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4.3.   Discussion des principaux résultats de l’étude 63

4.3.2.   Caractéristiques des différents facteurs de risque observés en Pf 66

La population d’étude était composée d’une majorité d’hommes (82% des cas). L’atteinte prédominante du CHC chez l’homme est connue mais mal expliquée, très probablement liée à une exposition plus importante aux facteurs de risque de CHC, et en particulier à l’alcool. Le rôle des hormones androïdes dans la carcinogenèse hépatique est par ailleurs évoqué (13). En Pf, une hypothèse supplémentaire pourrait être un portage chronique de l’AgHBs plus fréquent chez les hommes. En effet il semble exister une susceptibilité plus importante de passage à la chronicité en cas d’infection virale B dans la population de sexe masculin, de manière générale bien plus souvent observée dans les études de prévalence de l’hépatite B (99, 100).

La majorité des patients inclus dans l’étude étaient âgés de plus de 50 ans (85% des cas), qui est un âge seuil communément admis dans la littérature comme à plus haut risque de survenue d’un CHC chez les patients porteurs d’une cirrhose ou d’une hépatite B chronique (12, 16).

4.3.2.2.   Caractéristiques  des  cas  de  CHC  associés  au  VHB  en  Pf  

Il apparaît dans notre étude que la majorité des cas CHC survenus avant l’âge de 50 ans étaient associés au VHB. L’âge plus jeune de survenue du CHC chez les porteurs chroniques du VHB (avec un âge moyen de 56,6 ans lors du diagnostic de CHC, soit en moyenne 9 ans plus tôt que les patients non porteurs de l’AgHBs dans notre étude) s’explique certainement par l’exposition très précoce au VHB, dont le mode de contamination en Pf est essentiellement néo-natal ou durant la petite enfance. L’analyse du profil sérologique de l’ensemble des patients inclus dans l’étude montre ainsi que deux tiers d’entre eux ont été en contact avec le VHB (infection actuelle ou guérie).

L’existence d’une charge virale élevée, particulièrement à risque de CHC dans le cadre d’une infection chronique par le VHB (25, 28), constituait un facteur de risque de CHC particulièrement observé dans notre étude (dans près de 3/4 des cas, chez les patients non traités). Dans la grande majorité des cas cette charge virale élevée était associée à un AgHBe négatif, ce qui montre que les hépatites actives virales B à AgHBe négatif sont également à risque de CHC.

Parmi les patients atteints d’un CHC associé au VHB, l’infection virale était par ailleurs très fréquemment associée à un cofacteur métabolique (60% des cas), ce qui reflète bien l’importance et la potentialisation de l’association de ces deux facteurs de risque. Cet effet synergique entre facteurs métaboliques et VHB a notamment été décrit dans l’étude de Chen et

al. (2008), dans laquelle le diabète était associé à un sur-risque de CHC chez les sujets porteurs

de l’AgHBs. Dans cette même étude, les patients porteurs de l’AgHBs qui étaient à la fois obèses et diabétiques avaient un risque de CHC multiplié par 100 par rapport à la population générale (101).

4.3.2.3.   Caractéristiques  de  la  cause  métabolique  associée  au  CHC  en  Pf  

L’obésité et le diabète ont été validés dans plusieurs études comme des facteurs de risque indépendants de CHC, mais également comme des facteurs aggravants des maladies chroniques du foie d’autres étiologies : virus et alcool en particulier (43, 44, 102).

Dans notre étude, la cause métabolique (obésité et/ou diabète) apparaissait dans 14% des cas comme unique facteur de risque associé au CHC. Chez plus de la moitié des patients (52%) ces facteurs métaboliques étaient associés au VHB et/ou à une consommation chronique d’alcool : il s’agissait des associations de facteurs de risque les plus fréquemment observées, décrites dans

la littérature comme particulièrement à risque de survenue du CHC (36, 101, 103).Par ailleurs

22% des patients inclus dans l’étude présentaient à la fois une obésité et un diabète. L’association simultanée de ces 2 facteurs a été associée dans une étude cas-témoin à un sur-risque de CHC par rapport aux sujets non atteints, avec un odds ratio de 11,8 (102).

4.3.2.4.   Caractéristiques  de  la  consommation  d’alcool  associée  au  CHC  en  Pf  

La consommation d’alcool a été retrouvée comme facteur de risque unique de CHC dans seulement 8% des cas. L’alcool exerce un effet synergique en cas d’infection virale B ou C, d’obésité ou encore de diabète (33, 36). Dans notre étude, sa fréquente association à d’autres facteurs de risque majeurs de CHC (métabolique ou viral dans 42% des cas de notre étude), et l’absence de cirrhose dans près d’un tiers des cas, font évoquer un rôle indépendant de l’alcool probablement modéré en Pf, et sûrement bien moindre qu’en métropole. Et en effet à l’inverse, ce constat n’était pas vérifié parmi les 12 patients de notre étude qui étaient originaires de métropole, chez qui il était retrouvé une cirrhose associée à une consommation chronique d’alcool dans près de 100% des cas (parmi lesquels plus de la moitié étaient en plus atteints d’obésité, et un quart d’hépatite C).

4.3.2.5.   Autres  facteurs  de  risque  de  CHC  observés  dans  l’étude  

Un taux élevé de tabagisme était retrouvé dans notre étude (50% des cas). Dans plusieurs analyses de cohorte ou cas-témoins, le tabac est apparu comme un facteur favorisant la survenue du CHC (48, 104). Par ailleurs, certaines études suggèrent un effet synergique du tabac et de l’alcool sur le risque de cirrhose et de CHC (105). Cette co-intoxication était observée chez 30% des patients inclus dans notre étude.

L’hépatite C était très peu fréquemment associée au CHC en Pf, elle concernait en moyenne un nouveau cas de CHC tous les 2 ans. Les cas de CHC associés au VHC concernaient des patients qui pour la plupart n’étaient pas originaires de Pf : 2 étaient originaire des Philippines et du Cameroun (régions de haute endémie pour l’hépatite C) et 3 de France métropolitaine. Chez le patient originaire de Pf, l’infection virale était attribuée à un antécédent transfusionnel ancien. Malgré un nombre très important de valeurs manquantes, 11 cas familiaux de CHC ont été identifiés. Parmi eux, 4 patients (originaires de la presqu’île de Tahiti) appartenaient en fait à

la même famille, dans laquelle étaient identifiés au total 8 cas de CHC survenus sur 3 générations (4 cas diagnostiqués antérieurement à notre période d’étude). Un autre patient (originaire des îles Australes) appartenait également à une famille atteinte d’un grand nombre de cas de cancers primitifs du foie (9 cas identifiés sur 3 générations, dont 8 étaient antérieurs à 2008). Les arbres généalogiques de ces deux familles apparaissent en annexe 4. Le taux exact des cas familiaux de CHC n’a pas pu être déterminé dans notre étude du fait de sa nature rétrospective, cependant ces quelques cas apparaissent tous associés à une hépatite virale B, comme cela a pu déjà être décrit dans certaines études. Cette carcinogenèse accrue associée au VHB dans certaines familles pourrait faire évoquer des prédispositions génétiques particulières, une atteinte par des virus plus agressifs, ou encore de possibles expositions familiales à d’autres facteurs de risque majeurs de CHC (aflatoxine B1 par exemple).