudiens », Mélanges A. Magdelain, M. HUMBERT et Y. THOMAS (éd.), Paris 1998, p. 102-138. Sur la notion plus large de lèse-majesté, voir M. SBRICCOLI, Crimen laesae maiestatis. Il

problema del reato politico alle soglie della scienza penalistica moderna, Milan, Giuffrè, 1974. Voir surtout les

travaux récents de Jacques Chiffoleau : J. CHIFFOLEAU, « Sur le crime de majesté médiéval », dans Genèse de

l'État moderne en Méditerranée. Approches historiques et anthropologique des pratiques et des représentations : actes des tables rondes tenues à Paris les 24, 25 et 26 septembre 1987 et les 18 et 19 mars 1988, Rome, École

française de Rome, Collection de l'École française de Rome n° 168, 1993, p. 183-313 ; ID., « Majesté » dans

Dictionnaire du Moyen Age, CL.GAUVARD,A. DE LIBERA,M.ZINK (dir.), Paris, PUF, 2002, p. 869-871; ID., « Le crime de majesté, la politique et l'extraordinaire : note sur les collections érudites de procès de lèse-majesté du XVIIe siècle français et sur leurs exemples médiévaux », dans Y-M. BERCÉ (dir.), Les procès politiques

(XIVe-XVIIe siècle), Rome, École française de Rome, Collection de l'École française de Rome no 375, 2007, p. 577-662 ; C. LEVELEUX-TEIXEIRA, « Quelques réflexions sur la construction normative de la lèse-majesté au Moyen Age (XIIe-XIVe siècles) », Cahiers poitevins d’histoire du droit, n°1, LGDJ, 2006, p. 7-28. Enfin, pour une autre lecture et sur l’ambiguïté de la lèse-majesté dans les procès politiques à la fin du Moyen Âge, voir enfin, J. BLANCHARD, Commynes et les procès politiques de Louis XI. Du nouveau sur la lèse-majesté, Paris, Picard, 2008.

3 P. T

de France et d’Angleterre », Henri VI4

. En effet, les pouvoirs séculiers se sont appropriés la qualification de lèse-majesté, les juges du roi prenant modèle sur ceux du pape. Les princes se posent désormais en défenseurs de la foi et en adversaires du diable.

À cet affront principal, s’ajoutent la désobéissance et l’impertinence de Jeanne au cours du procès, ce qui implique une atteinte à l’autorité ecclésiale incarnée par les juges de Rouen. Par ailleurs, si la cause est instruite en matière de foi, elle ne doit pas faire oublier un crime originel. En effet, la rébellion de la Pucelle contre la double couronne porte atteinte à la souveraineté royale d’Henri VI, et donc à sa maiestas. Ce crime a d’ailleurs une connotation religieuse, l’errance dans la fidélité au prince étant corrélée à l’errance dans la foi, puisqu’en son for intérieur, le sujet refuse la souveraineté du monarque. En outre, des constitutions impériales du début du XIVe siècle – Ad reprimandum et Qui sint rebelles (1313) – comparent le crime de majesté à la rébellion. Par ailleurs, équiparée à l’hérésie, dès 1326, dans une bulle de Jean XXII, la sorcellerie devient le crime de lèse-majesté par excellence : elle blesse la majesté divine et atteint les deux corps du roi. La sédition est d’ailleurs un trait dominant dans la lettre envoyée aux Grands, le 28 juin 1431, soit un mois après le bûcher5. La Pucelle d’Orléans n’est donc pas moins coupable que de ce que Jacques Chiffoleau a appelé une « sorte d’hérésie d’État »6.Il a ainsi montré que l’énormité du crime d’hérésie passait par des « formes proliférantes », au point d’évoquer une « hydre », car c’est son propre de n’avoir aucune borne. Les charges pesant sur Jeanne formeraient même un « réseau d’incriminations ouvert »7. Néanmoins, il souligne que, aux yeux de ses juges, la faute primordiale de la Pucelle est d’être, en son for intérieur, « une désobéissante »8. En les contestant, en s’en

remettant à Dieu, ou au pape, elle a refusé la médiation, et donc la souveraineté, d’une Église institutionnelle – l’ecclesia militans – incarnée, à Rouen, par l’évêque et ses assesseurs. L’emboîtement des crimes répond bien à l’enchâssement des majestés lésées.

4 J. Q

UICHERAT, Procès de condamnation et de réhabilitation de Jeanne d'Arc, dite la Pucelle, vol. 1, Paris, Renouard, 1841, p. 18 ; P. TISSET, Procès de Condamnation de Jeanne D'Arc, t. I, Paris, Klincksieck, 1960, p. 14.

5 Ibid., I, p. 426-430. 6 J. C

HIFFOLEAU, « L’hérésie de Jeanne. Note sur les qualifications dans le procès de Rouen », dans Jeanne

d’Arc. Histoire et mythes,Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014, p. 13-55. 7

Ibid., p. 30-31.

8 Ibid., p. 43. Jacques Chiffoleau ajoute (p. 44) : « Il ne fait pas de doute, par conséquent, que Jeanne, aux yeux de ses juges, lèse la majesté divine par son action, ses entreprises possiblement diaboliques, mais aussi et peut- être surtout par son refus profond, en son for intérieur d’obéissance aux puissances séculières et ecclésiastiques qui la jugent et qui prétendent tenir de Dieu leur pouvoir ».

Enfin, du point de vue du camp armagnac, la condamnation de Jeanne en 1431, pose aussi le problème de la lèse-majesté de Charles VII, un crime commis, cette fois, par les accusateurs de la jeune fille. Par ailleurs, la concurrence des majestés n’est pas seulement séculière, elle oppose aussi, au XVe siècle, la potestas du concile à celle du pontife. Pour Bréhal, nous le verrons, la mort de la Pucelle constitua également une atteinte à la juridiction du pape. Or, en tant qu’inquisiteur, c’est-à-dire juge extraordinaire délégué du Saint-Siège, il est garant de la souveraineté pontificale.

Une procédure insolite

Le dossier de l’inquisiteur Jean Bréhal porte sur un procès et non sur un cas d’hérésie9

. Il va s’agir pour lui d’obtenir non pas un aveu ou une abjuration, mais une annulation de la sentence de 1431. Le processus qui y conduit débute en 145010.L’historiographie a longtemps utilisé l’expression « réhabilitation de Jeanne d’Arc » pour qualifier le procès de 1455-1456, mais Pierre Duparc a réfuté cette formule, employée pour la première fois par Jules Quicherat11. Il a aussi montré qu’il ne s’agissait pas d’une simple restitutio ad famam – bien que cette dimension existe indubitablement dans la supplique de la famille d’Arc –, car cette procédure laisse subsister le principe de la culpabilité et de la condamnation. Elle n’en supprime que les conséquences et reconnaît de facto le bien-fondé de la sentence. Les termes « justification » et « absolution » paraissent aussi juridiquement impropres, encore que dans la

Recollectio, nous le verrons, Bréhal se livre bien à une justification morale de Jeanne, et que

les actes de la procédure ou mémoires judiciaires l’utilisent : Élie de Bourdeilles a composé une Justificatio puelle Francie, et Théodore de Leliis a signé un Tractatus justificationis. Quant à la « révision », terme utilisé avant « réhabilitation » pour désigner une procédure destinée à réparer une erreur judiciaire, Pierre Duparc remarque qu’elle n’a pas de correspondance exacte dans l’ancien droit.

Pour Charles VII et ses conseillers, il s’agissait de réduire à néant, non seulement la sentence de condamnation, mais aussi la totalité de la procédure de 1431. C’est ce qui

9 Pour les actes du procès, voir les éditions de Jules Quicherat et de Pierre Duparc : J. Q

UICHERAT, Procès de

condamnation et de réhabilitation de Jeanne d’Arc, Paris, 1841-1848 ; P. DUPARC, Procès en nullité de la

condamnation de Jeanne d’Arc, 5 vol., Paris, Klincksieck, 1977-1988.

10 Voir l’annexe 1 pour la chronologie de la procédure avec ses grandes phases. 11 P. D

UPARC, « Le troisième procès de Jeanne d’Arc », Comptes rendus des séances de l’Académie des

Inscriptions et Belles Lettres, 1978, p. 28-41. Voir aussi P. DUPARC, Procès en nullité de la condamnation de

transparaît de la préface des notaires, au début du registre, où il est dit du processus tenu à Rouen : nullus declarus est12. De même pour la supplique, où la famille d’Arc a demandé au pape d’intervenir ut super nullitate et iniquitate dicti processus, syntagme qui fait de la nullité à la fois la cause et l’objectif de la procédure13– ce que corrobore l’exposé de l’avocat Pierre

Maugier qui veut prouver que le procès de Rouen fut nullitate infectus14. Quant au rescrit de Calixte III, il indique clairement que la procédure de 1455 va suivre la via extraordinaria

nullitatis15. L’inquisiteur et les juges de la commission épiscopale doivent donc dénicher cette

nullité intrinsèque du procès de condamnation de Jeanne d’Arc. Tout comme l’hérésie enfouie qu’il faut dévoiler, la nullité de la précédente procédure doit être mise à jour par un examen attentif. La sentence finale de 1456 n’a plus qu’à déclarer : dictos processus et

sentencias…esse nullos et nullas, invalidos et invalidas, irritos et inanes. Les juges peuvent

ajouter alors : ipsos et ipsas, cassamus, irritemus et adnullamus16. Autrement dit, c’est parce qu’ils ont constaté sa nullité, qu’ils peuvent affirmer que le procès de 1431 est nul et non avenu. Comme le dit Pierre Duparc, la sentence de 1456 « consacre son inexistence »17.

Pour en arriver là, il fallut construire une « procédure spéciale », à la fois inquisitoire et accusatoire18. Les parents de Jeanne d’Arc – c'est-à-dire sa mère et ses frères – intentèrent donc l’action en adressant une supplique au pape. Calixte III, élu le 8 avril 1455, y a répondu favorablement, le 11 juin, par un rescrit confiant à une commission de prélats et à un inquisiteur le soin d’instruire l’affaire. La voie choisie fut la querela nullitatis, issue du droit romain, dont les divers cas d’application sont exposés dans le droit canonique : dans le Décret de Gratien, aux titres De foro competenti et De sententiis, dans les Décrétales et le Sexte, au titre De sententia et re judicata19. Le procès s’est donc ouvert par un lis, une contestation, exposant la querelle avec les demandes des plaignants, et les démarches pour l’organisation de la procédure comme l’institution des juges, la désignation ou la citation des parties

12 Ibid., I, p.1-2. 13 Ibid., I, p. 17. 14 Ibid., I, p.59. 15 Ibid., I, p. 13. 16 Ibid., II, p. 610. 17 P. D

UPARC, « Le troisième procès de Jeanne d’Arc », art. cit., p. 40-41. 18

P. DUPARC, Procès…, op. cit., V, p. 17. 19 Loc. cit.

adverses, la nomination des procureurs, des notaires et des auxiliaires de justice20. Cette phase figure dans les trois premiers chapitres de l’instrumentum établi par les notaires, après la préface et l’annonce du plan adopté. Elle est suivie de la réception des témoins et de la déclaration en contumace des accusés défaillants, le 20 décembre. Puis viennent la requête du promoteur de la cause, les 101 articles présentés par les demandeurs, les assignations et enfin les enquêtes. Dans la sentence finale, rendue le 7 juillet 1456, les juges déclarent procès et sentence de condamnation « nuls, invalides, sans effet et sans valeur »21. Toutefois, avant cette ultime proclamation, ils ont surtout pris soin de disqualifier les 12 articles soumis à l’université de Paris en 1431, et d’ordonner leur lacération (decernimus lacerandos)22

.

20

Les parties adverses, citées dans l’assignation du 12 décembre 1455, sont : le « révérend père dans le Christ le seigneur évêque de Beauvais, le sous-inquisiteur de l'erreur d'hérésie établi dans le diocèse de Beauvais, le promoteur des affaires criminelles de la cour de Beauvais, et tous et chacun de ceux croyant avoir un intérêt dans cette cause », Ibid., III, p. 46.

21

Ibid., IV, p. 224 et sq. : « Au nom de la sainte et indivisible Trinité, du Père et du Fils et du Saint-Esprit, amen. Par la providence de la majesté éternelle, le Christ sauveur, le Seigneur, Dieu et homme, a institué pour le gouvernement de son Église militante le bienheureux Pierre et ses successeurs apostoliques comme messagers principaux, pour enseigner dans la lumière de la vérité à avancer sur les chemins de la justice, rassemblant tous les hommes bons, relevant les opprimés, et ramenant sur le droit chemin grâce à un jugement raisonnable ceux qui s'égarent et dévient. Agissant donc en vertu de cette autorité apostolique en cette cause, nous, Jean, archevêque de Reims, Guillaume et Richard, évêques de Paris et de Coutances, par la grâce de Dieu, et Jean Bréhal de l'ordre des frères prêcheurs, professeur de théologie sacrée, l'un des inquisiteurs de la perversité hérétique au royaume de France, juges spécialement délégués par le très saint seigneur notre pape actuel […]. Nous disons et prononçons, décidons que lesdits procès et les sentences, contenant dol, calomnie, contradiction, et erreur manifeste de droit et de fait, ainsi que la susdite abjuration, l'exécution et toutes les suites, furent et sont nuls, invalides, sans effet et sans valeur. Et néanmoins, s'il est besoin, et comme la raison l'exige, nous les cassons, supprimons et annulons, en leur ôtant toute force ; nous déclarons que ladite Jeanne et les demandeurs ses parents n'ont subi ou encouru aucune marque ou tache d'infamie en raison de ce qui a été dit, qu'elle a été innocente et qu'elle est justifiée de tout cela et, s'il est besoin, nous l'en justifions entièrement ; nous ordonnons de procéder immédiatement à l'exécution de notre sentence et à sa publication solennelle en cette cité, en deux endroits : dans l'un aussitôt, à savoir place Saint-Ouen, avec une procession générale pour commencer et un sermon public ; dans l'autre, le lendemain, au Vieux Marché, à savoir là où ladite Jeanne mourut dans un feu cruel et horrible, avec une prédication solennelle, et la pose d'une croix honorable en mémoire perpétuelle et pour implorer le salut de celle-ci et des autres défunts ; en nous réservant, suivant le cas, exécution ultérieure de notre sentence, publication et, pour future mémoire, signification manifeste dans les cités et lieux insignes de ce royaume, comme nous voudrons le faire, et s'il reste encore quelque chose à faire ».

22 Loc. cit., : « Nous déclarons d'abord et, la justice l'exigeant, nous décrétons que ces articles commençant par ‘‘ Une certaine femme’’, insérés dans le prétendu procès et dans l'instrument des prétendues sentences portées contre ladite défunte, furent et sont extraits du prétendu procès et des prétendues déclarations de la défunte de

Documents relatifs