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Chapitre 3 Commande dissipative des réseaux de transport 53

3.4 Spécialisation aux systèmes de transport

3.4.3 Cas d’un modèle linéaire

      ui,min : ui ≤ ui,min ui : ui,min ≤ ui ≤ ui,max ui,max : ui ≥ ui,max (3.66)

Sur ce, nous terminons notre solution du problème de la dissipativité du modèle non-linéaire pour passer au cas non-linéaire.

3.4.3 Cas d’un modèle linéaire

Pour modéliser un réseau de transport par une équation d’état linéaire, le flux de sor-tie di ainsi que le flux d’entrée ri de chaque tronçon i peuvent s’écrire sous la forme (voir[44]) :

di(k) = sigi(k)λi,i (3.67) ri(k) = qi(k)c (3.68) où c est le temps du cycle des feux et q(k) est le débit d’entrée du i-ième tronçon. C’est le nombre de véhicules par unité de temps franchissant une ligne d’entrée d’un tronçon. D’après l’équation (3.18) nous avons :

li(k) = n X j=1,j6=i sj(x)gj(k)λi,j − si(x)gi(k) n X j=1,j6=i λj,i (3.69) PuisquePn j=1λj,i = 1, il vient : li(k) = n X j=1,j6=i sj(x)gj(k)λi,j − si(x)gi(k)(1 − λi,i) (3.70) Définissons le vecteur Li par : Li = [Li,1, · · · , Li,n]T ∈ Rnoù :

Li,j = (

−si(1 − λi,i) : pour i = j sjλi,j : pour i 6= j

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Alors, les équations (3.70) et (3.17) donnent : li(k) = n X j=1,j6=i Li,jgj(k) + Li,igi(k) = n X j=1 Li,jgj(k) = LTi g(k) = LiGu(k) + Liξ (3.71)

Dans ces conditions, l’équation d’état du réseau de transport (3.21) prend la forme linéaire suivante :

x(k + 1) = x(k) + q(k)c + Bu(k) + h (3.72) où q = [q1, · · · , qn]T est le vecteur de débits d’entrée, B = (L − D)G, h = (L − D)ξ et D ∈ Rn×nest une matrice diagonale dont les éléments diagonaux sont siλi,i.

Comme il a été étudié par Diakaki [51], dans les carrefours à feux, il existe une situa-tion où le nombre d’entrées est égal au nombre de sorties. Cette situasitua-tion est appelée état nominal ou état d’équilibre et est notée xN. La commande et le débit d’entrée corres-pondants quant à eux sont notés uN et qN. Dans cette situation, nous avons :

qNc + BuN + h = 0. (3.73) Généralement, un minimum de connaissances sur le processus à commander permet de dire quels sont les états d’équilibre intéressants. Nous supposons donc que l’ensemble de ces états d’équilibre est connu. Dans ces conditions, posons comme nouveau vecteur de commande :

v(k) = u(k) − uN (3.74) et comme nouveau vecteur de débit :

w(k) = (q(k) − qN)c (3.75) L’équation d’état (3.72) se transforme naturellement en :

x(k + 1) = x(k) + Bv(k) + ω(k) (3.76) Les contraintes sur l’état sont définies par :

X = {x ∈ Rn/ 0 ≤ x ≤ x} (3.77) D’après (3.25), les contraintes sur u(k) se transportent sur v(k) en :

U = {v ∈ Rm/ − v2 ≤ v ≤ v1, v1, v2 > 0} (3.78) où v1 = umax− uN, and v2 = uN − umin.

Remarque 3.3 Soulignons que, comme dans le cas non-linéaire, le débit d’entrée q(k) n’est pas connu en général. Ainsi, w(k) représente les incertitudes du modèle. Cependant, contrairement au cas non-linéaire, nous supposons qu’aucune information sur ce vecteur

incertain n’est disponible. I

La commande du système dynamique (3.76) aura pour expression :

v(k) = Kx(k) (3.79)

où K ∈ Rm×n. Dans ce cas, le système(3.76) en boucle fermée est donné par :

x(k + 1) = x(k) + BKx(k) + ω(k) = Ax(k) + ω(k) (3.80) où A = I + BK.

Soulignons que, comme dans le cas non-linéaire, l’existence des contraintes (3.78) implique que le retour d’état u = Kx n’est admissible que dans une région déterminée de l’espace d’état, c’est-à-dire :

Ux = {x ∈ Rn/ − v2 ≤ Kx ≤ v1; v1 > 0; v2 > 0} (3.81) Ce domaine représente l’ensemble des états admissibles pour la commande pour K choi-sie telle que rang(K) = m. Il est polyédral dissymétrique contenant l’origine. De ce fait, il est nécessaire d’assurer l’inclusion X ⊆ Ux. De cette manière, si x(k) ∈ X alors on est sûr que x(k) ∈ Ux. l’objectif de la commande est donc le suivant :

Objectif : Trouver un contrôleur par retour d’étatv = Kx tel que :

1. le système (3.76) soit dissipatif par rapport au taux d’approvisionnement S(k) = xT(k + 1)P r(k) et la fonction de stockage ψ(x) = 12xTP x,

2. X ⊆ Ux

Comme dans le cas non-linéaire, nous allons séparer l’étude de la dissipativité du système et l’étude de l’inclusion X ⊆ Ux.

Sur la dissipativité du système

Pour expliquer comment on peut trouver un retour d’état rendant le système (3.76) dissipatif sans connaissance préalable sur les bornes des incertitudes w, il nous faut com-mencer à préciser le cadre. Commençons donc par donner le lemme suivant.

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Lemme 3.4 Soit :

Sω(k) = x(k + 1)TP ω(k) (3.82) Si le système(3.76) est dissipatif par rapport au taux d’approvisionnement Sω(k), alors il est aussi dissipatif par rapport au taux d’approvisionnementS(k).

Preuve: Puisque le système (3.76) est dissipatif par rapport au taux d’approvisionnement Sω(k), alors d’après la définition 3.3 :

ψ(x(k + 1)) − ψ(x(k)) ≤ Sω(k) (3.83) Or, r(k) = q(k)c et ω(k) = (q(k) − qN)c, il vient alors ω(k) = r(k) − rN. Ainsi :

Sω(k) = x(k + 1)TP (r(k) − rN(k))

= x(k + 1)TP r(k) − x(k + 1)TP rN(k)

Puisque −x(k + 1)TP rN(k) < 0 car x(k + 1) ≥ 0 et rN(k) ≥ 0, il s’ensuit que : Sω(k) ≤ x(k + 1)TP r(k) = S(k)

ce qui prouve le lemme. 

A partir de ce lemme, il devient maintenant clair que toute recherche d’un retour d’état rendant le système (3.76) dissipatif va se baser sur le taux d’approvisionnement Sω(k) au lieu de S(k).

Regardons à présent les conditions sur le gain K pour que le système bouclé (3.80) soit dissipatif. En effet, observons d’abord que :

4ψ(x) − Sω(k) = 1 2x(k + 1)T P x(k + 1) − x(k)TP x(k)−x(k + 1)T P ω(k) = 1 2  Ax + ωTP Ax + ω−xTP x− Ax + ωTP ω = −1 2xT (P − ATP A)x + ωTP ω

Ainsi, puisque ωTP ω ≥ 0 car P est définie positive, alors l’inégalité : ψ(x(k + 1)) − ψ(x(k)) ≤ Sω(k)

est satisfaite si la matrice P − ATP A est semi-définie positive, c’est-à-dire, P − ATP A  0

Or,

P − ATP A = P − (I + BK)TP (I + BK) = −KTBTP − P BK − KTBTP BK = −KTBTP − P BK − KTBTP P−1P BK

L’application du lemme 3.3 de Schur avec R = −KTBTP − P BK, Q = P , S = (P BK)T donne la LMI suivante :

−KTBTP − P BK KTBTP

P BK P

!

 0 (3.84)

D’où le théorème.

Théorème 3.4 Si le gain K est solution de la LMI suivante : −KTBTP − P BK KTBTP

P BK P

!

 0 (3.85)

alors, le retour d’état v = Kx rend le système (3.76) dissipatif par rapport au taux d’approvisionnementS(k) = xT(k + 1)P r(k) et la fonction de stockage ψ(x) = 12xTP x. Notons tout de suite que la condition P − ATP A  0 peut aussi être déterminée par une autre procédure. En effet, puisque A = I + BK, alors

P − (I + BK)TP (I + BK)  0 (3.86) Or, on sait que la condition T  0 est équivalente à P−1T P−1  0, car xTT x = yTP−1T P−1y ≥ 0, où y = P x. Ainsi, (3.86) est équivalente à :

P−1− P−1(I + BK)TP (I + BK)P−1  0 Il s’ensuit que :

P−1− (P−1+ BKP−1)TP (P−1+ BKP−1)  0 Posons Q = P−1. Il vient alors :

Q − (Q + BKQ)TQ−1(Q + BKQ)  0

Si nous appliquons maintenant le changement de variable Y = KQ, la dernière inégalité devient :

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L’application du lemme 3.3 de Schur avec R = Q, S = (Q + BY )T donne : Q Q + YTBT

Q + BY Q !

 0, Q = P−1, Y = KQ (3.87) D’où le corollaire suivant.

Corollaire 3.2 Si la LMI suivante est faisable : Q Q + YTBT

Q + BY Q !

 0, Q = P−1, Y = KQ (3.88) alors, le retour d’état v = Kx rend le système (3.76) dissipatif par rapport au taux d’approvisionnementS(k) = xT(k + 1)P r(k) et la fonction de stockage ψ(x) = 12xTP x. Remarquons à partir de ce lemme que pour calculer le gain K, Il suffit donc de ré-soudre la LMI ci-dessus en Y = KQ puis de calculer K = Y Q−1.

Sur l’inclusion X ⊆ Ux

Regardons à présent les nouvelles conditions sur K pour que X ⊆ Ux. En effet, défi-nissons le vecteur v = [v1, · · · , vm]T par :

vi = min(v1,i, v2,i), i ∈ {1, · · · , m}

Soit Ki la i-ème ligne de la matrice K. Nous avons alors pour tout i ∈ {1, · · · , m} : |vi|2 = |Kix|2 ≤ kKik2 2kxk2 2 ≤ kKik2 2 max x∈X kxk2 2 = kKik2 2kxk2 2 (3.89) Nous sommes maintenant prêts à énoncer le lemme suivant.

Lemme 3.5 Si la matrice K est choisie telle que : kKik2

2kxk2

2 ≤ vi2, ∀i ∈ {1, · · · , m} (3.90) alors X ⊆ Ux.

Preuve: Soit x ∈ X et soit v = Kx. En vertu de (3.89), l’inégalité (3.90) implique pour tout i ∈ {1, · · · , m} :

ce qui donne −vi ≤ vi ≤ v

i. Puisque vi = min(v1,i, v2,i), il vient aussitôt que : vi ≤ v1,i

De plus, −vi ≤ viimplique :

vi ≥ −min(v1,i, v2,i) ≥ −v2,i

Ainsi, −v2,i ≤ vi ≤ v1,i, ou d’une manière équivalente −v2,i ≤ Kix ≤ v1,i pour tout i ∈ {1, · · · , m}, ce qui prouve que x ∈ Ux . 

Pour transformer la contrainte (3.90) en LMIs, observons qu’elle est équivalente à vi2

kxk2 2

− KiKiT ≥ 0, ∀i ∈ {1, · · · , m} (3.91) Soit N ∈ Rm×m une matrice symétrique dont les éléments diagonaux vérifient Nii

vi∗2 kx∗k2

2. Il est clair que si l’inégalité suivante est satisfaite :

Nii− KiKiT ≥ 0, ∀i ∈ {1, · · · , m} (3.92) alors l’inégalité (3.91) est satisfaite. Ceci dit, remarquons que l’inégalité (3.92) est équi-valente à :

diag[N − KKT] ≥ 0 (3.93) Or, il est bien connu que si une matrice est semi-définie positive, alors nécessairement ses éléments diagonaux sont non-négatifs. Ainsi, si la matrice K est choisie telle que la matrice N − KKT est semi-définie positive, alors l’inégalité (3.93) est satisfaite. L’ap-plication maintenant du lemme 3.3 de Schur sur N − KKT  0 avec R = N , Q = I et S = KT donne la LMI suivante :

N K KT I

!

 0 (3.94)

Pour résumer les résultats précédents, notons qu’une propriété remarquable des LMIs est la possibilité de regrouper plusieurs LMIs en une seule LMI bloc-diagonale. Cette propriété nous permet finalement d’énoncer la solution de notre problème de commande en termes d’une seule LMI.

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Théorème 3.5 Soit la matrice K solution de la LMI suivante :       −KTBTP − P BK KTBTP P BK P ! O O N K KT I !        0, avec Niiv ∗2 i kxk2 2 (3.95)

Alors, le retour d’étatv = Kx :

1. rend le système(3.76) dissipatif par rapport au taux d’approvisionnement S(k) = xT(k + 1)P r(k) et la fonction de stockage ψ(x) = 12xTP x

2. vérifie la contrainte X ⊆ Ux.

Soulignons un fait majeur qui résulte aussitôt de ce Lemme. En effet, pour un choix arbitraire de la matrice N telle que Niiv∗2i

kx∗k2

2, le retour d’état v = Kx fournit la classe des commandes rendant le système dissipatif. Cette liberté de choix de la matrice N confère à la commande dissipative dans le cadre de la régulation des carrefours à feux une flexibilité permettant de l’adapter à plusieurs situations possibles. Ceci est, à notre sens, un avantage certain, car elle nous offre une multitude de choix possibles pour améliorer les performances de la commande de notre système.

Par ailleurs, remarquons que l’inclusion X ⊆ Ux peut aussi être déterminée par l’ap-plication du théorème 3.1. En effet, cette inclusion implique que si x est solution du système d’inégalités −II y ≤ x

0 alors x est aussi une solution du système d’inégalités

K

−Kx ≤ v1

v2. Ainsi, en vertu de la proposition 3.3 la condition X ⊆ Ux est équivalente à l’existence de deux matrices non-négatives K1 ∈ Rm×n

+ et K2 ∈ Rm×n + :

K1− K2 = K (3.96)

K1x ≤ v1 (3.97) K2x ≤ v2 (3.98) Pour transformer les inégalités (3.97) et (3.97) en LMI, il suffit de remarquer que ces inégalités peuvent s’écrire sous la forme :

v1 − K1x ≥ 0 v2 − K2x ≥ 0

ce qui est équivalent à : diag(vi 1− Ki 1xi) 0 0 diag(v2i − Ki 2xi) !  0 (3.99) D’où le théorème

Théorème 3.6 Soient les matrices K, K1 etK2 sont solutions de la LMI suivante :       −KTBTP − P BK KTBTP P BK P ! O O diag(v1i − Ki 1xi) 0 0 diag(vi 2− Ki 2xi) !        0, avecK = K1 − K2

Alors, le retour d’étatv = Kx :

1. rend le système(3.76) dissipatif par rapport au taux d’approvisionnement S(k) = xT(k + 1)P r(k) et la fonction de stockage ψ(x) = 12xTP x

2. vérifie la contrainte X ⊆ Ux.

Remarque 3.4 Contrairement au cas non-linéaire, les conditions de la dissipativité du système de transport dans le cas linéaire sont données sans qu’on dispose d’information spécifique sur les incertitudes w. Ceci peut paraître surprenant, cependant il n’en est rien. En effet, les conditions du théorème sont formulées pour exiger la dissipativité par rap-port au taux d’approvisionnement Sw(k) au lieu de S(k). Dans ce cas, la quantité du désordre stockée pendant un cycle n’est jamais supérieure au désordre fourni par les per-turbations w(k) durant ce cycle. Autrement dit, si la condition (3.85) est satisfaite, alors la commande fait que, toutes les trajectoires du système sont incluses dans l’ensemble des contraintes X. La stabilité du système peut seulement être garantie si r(k) ≤ rN∀k, car dans ce cas Sw(k) ≤ 0 et l’entropie est une fonction de Lyapunov définie positive. Ce-pendant, dans la réalité, cette hypothèse ne peut pas toujours être suivie et par conséquent la stabilité peut être menacée.

3.5 Conclusion

Dans ce chapitre, une approche basée sur la commande dissipative a été adaptée avec succès et appliquée aux réseaux de carrefours à feux. Dans un premier temps, le principe

3.5 Conclusion 89

de cette approche a été donné dans sa formulation la plus générale, puis un examen a été fait afin de mettre en évidence ses avantages. Dans un deuxième temps, une spécialisation du problème de la commande dissipative aux systèmes des carrefours à feux a été réalisée. En considérant l’entropie comme étant le désordre stocké dans le système, nous avons élaboré une loi de commande rendant le système dissipatif, c’est à dire permettant de rendre le système mieux organisé. Cette étude est faite dans une formulation qui prend en compte explicitement les contraintes aussi bien sur la commande que sur l’état. Deux cas ont été étudiés : celui où le modèle du système est non-linéaire est d’abord analysé. Ensuite, nous nous sommes intéressés au cas où le système peut être représenté par un modèle linéaire. Dans les deux cas, la mise en évidence de l’outil LMI nous a permis d’énoncer des conditions suffisantes pour la résolution de notre problème de commande dissipative.

Dans le cas non-linéaire, nous avons trouvé une borne supérieure sur la norme des incertitudes wm en deçà de laquelle la propriété de la dissipativité du système incertain est conservée. Cependant, dans le cas linéaire, la commande n’impose aucune pénalité sur les incertitudes. Par conséquent, l’effet des perturbations sur le comportement du système bouclé est difficile à maitriser, et en particulier la stabilité n’est plus garantie.

Ce dernier point est un handicap qui est, à notre sens, sérieux. En effet, il enlève à l’approche des systèmes dissipatifs l’un de ces principaux avantages, à savoir la possibilité de réaliser un compromis entre un comportement souhaité et le coût de la commande nécessaire pour l’obtenir. Il faut donc se tourner vers d’autres méthodes de synthèse pour un traitement quantitatif plus rigoureux garantissant une loi de contrôle qui amortisse le plus rapidement possible les perturbations susceptibles de déstabiliser les systèmes. La commande Hse positionne parmi les approches permettant d’atteindre cet objectif. C’est le sujet du chapitre suivant.