• Aucun résultat trouvé

Epaiss eur (nm )

CHAMP COERCITIF

A la lueur de l’ensemble des résultats qui ont été présentés dans les précédents paragraphes, nous avons compris les différents processus qui permettent de passer d’une structure de bulles blanches à une structure en labyrinthe blanc ou en bandes blanches. Il nous reste maintenant à comprendre quels sont les mécanismes qui permettent de passer d’une structure de bulles blanches à une structure de bulles noires.

Pour cela, nous avons étudié la configuration des domaines pour des champs appliqués proches du champ coercitif. C’est là où l’aimantation change de signe et donc là où il peut y avoir une inversion du contraste des domaines. Juste au dessous de l’échantillon, nous avons mis en place une petite bobine en cuivre dont le flux est canalisé par un noyau de fer doux. Cette dernière, alimentée en courant continu, permet d’obtenir des champs magnétiques de ±500 Oe au niveau de l’échantillon sans dégagement de chaleur. Etant donné que le champ coercitif est de l’ordre de 200 Oe, cette bobine est idéale pour cette étude.

Lorsqu’une telle étude est entreprise, il faut pouvoir décorréler les changements de contraste liés à la pointe de ceux liés à l’échantillon. Tout d’abord, lorsqu’un champ magnétique est appliqué sur la pointe, son point de fonctionnement change en l’absence de correction. Nous avons donc toujours pris garde à ce que la fréquence de conduite et donc le signe de la pente de la courbe de résonance au point de fonctionnement ne change pas. Ainsi, comme nous pouvons le voir à partir de l’équation (4.14b), il n’y aura pas de changement de contraste lié à une inversion de signe de la pente. Puis, une attention particulière doit être portée à la possibilité de retournement de l’aimantation de la pointe qui entraînerait également une inversion du contraste magnétique. Pour cela, nous avons réalisé une expérience pour laquelle la configuration est décrite dans la figure 5.28.



figure 5.28 : configuration magnétique de la pointe et de l’échantillon dans l’étude de l’effet induit par le retournement de l’aimantation de la pointe sur le contraste de l’image MFM.

a b c

figure 5.29 : mise en évidence du retournement de l’aimantation de la pointe à cause du champ magnétique appliqué. Le contraste magnétique de l’état rémanent perpendiculaire (a) s’inverse pour un champ de 220 Oe (b) et se maintient en champ nul. Lors de la réaimantation de la pointe (c) le contraste s’inverse à nouveau montrant que l’aimantation de la pointe s’était retournée.

l’échantillon est observé avec une pointe dont l’aimantation est orientée selon l’axe z négatif. Les contrastes blancs sont, sans ambiguïté, dus à des domaines dont l’aimantation est orientée suivant -z car c’est le contraste noir qui prédomine et que le rémanence est positive (figure 5.29a). Nous avons alors appliqué in situ un champ positif de 220 Oe et nous avons observé un changement de contraste des domaines comme nous pouvons le voir sur la figure 5.29b. Ce dernier ne peut pas être dû à un renversement des domaines car, pour des champs appliqués positifs, le contraste noir devrait être accentué. Cette inversion de contraste persiste même lorsque le champ appliqué est réduit à zéro. L’aimantation de la pointe s’est donc inversée et le reste car elle était orientée dans la direction opposée au champ. Cette inversion est confirmée lorsque nous avons réaimanté la pointe dans la direction -z et que nous avons refait l’acquisition d’une image en champ nul (figure 5.29c). Le contraste était à nouveau identique à celui obtenu tout au début de l’expérience. Dans la suite, pour éviter les artefacts liés aux effets de renversement de pointe, nous avons toujours aimanté la pointe dans la direction du champ appliqué. Cette technique est d’ailleurs parfois utilisée pour augmenter le contraste en MFM et pour s’assurer que l’aimantation de la pointe n’est pas perturbée par le champ de fuite de l’échantillon.

Cette étude, réalisée avec une pointe douce de faible aimantation à saturation, a été reproduite pour une pointe dure de forte aimantation à saturation. Dans ce cas, nous n’avons pas observé de retournement de la pointe pour des champs compris entre ±500 Oe. Dans la suite de l’étude sous champ magnétique, nous avons toujours utilisé une pointe dure pour pouvoir acquérir des images pour toutes les valeurs de champ à un même emplacement de l’échantillon.

Nous partons donc d’une structure en bulles blanches telle qu’elle a été obtenue après avoir appliqué un champ de +12kOe en perpendiculaire et nous appliquons un champ magnétique négatif à l’aide de la petite bobine, orienté dans le même sens que l’aimantation de la pointe. En prenant toujours garde que la fréquence de conduite ne change pas, nous obtenons à -400 Oe des bulles noires sur un fond blanc.

Même s’il est difficile de dire s’il y a coexistence d’une rotation cohérente d’aimantation et d’un déplacement de parois, autour du champ coercitif, le passage d’une structure de bulles blanches à noires se fait de manière continue sans qu’il y ait disparition ou apparition brutale de l’une ou l’autre des espèces (figure 5.30).



a b

c d

e f

figure 5.30 : variation de la structure en domaines avec un champ appliqué in situ égal à (a) 200 Oe (b) 100 Oe (c ) -60 Oe (d) -100 Oe (e) -300 Oe (f) -400 Oe

Finalement, nous avons étudié l’évolution de ces structures en domaines en fonction de la température. En effet, des calculs réalisés par Garel [Gar 82] ont montré que l’existence des bulles et des bandes dans un matériau dépendait à la fois du champ magnétique appliqué mais également de la température du système selon le diagramme de phase représenté dans la figure 5.31. La température de transition d’une structure à l’autre dépend du champ appliqué. Dans notre cas, il faut que la température soit proche de la température de Curie, égale à 1130°K, pour espérer voir la transition.

figure 5.31 : diagramme de phase calculé par Garel et Doniach dans un modèle d’Ising [Gar 82]

Malheureusement une telle température ne peut être atteinte que difficilement et dans une atmosphère d’azote pour éviter l’évaporation du cobalt. Nous nous sommes alors contentés d’étudier l’évolution de la taille des domaines avec la température. Une étude semblable avait été réalisée par Grundy [Gru 66] à l’aide d’un microscope en transmission. Il avait montré qu’il y avait une légère diminution de la taille des domaines lorsque la température augmentait. C’est pour cela que nous avons placé en dessous de l’échantillon un élément peltier d’encombrement minimum qui permet d’atteindre des températures de l’ordre de 150°C [Dem 96].

Les résultats obtenus sur la structure en bande, qui est énergétiquement la plus stable [Tom 84], ne montrent aucune évolution de la taille ou de la forme des domaines pour des températures comprises entre 30 et 100°C. Suite à ces résultats, nous avons décidé de recommencer ces expériences avec la structure la moins stable, celle qui est composée de bulles. La superposition de

 deux images obtenues à 40 et 80°C montre bien qu’il y a un changement dans l’image mesurée (figure 5.32). Les niveaux noirs et blancs correspondent aux parties communes des deux images alors que les niveaux de gris font apparaître les différences. Cependant, nous ne savons pas à quoi attribuer ce changement. D’une part, nous avons vu lors de l’expérience que, sous la chaleur émise par le peltier, le cantilever était soumis à une torsion latérale. La pointe n’étant plus perpendiculaire à la surface de l’échantillon peut devenir sensible à une composante planaire d’aimantation. D’autre part, l’aimantation de la pointe peut changer avec la température comme cela a été le cas lorsqu’elle était soumise à un champ magnétique. A l’heure actuelle, nous sommes donc incapables de dire si la température affecte la structure en domaines sous forme de bulles.

figure 5.32 : superposition des images obtenues à 40 et 80°C.

5. C

ONSEQUENCES ET UTILISATION DE LA STRUCTURE EN DOMAINES

Nous avons montré tout au long de ce chapitre que, pour une épaisseur de couche de cobalt supérieure à 50 nm et une histoire magnétique donnée, nous étions capables de connaître avec exactitude les champs caractéristiques des courbes d’aimantation ainsi que la structure en domaines. De plus, nous avons pu extrapoler le comportement dynamique des domaines à la base de mesures d’états rémanents en l’absence de champ magnétique appliqué. Il apparaît donc que ces couches sont des systèmes modèles qui vont nous permettre d’étudier des phénomènes physiques liés à ces structures en domaines très particulières.

Dans ce paragraphe, seulement trois exemples seront présentés même si la potentialité des propriétés magnétiques des couches de cobalt sont bien plus étendues. En effet, de nouveaux projets sont à l’étude et ils nous permettront d’introduire des effets magnétiques localisés dans les

semi-magnétiques des domaines dans le cobalt.

5.1. Effets de la nanostructuration sur la distribution des domaines

Ce thème sera développé tout au long du chapitre suivant. Il consiste à observer l’évolution des propriétés magnétiques des couches de cobalt lorsque leur taille latérale est réduite. Les effets induits sur le magnétisme technique sont alors liés à la diminution et l’augmentation du champ démagnétisant perpendiculaire et parallèle respectivement. L’orientation des domaines est également fortement corrélée à cette réduction de taille comme le montrera l’analyse des propriétés microscopiques par microscopie de force magnétique.

5.2. Mise en évidence de la magnétorésistance dépendante du spin

Lorsque nous regardons une image MFM obtenue après désaimantation planaire (figure 5.33), nous ne pouvons nous empêcher de penser à une vue en coupe d’une multicouche magnétique. En microscopie électronique en transmission, les contrastes blancs correspondraient à la couche de cobalt et les contrastes noirs à celle de ruthénium [Mic 95].

figure 5.33 : image MFM obtenue après désaimantation planaire pour une couche de 200 nm d’épaisseur.

Nous pouvons alors nous demander si une couche de cobalt unique pourrait présenter de la magnétorésistance dépendante du spin. En fait, par rapport à une multicouche magnétique où deux couches magnétiques successives séparées par une couche non magnétique sont couplées antiferromagnétiquement, deux domaines successifs possèdent bien des aimantations antiparallèles

