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Partie I : Cellules souches neurales et cellules souches de glioblastomes

3. Les cellules souches cancéreuses de glioblastomes

3.3. Cellules souches de glioblastomes

3.3.1. Découverte

Les cellules souches de glioblastomes (CSG) ont été mises en évidence pour la première fois in vitro en 2002 par l’équipe de Steindler qui, en utilisant des échantillons de patients, a réussi à cultiver des sphères (Ignatova et al., 2002). Ces résultats ont été confirmés in vivo dans les tumeurs cérébrales : des cellules CD133 positives greffées dans des souris immunodéficientes ont permis le développement d’une tumeur (Singh et al., 2003, 2004). En 2004, Galli et coll démontrèrent que des cultures primaires, issues de résections chirurgicales provenant de patients atteints de GBM et cultivées en milieu défini, contiennent des CSG capables de reconstituer une tumeur lors de greffes en série dans des souris immunodéficientes (Galli et al., 2004).

Partie I : Cellules souches neurales et cellules souches de glioblastomes

Introduction

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3.3.2. Marqueurs des CSG

Les marqueurs des CSC comme SOX2, NANOG, OCT-4, Nestin, MUSASHI1, c-MYC, qui sont des acteurs essentiels au fonctionnement des cellules souches, sont les marqueurs les plus fiables pour reconnaitre les CSG. Contrairement aux cancers liquides comme la leucémie, dans le glioblastome et pour d’autres cancers solides, la sélection de marqueurs membranaires est plus compliquée. Pour les CSG des marqueurs comme CD133 (ou prominin-1), CD44, CD15 (LewisX), ou L1CAM sont utilisés. Ainsi le marqueur CD133 permet d’isoler une population cellulaire hautement tumorigénique : seules 100 cellules CD133+ sont nécessaires pour former une tumeur chez la souris après xénotransplantation alors que 100.000 CD133- en sont incapables (Singh et al., 2004). Cependant, l’expression de CD133 varie au cours du cycle cellulaire (Barrantes-Freer et al., 2015). D’autre part, la reconnaissance de l’expression de CD133 se fait via son épitope membranaire AC133. Or, lors de la différenciation, l’expression de AC133 diminue mais pas celle de CD133 (Kemper et al., 2010). Par ailleurs, une étude a montré que dans des cultures primaires de GBM cultivées en sphères et n’exprimant pas CD133, la xénotransplantation aboutit à la formation d’une tumeur à la même fréquence que la xénotransplantation de cellules cultivées dans les mêmes conditions et exprimant CD133 (Beier et al., 2007). Ceci démontre une diversité des CSG et l’importance d’utiliser plusieurs marqueurs, notamment les marqueurs dits fonctionnels comme SOX2, Nanog, OCT-4 ou de valider des caractéristiques des CSG par des méthodes fonctionnelles. Le marqueur CD44 est retrouvé dans le sous-type mésenchymateux quasi exclusivement (Phillips et al., 2006). C’est d’ailleurs un marqueur des cellules mésenchymateuses saines. Récemment, l’équipe de Raphaël Rodriguez a mis en évidence un rôle insoupçonné de cette glycoprotéine membranaire : l’endocytose du fer. Jusqu’alors, seule la transferrine était connue pour jouer ce rôle ; ils ont montré que cette endocytose de fer peut interférer avec la plasticité épigénétique (Müller et al., 2019).

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3.3.3. Régulation des CSG par le microenvironnement

Tout comme les CSN, les CSG sont régulées par leur microenvironnement : la niche tumorale.

En étudiant la localisation des cellules CD133+, Christenssen et coll ont mis en évidence la présence de cellules CD133+ au niveau de niches mais aussi l’existence de cellules CD133+ isolées. Les cellules CD133+ regroupées en niche expriment d’avantage les marqueurs souches Sox2, EGFR et Nestin comparé à leurs homologues isolées qui pour leur part expriment plus fortement le marqueur de prolifération Ki67. Ces résultats suggèrent que les CSG sont localisées au niveau de niches tumorales et que leur activation s’accompagne d’une sortie de la niche (Christensen et al., 2011).

Les tumeurs sont souvent retrouvées près de la SVZ, la proximité avec cette zone est d’ailleurs de mauvais pronostic (Sinnaeve et al., 2018). Pour maintenir leur état indifférencié les CSG détournent les voies de signalisation impliquées dans le maintien de l’état souche des cellules souches physiologiques comme la voie Wnt, Shh. Il n’est alors pas étonnant de retrouver les mêmes molécules dans la niche tumorale que dans la niche neurogénique notamment les morphogènes et les BMP (pour revue : (Lathia et al., 2015)). Ainsi, la signalisation passant par les BMP régule la quiescence des CSG et leur résistance aux traitements : BMP4 stimule la quiescence tandis que TGF-β1 active les CSG (Sachdeva et al., 2019).

De plus, les CSG sont préférentiellement retrouvées à proximité de vaisseaux sanguins, les GBM étant des tumeurs fortement vascularisées. Ceci permet aux CSG d’avoir accès aux facteurs sécrétés par les cellules endothéliales, dont, en particulier, le ligand Shh, qui favorise l’autorenouvellement et la prolifération des CSG (Clement et al., 2007). En retour, les CSG favorisent l’angiogenèse par la sécrétion de VEGF et seraient capables de générer par transdifférenciation des péricytes ou des cellules endothéliales (Cheng et al., 2013). Dans la tumeur, les cellules de la masse tumorale sont localisées en périphérie et les CSG au centre, au niveau de la zone nécrotique. Cette organisation résulte en un gradient d’oxygénation décroissant de l’extérieur vers l’intérieur de la tumeur : les CSG sont dans une niche hypoxique. En réponse à l’hypoxie, les cellules produisent les protéines HIF

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40 (hypoxia inducible factor) qui participent au maintien de l’état souche, à la survie et à la résistance aux traitements des CSG (Li et al., 2009). L’hypoxie induit aussi la transcription de c-MET, et réciproquement, le HGF (son ligand) induit la production de VEGF favorisant l’angiogenèse (Joo et al., 2012). Or, le récepteur c-MET et son ligand HGF induisent une voie de signalisation connue pour favoriser la prolifération, la survie et la migration des glioblastomes (Trusolino et al., 2010).

Il est intéressant de signaler que les CSG ont un rôle direct dans l’immunosuppression. L’immunosuppression est une des caractéristiques des cancers en général et est indispensable à leur développement. Ainsi, les CSG sont capables d’inhiber les lymphocytes T cytotoxiques et de favoriser les lymphocytes T régulateurs et le recrutement des macrophages/microglie immunosuppresseurs (Tomaso et al., 2010; Wu et al., 2010).

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